mardi 24 février 2015 - par Wirsher

Philippe Richert investit la région Alsace-Ardenne-Champagne-Lorraine en tête de liste UMP, retour sur ses actions récentes

A l’aube des élections des conseils départementaux - nouvelles structures permettant sous le couvert de la parité homme/femme d’augmenter de 2% le nombre de conseillers généraux à la charge du contribuable, mais aussi surtout d’écarter les petits partis de la vie politique en les contraignant à présenter deux couples homme-femme par canton - Philippe Richert, président UMP de la région Alsace, annonce sa prochaine investiture à la tête de la liste UMP pour les élections régionales qui auront lieu fin 2015 dans la nouvelle région A-AR-CH-LOR (Alsace-Ardenne-Champagne-Lorraine). Retour sur quelques éléments marquants récents à propos de Philippe Richert, et de l’UMP locale alsacienne.

Le Conseil Unique d’Alsace (CUA) en 2013

Philippe Richert s’est fait connaître en 2013 pour avoir mené le projet du CUA. Ce projet visait à « simplifier le mille-feuille administratif (le fameux) » en supprimant les départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin et en regroupant toutes les compétences au niveau de la région Alsace, tout en acquérant de nouvelles compétences au détriment de l’état français. L’idée de base étant bonne, si ce projet avait vu le jour, il serait aujourd’hui devenu un laboratoire pour la France, pour expérimenter l’éventuelle suppression de l’échelon départemental initialement souhaité par le gouvernement socialiste. Un projet clairement autonomiste qui s’est vite attiré les foudres des partis nationalistes et ultra-jacobins, FN en tête, craignant de voir ces revendications autonomistes entraîner la fameuse « balkanisation » de l’état français.

Ce projet a été soumis aux électeurs alsaciens par référendum. Bien qu’ayant obtenu 58% de voies favorables, il a été rejeté car la victoire du OUI nécessitait de satisfaire des conditions drastiques imposées par le gouvernement de François Hollande :

- participation minimale de 25% des inscrits dans chacun des deux département

- OUI gagnant dans les deux départements

 

La participation a été trop faible dans les deux département, le Bas-Rhin a voté OUI à 68% et le Haut Rhin OUI à 44% seulement. Le référendum a donc été rejeté. S’il s’agissait d’un référendum classique, il aurait été approuvé puisque la majorité des votants ont voté OUI.

C’est uniquement à cause de se résultat non souhaité par nos dirigeants, que le « redécoupage » des régions de la réforme territoriale en cours s’est fait sans aucune consultation démocratique, sur le coin d’une table, par une poignée d’élus PS connaissant mieux que quiconque les besoins des français, sans avoir consultés un géographe ni même un sociologue.

 

Les raisons de l’échec

Si Philippe Richert attribue l’échec de ce référendum à l’intrusion de partis nationalistes dans le débat régional, ainsi qu’au manque de soutient de certains autres politiciens UMP de la région et aux conditions du vote, il omet volontairement de préciser que les citoyens alsaciens n’ont pas été séduits par un projet aussi clientéliste que vague, qui ne permettait pas de chiffrer la moindre économie, et dont le manque de transparence donnait l’impression d’être un chèque en blanc.

Bizarrement quand la radio France Bleu Alsace repose la question sur un sondage en ligne « si c’était à refaire » en 2014, 91% des votants se prononcent pour le OUI. Ce qui montre bien qu’il y avait là un réel souhait de faire bouger les choses et que le seul problème était la forme du projet tel qu'il était présenté par M. Richert.

 

La réforme territoriale en 2014

En juin 2014, seul contre la majorité des citoyens alsaciens, ayant eu vent du projet de réforme territorial du gouvernement socialiste, il surprend en prenant l’initiative de travailler avec son homologue lorrain en vue d’un rapprochement des régions Alsace et Lorraine. Cette initiative est vécue comme une trahison par beaucoup d’alsaciens qui se sont déjà montrés très défavorables à un tel projet de fusion entre Alsace et Lorraine lors de la commission Balladur (2009) sous la présidence de Nicolas Sarkozy (ils se moquent donc de savoir si le projet vient de la droite ou de la gauche).

Au moment où la réforme territoriale était à construire, que des modifications étaient encore possibles, Philippe Richert a donc fait croire à l’exécutif que l’Alsace était ravie de fusionner avec la Lorraine.

Seulement en juillet, suite à un lever de bouclier des élus Picards, une poignée de députés PS décident d'adjoindre la Champagne-Ardenne à l'ensemble Alsace-Lorraine. Philippe Richert sent qu’il aurait peu de chance de prendre la tête d’une région plus grande que la Belgique, il change alors radicalement sa position, et refuse désormais toute fusion de la région Alsace.

Si coté alsacien on se réjouit de la prise de conscience tardive de M. Richert, ce retournement a par contre eu pour effet de créer une tension entre les régions Alsace et Champagne-Ardenne, en laissant entendre une hostilité (pourtant inexistante) des alsaciens à l’encontre de la Champagne-Ardenne.

