jeudi 9 juin 2011 - par Taverne

Nolwenn et les fantômes du phare de Tévennec

« Nous devons nous battre pour ces phares. Ils sont les rêves du futur, les rêves de nos enfants », écrit la chanteuse Nolwenn Leroy qui vient d'apporter son soutien à une association dont le but est de rénover le phare de Tévennec (« l’enfer ») – situé face à la Pointe du Raz sur un rocher tout proche de l’île de Sein- pour y installer une résidence pour artistes.

L’association vient de signer une convention avec les services de l’État afin de réaliser des travaux de consolidation. Mais la décision de l’affectation de lieux est suspendue à l’accord à venir d’une commission. En tout cas, la belle Nolwenn a spontanément accepté de soutenir le projet en faisant venir une équipe de télé sur les lieux et de solliciter des investisseurs.

Il y a de quoi faire ! Le phare, laissé à l’abandon, est dans un état pitoyable. Ce site montre des photos de l’intérieur et de l’extérieur.

Voici une vidéo sur le phare maudit de Tévennec.

Le phare de Tévennec fut construit sur un lieu hanté

Le petit îlot au large de Raz a toujours eu la réputation de lieu maudit, ce lieu accueillerait les âmes des bretons avant l’Avalon (paradis celtique). Il est hanté par les âmes errantes des naufragés. Pendant la révolution le navire « Saint Louis » s’échoua sur cette île, quand les secours arrivèrent ils ne trouvèrent aucun corps, tout les naufragés avaient disparu. Le phare de Tévennec a quand même été construit là. Les caboteurs avaient en effet besoin que l’on renforce l’ »éclairage » de la navigation nocturne en cet endroit. Le phare d’Ar Men était déjà en cours de construction (début en 1867). Les travaux ont duré 5 ans, de 1869 à 1874. En pleine mer fut érigée une maison-phare constituée d’une tourelle carrée et d’un corps de logis de 11 mètres de hauteur. A quelques encablures du phare de la Vieille, entre l’île de Sein et la pointe du Van.

La solitude du gardien de phare rend fou

Le phare de Tévennec étant classé par l’administration d’alors comme un phare de quatrième ordre, on n’y installe qu’un seul gardien en poste, qui y reste un semestre entier. La plupart des gardiens de sa maison phare, achevée en 1874, connurent un sort tragique.

Le premier gardien de phare entend des voix lui ordonnent en breton : « Kers cuit, kers cuit… Ama ma ma flag », (« Va-t’en, va-t’en, ici, c’est ma place« ). En septembre 1874, Henry Porsmoguer, le deuxième gardien du phare devient fou. Natif de l’île voisine, Sein, il a participé aux travaux de construction des phares Ar-Men et Tévennec. Le feu est allumé le 15 mars 1875 et Henry Porsmoguer doit se charger seul de son entretien. Il ne peut rentrer auprès de sa famille qu’après de longs mois passés sur l’îlot de Tévennec. Il présente sa démission au bout d’un an. En décembre 1875, le troisième gardien, Jean-Marie Rohou né à Plogoff prend son service. Lui aussi, démissionne dès avril 1876.

On double le poste de gardien en 1876

En 1876, l’administration accepte de prendre en considération l’immense solitude dans laquelle doivent vivre les gardiens. Elle « double » le poste en nommant un second gardien. Guillaume Guézennec, né à Cleden-Cap-Sizun, est nommé à ce nouveau poste, le 1er août 1876. Alain Menou, le second gardien du Tévennec, résiste de 1878 à 1885 puis devient fou. Alerté, le curé de Plogoff bénit le rocher, intimant au diable de s’en aller. Même à deux, les gardiens connaissent des drames. Ainsi, par exemple, le gardien auxiliaire Milliner y meurt sans que l’on puisse lui porter secours… Alexis Kerbiriou se sectionne l’artère fémorale avec son couteau, et se vide de son sang dans les bras de son compagnon qui le veille deux jours et deux nuits jusqu’à la relève.

Cela ne suffit pas, on fait venir les épouses

Cela ne va pas mieux. Les gardiens successifs demandent régulièrement leur nomination à d’autres postes car la vie à Tévennec est trop dure. En 1898, pour résoudre le problème créé par tant de démissions, l’administration propose que les épouses des gardiens vivent à Tévennec. Monsieur et madame Milliner furent les premiers à s’y installer en couple, en janvier 1898. De 1900 à 1905, le couple Quéméré occupe le rocher avec un enfant puis quatre de leurs onze enfants. Une vache et un cochon assurent en partie la subsistance de la famille. Le couple Quéré s’installe en 1905. Le couple Ropartz en 1907. Le gardien Ropartz voit son père happé par une lame. Le couple perd un nouveau-né quand une tornade vint interdire toute communication avec le continent. Le toit de la maison est arraché par un ouragan peu de temps après.

