mardi 24 décembre 2019 - par Michel J. Cuny

Mai 1939 à Paris : une incroyable campagne de publicité pour l’Allemagne nazie et contre l’Union soviétique…

En Ukraine, la victoire de la révolution bolchevique est très vite suivie par un meeting à l’occasion duquel Skrypnik, un membre du Comité central bolchevik, se sera écrié :
« Camarades, Kiev est libérée par l’armée rouge des ouvriers et paysans révoltés ! Camarades, le pouvoir des Soviets vous apporte… » » (Alexandre Barmine, op. cit., page 81.) 

D’une certaine façon, ces points de suspension sont lourds de menaces… En effet, voici ce que, selon notre témoin, les Soviets sont susceptibles d’apporter là où la population a le malheur de les voir arriver triomphants…
« Nous vîmes la scène suivante. Un couple se présenta devant le poste, l’homme vêtu en ouvrier. Ses papiers étaient en règle. Ils passèrent. Le chef de poste les suivait d’un regard aigu. Il les rappela. D’un geste brusque, il dégrafa le paletot de l’homme et découvrit, comme il s’y attendait, des épaulettes. « Emmenez-le ! » Deux soldats emmenèrent l’officier, dont la femme ne comprenant pas encore quel malheur s’abattait sur eux, demandait : « Mais qu’arrive-t-il, mon ami ? » Quatre cents officiers prisonniers furent fusillés à l’arsenal en représailles du massacre des ouvriers. Le sang appelle le sang, cela ne faisait que commencer. » (Idem, page 82)

Et pourtant, par la suite, Alexandre Barmine offrirait vingt ans de sa vie à ceux qu’ils présentent ici tout simplement comme des criminels, tout en nous assurant du fait que ce genre d’assassinat n’était qu’un début !… De qui se moque-t-il ? Des Françaises et des Français de 1939 ?…

Mais, puisque les bolchéviks avaient commencé, il n’y a aucune raison de s’étonner de l’attitude de la Rada ukrainienne… qui se trouve bientôt rangée en une étonnante alliance que voici paraître cinq semaines plus tard, lorsque… « l’armée rouge de Mouraviev dut se replier devant les Ukraino-Allemands  ». 

D’abord incrédules, nous sommes aussitôt renvoyé(e)s vers une note de bas de page qui ne paraît pas être de Barmine lui-même…


« La « Rada » chassée presque complètement de l’Ukraine demanda l’aide des Allemands. Les Allemands envahirent l’Ukraine avec 33 divisions dont quatre de cavalerie, au total plus de deux cent mille hommes. La résistance de l’armée rouge était brisée. Les Allemands avançaient avec une rapidité foudroyante. Kiev était occupé le 16 mars [1918]. Poltava, le 30, Kherson le 10 avril. À la fin d’avril les soldats du Kaiser, traversant toute l’Ukraine, entraient en Crimée et au pays des cosaques du Don.  » (Idem, page 82)

Au moment où tout ceci se passe, Alexandre Barmine, qui est lui-même né le 16 août 1899 à Waljawa en Ukraine, n’a pas encore dix-neuf ans… Comment ressent-il l’arrivée des Allemands en présence de ces bolcheviks qu’il prétendra avoir rejoints ensuite pour rester à leur service jusqu’à l’âge de 37 ans révolus ? Voilà ce qu’il tient à en faire savoir en France durant l’année cruciale de 1939 :
« « Les Allemands sont là ! » L’idée qu’ils se battaient depuis quatre ans contre le monde entier et entraient maintenant au cœur de l’Ukraine avait quelque chose de grand. Le lendemain, je remarquai à la gare un changement extraordinaire. La gare de Kiev était depuis 1914 délabrée, abandonnée, d’une saleté irrémédiable… Des équipes de soldats y lavaient tout à coup les planchers, y peignaient les murs, y accrochaient des écriteaux allemands tout neufs. Une odeur de savon et une atmosphère d’ordre miraculeux y régnaient.  » (Idem, page 82. Les points de suspension sont dans l’édition française.)

