mardi 8 février 2022 - par Trash Cash

Les nouveaux saigneurs

Essayons de prendre un peu de hauteur pour comprendre dans quel monde nous vivons : pas encore un univers à la Matrix ( techniquement encore impossible), mais plus du tout une démocratie. L'invasion de notre langue par une déferlante de nouveaux noms barbares est le symptôme du processus fondamental à l'oeuvre depuis bien longtemps. On nous distrait avec des crises pseudo-sanitaires ou des joutes de guignols candidats à la fonction présidentielle. Mais que se passe-t-il en réalité derrière ce lavage de cerveau à échelle planétaire ? Rien de plus que l'avènement de l'homo consumeris, ancien grand singe revenu de ses tentatives d'humanisation pour sombrer dans un matérialisme absolu et terminal.

S’accumulent dans nos consciences clignotantes ces milliers de noms nouveaux, sortis de nulle part, inconnus de nous tous, il y a encore quelques années, quelques mois. Toutes ces marques, ces néologismes, ces sonorités qui se retrouvent d’un coup dans toutes les bouches, ces signes réitérés dans tous les textes. Si dérisoires en réalité. Les tesla, les iphone, les astrazenecca, et autres gloubiboulgas. Ils viennent après d’autres, innombrables, depuis l’avènement de l’ère industrielle, qui en leur temps occupèrent aussi peu à peu nos perceptions mentales, nos mémoires, nos soi-disant individualités ; les cocacola, les boeing, les ford, les prada, tous les gnagnas qui se confondent avec nos passés de consommateurs.

Leurs noms, leurs marques, leurs promesses, s’imposent jour après jour, parasitent par leur force totalisante nos existences. Ce n’est pas rien, ce n’est pas qu’un bruit de fond, une mode, de la simple pub, sympa, distrayante, de la notoriété gentillette, comme ça, pour le fun, pour l’ambiance. C’est bien plus profond que cela. Petit à petit, l’image qu’ils suggèrent, le désir de les posséder, leur achat, leur usage quotidien, leur possession même fugace, fait qu’ils remplaceront tout le reste, ce que l’on appelait avant naïvement le naturel. De la même manière que leurs appareils - assemblage complexe et en réalité inutile de plastique et de métal - ou leur pâtée industrielle, s’interposent entre nos corps et l’environnement naturel dont nous sommes issus, phagocytant sans relâche notre matière commune. Leur conquête de notre planète n’est en fait que la preuve ultime de l’artificialisation du monde ; bientôt achevée.

Ils occupent désormais tout notre horizon mental, colonisent nos esprits, violent nos imaginaires, pillent nos temps de vie, saturent notre pauvre existence, notre seule véritable richesse, précieuse, parce qu’elle est unique à l’échelle de l’éternité. Triomphants dans leur hilarité continuelle, ils squattent notre bulbe nécrosé, rythment nos tristes reptations de poulpes motorisés. Les Elon Musk, les Bezos, les Macron , les micros, les omicrons, Tout ce théâtre de guignols épileptiques de l’univers médiatique, de la tech, de l’industrie déferlent sans répit en un torrent de mots et de gimmicks. Moteurs d’une pseudo-actualité, dictée en réalité et composée pour leur intérêt, leur agenda,

Il est temps de les voir comme ils sont : vaines agitations de vaniteux dégénérés, Une élite auto-proclamée, porte-paroles affolés d’une humanité qui comprend que sa fin est arrivée.

Ils aimeraient nous faire croire que l’on pourra changer le destin de l’univers, avec quelques gadgets. Y croient-ils eux-mêmes ? Ils nous occupent H24, obstruent notre triste horizon, parasitent notre pensée remplacent notre langue, notre vocabulaire par un gloubish imposé. Le monde totalitaire d’Orwell s’est réalisé, la novlangue privatisée qui remplace la pensée est installée. Smartphoune, 18G, Uber, distanciation sanitaire, ragougnasse et ratatasse

Communions avec les nouvelles icônes du parti dont il faut être, elles nous conduiront vers des lendemains heureux, Entendons chanter toute la sainte journée leurs louanges du progrès : la nature enfin nettoyée, le système solaire conquis, l’énergie à volonté, le bonheur généralisé, et bien-sûr l’immortalité, ce salut éternel. Ça ne vous rappelle rien ?

L’homme est un animal religieux et c’est bien vrai, mais il lui faut une nouvelle spiritualité pourtant bien plombée de matérialité. Voici nos nouveaux modèles indépassables ; et pourtant déjà dépassés ; promoteurs d’une unique possibilité de vivre. ils nous nourrissent avec l’illusion du temps qui passe, du progrès qui progresse, de l’innovation qui innove, vous promettant quelque part de continuer à être ces petits rois et reines d’un château de sable de plaisir et de confort, construits rien que pour vous.

Tout le reste s’éloigne, s’efface, occulté par la nouvelle quincaille inutile, l’objet sacralisé, la marchandise vénérée, le plus produit, l’article dont on m’a tant fait l’article, celui qui va vous faire piétiner le précédent que vous aviez pourtant bichonné avec les accessoires adhoc qu’on vous avait vendus. Gigatonnes de matières transformées, gaspillage faramineux d’énergie et accumulation toujours plus gigantesque de capitaux monstrueux .

La voiture doit être autrement, autonome et électrifiée, la communication entre les êtres sera distante et fluidifiée, la nourriture sera végétalisée et laboratisée, la santé, elle, doit être monitorée et perpétuellement vaccinée. Et ton slip ? Il est connecté ?