A partir de là, l’UMP locale fait campagne contre ce ménage à trois et le conseil général du Bas-Rhin publie des caricatures présentant les lorrains comme des gens pauvres, contribuant ainsi un peu plus à faire passer l’Alsace pour une région égoïste, rejetant purement et simplement ses voisines.

Pour info, les vrais raisons de l’opposition massive des alsaciens sont :


- Le maintien du droit local, du dialecte alsacien et de la coopération transfrontalière

- Le refus d’une réforme qui n’apporte aucune économie et aucune diminution du nombre d’élus, qui peut donc potentiellement couter plus à la France qu’elle ne lui rapportera

- Un attachement profond à la région Alsace, qui n'a rien d'artificielle parce qu'elle correspond à une histoire, une culture et un bassin de vie

- L'incompréhension d'un tel non sens économique : La Champagne-Ardenne a tout intérêt à se tourner vers Paris, la Lorraine vers les pays voisins aux nord, l'Alsace vers les pays voisins à l'Est. Comment ces trois stratégies opposées pourraient-elles coexister et être pilotées depuis une seule administration centralisée ?

 

Le retour du CUA

Suite au revirement de la droite alsacienne, Jean Rottner (maire UMP de Mulhouse) lance une pétition en ligne, demandant :

- Que l’Alsace reste seule

- Que le CUA de 2013 soit intégré à la réforme territoriale malgré l’échec du référendum

En choisissant de remettre sur le tapis un projet rejeté par référendum, il se prive d’emblée du soutient de tous ceux qui n’ont pas soutenu le CUA. Sa pétition obtient malgré tout 60 000 signatures.

Pendant ce temps là le conseil régional d’Alsace et ses deux conseils départementaux votent à 96% pour une motion contre la fusion des régions et pour le retour du CUA.

Le 11 octobre 2014, l’UMP de Philippe Richert organise un grand rassemblement à Strasbourg pour soutenir sa contestation. L’UMP est alors le seul parti qui prend la parole, et tient méthodiquement les autonomistes à l’écart, alors qu’ils partagent le même objectif.

Au cours de son discours Philippe Richert fait chanter la marseillaise et lâcher des ballons tricolores. Cette initiative fait grincer des dents la foule présente, non pas parce qu’elle est hostile à la France, mais parce qu’elle n’a a priori aucune raison de devoir prouver son attachement à la France, pour venir manifester son mécontentement de voir disparaitre la région Alsace. Je ne vois pas quelle autre région serait capable de faire une telle mise en scène mesquine, pour fayoter l’exécutif parisien.

 

La suite de la gronde

Après cette manifestation, d'autres manifestations se font sans l'organisation de l'UMP. Refusant de participer à une manifestation dont elle n’est pas l’organisatrice, l’UMP locale va alors totalement déserter les manifestations qui suivirent, bien qu’elle est à l’origine de la mobilisation.

4 nouvelles manifestations rassemblant plusieurs milliers de personnes eurent lieu. Au cours de ces manifestations le milieu autonomiste prend de l’ampleur, notamment les autonomistes centristes d’Unser Land, qui font de la contestation de l’antidémocratisme de la réforme leur combat. La contestation se recentre désormais sur la revendication d’un référendum.

Aujourd’hui, la FDA (fédération alsacienne démocratique) une fédération qui regroupe tous ceux qui refusent politiquement la réforme territoriale - principalement des autonomistes d’Unser Land, les principaux groupes de contestataires issus des réseaux sociaux et des indépendants, à noter que les militants d’extrêmes droites sont exclus de cette fédération - fait signer une pétition sur papier, dans le but d’obtenir une signature de 10% des électeurs d’Alsace, obligeant ainsi - selon l’article L.1112-16 du Code Général des Collectivités Territoriales - le Conseil Régional à organiser une consultation par référendum. Attention si vous voulez participer à cette pétition il faut impérativement l'imprimer sur feuille A4, la remplir intégralement et l'envoyer à l'adresse indiquée. Un exemplaire a été remis aujourd'hui même à Philippe Richert.

 

L’abandon de la cause alsacienne

Sentant ne plus profiter de la vague de contestation alsacienne Philippe Richert va alors prendre de la distance avec le mouvement, puis commencer à dénigrer les autonomistes, dépité de leur main mise sur la contestation de la réforme, rentrant ainsi dans le jeu du PS alsacien, qui cherche systématiquement à faire naître une dérive extrémiste chez les contestataires. Il ferait mieux de s'intéresser à l'histoire de l'autonomisme alsacien, comme çà il comprendrait qu'il a dans une certaine mesure été autonomiste durant sa contestation et lorsqu'il militait pour le CUA. Cette excellente série de vidéos sur l'autonomisme alsacien lui serait sans doute bénéfique.

