vendredi 13 septembre 2019 - par Professeur Chems Chitour

Pour un système éducatif de valeurs et tourné vers la modernité

 

« Et sur les indications du diable, on créa l'école.
L'enfant aime la nature : on le parqua dans des salles closes.
L'enfant aime voir son activité servir à quelque chose, on fit en sorte qu'elle n’eût aucun but.
Il aime bouger : on l'obligea à se tenir immobile.
Il aime manier les objets : on le mit en contact avec les idées.
Il aime se servir de ses mains : on ne mit en jeu que son cerveau.
Il aime parler : on le contraignit au silence.
Il voudrait raisonner : on le fit mémoriser.
Il voudrait chercher la science : on la lui servit toute faite.
Il voudrait s'enthousiasmer : on inventa les punitions.
Alors les enfants apprirent ce qu'ils n'auraient jamais appris sans cela.
Ils surent dissimuler, ils surent tricher, ils surent mentir."

(Adolphe Ferrière pédagogue suisse au Congrès de Calais, 1921)

 

Ce cri du cœur d’Adolphe Ferrière décrit en creux la détresse des sans voix et non sans droit que constituent les enfants et à qui on veut inculquer un rapport au monde en contradiction avec leurs ressentis. C’est dire si à des degrés divers tout les systèmes éducatifs de par le monde ont des difficultés à marier la modernité et le développement harmonieux des aptitudes réelles ; Dans cette course à la fortune. Il semble que certains aient trouvé la panacée subtil mélange de « liberté » mais aussi de rapport au monde de plus en plus numérique. Dans ce qui suit je vais présenter la rentée scolaire en Algérie installée dans les temps morts de la scolastique moyenâgeuse qui s’occupe au contenant qu’au contenu. Je donnerai ensuite quelques pistes utilisées par certains pays pour prendre en charge le développement harmonieux des aptitudes des enfants dans un monde où il n’y a plus de carrières linéaires Où le CDD devient la norme et où il faut constamment se réinventer pour pouvoir « durer »… 

La rentrée scolaire en Algérie : Rien de nouveau sous le soleil

Evénement exceptionnel dans la morosité actuelle ! Nos enfants mettent leurs plus beaux atours pour aller à l’Ecole. Les parents aussi stressés que leurs enfants sont au rendez-vous. Ces enfants qui partent avec un capital de confiance immense, mais qui au final sont souvent déçus au vu des performances faibles tant qualitatives que quantitatives. Pourquoi ? Mille raisons peuvent être invoquées. Si la massification après l’indépendance était explicable, aujourd’hui, on est à 9,1 millions et demi d’élèves, 25000 écoles, 5000 CEM et 3 00 lycées. Un Algérien sur quatre est à l’école ou à l’université . L’aspect quantitatif devient de plus en plus difficile à satisfaire du fait d’une démographie galopante, débridée et d’un sujet tabou que les gouvernants n’osent pas invoquer par démagogie et par crainte des gardiens du temple qui sont là pour dicter la norme sans participer à la gestion. 

Comme il était à prévoir quarante huit heures on ne parle plus de l’Ecole C’est au ministère de calmer le jeu et ne pas faire de vagues Justement à propos de démographie c’est triste de constater que même à 20 km d’Alger les enfants sont entassés à plus que 45 par classe ! Le système éducatif est en roue libre, chaque année depuis 57 ans c’est le même rituel, l’acte pédagogique est resté ignoré, parce qu’« on n’a pas été assez exigeant » à l’encontre des personnels enseignants, dont il relève un manque de rigueur dans la formation. que le système éducatif représente « la colonne vertébrale d’un pays et pourtant nous avons toujours les mêmes recettes du siècle dernier avec toujours une chape de plomb idéologique

