NDDL, un combat plus judicieux
Le combat contre l'implantation d'un nouvel aéroport à NDDL est légitime, courageux et respectable ; la forme que prend ce combat si elle est spectaculaire, romantique, médiatique, n'est peut-être pas la plus efficace.
Quels sont les véritables enjeux de ce projet ? Ils sont d'abord financiers et ensuite idéologiques. Sur une utopie des (glorieuses)années 60 révant d'un développement régional idéal et magique du Grand Ouest, des prédateurs ont entrevu la possibilité lucrative de mettre en place un PPP(partenariat public privé), c'est-à-dire faire réaliser un projet d'équipement qui relève naturellement des pouvoirs publics par un consortium privé ; les arguments favorables a priori séduisent, le principe étant de se substituer à l'Etat pour financer le projet, donc pas d'augmentation de la "monstrueuse Dette", pas de création intempestive d'emplois territoriaux qui ponctionnent les impôts. Le consortium choisi livrera "clefs en main" au donneur d'ordre l'équipement prévu selon un cahier des charges adapté.C'est la théorie, la réalité c'est que le consortium loue bien pendant 30 ou 40 ans moyennant un loyer qui inclue le remboursement de l'investissement, les intérêts, les coûts de fonctionnement, de maintenance,ainsi qu'un maximum de prestations annexes, ce que l'on appelle les services facilitaires (sécurité,nettoyage, restauration, gestion des prestations, et tout ce qui pourra être imaginé dans le cadre retenu) et la rémunération du prestataire. C'est bien sûr le contribuable qui va supporter tous ces coûts, et au terme du partenariat la collectivité deviendra propriétaire d'un bien obsolète !
60% des PPP mis en place au Royaume Uni dans le domaine hospitalier sont en état de faillite après 15ans, l'exemple récent de l'hôpital d'Evry est éloquent, cependant les consortiums impliqués eux ne sont pas fragilisés. Mon expèrience personnelle permet d'éclairer un peu le phénomène :
les instances politiques embringuées dans de tels montages, soit pour des raisons politiciennes, soit pour des raisons moins avouables (corruption, financements occultes) la plupart du temps ne sont pas en mesure d'établir des cahiers des charges adaptés, ils font donc appel à des bureaux d'ingiénérie qui rédigent pour eux les cahiers des charges et les appels d'offres (le hic c'est très souvent ces cabinets de consultance sont inféodés aux possibles soumissionnaires). Les critères de sélection et d'exclusion ne laissent de place que pour certaines entreprises, les capacités, besoins, surestimés, les clauses juridiques taillées sur mesure pour ne pas dire orientées. Le dépouillement des offres (offres qui bénéficient parfois de fuites sur les critères décisifs) profitent du savoir faire de ces bureaux de conseils, et ensuite le lobbying (doux euphémisme) entre en action auprès de ceux qui auront voix au chapitre.
Après l'adjudication, la régalade commence, comme par malheur (ou par miracle !), les coûts ont été sous-estimés, il va falloir prévoir des rallonges, les matériaux sélectionnés sont revus à la baisse, il faut OPTIMISER ! Les services facilitaires vont subir une cure d'amaigrissement, et l'on aura beau inventer des SLA et des KPI (systèmes de contrôle et de pénalisation) L'adjudicataire est chez lui !
Voila schématisé l'enjeu financier et comment il se met en place, l'enjeu idéologique c'est de marchandiser au maximum les services publics selon les préceptes friedmanniens des "Chicago boys", les politiques n'étant là que pour engager les citoyens par signature interposé dans des opérations pour lesquelles on a omis de les infomer.
On n'a pas mis en prison Al Capone les armes à la main, ce sont les comptables qui l'ont fait tomber, pour NDDL il serait judicieux d'exiger tous les éléments par toutes les voies possibles, cahier des charges, toutes les offres déposées, l'intégralité du contrat passé avec Vinci, ainsi que les contrats passés avec des sous-traitants par ce dernier, enquêter sur tous ceux ayant à voir dans ce dossier.
Dans la foulée on jetterait un oeil sur le PPP Balard, sur les futures prisons, Bouygues, Eiffage, Sodexo et d'autres sont des spécialistes de ces montages mais à l'arrivée le dindon de la Farce c'est le citoyen, sans oublier les dommages collatéraux indéniables comme à Notre Dame des Landes.