Face aux drames répétés, on installe l’éclairage permanent au gaz

En 35 ans, y seront allés 19 gardiens et 4 gardiennes. Dans la légende, on dit alors que le fanal du Tevennec est un lieu maudit car de nombreux drames s’y sontproduits. Lassée, l’administration décide, en 1910, de transformer le phare en feu permanent à gaz. Une réserve de gaz permettait une autonomie de 6 mois, libérant les gardiens de cette servitude. Ainsi, depuis cette date, aucun gardien n’a été nommé à ce poste tant redouté. Aujourd’hui, le feu du Tévennec est alimenté par l’énergie solaire.

La légende des « kers-cuit »

« Kers cuit, kers cuit… Ama ma ma flag », (« Va-t’en, va-t’en, ici, c’est ma place« ) entendait le premier gardien. Mais l’explication de ces cris lugubres, que l’on prête aux âmes des naufragés ayant trouvé la mort sur l’îlot, est aujourd’hui donnée par la découverte, voici une dizaine d’années par es plongeurs, d’un tunnel traversant le rocher. Par fortes marées, l’air s’en échappe par des failles dans la roche, ce qui peut produire des sons extrêmement étranges et angoissants de type hululements sinistres. Il n’en demeure pas moins que le phare continue de jouir d’une très mauvaise réputation auprès des marins et des habitants du Cap Sizun. On raconte à son propos toutes sortes d’histoires. Par exemple qu’un gardien mort brutalement dans les bras de son épouse aurait été mis au saloir par celle-ci pour conserver son corps jusqu’à la relève suivante.

Nolwenn Leroy aura à se battre aussi contre les légendes et les fantômes.

Extraits d’ouvrage

Extraits d’ouvrage (Jean-Claude Fichou : « Les Phares »)

« Les ouvriers qui y érigèrent un phare étaient terrorisés par des phénomènes étranges, diaboliques. La nuit, des hurlements de terreur, éclats de bagarre, de rires déments dominaient le ressac (…) Parfois des êtres, pâles lueurs, titubaient sur la roche, dressaient des croix pour s’y suspendre ensuite. »

« Le jour, pendant la construction, au-dessus des travailleurs tournoyaient les oiseaux, surpris d’y voir des êtres vivants, eux-mêmes qui ne pouvaient s’y poser, à cause des morts ! Par leurs cris : « Kers-kuit, Va-t’en », ils semblaient prévenir les travailleurs des dangers qui les menaçaient. La nuit, c’était des bruits de gens qui se querellaient, se battaient ; on aurait dit tout bouleversé ; le couvercle de la citerne, surtout, déjeté de côté et d’autre. Des vieillards parcouraient la roche et le bâtiment. Des croix se dressaient et s’abattaient ; des gens s’y suspendaient… »

Lien utile : phare de Tévennec

Ecouter l’album « Le gardien de phare », par Stéphane Bersier. Chansons sur des textes de l’auteur de cet article.



19 réactions


  • LE CARDINAL 9 juin 2011 09:38

    belle histoire
    belle Nolwenn
    que la région et les départements s’engagent
    sauvons notre patrimoine !


  • Hervé Torchet 9 juin 2011 10:23

    Bon article, et il est vrai que la désaffectation des phares pose le problème de leur utilisation. Nolwen Leroy veut contribuer à une solution. Bravo.


  • LE CARDINAL 9 juin 2011 10:37

    la mode est à la création de « gites » et « chambres d’hôtes » hors normes...et rentables ! smiley


  • breizhnana 9 juin 2011 14:11

    J’adore les phares mais désolée je n’aime pas Nolwenn Leroy, ex-star ac très opportuniste pour surfer sur une vague porteuse après un flop de son CD précédent. 

