Nature mon cul !
Ah la vache, tu m’as bien eu.
A me faire croire que par miracle je pourrais me découvrir – éventuellement, avec le vent dans le dos – des talents de jardinier, à me faire croire que tout le monde a la main verte, même moi qui arrive à faire crever du lierre.
Franchement, quand j’ai acheté ton plateau d’aromates à 30 euros (-20% parce que c’était la semaine privilège et que ta vendeuse un peu trop aimable m’avait refourgué une carte fidélité – qui ne marche qu’avec les produits du magasin m’avait-elle dit dans un clin d’œil) où il y avait du basilic, du persil, de l’aneth (non, non, pas celle de « Premiers baisers »), de la coriandre et tout un tas de trucs qu’on met dans les pâtes quand on a plus de beurre, sur la foi du discours parfaitement marketé de ta vendeuse trop maquillée, j’avais de la chlorophylle plein les yeux, du sang végétal me coulait dans les veines, je me voyais déjà comme le nouveau Nicolas le jardinier (mais avec un autre prénom, parce que Nicolas, bon c’est quand même pas bien beau). Je n’avais jamais pu être un bricoleur aux yeux de mon père (Ikea et ses notices à la con : vainqueur par KO technique), j’allais pouvoir flamber auprès de ma mère, la mini-binette dans une main, l’arrosoir à nain dans l’autre.
J’ai donc foncé chez moi, ouvert le bidule, regardé la notice qui m’a eu l’air aussi claire que la règle des Pokemon et puis j’ai mis les mains dedans. J’ai même pris une photo de ma pomme avec du terreau plein les ongles (merci d’ailleurs, j’ai niqué mon portable).
Bon. Quand j’ai ouvert le bousin et que j’ai calculé dans ma petite tête (j’ai pas la main verte, mais mon cerveau fonctionne à peu près, merci) combien il fallait de terreau pour remplir les 7 pots, j’ai commencé à flairer l’arnaque. C’était une blague, hein, c’est ça ? De pas filer assez de terreau, c’est pour voir si on suit, c’est ça ? Bande de comiques, j’ai dû aller niquer le parterre de fleurs devant chez moi pour en avoir assez, merci pour elles.
Après, quand j’ai vu que tu parlais de « galets » pour « drainer » et même si c’est pas mon genre de drainer en route, j’ai réussi à résoudre cette énigme digne de la dernière question de « Qui veut gagner des millions ? ». Je me suis quand même demandé si t’essayais pas de te la jouer genre bouffe indienne, avec l’accompagnement vendu à part.
Mais là où j’ai compris que j’étais vraiment le dernier des cons, c’est quand j’ai commencé à attendre. A attendre encore et encore.
Ça fait 10 jours que j’ai planté tes merdes, arrosé avec application – pardon vaporisé avec un démaquillant reconverti (non, ce n’était pas MON démaquillant) – tous les jours (une goutte pour le coriandre, deux pour le basilic), leur ai parlé (si le bébé est une personne, la graine est déjà une plante, me disais-je benoitement), mis au plus bel endroit de mon appartement, le plus ensoleillé, le plus qui-déchire-sa-reum. Et tout ça pour quoi ? Des pots plein de terre, pas un truc qui pousse, même pas à l’envers (j’ai vérifié).
Je sais plus qui disait que dans la vie, fallait au moins planter un arbre. Je me disais, bon ok c’est juste du basilic, mais qui vole un œuf vole un bœuf, non ? Donc, qui plante une herbe aromatique plante un baobab, tu crois pas ?
Bon ben au final, j’ai planté mais y’a rien qu’a poussé. J’imagine que ça compte pas donc.
Alors, écoute-moi bien : c’est la dernière fois que je vais me faire entuber chez toi, Natures & Découvertes. Parce qu’en plus de la découverte – ou plutôt la confirmation – que j’avais autant la main verte que la bosse du commerce, la nature je l’ai même pas entraperçue.
Voilà. Tu me reverras plus. Même si les vendeuses sont sympas. Non mais.
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PS : je repasserai peut-être juste acheter « Comment chier dans les bois : Pour une approche environnementale d'un art perdu » parce que j’avoue que le titre m’intrigue, mais c’est tout !
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