Avis aux Parisiennes et aux Parisiens pour l’été de 1940 !…

Car la suite de l’argumentaire – que sa date de publication en France permet de ranger ici dans un cadre pro-nazi – déployé par le futur époux de la petite-fille de l’ancien président des États-Unis, Theodore Roosevelt, n’est pas mal non plus :
« Kiev se ressentit de cette dictature de l’ordre : nos maîtres mêmes vinrent en classe proprement rasés. » (Idem, page 82.) 

Les collabos sont d’ailleurs jugés inférieurs à la tâche que l’Allemand veut, et peut seul sans doute, promouvoir… en cette année 1918, à Kiev (Ukraine), tandis qu’à Berlin règne l’empereur Frédéric Guillaume Victor Albert de Hohenzollern :
« À la fin d’avril, le général allemand Eichorn a « envoyé promener » le gouvernement national de la « Rada » qui était trop rouge pour lui. Sur les baïonnettes allemandes était constitué le régime monarchique avec le traditionnel « Hetman » à la tête. » (Idem, pages 82-83)

Voilà qui a décidément de la gueule, n’est-ce pas ?… Qu’attend donc la France de 1939 pour laisser passer le Führer Adolf Hitler, et lui permettre de chasser tout ce qui est trop rouge pour lui  ?

Et comment bouder tout le reste de ce que nous annonce Alexandre Barmine  ?…
« On pouvait voir passer en auto, dans les rues, l’hetman Pavlo Skoropadski, ancien général de l’armée tzariste, nouveau chef de l’État de la nouvelle puissance d’Ukraine indépendante, protégé du Kaiser. C’était un homme d’âge mûr, vêtu d’un bel uniforme blanc et portant la croix de Saint-Georges de l’ancien régime. La presse illustrée d’Ukraine s’imprimait à Berlin. Des billets de banque ukrainiens, d’un modèle neuf, aussi imprimés à Berlin entrèrent en circulation. » (Idem, page 83.)

Mais pourquoi donc, après avoir été témoin de tout cela qui tranchait si nettement avec la barbarie bolchevique, s’agglomérer au parti communiste d’Union soviétique, s’introduire dans la hiérarchie militaire et puis rejoindre le personnel diplomatique en poste à l’étranger ?…



23 réactions


  • Francis, agnotologue JL 24 décembre 2019 10:03

    Bonjour Michel Cluny,

     

    Article hermétique pour moi, désolé.

     

     Commentaire sur le seul titre : je crois que c’est la haine éprouvée par les capitalistes européens contre les Bolcheviks qui est la cause profonde de la 2ème guerre mondiale. Des capitalistes qui ont fini par s’entre-détruire.

     


    • Clark Kent Séraphin Lampion 24 décembre 2019 12:14

      @JL

      « Des capitalistes qui ont fini par s’entre-détruire.  »

      Remarque pertinente.
      Au début de la première guerre mondiale, la position des capitalistes américains était de laisser les capitalistes européens s’entre-détruire par application de la doctrine Monroe, mais aussi pour consolider leur propre appareil de production encore en gestation mais déjà bien avancé. 
      Ils se sont impliqués après ’interception par les services de renseignements britanniques du « télégramme Zimmermann » adressé par le ministre allemand des Affaires étrangères à son ambassadeur à Mexico et lui demandait de négocier une alliance avec le Mexique tournée contre les États-Unis : « Une alliance sur les bases suivantes : faire la guerre ensemble, faire la paix ensemble, large soutien financier et accord de notre part pour la reconquête par le Mexique des territoires perdus du Texas, du Nouveau-Mexique et de l’Arizona ».
      Pour la seconde guerre mondiale, les dirigeants américains ont eu la même stratégie : après avoir fourni du matériel militaire (camions et armes) à l’Allemagne nazie, ils ont attendu, pour intervenir, que les puissances européennes soient exsangues pour récolter le marché ouest européen et imposer une hégémonie à travers l’OTAN et l’OCDE.
      Ils ont récupéré l’est 45 ans plus tard, et leur sanctuaire territorial est toujours intact. 
      Si les capitalistes s’entre-détruisent parfois, c’est souvent pour le profit de l’un dans eux, le plus fort ou le plus malin.


    • Clark Kent Séraphin Lampion 24 décembre 2019 15:52

      @San Jose

      « Que voulez-vous faire contre des gens pareils ! »

      Ça :
      "Le 29 décembre 1917, un décret de la République soviétique de Russie répudie unilatéralement l’intégralité des dettes de l’Empire russe.’ etc.


