Mes chroniques italiennes 3
Dans cette aventure italienne, bien des apprentissages, des étonnements, des plaisirs et des déplaisirs, des rencontres, des découvertes, des déceptions, ... ont rempli et remplissent encore l'ensemble de notre vécu.
Une chose étonnante et tout autant révélatrice tient en la réaction de nombreux Italiens lorsque nous leur annonçons notre décision de rejoindre nos pénates. « Si nous le pouvions, nous ferions comme vous », disent-ils. Quand un pays met ses habitants en fuite – non pas, jusqu'à présent et heureusement, par souci du danger, mais suite à un profond malaise –, il semble utile de se poser les bonnes questions. Mais qui le fait ?
Certainement pas les responsables politiques. Or, ce sont eux qui ont pris un engagement envers la communauté. Ils trahissent cette communauté. Paradoxalement, cet ensemble de citoyens semble à la fois insatisfait et inerte. En d'autres mots, il rouspète et il subit. Mais, il ne fait rien.
Simultanément aux élections européennes (auxquelles, pour la première fois, nous ne pourrons participer à cause d'une information éhontément mal faite), de nombreuses villes italiennes organiseront aussi celles de leur maire. Quelle pitié ! Je ne vois aucune volonté de changement. On va voter pour celui qui joue du charme et du sourire, sans vraiment réfléchir au vide de son mandat précédent. Et comme le vote n'est pas obligatoire, y procèdent seulement les convaincus, le fan club des candidats. Mais comment... comment veut-on entretenir la démocratie de cette façon ?
Nous avons fréquenté des intellectuels italiens. Ils nous ont expliqué la valeur qu'ils accordent au parcours démocratique de leur pays. La péninsule fut une monarchie jusqu'au référendum du 2 juin 1946. Elle est alors devenue république. Le paysage est alors celui d'une gauche représentée par les socialistes et les communistes face à la démocratie chrétienne. Une minorité avait choisi la droite, la monarchie, le populisme. Le premier gouvernement provisoire fut conduit par le démocrate-chrétien Alcide Di Gasperi. Le roi quitta le pays. Le premier président de la République s'appelle Enrico De Nicola. La Constitution, qu'on dit une des plus belles, entre en vigueur le premier jour de janvier 1948.
Le pays est fier de ses représentants d'alors et chaque ville, de la plus grande à la plus petite, a des rues qui portent leur nom : De Gasperi, Togliatti le communiste, ... Certaines s'appeleront-elles un jour Berlusconi, Salvini, Di Maio ??
Si, comme je l'ai dit d'entrée de jeu, l'Italie n'existe pas, elle est néanmoins un beau paradoxe. On en appelle, actuellement, aux manes d'Enrico Berlinguer, le mythique secrétaire du parti communiste de 1972 à 1984. Antifasciste engagé, actif sur le plan international, il prit les indispensables distances avec le communisme soviétique. Il chercha inlassablement le respect de la morale en politique. Et, pendant que certains se désespèrent de sa disparition prématurée, d'autres, nombreux, se détournent ostensiblement de leurs responsabilités ou cherchent un retour rebutant du fascisme. A suivre...
Françoise Beck