jeudi 16 septembre 2010 - par Krokodilo

Les dizaines et les centaines sont des unités !

Vous trouvez ça absurde ? Alors c’est que, comme votre serviteur, vous avez été éduqué selon des méthodes ringardes - par des enseignants qui ignoraient les avancées les plus remarquables de cette science (?) qu’on appelle la pédagogie.


Comme moi, vous avez dû apprendre qu’il y avait les unités, les dizaines, les centaines, les milliers, les dizaines de milliers, les centaines de milliers, les millions, etc.
Tout ça est dépassé ! De nos jours, par exemple, et même depuis des années, le nombre 365 appartient à la classe des unités. Étonnant, non ?

Cette classe des unités est suivie par la classe des milliers, comme indiqué sur le 2e tableau de ce site de mathématiques.

En fait, cette présentation systématisée, destinée à expliquer les grands nombres aux petits (CE2, CM1) est très logique, mais une certaine confusion est possible. Celle-ci est sémantique, pas mathématique, et vient de l’usage d’un même mot « unité » pour les unités, mais aussi pour la classe des unités, et encore après pour les unités des milliers – que je connaissais plus simplement comme "les milliers" !

A noter qu’il est beaucoup plus facile d’expliquer les petits nombres aux grands que les grands nombres aux petits !

Mais pour éviter toute ambigüité, certains ont eu une idée lumineuse : changer le nom des unités (les vraies) et les appeler « les unités simples » – compliquer le nom des unités pour simplifier, il fallait y penser !
Ainsi, comme dans l’exemple de ce site, le nombre 2 325 081 se compose de :
1 unité simple, 8 dizaines, 0 centaines, 5 unités de milliers, 2 dizaines de milliers, 3 centaines de milliers, 2 unités de millions.

 À ceux qui penseraient qu’il s’agit là d’une galéjade, d’un « hoax » comme Internet en pond chaque semaine, je donne aussi des références papier, à l’ancienne : Mathématiques CM2, éditions Hachette.

L’école Montessori semble néanmoins se méfier de la confusion et garder le vocabulaire classique :
« On écrit les unités en vert, les dizaines en bleu, les centaines en rouge et les milliers en vert de nouveau (parce que les milliers sont en réalité les unités de milliers, suivis par des dizaines de milliers, etc...) »

Ainsi, alors que la pédagogie traditionnelle va du simple au compliqué, aujourd’hui nos chers petits commencent par une explication complexe, ambigüe ou confuse (mais logique) ; puis, s’ils réussissent à comprendre cette présentation des grands nombres, ils se hisseront dans les classes où ce vocabulaire ambigu sera alors abandonné, où on leur enseignera la simplicité et l’épure.

A moins que ce soit une astuce : après tout, la France est réputée avoir un système quelque peu obsédé par la notation au demi-point et très sélectif.

Il est possible que cette façon de présenter les nombres au primaire existe depuis très longtemps. En tout cas, je peux témoigner que ce vocabulaire « classe des unités » a nécessité que je le ré-explique à ma fille, pourtant très à l’aise avec les maths.

Les questions que je me pose : est-on sûrs que cette présentation des grands nombres en « classes » est un progrès pédagogique sur la simple énumération des unités, dizaines, centaines, milliers, etc. ? A-t-on prouvé qu’elle permet une meilleure compréhension ?
 
2. Puisque c’est la rentrée scolaire, une autre remarque sur l’enseignement : après quelques années d’essais dans des établissements pilotes, le travail des langues étrangères en groupes de niveau a été généralisé.

Amateurs de simplicité, vous imaginez comme moi qu’on va répartir, par exemple, toutes les premières qui font allemand en niveau 1 et niveau 2, ou encore en niveaux A1, A2, B1 de la classification du CECRL  ?

Trop simple ! Selon les directives officielles, les élèves ne seront pas regroupés par groupe de niveau mais par groupe de compétence. Quézaco ?

Eh bien, dans une langue étrangère, presque tout le monde (sauf circonstances particulières) est plus à l’aise à l’écrit qu’à l’oral, et en compréhension plutôt qu’en expression active, en écoutant plutôt qu’en parlant.

Mais évaluer les compétences spécifiques de chaque élève - écrit / oral, compréhension / production, - puis les regrouper selon ces critères pourrait aboutir à des tas de groupes différents, formant un véritable casse-tête chinois (ou anglais, ou allemand, etc.), qui augmenterait inéluctablement la consommation d’aspirine des proviseurs et de leurs adjoints...
 
Il y a fort à parier que le malheureux responsable d’établissement va craquer devant son logiciel de gestion des emplois du temps, et conclure que, finalement, niveau ou compétences on s’en fout, on fera un niveau un et un niveau deux... et basta !