    • Francis, agnotologue JL 24 décembre 2019 16:15

      @Séraphin Lampion
       
       ’’Si les capitalistes s’entre-détruisent parfois, c’est souvent pour le profit de l’un dans eux, le plus fort ou le plus malin.’’
       
      Le capitalisme comme l’homme n’a d’autres prédateurs que ceux de sa propre espèce, autrement dit lui-même.
       
      C’est une loi de la nature.


    • Clark Kent Séraphin Lampion 24 décembre 2019 17:33

      @JL

      il parait que dans la nature, « les loups ne se mangent pas entre eux »,
      j’avais cru comprendre que, comme le disait Jean-Paul Sartre (qui n’a pas dit que des conneries, surtout quand il a piqué chez les autres) : « L’homme n’a pas de nature, il n’a qu’une histoire. »


    • MAUGISMICHEL MAUGISMICHEL 24 décembre 2019 19:48

      @JL

      « C’est une loi de la nature. »

      Si c’était le cas, alors à quoi servirait il d’être marxiste ?

    • Clark Kent Séraphin Lampion 25 décembre 2019 10:09

      @kimonovert

      oui mais là, c’est des loups américains (private joke)


    • Clark Kent Séraphin Lampion 25 décembre 2019 16:09

      @San Jose

      « Le capitaliste se caractérise par son extrême amour de ses arrière-petits-enfants, car c’est pour eux qu’il complote à ultra long terme.   »

      Votre ironie se retourne contre vos idoles. Le capitalisme ne « complote » pas, c’est une système.
      Par contre, les acteurs majeurs de ce système, les banquiers, financiers et industriels, ont des stratégies, et c’est comme ça qu’ils établissent leur puissance, leur pouvoir ou, au contraire les perdent, battus par plus forts qu’eux. 
      Il est sûr qu’en 1913, la guerre en Irak n’était pas plus programmée qu’un gambit du roi en début de partie d’échec. Par contre, de la même façon qu’un bon joueur d’échecs ne peut pas gagner s’il n’organise pas son jeu et n’a pas d’objectif clair (quitte à le modifier en fonction de l’évolution de la partie), les acteurs politiques des états et les multinationales ont des stratégies
      c’est vous qui parlez de complot, pas moi, mais c’est tellement facile de proférer des incantations plutôt que d’argumenter...


    • Et hop ! Et hop ! 25 décembre 2019 19:26

      @JL

      J’ai pas compris non plus, il est question de la guerre de 14-18.


    • Francis, agnotologue JL 26 décembre 2019 10:05

      @Séraphin Lampion
       
       ’’ Le capitalisme ne « complote » pas, c’est une système.’’
       
      En effet. En revanche, le néoilibéralisme ...
       
      « Ainsi commence le fascisme. Il ne dit jamais son nom, il rampe, il flotte, quand il montre le bout de son nez, on dit : C’est lui ? Vous croyez ? Il ne faut rien exagérer ! Et puis un jour on le prend dans la gueule et il est trop tard pour l’expulser. » Françoise Giroud
       
      « Le programme libéral ne peut pas réussir à convaincre sous ses couleurs : il faut qu’il avance masqué. » Serge Halimi


  • sophie 24 décembre 2019 18:04

    Une vraie tête de fou cet adolf


  • pallas 25 décembre 2019 00:21
    Michel J. Cuny

    Trop tard

     smiley

    C’était en 1978 qu’il fallait ce poser la question

    Allez pourrir en enfer, ces chiottes a vrai dire

    Salut

    Echec et Mat, par le Fou, en trois coups

    C’est possible, la preuve


  • eau-du-robinet eau-du-robinet 25 décembre 2019 09:08

    « ... une incroyable campagne de publicité pour l’Allemagne nazie... »

    .

    et pourtant durant ses dernières dizaines d’années nous avons eu droit à un énorme lavage de cerveau avec des nombreuses campagnes publicitaire pro Union Européenne donc le projet été à l’origine un projet NAZI !

    .
    Mais cela les grand médias nous n’en parlent JAMAIS !

