Nicolas, notre jardinier !
Tel un super jardinier, dur à la besogne, notre président arrose sans discontinuer le jardin de la France. Il fait fi des prévisions météorologiques de ses services et des organismes européens et internationaux, qui annoncent pour notre pays, la poursuite de la sécheresse, une baisse des nappes phréatiques et une pluviométrie faible pour 2007 et 2008. Eléments climatiques parmi les moins bons de l’Union européenne.
Treize milliards de dépenses d’arrosage en quelques jours ! Et pour l’instant, aucune rentrée nouvelle ne pointe à l’horizon visible. La météo des recettes fiscales n’est pas très bonne. Tous les comptes sont au rouge : dette, déficit, Sécurité sociale, retraite, commerce extérieur, etc. Sauf les taux du chômage et de l’inflation. Sur le premier, la démographie des "baby-boomeurs" arrange bien les choses quant au second, la BCE conduit une politique monétaire remarquable en privilégiant un euro fort. Heureusement, car si la BCE écoutait notre grand jardinier, l’inflation serait aussi passée dans le rouge.
Il y a encore plus surprenant ! Alors que toute la campagne présidentielle s’est faite sur la dette, cette dette qu’il fallait rapidement et irrémédiablement résorber, notre super jardinier repousse maintenant son traitement aux calandres grecques, c’est-à-dire à 2012. Alors, confiant, droit dans ses bottes toute neuves d’homme à tout faire, il arrose et arrose encore notre jardin, comptant qu’il finira bien par y pleuvoir dessus, d’ici à cinq ans, au plus tard. Parole de jardinier !
Cinq ans, c’est tout de même long. N’est-ce pas ? Même très long en termes de prédiction. Voire impossible. Même Madame Soleil ne s’y est d’ailleurs jamais aventurée. Et s’il ne pleuvait pas durant quatre ou cinq ans ? Si la croissance n’était pas au rendez-vous sur lequel notre jardinier et son équipe ont tout misé ? Beaucoup d’experts, des vrais et des faux naturellement, se sont d’ailleurs souvent trompés sur un tel sujet. Alain Juppé sait de quoi l’on parle. Il en a fait les frais en 1997 en prônant la dissolution de l’Assemblée car ses experts prévoyaient en Europe une croissance catastrophique entre 1997 et 2001. C’est tout le contraire qui s’est produit. Pour le bonheur de Jospin, mais cela est une autre histoire...
Mais revenons à notre jardinier Nicolas ! Si un joueur de poker fortuné peut se permettre le pari d’attendre que la météo tourne, le président directeur général d’un pays le peut-il ? Oui, dirons certains, car il a été élu et il peut donc se permettre les paris les plus audacieux avec le budget du sixième pays de la planète. Non, dirons d’autres, car un pays n’est pas une table de poker et l’argent qu’on y joue est celui de la nation, de ses citoyens. De tous ses citoyens. Rappelons ici que 100 % des Français, les pauvres comme les riches, paient la TVA, c’est-à-dire l’impôt qui rapporte 51 % du budget de l’Etat, soit 144 milliards d’euros en 2006. C’est avec cet argent, et quelque part notre argent, que des paris sont faits sur des prévisions à cinq ans !
Alors notre grand jardinier serait-il aussi un éminent prévisionniste ? Quelqu’un qui pourrait même voir dans une boule de cristal ? On peut peut-être en douter. Nicolas est déjà tellement de personnes à la fois depuis le 6 mai 2007 : président, vice-Premier ministre, ministre de l’Industrie et de l’Aéronautique délégué, ministre attaché à l’Ecologie, ministre de l’ombre de l’Economie et des Finances, super ministre des Affaires étrangères humanitaires, ministre des Affaires européennes par dérogation, garde des Sceaux de secours, etc., voire porte-parole du gouvernement et de sa propre présidence. Alors, et si en plus notre président était un prévisionniste éminent ?
En vérité, c’est le bon sens qui doit revenir habiter l’Elysée. Le bon sens du terrain, de la terre, comme aime à le rappeler tout bon paysan. Un bon sens de paysan, mais aussi un bon sens de vrai jardinier. Pas du jardinier du dimanche, pas celui qui sait tout, qui a tout vu et qui promet que la pluie va arriver bientôt, dans quelques années. Non, pas celui-ci. Nous voulons parler de celui qui ne peut ignorer deux grands principes de réalité.
Le premier nous rappelle que "qui trop embrasse mal étreint" et le second, que "personne n’est omniscient et doté du don d’ubiquité".
Alors, pour l’avenir de notre jardin national, souhaitons qu’il se mette à pleuvoir... de la croissance. Beaucoup de croissance. Au moins 3 % durant chacune des cinq prochaines années. Juste pour faire mentir les mauvais augures nommés OCDE, FMI et Eurostat.
La surprise serait tellement bonne. Même si elle doit être attribuée, en l’an de grâce 2012, à notre super jardinier !