lundi 4 octobre 2010 - par
Pour comprendre le 21 ème siècle il faut oublier le 20 ème
A lire et parcourir la planète et les forum web, il semble évident que de nombreux internautes, tout à leur sincérité et convictions sociales, se privent de la capacité de comprendre le monde tel qu’il est en 2010 (pas tel qu’il devrait être ou qu’ils aimeraient qu’il soit).
Ils n’ont pas (encore) chaussé les lunettes qui leur permettront de comprendre le siècle dans lequel nous sommes entrés, un siècle évidemment différent du précédent.
Quand nous parlons de changer notre modèle social il ne s’agit pas de renvoyer les français au XIX ème siècle laborieux (plus personne ne cherchera du charbon dans la mine de Zola) mais bien d’inventer en permanence une société vivable et adaptée aux nouveaux défis de l’humanité.
Nous sommes entrés vers 1989 dans le nouveau siècle. En effet la planète toute entière a connu deux évènements majeurs :
- La chute définitive du socialisme/communisme. Le système communiste ne restant plus qu’à l’état de trace dans le monde (Corée du Nord ou déclinante Ile de Cuba) ou de système de contrôle politique (Chine à la fois libérale au niveau économique et communiste au niveau organisation politique)
- L’avènement rapide, Irrésistible et totalement inédit de l’Internet. Un Internet qui a fait basculer en quelques années les terriens dans l’ère de l’information et de la connaissance.
Les conséquences de ces changements majeurs sont au nombre de cinq au moins
- La mondialisation s’est accélérée, mondialisation des échanges de biens, de services, mais aussi des économies devenues totalement imbriquées et dépendantes les unes des autres. Aucun pays ne peut plus se couper des autres par son système économique ou social. S’il se mettait à l’écart ses habitants vivraient une telle descente aux enfers économique et sociale qu’il leur serait difficile d’assurer simplement leur survie biologique
- L’industrie et son corollaire de modèle de société n’existe plus : Dans la plupart des pays développés, l’enjeu n’est plus d’arracher à la terre des moyens de subsistance (sociétés agricoles) ou de transformer la matière en produits finis, mais bien de collecter, trier, échanger et valoriser la matière première principale du siècle : l’information numérisée et la connaissance.
- Pour un travailleur la compétence change aussi : elle consistera de moins en moins à piloter une machine mais à collaborer avec une équipe sur des projets (plus ou moins durable) de développement.
- Le salariat déclinant : Il s’était généralisé au XX ème siècle et régressera tout au long du siècle puisque la relation de travail change. Le travail ne lutte plus contre le capital, mais la compétence et l’innovation deviennent eux-même le premier capital du travailleur (son employabilité) et de l’entreprise (sa compétitivité)
- La vitesse comme élément majeur de richesse. Le rapide mange désormais le lent
Autrefois, au XX ème siècle, c’était le gros qui mangeait le petit (la grande manufacture, le gros commerçant, les grosses villes), aujourd’hui au temps de l’internet la taille n’est plus l’élément compétitif déterminant. Le XX ème siècle était celui de la vitesse des machines (locomotives, avions, voitures, fusées, le XXI est toujours celui de la vitesse, mais la vitesse de la pensée des hommes, leur capacité à comprendre très vite les nouvelles situations et à s’y adapter (une entreprise qui ne change pas très vite est désormais condamnée).
Face à cette société post-moderne dans laquelle nous sommes entrés de plain pied, l ’occident présente des handicaps majeurs. L’occident est matérialiste et cartésien. L’Occident croit en un but unique et fort vers lequel toutes ses forces sont tendues (la découverte de nouveaux mondes, la colonisation, l’industrialisation, le socialisme..) L’occident est adepte de LA solution, la vérité unique (la Pravda), la marche vers le progrès et les lumières, le sens de l’histoire...
Ce qui fut la base de la renaissance puis de l’époque moderne et expliqua notre formidable essor économique, cette croyance en une seule et unique vérité (religieuse, politique) nous handicape désormais sérieusement.
Le monde asiatique lui ne cherche pas la vérité (et quand il l’a cherché avec le marxisme importé d’occident cela n’a jamais marché) mais il cherche l’harmonie. Pour parvenir à cette harmonie, ce n’est pas dans la confrontation mais bien dans l’adaptation permanente à son environnement.
L’Asie est donc pragmatique, l’occident est quant à lui dogmatique.
Pour aborder et construire notre avenir nous allons devoir redevenir humbles, ouverts aux autres expériences, flexibles et entreprenants. Le challenge sera redoutable dans un pays comme la France, pétrie de certitudes et ne sachant pas pratiquer le consensus (on le voit sur le dossier de la réforme des retraites).
Sans consensus, sans capacité d’avancer ensemble en nous adaptant au terrain nous enregistrons sans cesse des défaites (nos déficits et secousses sociales) et risquerions de devenir un musée des siècles passés
Didier Cozin
Auteur des livres "Histoire de DIF" et ’Reflex DIF"