    .
    Les publicitaires pour l’Europe évitent soigneusement d’utiliser le véritable terme qui est celui de l’UE - Union Européenne, évitent de nous parler des origines de cette Union.
    .

    Qui sont les pères fondateurs européens ?
    https://www.youtube.com/watch?v=kR8DRBZ-wrw

    .

    Voila comment ses technocrates mondialistes nous ont baise :

    Le référendum français en 2005 .... malgré le non ce référendum à été bafoué 3 ans plus tard par les parlementaires français, de droite comme de gauche !
    https://www.youtube.com/watch?v=zc37DMMcJiU

    .

    Marie-France Garaud : Jean Monnet, un agent américain, payé pour détruire les états européens
    https://www.youtube.com/watch?v=1Atyvt9TlcQ


    • Et hop ! Et hop ! 25 décembre 2019 18:44

      @eau-du-robinet

      L’UE qui est un pacte d’inspiration américaine de libre échange commercial et de libre circulation des travailleurs et des capitaux est complètement à l’opposé de l’idée nationale-socialiste d’une Europe des nations indépendantes.


    • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 25 décembre 2019 19:04

      @Et hop !

      L’ Europe aujourd’hui est surtout une connerie intellectuelle dernière suiviste des accords OMC . Ça nous plombe ...a part les allemands.


    • William William 29 décembre 2019 19:02

      @Et hop !
      Mais voyons, vous savez bien que ce sont Hitler, la CIA, les illuminati et le complot judéo maçonnique qui sont à l’origine de l’UE...


    • Et hop ! Et hop ! 30 décembre 2019 11:16

      @William

      Ce n’est pas Hitler, ce sont les USA qui ont repéré et fait chanter et formé aux USA l’ancien haut fonctionnaire nazi Walter Hallstein, exactement comme les Young Leaders actuellement.


  • CN46400 CN46400 25 décembre 2019 10:09

    L’article de Cuny est un peu confus, mais il parle de ces innombrables arrivistes qui, tant que ça rapporte un peu, pullulent autour de tous les pouvoirs. Avant de renier leur positions ante avec les arguments que leurs nouveaux chefs veulent entendre.

    Toute les révolutions, qui ne sont faites que de viande humaines, comptent et compteront toujours une proportion importante de ces matières premières qui sont à la base de toutes les contre-révolutions. Le renégat est, toujours, de tous les contre révolutionnaires, le plus obtus. Pourquoi Carrier, qui commanda les noyades de Nantes, sauva sa peau en thermidor ? Parce qu’il rallia le complot anti Robespierre, bien sûr....

    La révolution russe ne pouvait, évidemment, pas échapper à cette loi, Staline étant le carré, ou le cube, comme on voudra, de Robespierre. En URSS, il y eu beaucoup de répression injustifiée, soit, mais tous en avaient-ils conscience ? tous les réprimés étaient-ils innocents ? Comment comprendre la nostalgie (52% des roumains regrettent Caucescu)...En fait, comme la condamnation du passé, la nostalgie repose sur le même socle, celui du refus de l’analyse objective. Staline est autant le produit du tsarisme et du capitalisme embryonnaire que du marxisme.

    Devant la même équation, Lénine choisit, et imposa, en 1920 la Nep pour « plusieurs générations ». A partir de 1924, les survivants ne surent pas rester unis autour de la Nep, qu’ils avaient pourtant approuvé, et le plus rusé imposa un autre choix : le « socialisme dans un seul pays » sans, peut être, bien mesurer les contraintes que cette option allait entraîner jusqu’à la chute de 1991.

     Aujourd’hui, toutes les analyses qui refusent ce retour sur Lénine, surtout quand on voit ce qui se passe en Chine, sont nulles et sans consistance !


    • Et hop ! Et hop ! 30 décembre 2019 11:20

      @CN46400

      A la base des révolutions, les premiers révolutionnaires sont déjà des arrivistes et des renégats, le père de Lénine avait été anobli par le Tsar, Marat avait été anobli à la demande du Duc d’Orléans, tous les révolutionnaires de 1789 étaient des privilégiés.


  • Désintox Désintox 26 décembre 2019 10:30

    Il faut être initié.


    • William William 29 décembre 2019 19:04

      @Désintox
      faire le lien entre le titre et le contenu de l’article demande effectivement une certaine sagacité smiley


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