    Tevennec, on lui a demandé, à défaut d’avoir eu l’idée toute seule c’est sûr qu’elle n’allait pas refuser, l’occasion était trop belle pour enfoncer le clou d’une bretonnitude soudain miraculeusement « retrouvée » du fond des âges, et très surfaite. Surfaite pour elle qui ne crée rien, comme cette inutile reprise sans âme de tubes qui datent de 30 ans, et donnent à la « métropole » encore un de ces regards de cartes postales de touristes sur une Bretagne folkorique accrochée à ses certitudes, alors que la région a au contraire une créativité musicale hors du commun et formidablement vivante. « Brest » par Leroy, quelle platitude...
    C’est Stivell et les tri yann qui sont contents, ça leur redonne un coup de jeunisme bienvenu.. Et toujours aussi modeste, elle a même engendré un pays de Nolwennie« , rien que ça.. 
    Pour le phare, ... je passe sur l’obscur »des rêves du futur« et les médias moutonniers qui emploient déjà des »vole au secours« ... C’est bon, tous les journaux en parlent, super promo surtout pour elle, même s’ils disent tous la même chose. Après avoir »sauvé la culture bretonne" (? ???) elle va sauver les phares. Elle a du boulot, il y en a beaucoup (plus de 50 en Bretagne). Alleluia. Heureusement qu’elle est là... On peut compter sur elle, chic...
    elle va donner un pourcentage de la vente de disques ?? La Bretagne fait vendre, qu’elle lui en rende...




    • Taverne Taverne 9 juin 2011 15:15

      Vous noterez quand même que j’ai beaucoup parlé du phare et de ses gardiens et très peu de Nolwenn.


    • Peachy Carnehan Peachy Carnehan 9 juin 2011 15:17

      @ Taverne

      « Vous noterez quand même que j’ai beaucoup parlé du phare et de ses gardiens et très peu de Nolwenn. »

      C’est aussi pour cette raison que j’ai voté pour ton article en modération.

       smiley


    • Taverne Taverne 9 juin 2011 15:31

      Cela dit, les jolies filles m’inspirent beaucoup. Je veux bien lui écrire tout un album sur la Bretagne  !

      Ben quoi ? smiley


    • breizhnana 9 juin 2011 16:54

       smiley smiley .. ceci dit une fois bien défoulée j’ai plussé bien sûr votre article mon cher Taverne, car en effet si ce n’est le titre l’article surtout portait sur le phare et était fort plaisant et instructif à lire, et aussi fort utile pour l’info essentielle... smiley


    • yann 10 juin 2011 05:16

      citation« ex-star ac très opportuniste pour surfer sur une vague porteuse après un flop de son CD précédent. »
      ex starac ...apparemment dans votre bouche = situation honteuse qui ne permettrait plus àune personne d’agir,de parler et de chanter .Quand vous parlez de l’artiste Catherine Ringer (Rita Mitsouko) vous dites « ex porno » ?????

      citation« opportuniste pour surfer sur une vague porteuse »

      àmoins d’être sourd cette vague porteuse n’était plus qu’une vaguelette dans les médias Français ces 15 dernières années.

      Citation :« un flop de son CD »
      Donc quand un artiste ne vend que 50.000 albums sa « mission » est de fermer sa gueule .
      Il va y avoir un grand silence dans les rangs vu la catastrophe des ventes de disques en ce moment

      citation :« elle va donner un pourcentage de la vente de disques ?? La Bretagne fait vendre, qu’elle lui en rende... »

      Ces chansons n’appartiennent àpersonne ,elles font partie du patrimoine culturel ,avez vous demandé àTri Yann ,àCécile Corbel, Denez Prigent ,Alan Stivell et autres de rendre quoi que ce soit àla Bretagne ?

      Votre message ne concerne pas le sujet « les phares de Bretagne » c’est juste l’occasion de cracher sur une artiste que vous n’aimez pas .Que de haine pour une personne qui ne fait en fait de mal àpersonne .
      Je peux comprendre que l’on aime pas un chanteur(euse) mais pourquoi les dénigrer àce point et mettre leurs intentions plus bas que terre .Désolant ..


  • Taverne Taverne 9 juin 2011 15:35

    Nouvelle chanson ! Ecrite aujourd’hui. Stéphane Bersier, très inspiré, essaie déjà de la mettre en musique. Donnera lieu pourquoi pas à un article futur sur les lavoirs et lavandières.

    Ma lavandière

    I

    Sur le chemin du vieux lavoir
    Comme j’aurais voulu l’avoir,
    A moi tout seul ma lavandière
    Qui sentait la lavande hier.

    Qui sentait si bon,
    Qui sentait le savon.
    Ma lavandière
    Qui était si fière.

    II

    Au fil de l’eau et du ruisseau
    Du temps qui emporte son seau,
    Qu’est devenue ma lavandière
    Que j’aimais en Hollande hier ?

    Et dans ses cheveux
    La fleur que je veux.
    Pour ma lavandière,
    Aux moulins d’hier.

