Les Forces spéciales à pied d’oeuvre en Libye...
Le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian a demandé à la Direction de la protection et de la sécurité de la défense (ancienne sécurité militaire) d'ouvrir une enquête pour : « compromission du secret de la défense nationale », la raison ? la parution d'un article dans le Monde daté du 25 février faisant mention de la présence de forces spéciales françaises, du Service action et d'agents de la DGSE en Libye aux côtés des Special forces américaines et britanniques.
Les missions spéciales appartiennent à ce qu’il est convenu d’appeler la « guerre non conventionnelle », missions conduites en un territoire hostile contrôlé par une force adverse ou ennemie. Le registre des tâches qui relèvent de leurs compétences est très étendu mais appartient à une des grandes catégories suivantes : guérilla - subversion - exfiltration - création de zones de résistance - encadrement de forces autochtones - contre terrorisme - action psychologique - action humanitaire - formation.
En principe, le recours aux opérations spéciales se profile quand l'état-major ne peut apporter une réponse conventionnelle à une situation donnée, ce qui semble être le cas en Libye actuellement. J'évoquais sur mon blog dès le mois d'août 2015, l'intérêt qu'il y aurait à infiltrer des équipes d'observateurs sur le trait de côte libyen afin de renseigner sur les navires utilisés pour transporter les clandestin... La formation polyvalente et spécialisée des hommes et la mise en œuvre de matériel à la pointe de la technologie permettent à ces unités d’accomplir des missions requérant une spécificité très « pointue » et de remplir des taches de nature aussi diverses que variées. Selon la définition qu’en donne le Departement of Defence (DoD), l’unconventional warfare : « comprend un large spectre d’opérations militaires et paramilitaires conduites en territoire tenu ou contrôlé par l’ennemi ou sur un terrain politique sensible. L’unconventional warfare n’est pas limité à la guerre de guérilla, à l’évacuation, à la récupération, à la subversion, au sabotage et autres opérations à faible visibilité de nature dissimulée ou clandestine. L’interpénétration des aspects de l’unconventional warfare peut être individuelle ou collective avec la prédominance de personnel indigène habituellement soutenu ou dirigé à des degrés variables par une source externe durant le temps de guerre ou de paix ».
Dans le jargon militaire, le vocable opération spéciale est différemment interprété selon qu’il est utilisé par les forces de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) ou l'Inter-Américan Defense board (IADB). La définition la plus complète reste celle admise par le Departement of Defense : « Opérations conduites par des forces spécialement entraînées, équipées et organisées contre une cible stratégique ou tactique en poursuite d’un objectif militaire, politique, économique, ou psychologique. Ces opérations peuvent être menées en temps de paix ou de guerre. Elles peuvent soutenir des opérations conventionnelles ou être conduites indépendamment quand le recours aux forces conventionnelles reste inapproprié ou impossible. »
Le vocable « Direct Action » en vigueur dans les forces de l’OTAN recouvre des missions de : destruction d’objectifs, de matériel, neutralisation humaine et récupération d’hommes ou de matériel. Les opérations psychologiques (PSYOP) n’ont elles que : « d’autre but que d’influencer les populations et les forces militaires ennemies afin de réduire leur combativité et, si possible, les rallier à la cause ». Cela se rapproche quelque peu des « affaires civiles » qui ont en charge les relations entre la population et les militaires déployés sur le terrain. Certains de ces hommes sont chargés d’accomplir des tâches liées au renseignement et/ou qui peuvent avoir une influence sur les opérations militaires : voies de communication, accueil de la population, etc.
Nombre de missions nécessite l’infiltration d’un groupe ou d'une équipe, à lui ensuite à procéder à une reconnaissance et à se dissimuler pour observer l’objectif et transmettre par radio les comptes-rendus cryptés. Ces observations peuvent être le prélude à des missions diverses : recherches - localisation - identification et désignation d’objectifs - rapport après destruction - renseignements sur le terrain et/ou les forces présentes - observations hydrographiques et/ou météorologiques, etc.