10 réactions


  • geo63 16 septembre 2010 11:55

    Nous travaillons tout simplement en base 10 qui va de 0 à 9 puis c’est 1 0, mais on pourrait travailler en base 2 (0 et 1), le binaire... etc...Quoi de neuf ?


    • Krokodilo Krokodilo 16 septembre 2010 12:13

      L’introduction des bases et l’apprentissage par exemple du binaire ne se fait je crois qu’au CM2 (et encore peut-être pas toujours). Pour les plus petits, je me demandais si cette façon de présenter les grands nombres n’apporte pas de la confusion plutôt que des éclaircissements.


  • spartacus1 spartacus1 16 septembre 2010 14:04

    Rien de nouveau sous le soleil, cela existe depuis bien longtemps. C’est ce que l’on appelle la notation ingénieur du système international d’unités.

    On travaille par paquets de 3 puissances de 10 : kilo, mega, giga, tera, péta ... pour les grands nombres ; milli, micro, nano, pico, femto pour les petits nombres.

    Peut-être n’est-ce pas si mal que l’on apprenne dès le plus jeune âge comment travaillent les ingénieurs ?


    • Krokodilo Krokodilo 16 septembre 2010 14:44

      @ Spartacus, certes, mais j’ai été surpris que mon gosse me pose la question alors même qu’il est à l’aise en calcul. La sémantique unités, unités simples, classe des unités, unités des milliers n’est-elle pas en elle-même source de confusion, comparativement à l’apprentissage mécanique, unités, dizaines, centaines, milliers, etc. ? Cela n’empêcherait pas d’y revenir plus tard en l’expliquant cette fois de façon ingénieur comme vous dites. En fait, je n’ai pas d’avis tranché, je me posais la question sur l’efficacité pédagogique, surtout après avoir remarqué que certains sites alertaient justement sur le risque de confusion. Et puis, ça change un peu de Sarko et du dollar.


  • alberto alberto 16 septembre 2010 14:28

    Bonjour, Kroko

    Si ça peut vous rassurez, moi qui ai appris la grammaire à l’époque (disons vers années 50-60) du "sujet-verbe-complément, et préposition relative, et complément de lieu, etc..., quand je lis les livres de grammaire d’aujourd’hui je n’y comprend rien, n’ayant pas de tableau des correspondances entre ancienne et nouvelle terminologie...

    Pour ce qui est du calcul, un truc me fait un peu peur, c’est qu’après les théories, dont tu parles dans l’article, et qu’on essaie d’inculquer aux élèves, l’utilisation systématique de la calculette entraine une grande confusion dans la perception des dizaines des centaines etc, mais surtout les incite à la paresse de calculer par eux-mêmes pouvant entraîner une perte de savoir faire. Quant au calcul mental il est passé aux oubliettes ! Ainsi va le monde...

    Bien à vous.


    • Krokodilo Krokodilo 16 septembre 2010 15:25

      Bonjour, je crois qu’il y a un retour aux classiques, aux bases, dictées, récitations, y compris un peu de calcul mental. D’accord sur la grammaire, je me demande si on ne pourrait pas reporter au collège l’apprentissage d’une grammaire analytique détaillée, comme toutes ces catégories de compléments circonstanciels, au profit d’une insistance sur les points essentiels comme le COD - que tous les 6e n’ont pas bien assimilé -, ou du goût du texte ; mais dans ce cas, les profs du collège accuseraient les instits (PDE) de ne rien fiche !


  • cob 16 septembre 2010 14:38

    Pour être tout à fait cohérent, il eût plutôt fallu écrire :

    • 1 unité simple, 8 dizaines simples, 0 centaine simple, 5 unités de milliers, 2 dizaines de milliers, 3 centaines de milliers, 2 unités de millions

  • docdory docdory 17 septembre 2010 00:11

    @ Krokodilo

    Je n’en crois pas mes yeux ! Ainsi donc, les « pédagogols », non contents d’avoir créé d’innombrables « faux dyslexiques » avec l’inepte méthode globale de lecture, ont maintenant décidé de créer des générations d’acalculiques avec cette méthode à la con ???!!!
    Je crois que l’éducation nationale ne regagnera ses lettres de noblesse que lorsqu’on l’aura rebaptisée son ministère par son ancien nom « le Ministère de l’Instruction Publique », et que l’on en aura viré la totalité des pédagogues au sein des inspections académiques et rectorats !

    • Krokodilo Krokodilo 17 septembre 2010 10:35

      En fait, cette présentation existe peut-être depuis longtemps, mais je ne l’avais pas remarquée avec mon aînée. Espérons la visite d’un instit sur AVox pour plus de détails.


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