En décembre, Jean Rottner envoie un mail à tous les signataires de sa pétition pour leur dire que l’UMP annulera la fusion de l’Alsace avec la Lorraine et la Champagne-Ardenne à son retour en 2017. Nicolas Sarkozy, en meeting à Mulhouse fait la même promesse même si on ne peut que suspecter un certain électoralisme chez ces derniers.

Début janvier la fusillade de Charlie Hebdo met un terme aux manifestations alsaciennes, qui laissent maintenant place à un nouvel élan politique pour les départementales. En effet, la manifestation du 10 janvier tombant en même temps que le deuil national et les manifestations JeSuisCharlie, seul 300 personnes manifestèrent selon la police allemande, 150 selon la presse française.

Depuis décembre, Philippe Richert ne s’est plus exprimé sur le sujet et voilà que maintenant il revient comme un cheveux sur la soupe, expliquant que la super région a maintenant un sens pour lui et qu’il serait à la tête de la liste UMP pour mener la construction de cette nouvelle région.

Il a donc définitivement abandonné le refus de la réforme là où beaucoup de personnes auraient espéré que l'intégralité des conseillers régionaux et généraux d'Alsace présentent une démission collective pour aller au bout de leur protestation. Il faut dire que le conseillers généraux d'Alsace toucheront une augmentation de 40% grace à cette fusion, inutile de se demander pourquoi ils ont tous abandonné le combat.

 

Et les départementales ?

Ce matin encore j'ai reçu dans ma boite aux lettres un tract UMP qui dit :

« Au 1er janvier prochain, l'Alsace sera fondue dans un vaste ensemble de tout le Nord-Est de la France. Pour que les Alsaciens gardent leur identité, pour qu'ils puissent défendre leurs droits et leurs intérêts, […] il faut que que le Bas-Rhin soit fort et qu'il soit dirigé par une majorité qui a fait ses preuves. »

Je remercie donc mes candidats UMP Denis HOMMEL et Nicole THOMAS, de m'avoir démontré qu'il était bête de voter pour eux car cette majorité vient justement de prouver qu'elle était incapable de réussir ce qu'elle évoque (CUA raté malgré qu'on le donnait gagnant d'avance, stratégie maladroite ayant abouti à la fusion là ou presque toutes les régions ont été entendues par les promoteurs de la réforme territoriale, …).

Pour conclure je vous laisse découvrir certaines des plus belles prises de positions de Philippe Richert depuis le début de la mise en place de la réforme territoriale. Et je relaie l’appel de Gérard Longuet qui a demandé à l’UMP de prendre position sur son éventuelle annulation de la réforme territoriale en cas de prise de pouvoir en 2017.

 

On connaissait le ni-ni de l'UMP dans le Doubs. Pour moi ce sera ni PS, ni FN, ni UMP.



7 réactions


  • Michel DROUET Michel DROUET 24 février 2015 11:50

    Bonjour Wirsher

    Et moi, en Bretagne, je ne voterai pas du tout aux élections départementales

    http://michelumix.over-blog.com/2015/02/votez-nous-ferons-le-reste.html


    • Wirsher 24 février 2015 13:22

      Vous allez donc voter pour le parti préféré des français et on ne peut que vous comprendre, vu l’état de la démocratie.


      - 49.3

      - Manœuvres politiciennes

      - Magouilles

      - Scandales

      - Sectarisme

      - Clientélisme

      - …


    • Wirsher 24 février 2015 13:32

      Au fait ce n’était pas la peine que je me lance dans une énumération, votre article est très complet.

      C’est bien parce que la démocratie est en panne que je me tourne pour ma part vers le fédéralisme via l’autonomisme.

      Je rêve également d’un scrutin à la proportionnelle.


  • soi même 24 février 2015 14:44

    J’attends avec impatience le pas de travers en ce qui concerne Philippe Richert, bof c’est comme tous ces professionnels de ce milieux, un état d’âme de carriériste !

     


    • Wirsher 25 février 2015 20:16

      Certes, rien de surprenant venant d’un pourriticien.

      Mais de là à ce que mes candidats aux départementales m’écrivent :

      « Il faut que que le Bas-Rhin soit fort et qu’il soit dirigé par une majorité qui a fait ses preuves. »


  • remes 24 février 2015 23:48


    merci pour cet article , très juste,

    le gouvernement et le PS ont un réel mépris pour l’Alsace , les Alsaciens et tous les français :
    -non respect des engagements (Fessenheim , chômage , austérité , dépenses des politiques...)
    -non respect des élus , des aspirations des citoyens , administrations par des fonctionnaires et les préfets...

    le citoyen ne peut pas s’exprimer par le vote , s’il s’abstient , ça ne compte pas , le vote blanc ne compte pas , comment faire s’il ne veut pas du PS , de l’UMP , du FN ?

    pour ma part , j’irai encore voter une seule fois , juste pour éliminer au maximum le PS , et après je ne me déplacerai plus (sauf pour un parti comme en Grèce)


    • Wirsher 25 février 2015 20:14

      Raisonnement très juste, même si moi j’ai choisi de placer ma confiance dans un autre parti, plus « local ». ;’)


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