Pour que Sarkozy prenne sa retraite à 57 ans !

Ce qui me surprend le plus, c’est de voir et entendre un nombre de plus en plus important de personnes utiliser le terme de "guerre civile". Je n’aurais pu imaginer cela il y a cinq ans, pensant que les intérêts individuels et collectifs nous protégeraient de toutes velléités. Hélas, il me semble qu’on est arrivé à un point où une partie non négligeable de la population semble n’avoir plus aucun intérêt dans ce système.

 

Tout d’abord, des cités de plus en plus ghettoïsées, où s’entassent des immigrés et des descendants d’immigrés du Maghreb et d’Afrique subsaharienne. Le chômage est très élevé, surtout parmi les jeunes, y compris pour ceux qui ont obtenu des diplômes. Marianne faisait un reportage très instructif sur les cités de Castres. Beaucoup moins médiatisées que celles de la région parisienne, il s’y installe petit à petit un apartheid sciemment organisé par le maire UMP entre le centre-ville habité par une classe moyenne en grande majorité blanche et des cités en périphérie non blanches. La construction de deux mondes qui s’évitent...peu importe que le trafic de drogues soit la principale source d’activité dans les cités, peu importe que la délinquance explose dans ces même cités ou que les salafistes y prennent le pouvoir et dictent leur loi du moment que ces "damnés de la terre", ces "déracinés" ne franchissent pas la ligne invisible qui encercle les beaux quartiers.

 

De nos jours, les jeunes collégiens de Seine-Saint-Denis n’ont pour beaucoup jamais vu la tour Eiffel et savent encore moins la placer sur une carte de Paris. Ne me parlez pas alors des autres monuments...ils sont exclus de fait de toutes les activités culturelles qui pourraient les faire sentir un peu plus "Français" puisque celles-ci sont principalement dans le centre-ville. Alors, pourquoi ne feraient-ils pas comme chez eux ? Ce chez-soi qu’ils n’ont jamais vu ou que très furtivement. Ah oui, c’est vrai ! Les activités ne manquent pas dans les cités, me diront mes contradicteurs... il est vrai que les collectivités locales pensent à construire des terrains de football sur lesquels ils pourront courir... les meilleurs jargonneurs avancent l’idée que c’est un très bon investissement sur le long terme qui permettra de trouver le nouveau Zidane ou du moins des bons joueurs professionnels. Il est impossible que les futurs lauréats de la médaille Fields se trouvent dans les cités selon nos politiciens alors on préfère laisser en abandon nos chères ZEP et mettre de l’argent selon les souhaits d’une jeunesse qui ne peut avoir une bonne vue d’ensemble, c’est-à-dire dans des activités de garderie.

 

Dans cette situation, il leur est difficile de se sentir impliqué dans la société française et donc de trouver sa place. On peut à juste titre évoquer le risque que ces cités deviennent des favelas où seule l’armée oserait rentrer et des milliers d’assassinats chaque année.

 

Autre catégorie qui souffre, les agriculteurs. J’ai du mal à les situer politiquement...ils étaient autrefois de droite...le sont-ils toujours ? La politique agricole commune accélère le mouvement de concentration des terres et des élevages au détriment des petits exploitants qui n’arrivent plus à s’en sortir. En moins de quinze ans, le nombre d’exploitations laitières a été divisé par deux. Les agriculteurs se sentent dépossédés : le pouvoir est dans les mains des grandes coopératives et de la grande distribution qui peuvent faire un intensif lobbying dans les cabinets ministériels, à Bruxelles "au nom des consommateurs" (le fameux surplus du consommateur de la microéconomie). Les Français sont pour beaucoup des urbains de la troisième et quatrième génération (voire plus) donc le rapport à la terre ne leur dit plus rien. Le prestige de l’agriculteur est bon pour le salon de la porte de Versailles, voilà tout. Pour le spectateur, l’agriculteur est celui que l’on peut voir à la télévision à la recherche d’une femme. Il est drôle malgré lui et surtout pas moderne (alors que beaucoup sont dorénavant techniciens ou ingénieurs de formation). La pauvreté est très grande parmi les agriculteurs, plus que dans les cités et leur retraite est très souvent dérisoire. Plus encore, s’il ne s’est pas converti au bio alors il est un ennemi avant d’avoir pu s’expliquer sur l’impasse dans laquelle ça le mènerait. Je n’entends que très rarement les agriculteurs sur Agoravox et cela me ferait plaisir d’entendre les difficultés de ceux qui n’ont pas pour seul problème le recensement de burkas en France.

 

Les salariés de l’Industrie payent également un lourd tribut à la crise actuelle. Pour dire vrai, la crise pour les ouvriers a commencé au début des années 1970 où il y eut la conjonction de plusieurs phénomènes : les ménages étaient quasiment tous équipés des biens de consommation phares des trente glorieuses (le frigo, la télé, la voiture etc.) donc l’expansion de ces industries devint moindre. Par ailleurs, on constata que l’on pouvait faire ces produits beaucoup moins chers grâce à la robotisation et/ou grâce aux délocalisations. Enfin, les entreprises voulaient de plus en plus de techniciens et des ingénieurs, ce qui laissait sur le carreau de nombreux ouvriers. Sans oublier la fin de l’industrie minière et le fort déclin de la métallurgie dans le Nord. A partir de 1982, le nombre d’ouvriers diminua sans interruption. La crise que nous connaissons a mis de côté des centaines de milliers de salariés de l’industrie avec peu de perspectives pour ceux qui avaient passé plus de 25 ans dans l’usine fermée.

 

Dans le même temps, il y a un président qui avait promis de ne pas bouger l’âge de la retraite en 2007 mais qui revient finalement sur sa promesse de campagne pour rassurer les marchés, dit-on. Réforme inique qui va davantage cliver la France, elle met principalement les cotisants à contribution et ménage ainsi le capital. Réforme idéologique car on ne prend pas en compte l’espérance de vie en bonne santé qui est très probablement inférieur à 62 ans dans les catégories défavorisées. Ces gens-là devrait savoir que lessiver des salariés engendre des coûts pour la collectivité car deux ans de travail en plus c’est lessiver davantage des salariés au bout du rouleau et donc augmenter le risque qu’ils souffrent de maladies graves. Réforme stupide car basée sur des projections démographiques en 2050 alors que tout démographe sait pertinemment que l’on ne peut faire de projections correctes que sur 20 ans maximum (et encore je suis gentil). 

 

Cette réforme sera explosive. Nicolas Sarkozy a 55 ans soit l’âge à partir duquel on propose à certains et certaines une retraite anticipée. Je ne lui en voudrais pas s’il peut profiter de ce dispositif. Ou bien en 2012.