Le commandement des opérations spéciales français crée en 1992 le fut à l’exemple des États-Unis qui avaient pris la décision d’un regroupement de leurs forces spéciales en un organisme unique. Le COS dont le quartier général est situé pour partie sur la base aérienne de Taverny et dans les sous-sols du Ministère de la défense, repose sur un commandement tournant entre les armées de terre - Air - Mer. Ce commandement rassemble des unités diverses et dispersées au sein des quatre armes (TAM et gendarmerie) qui peuvent pour les besoins d’une mission être appelées à opérer ensemble. Déjà en 1988, le 11° choc, le GIGN et les Fusiliers Marins Commandos (FUMACO) avaient participé à une action commune, la prise de la grotte d’Ouvéa.
Le COS s'appuie sur plusieurs bureaux : opérations, entraînement, recherches et développements, télécommunication, système d'information et les actions civilo-miltaires. Il s’agit pour le COS, principalement, de coordonner l’organisation, l'entraînement, et la doctrine d’emploi d’unités différentes pour une utilisation cohérente. Le COS dispose de plusieurs unités pouvant être placées sous un commandement unique. Le premier cercle dédié principalement aux missions d'assistance, d'encadrement, de soutien aux unités engagées compte environ 2 000 hommes provenant du 1 régiment parachutiste d’infanterie de marine. Le 1° RPIMA comprend une compagnie de commandement, une de communication et 3 compagnies de combat (recherches et actions spécialisées). La première compagnie est spécialisée dans le combat urbain, aquatique et la protection rapprochée de personnalités, la deuxième dans la guérilla urbaine et la troisième dans les reconnaissances profondes.
Le Commandement des FUSiliers marins COmmandos (COFUSCO) est basé à Lorient et comprend les commandos : Pentefenyo, Monfort et le GCMC qui vient de recevoir une nouvelle appellation ; Toulon accueillant les commandos : Hubert et Jaubert (un nouveau vient d'être créé dont j'ai oublié le nom). Chaque section s’articule en 4 pelotons de 20 hommes divisés en 2 équipes de combat. L’armement et le matériel sont répartis dans les différentes bases navales occupées par la Marine nationale. Le commando Hubert, celui des nageurs de combat, est basé à Saint-Mandrier dans le Var. Il est composé de deux compagnies, une d’appui et une autre opérationnelle comprenant une cinquantaine de NC répartis en 4 pelotons : A (contrôle de l’équipement), B (anti-terroristes), C (opérations sous-marines) et D (reconnaissance appui avec mini sous-marin Vostock). Le Groupe de combat en milieux clos (dont l'appellation vient de changer) comprend 17 hommes formant 2 équipes.
Le COS dispose pour la logistique et le transport de l’aviation légère de l’armée de terre (ALAT) qui dispose d’une escadre dédiée aux opérations spéciales, le Détachement Alat des Opérations Spéciales (DAOS) qui comprend entre autre des hélicoptères cougar, puma, et gazelle. A mentionner également l'Escadrille d'Hélicoptères Spéciaux (EHS). Le commando parachutiste de l’air n°10 spécialisé dans la récupération et l’exfiltration comprend 3 pelotons basés sur la base aérienne de Nîmes.
En cas de nécessité, le COS peut faire appel aux unités composant le 2° cercle. Le 13 régiment de dragons parachutistes (RDP) spécialisé dans les missions de renseignement dans la profondeur, du 17° régiment de génie parachutistes (RGP), du groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) et faire également appel à des réservistes spécialistes dans les affaires civiles, les relations publiques et opérations de nature psychologique.
Le volet renseignement s'appuie sur La Direction du renseignement militaire basée à Creil, dont la mission reste : le recueil, l'analyse, la préparation du dossier de renseignement ou d'objectif indispensable au haut commandement militaire, renseignement pouvant être d'origine humaine (agents de terrain) et/ou technique (interceptions, observations).
La Direction générale pour la sécurité extérieure est en charge du « rens » à l'extérieur du territoire, le renseignement interne étant de la compétence de la DGSI et d'un sizaine d'autres services. Si les agents appartenant au Service actions sont des militaires, la DGSE emploie également du personnel civil. Quant à la DPSD, il s'agit d'un organisme interarmées qui a repris les attributions de la Sécurité militaire et qui a pour mission d'assurer la protection et l'intégrité du Ministère de la défense, des infrastructures militaires, des militaires et la protection rapprochée des officiers supérieurs ou des généraux. Elle a en charge les enquêtes sur le personnel et la délivrance des habilitations au secret-défense et travaille avec la DGSI. Petite phrase du jour : « La sagesse est méfiance voire défiance, la force ombrageuse. »