    III

    Au lavoir, je faisais « hé ho ! »
    Elle disait « attends Roméo ! »
    Et pressait ses petites mains vives.
    Riant au milieu des lessives,

    D’l’amusant museau,
    Qui dans les roseaux,
    Se tenait bien sage.
    Loin de son corsage.

    IV

    Ma mémoire tombe de l’armoire
    Elle fuit comme une baignoire.
    Qu’est devenue ma lavandière
    Que j’aimais dans la lande hier ?

    Et dans les chardons
    Le joli sein rond,
    De ma lavandière
    Qui était si fière.

    V

    Le temps a fini par l’avoir,
    Mon amoureuse du lavoir.
    Il a tué les amants d’hier
    Il a tué ma lavandière.

    Je n’ai de son rire
    Qu’un lointain souvenir.
    Le temps, ce vaurien
    Ne m’en laisse rien.

    VI

    Sur le chemin du vieux lavoir
    J’aurais voulu la revoir,
    Une dernière fois ma lavandière
    Qui sentait la lavande hier.

    Qui sentait si bon,
    Qui sentait le savon.
    Ma lavandière
    Qui était si fière.

    Voris Bian 9 juin 2011


  • velosolex velosolex 10 juin 2011 02:24

    Grave erreur d’avoir automatisé les phares.
    C’est un peu comme de mettre un automate à la place du bon dieu
    Parfois il m’arrive de faire semblant de croire
    Gardien de phare c’était un peu le boulot de concierge
     De la mer et du ciel à la fois !
    Les trois.huit en un seul jour
    La mer qui monte les escaliers cinquante fois l’heure
    Sans même s’excuser ni s’essuyer les pieds
    Et qui cogne au carreau de la lanterne
    En lançant ses cailoux
    au beau milieu de la nuit.
    Comme un voyou des quartiers

    Maintenant c’est plus pareil
    On est bien seul sur l’océan
    Avec plus personne en haut de la chandelle
    Et pour me montrer la route
    Que la lumière de mon du-solex
    Pour rechercher un job


  • velosolex velosolex 10 juin 2011 19:06

    Retour sur les phares.
    Je me suis fait emporté par un coup de lambic
    En évoquant la silhouette phallique de ces chères lanternes des vivants.
    Pour en revenir à cette Nolwenn il me semble que bien peu de bretons
    Se reconnaissent en elle
    Tout comme les corses en Tino Rossi
    Mais on en parle à Paris
    Où il ne saurait y avoir de bons becs
    Qui n’y sont pas allés

    Allez faire plutôt un tour du coté de Gérard Delahaye, de Mélaine Favennec (son album « la chambre » qui a eu le grand prix charles Cros reste un régal d’intimité mélodieuse !)
    Tant de vieux bardes de nos régions et que l’on entend pas sur France inter, où la différence est de moins en moins audibles
    Vous pourrez faire profit à vos enfants des ours du scorff, musiciens débonnaires
    Outrageusement ignorés
    Qui font rire aussi les grands
    En confondant cajun, violons et bombardes.
    Et tant de musiciens et chanteurs : Anne Auffret, Yann-Fanch Kemener, Jean michel Veillon, Erik Marchand,, Gwenael Kerleo, Didier Squiban, ... Et tant d’autres.

    Pour revenir aux phares, l’idée serait plaisante de les réinvestir en gardiens.
    Le phare et l’isolement ne rendait pas fou tout le monde
    C’était une haute solitude propice aux esprits forts.
    Un havre de paix pour la pensée.
    pourquoi pas ne les proposer à tous ces agrégés « en vacances de poste »
    Tout en étant bel et bien payés.

    Au moins Luc Ferry là haut ne dirait plus de sornette
    Même en criant très fort
    Car le vent sur ces hauteurs
     Amène à la modestie même les plus braillards.

    Car comme dit chez nous le proverbe :
    « Brizh diod hag a car tewel ouzh un den fur a so henvel »
    Ce qui veut à peu près dire :
    « Plus qu’idiot s’il sait se taire à l’air d’un homme sage ! »


    • velosolex velosolex 10 juin 2011 19:15

      Néanmoins, soyons juste. Cette initiative de Nolwenn Le roy est tout à fait pertinente et doit être encouragé. il faut savoir qu’actuellement des prédateurs profitant du fait que les phares ne sont plus gardés, viennent voler mobilier, équipement, voir les pierres elles-mêmes.
      Les technocrates qui ont pris la décision de vider les phares de présence humaine sont des criminels ; car le phare n’est pas qu’une alerte, ni même une présence bienveillante.
      C’est la vigilance des gardiens qui a permis de sauver bien des vies humaines.
      Et ça ce n’est pas automatisable !


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