Passion, mystères, aventures : le tigre du Bengale...
J'ai revu, dernièrement, Le tigre du Bengale du réalisateur Fritz Lang, ainsi que le film suivant, Le tombeau hindou, des oeuvres inoubiables qui avaient marqué mon enfance : j'avais tremblé, alors, devant les nombreuses mésaventures vécues par ce jeune architecte, arrivé en Inde pour y superviser la construction d'un hôpital, sous les ordres d'un Maharadjah qui paraissait à la fois débonnaire et cruel...
J'avais frémi, en découvrant, dans les souterrains du palais, une horde de lépreux laissés à l'abandon, se précipitant à la poursuite du héros de l'histoire.
J'avais été éblouie par les décors somptueux de l'Inde et de ses palais, par la procession en l'honneur du Maharadjah, installé sur un éléphant caparaçonné de tissus soyeux.
J'avais admiré la danse de Seetha, la bayadère, aux mouvements ondoyants, accompagnés par une musique rythmée, envoûtante.
En revoyant ce film, j'avoue que le charme a, encore, opéré : ce beau livre d'images m'a, encore, emportée et fait rêver à une Inde mystérieuse et magique...
Les noms des personnages et des lieux aux sonorités exotiques, m'ont, encore, fait voyager vers des rives lointaines : Seetha, Asagara, Chandra, Eschnapur.
J'ai, encore, vibré devant les dangers bravés par les deux jeunes héros, Harald Berger (Henri Mercier, dans la version française) et Seetha.
J'ai perçu mieux encore une société indienne où règnent les pires des injustices : face au luxe démesuré du palais de Chandra, on y voit des exclus, des malades, des réprouvés.
On est révolté par cette société de l'exclusion et de la démesure.
Tous les ingrédients du film d'aventures sont réunis : amour passionné, haine, jalousie exacerbée, désir de vengeance, poursuites dans le désert, cruauté, peur, angoisse...
Ce film nous donne, aussi, d'une certaine façon, une leçon de vie : le Maharadjah, devant l'amour qui unit les deux héros, finit par renoncer à sa vengeance et les laisse libres de repartir vers l'Europe.
On est sensible à l'humanité du personnage d'Asagara qui, malgré la soumission à son maître, essaie d'aider les personnages en difficulté.
On voit combien la cruauté, la jalousie humaines conduisent à des excès condamnnables : la violence des châtiments est terrible.
Sorti en 1959, ce film montre une sorte de fascination du réalisateur pour l'Inde et ses mystères. A travers le personnage de Seetha, la danseuse sacrée, Fritz Lang nous fait percevoir la présence d'un autre monde, mystique, caché... Le palais d’Eschnapur symbolise bien cet univers secret, avec ses dédales, ses souterrains, sa léproserie, lieu inquiétant et révélateur de la détresse et de la fragilité humaines.
Les lépreux mis à l'écart, enfermés, laissés à l'abandon, rebut de l'humanité sont une démonstration de la cruauté et de la barbarie des hommes.
Le palais lui-même, dans sa richesse au luxe tapageur, peut évoquer le délire du Maharadjah, sa soif de puissance qui le conduit vers l'excès, l'envie de domination, et d'un pouvoir absolu.
Certaines scènes empreintes d'érotisme dont la célèbre danse du Cobra exécutée par Seetha laissent entrevoir toute la force du désir humain.
Ainsi, ce film d'aventures, contrairement aux apparences, n'est pas si anodin : il contient de nombreux messages, il révèle les êtres humains que nous sommes, il montre les conflits qui régissent les rapports humains, la haine, la violence animale qui est en chacun de nous, bien représentée par le tigre du Bengale qui donne son titre au film.
Le palais de Chandra ne symbolise-t-il, ainsi, pas tous les replis de l'âme humaine ? Beauté, éclats, cruauté, misère, désarrois et fragilités...
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