jeudi 8 décembre 2005 - par stephane rossard

Les plaies non guéries de la France

On parle toujours des plaies d’Égypte. Mais la France a aussi les siennes. Des plaies jamais guéries depuis trente ans. À force, la situation empire et dégénère. Jusqu’où ? Troisième volet : une France en perte d’identité.

La France souffre d’une réelle perte d’identité. Cette dilution est la conséquence directe de l’affirmation des différences au détriment de ce qui nous unit, de ce qui nous rassemble, bref, de ce qui permettrait d’insister sur les éléments constitutifs d’une Nation et qui justifient que nous vivions en paix sur le même territoire, soit : une culture, une histoire, des valeurs et des principes communs. Or, au cours des dernières années, l’accent a été mis sur le communautarisme. Logiquement, la notion de Nation a perdu de sa pertinence, de son sens même. La Nation n’est plus qu’une nébuleuse de communautés revendiquant leurs traditions, leur culture et des valeurs, parfois, en contradiction avec celles du pays.

Cette revendication « identitaire » des communautés est légitime car elle participe à l’expression de la spécificité d’un peuple, à l’enrichissement d’un pays et à la création une dynamique de créativité. Cependant, ces revendications ne doivent pas prendre le pas sur l’identité nationale, celle censée les transcender, car neutre, et qui sert de cadre à leur épanouissement. De cette dilution progressive est née ce malaise. Un malaise croissant. Un malaise qui est la manifestation de ce déséquilibre entre l’unité inhérente de notre République et la diversité ethnique, réalité incontournable de notre pays. L’un ne doit pas se faire au détriment de l’autre.

En parallèle, la notion de fierté nationale tend à se dissiper. Se montrer ou se dire fier de son pays est interprété désormais comme rétrograde, souvent taxé de nationalisme, voire de fascisme. Une exception française regrettable. En effet, à l’étranger, nombreux sont les peuples à célébrer avec ferveur leur fête nationale, à afficher au balcon le drapeau national, et à chanter à voix haute l’hymne national. Autant de symboles conspués en France ! En Argentine, il existe ainsi un jour de la « bandera », c’est-à-dire un temps dédié au drapeau. En Afrique du Sud, vient d’être lancée la campagne « une école, un drapeau », dans le but d’enseigner aux élèves l’importance des symboles nationaux et de leur permettre d’en saisir la signification ! Par ailleurs, des pays comme l’Australie, la Nouvelle-Zélande, l’Argentine ou encore l’Afrique du Sud n’hésitent pas à afficher des slogans « proudly » , autrement dit, qui mettent en exergue les productions à caractère national !

En France, défendre les symboles nationaux vous attire au mieux de la moquerie, au pire des insultes. Or, on laisse faire. C’est le fruit d’une excessive prudence, assimilée parfois à de l’hypocrisie, de nos décideurs politiques soucieux de ne froisser aucune sensibilité. Mais, leur résultat est désastreux.

Justement à l’inverse de l’effet recherché. Loin de prévenir des désordres, la situation s’est dégradée. Quant à l’opinion publique, saturée, elle exige une plus grande sévérité à l’encontre des personnes contestant le cadre républicain et ses valeurs inhérentes, comme la laïcité. Il est temps de mettre un terme à cette confusion ambiante, résultat d’un manque de fermeté et de clarté de notre classe politique.

En parcourant le monde, il est frappant de voir qu’une telle attitude est naturelle, va de soi pour la plupart des pays. Combien de temps encore nos responsables politiques continueront-ils à faire la politique de l’autruche, à se voiler les yeux ? À se montrer tièdes face à une actualité plutôt brûlante ! À croire que le 21 avril 2002 est déjà tristement oublié. Rappelons qu’il ne faut « jamais dire jamais ». Autrement dit, la démocratie n’est pas gravée dans le marbre, mais un corps vivant dont la bonne santé et le dynamisme dépendent exclusivement de l’attention que lui portent à la fois élus et citoyens. Un moment de faiblesse, d’égarement, et le mal peut vite gangrener.

Renan écrivait que la Nation est « un rêve d’avenir partagé ». Deux questions que chacun devrait se poser : la France (vous) fait-elle encore rêver ? Et avons-nous encore cette envie d’avenir partagé ?



4 réactions


  • Sylvio (---.---.153.134) 8 décembre 2005 19:13

    Et oui malheureusement, l’identité française et ses symboles se sont fait approprié par différents mouvements :

    Le FN et les mouvements d’extrême-droite se sont approprié le drapeau français et l’hymne national pour rassembler plus facilement. Par contre, curieusement, ils ne mettent pas trop en valeur sa devise (liberté-égalité-fraternité) si connue dans le monde et son engagement dans le respect des droits de l’homme (reconnu aussi par beaucoup de peuple dans le monde).

    Les autres parties politiques et les français devraient aussi s’approprié (ou se ré-approprié) ses symboles. Sauf que aujourd’hui ce serait difficile de ne pas passé pour un « facho » ou tout simplement un xénophobe en faisant cela, il faudrait donc expliqué pourquoi.

    Comme je le dis dans mon article (publié sur agoravox), il n’y a pas de mal a appartenir à une communauté et à en être fier, du moment que ce n’est pas en dénigrant ou en rejetant les autres communautés (comme c’est trop souvent le cas, quelquesoit la communauté).

    Comme vous le dites, ces symboles ne devraient pas êtres honteusement caché, aujourd’hui les personnes plutôt « bien de droite » se disent fier d’être français en chantant la Marseillaise et en agitant des drapeaux. Les personnes de gauche défendent fièrement les principes de liberté-égalité-fraternité et les droits de l’homme.

    Pour autant, tout ceci est absurde, on peut être socialiste et aimé son drapeau. On peut être de droite et s’engager pour le respect des principe de la devise française. Tout ceci n’a rien d’incompatible et n’a rien avoir avec des idées de droite ou de gauche.

    Il faut donc, selon moi pour être bien « français », aimé (ou au moins respecté) :
    - le peuple français dans son ensemble : les français tu les aimes (tous) ou tu la quittes.
    - son hymne
    - son drapeau
    - sa devise
    - ses principes fondateurs (laïcité, droits de l’homme).


  • (---.---.126.31) 9 décembre 2005 13:06

    Les principes de liberté-égalité-fraternité et les droits de l’homme ne sont pas le monopole de la gauche.


  • IMINOREG IMINOREG 21 décembre 2005 04:29

    La France (vous) fait-elle encore rêver ? Et avons-nous encore cette envie d’avenir partagé ?

    Je trouve ces questions tout à fait pertinentes, d’autant que j’ai l’impression que ce n’est plus du tout le cas chez les jeunes Français que je reçois ici à Montréal en échanges universitaires. La dernière fois que je les ai interrogés sur le sujet, ils m’ont répondu que la France « c’est mort », ils ne s’y voient pas d’avenir. Et ce sont des jeunes qui sont tous en maîtrise, qui ont eu déjà la chance de faire des études mais ils n’ont plus aucune estime d’eux-mêmes et sont perdus dans leurs identités.

    je trouve cela triste, peut-être apprendront-ils à l’aimer en émigrant et surtout en se coltinant à une autre réalité, celle de l’immigration.


  • wwww.jean-brice.fr (---.---.157.251) 19 février 2006 16:59

    Il faut réhabiliter l’HISTOIRE et la mettre sur le même rang que les sciences exacte. D’autre part, nos écrivains, metteurs en scène, etc devraient plus s’en inspirer et mieux la comprendre...


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