Lettre ouverte au Ministre de l’agriculture et de l’alimentation
Objet : Pour une PAC 2023 plus juste et au service de tous !
Monsieur le Ministre de l’agriculture et de l’alimentation,
La Politique Agricole Commune (PAC) a été instaurée en 1962. Ses principales missions était de rémunérer les agriculteurs, de protéger le marché européen. Depuis la réforme de 1992, la PAC a perdu ses principales prérogatives. Elle doit rapidement retrouver ses premières missions qu'elle avait.
Cela ne signifie pas un retour en arrière mais un retour à une PAC équilibrée, régulatrice, protectrice et rémunératrice et qui ne plonge plus les agriculteurs français dans un gouffre financier.
Nos agriculteurs français passent pour des assistés, « ils sont toujours aidés et ils viennent encore râler. ». Il faut rappeler ici que les aides de la PAC constituent la majeure partie d’un revenu de l’éleveur, par exemple, et que ce dernier n’arrive pas à se verser de salaire avec son métier.
Depuis un demi-siècle, l’agriculture française a été vouée à l’exportation, avec des pris bas imposés de façon à produire des produits standardisés. Ainsi, nous exportons nos productions et importons pour notre propre consommation. C’est illogique et dangereux, car chaque pays de la planète doit pouvoir, selon ses capacités, être autonome au point de vue alimentaire. La France, métropolitaine et ultramarine, en a les capacités.
C’est pourquoi nous avons besoin urgemment d’une politique de souveraineté agricole, aussi bien au niveau français qu’au niveau européen.
Comment redéfinir les prérogatives de la PAC ? En Trois axes :
Régulation et maîtrise.
Les agriculteurs doivent bénéficier d’un niveau de vie équitable à travers la garantie de prix rémunérateurs pour leurs produits.
Pour cela, il faut baser la production européenne sur la satisfaction de nos besoins (en réservant les éventuels surplus à l’export ) pour maintenir un équilibre entre l’offre et la demande sur le marché européen, et de ce fait parvenir à des prix stables et justes (comprenant les coûts de production, ET la rémunération normale du travail de l’agriculteur comme tout autre métier).
La PAC devra s'orienter vers une préférence communautaire pour protéger les agriculteurs de l'Europe, garantir des normes respectées comme en refusant les importations qui ne les respectent pas.
La France doit faire valoir à l'OMC une exception agricole, comme cela a été fait pour la culture !
Aux frontières de l'UE, mettre des droits de douane réévalués pour les importations à bas prix de façon à donner le prix juste pour les agriculteurs, pour éviter le dumping par les moins-disants mondiaux et permettre des prix agricoles européens viables, accompagnée de la création d’un Observatoire Européen des Productions et des Marchés (OEPM) qui répercuterait vers les organisations de producteurs les consignes d’ajustement de chaque production, pour stabiliser les prix de façon qu'ils restent proches des coûts de production.
Mettre en place un prix minimum d’entrée, notamment pour les fruits et légumes. Nos productions ne peuvent plus subir de distorsion de concurrence.
Sur les marchés intérieurs européens, ajuster l'offre et la demande de chaque filière.
Si nous allons plus loin, nous pourrions mettre en place le système EMB et l'adapter à chaque type de production agricole.
Aides à l’installation et aux productions fragilisées.
Des aides spécifiques peuvent être accordées aux petites fermes pour reconnaître leur statut. Nos petites fermes respectent l'environnement, assurent un maintien de l'emploi au niveau local, comme les plus grandes. Ce n’est pas tellement la taille de l’exploitation qui compte mais la manière de travailler. En France, nous sommes loin, très loin, des méthodes de production du continent américain.
La nouvelle PAC doit reconnaître les pratiques pastorales et soutenir les activités agricoles dans les zones à handicap naturel.
Il faut donc maintenir les aides significatives aux productions soumises à des zones défavorisées (ICHN, éloignement géographique, difficulté logistique). Par exemple, pour ce qui est des zones de montagnes, dans le cadre du premier pilier :
Mettre en place un soutien à l'herbe au niveau de l’exploitation.
Des aides à la production, aux bâtiments selon le relief,
Maintien des services publics dans ces zones isolées.
Un cahier des charges selon les réalités du terrain.
Le nouveau zonage des aides ICHN menace l'équilibre des exploitations alors que les contraintes naturelles sont avérées, il faut réviser la carte, quitte à faire du cas par cas ou laisser la possibilité aux régions de pouvoir faire le calcul.
Il est bon de rappeler que l'élevage est source et défenseur de biodiversité.
Le soutien aux petites exploitations et à l'agriculture d'Outre-Mer.
La disparition des exploitations agricoles doit cesser. Que l’on soit en conventionnel ou en bio, que ce soient des fermes de 500 vaches ou 80, chaque agriculteur doit être défendu.
Des aides spécifiques pourraient être distribuées aux petites fermes pour reconnaître leur statut.
Chaque ferme, petite ou grande, est créatrice d’emploi au sein de nos territoires ruraux et préservent l'environnement.
Par le deuxième pilier de la PAC, les exploitations doivent être soutenues par des mesures ciblées, régionalisées, mais sans que cela créé de nouvelles distorsions entre producteurs.
L'économie de nos départements d'Outre-mer (DROM) se fonde sur l'agriculture, c'est leur cœur.
De ce fait, la PAC avec le Programme d'Options Spécifiques à l'éloignement et à l'insularité (POSEI) doit protéger l'alimentation et les productions de nos territoires ultramarin face à la concurrence des pays tiers.
La PAC doit aussi servir à établir un programme de développement des cultures oléagineuses.
Comment ?
-Protéger le marché européen en interdisant toutes marchandises importées qui ne correspondent pas à nos standards de production, comme le soja OGM.
-L’arrêt de la production d'agrocarburants qui est une supercherie et nous demandons qu'un vrai engagement sur les plantes oléagineuses voie le jour pour permettre une meilleure rémunération et reconnaissance à nos agriculteurs.
-Protection des cultures et ne plus considérer les légumineuses (pois, lentilles...) comme des Surfaces d’intérêt écologiques (SIE). .
- Intégration des légumineuses dans la rotation de cultures qui permettra notamment de meilleurs rendements avec des taux de protéines meilleurs, une biodiversité sauvegardée.
-Faciliter les circuits courts en permettant aux céréaliers de pouvoir vendre directement aux éleveurs, ce qui pourra permettre aux éleveurs de ne plus se fournir en tourteaux de soja brésiliens ou de maïs d'Europe de l’Est par un fabricant d'aliments pour bétail (FAB)
-Augmenter la surface des cultures de protéines végétales (colza, tournesol,soja, pois,luzerne),ce qui va réduire les cultures de blé et donc supprimer les excédents de blé européen qui partait vers les pays tiers.
Il est plus qu'urgent de réformer la PAC et qu'elle retrouve ses premières missions, celles d'assurer un revenu décent à nos agriculteurs en protégeant et régulant nos productions, de permettre une alimentation saine et durable aux peuples européens.
En espérant que vous prendrez en compte ces idées, afin de redonner du souffle à notre agriculture, éprouvée par plusieurs décennies de libéralisme.
Soyez assuré de mes sentiments cordiaux
Valentin Lagorio,
secrétaire-général-adjoint à l’Union du Peuple Français.