Après la monarchie absolue, vous adorerez le matérialisme absolu, la dictature de la possession, la propriété pour tous et le diktat de la nouveauté. Tout est renouvelé, au nom de l’histoire en marche, de la modernité. Tout doit être réinventé pour être entièrement numérisé et marchandisé.

Parce que, surtout, la rotation du capital doit s’accélérer. Les taux de profits sont en chute libre, il faut surconsommer, tout renouveler, tout racheter, tout le temps ou bien tout le système, désormais adopté, imposé, va s’effondrer. Ce n’est pas seulement un question de profit toujours plus grand, c’est une question de survie , celle un feu allumé, il y a longtemps, et qui réclame toujours plus de combustible pour alimenter son coeur en fusion.

Saoulez-vous de ce tourbillon de matières et de ricanements. La consommation, comme son nom le suggère, c’est la consomption du monde, et de l’espèce, une immolation continue en l’honneur du néant.

Et l’on vous fait oublier l’essentiel, la vie, et sa brièveté. La vie de ceux que l’on aime et qui eux-mêmes sont pris par la transe. On en oublie le simple fait de vivre, d’exister, comme si elle était insupportable, la vie.

Et surtout, on en oublie les mots anciens ceux de nos morts, de nos familles. Et puis ceux des auteurs, repoussant dans les couches multiples et complexes du passé des univers pourtant très proches du nôtre et qui nous ont précédés, ayant déjà tout compris, tout expliqué du monde, celui dans lequel on est par hasard tombé.

Les grands noms de la pensée, de la littérature, ne sont pas seulement poussiéreux, ou ringards, ou ennuyeux, ils sont déjà obsolètes, dépassés, illisibles, incompréhensibles, bientôt comme le latin ou le grec. D'ailleurs, comment pourrait-on encore communier avec les Humanités quand on est plus qu'aspiration à la possession matérielle ?

S’il y a un grand remplacement, colonisation rampante d’un monde par un autre, travail de sape d’une armée de profiteurs sournois et étrangers, barbares à la religion motifère, c’est bien celui d’une civilisation du fric et de la consommation qui aura tout pourri et qui pour en terminer, est contrainte d’accélérer en hyperbolique son autodestruction.



8 réactions


  • Samy Levrai samy Levrai 8 février 2022 11:25

    Bien vu.


  • Joséphine Joséphine 8 février 2022 12:39

    Le grand remplacement est en nous, les barbares sont déjà en nous. Et comme l’a dit Philippe Murray, auteur du brillant livre « Homo Festivus », nous sommes déjà morts, les djihadistes n’auront même plus à nous tuer. 


    • Le421... Refuznik !! Le421... Refuznik !! 8 février 2022 17:57

      @Joséphine
      Vous pouvez me faire une statistique rapide sur les « djihadistes » en France ?
      Juste histoire de rigoler cinq minutes.
      Si vous mettez en regard le nombre d’abrutis...
      Et là, c’est toutes religions confondues !!  smiley


  • Le421... Refuznik !! Le421... Refuznik !! 8 février 2022 17:56

    Et tous ces sachant qui s’accrochent à leurs prébendes comme des morpions sur les couil.. !!

    Même les « toubibs » ou autoproclamés spécialistes en tout et connaisseurs de rien s’y sont mis.

    La soupe est bonne !!


  • saint louis 8 février 2022 19:24

    La génération des « ancêtres » d’aujourd’hui a vécu une transformation extraordinaire de dans leurs vie.

    Disons que cette évolution a été plutôt positive dans quasiment tous les domaines.

    Pour les générations actuelles, la transformation extraordinaire va se poursuivre mais avec une évolution qui va tendre vers une régression massive des libertés et des cultures ancestrales.

    Rien qu’à voir comment son considérés les automobilistes et le monde du travail en France, toutes les entraves possibles et les moyens pour faire payer.


  • zygzornifle zygzornifle 9 février 2022 10:28

    Heureusement qu’il n’y ait pas une planète proche avec toute une population a asservir ....


  • monde indien monde indien 9 février 2022 14:01

    Merci pour ce bel article .

    Le désastre actuel de l ’ humanité n ’ est pas que le seul fait du matérialisme consumériste auquel on pourrait aisément opposer un matérialisme spirituel et mystique , qui n ’ est hélas guère à la mode . Il s ’ agit aussi d ’ un individualisme forcené et morbide . Chacun pour soi , disent-ils . 

    C ’ est un peu vite oublier la communauté humaine .

    Ah bon ? c ’ est quoi ce truc-là ? 

    Eh oui , c ’ est quoi la communauté humaine ? On pourrait même demander : c ’ est quoi la communauté de tout ce qui vit ? Et même : la communauté de tout ce qui existe , vivants et non-vivants  ?

    On pourrait également relire avec profit le très beau livre de Françoise Dolto sur les premières semaines de la vie des tout-petits enfants où on voit que le bonheur de ses parents est tout aussi nécessaire à ce tout-petit enfant qu ’ est nécessaire le bonheur de leur enfant pour les parents .

    Ou pour reprendre les paroles d ’ un vieux sage birman : Il faut que l ’ autre soit heureux .

    http://mondeindien.centerblog.net/

    Bien amicalement ,


  • I.A. 10 février 2022 08:21

    Poétique et très juste, merci.

    Ça nous arrive encore, de regretter n’être plus cette pierre immobile au soleil, cet arbre bruissant sous la bise, cette mer, ce sable, et même cet oiseau-là qui chante...

    Les choses simples, nous y reviendrons tous. Nous y reviendrons, puisque nous nous en souvenons.


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