Les mutations dans le monde L’excellence finlandaise

Si on doit se référer à des pays qui ont réussi et qui innovent deux pays nous viennent à l’esprit. La Finlande et Singapour Quel le secret de la réussite ? : «  Dans les écoles finlandaises, les murs tombent – et pas seulement les cloisons entre les salles de classe. Les divisions par discipline et par âge se voient également éliminées, et les élèves ont un plus grand pouvoir de décision sur ce qu’ils vont étudier  Les chaises et les tables traditionnelles ont disparu, laissant la place à des espaces où des enfants d’âges différents se rassemblent pour un cours en commun » (1)

« Dans  une interview de la Ministre de l’éducation finlandaise, Sanni Grahn-Laasonen, évoque  le passage des disciplines enseignées en «  silos  » à une formation «  pluridisciplinaire  ». . Durant l’apprentissage (phenomenon-based learning, PBL) les élèves étudient un sujet traditionnel de manière holistique. «  les écoles peuvent choisir une thématique, le changement climatique, par exemple, qui va être considérée du point de vue de disciplines très différentes, comme les mathématiques… Cela apprend nos enfants à penser des sujets à partir de perspectives différentes  ». Les partisans de ce type d’apprentissage estiment qu’il aide à doter les étudiants d’outils critiques aujourd’hui nécessaires. Kirsti Lonka, professeur de psychologie de l’éducation à l’Université de Helsinki, déclare : «  Dans la vie réelle, notre cerveau n’est pas divisé en disciplines… nous pensons de manière très holistique. Et quand on réfléchit à des problèmes comme les crises mondiales, l’immigration, l’économie, la post-vérité, il devient apparent que nous n’avons pas donné à nos enfants les outils pour appréhender ce monde interculturel  ».(1) 

La BBC résume les différences entre le système finlandais et ceux des autres pays, en citant, entre autres, les points suivants : Le professorat est un métier prestigieux et bien rémunéré Il n’y a pas d’inspections ni d’évaluations de professeurs La journée d’école est courte et les vacances d’été durent 10 semaines Les enfants sont évalués par leurs professeurs. Le seul examen national ne concerne que ceux qui continuent leurs études jusqu’à 18 ans Les classes ont en moyenne 19 élèves Le succès est attribué au fait que l’enseignement et la lecture jouissent traditionnellement d’une haute estime ». (2) 

« Pendant près de deux décennies, la Finlande a la réputation d’avoir l’un des meilleurs systèmes éducatifs au monde. Sa capacité à produire des résultats scolaires élevés chez les enfants qui ne commencent pas l’éducation formelle avant l’âge de sept ans, ont des journées d’école courtes, des vacances prolongées, relativement peu de devoirs à la maison et pas d’examens, fascine depuis longtemps les experts en éducation du monde entier. A l'ère numérique, où les enfants ne dépendent plus des livres ni de la classe pour acquérir des connaissances. L'utilisation innovante de technologies et de sources extérieures à l'école, telles que des experts et des musées, en est un élément essentiel. L’objectif de donner aux enfants les compétences nécessaires pour s'épanouir au XXIe siècle, Apprendre à penser, apprendre à comprendre, sont donc des compétences importantes - et cela rend également l'apprentissage amusant, qui, selon nous, favorise le bien-être " » (3)

Singapour : Premier partout mais à quel prix ?

A l’autre bout du curseur Singapour vs. Finlande : quel modèle pour l'école du futur ? Prise en compte des avancées neuroscientifiques, recours intensif à la technologie, approche holistique... Partout dans le monde, de nouveaux modèles éducatifs se développent, dessinant des pistes possibles pour imaginer à quoi ressemblera la salle de classe du futur. À Singapour, tout se joue avant l'âge de 12 ans Champion de la réussite scolaire, Singapour se classe à la première place du classement PISA de 2015. Ce classement, établi depuis l’an 2000 par l’OCDE, teste le niveau des élèves âgés de 15 ans dans 72 pays. (l’Algérie est classé parmi les derniers) les élèves singapouriens ont presque deux années scolaires d’avance sur ceux des autres villes du monde… Un succès qui s’explique notamment par une méthode efficace pour l’apprentissage des mathématiques ».

« Le principe ? « Enseigner moins, apprendre plus ». Une discussion de 20 minutes en petits groupes succède toujours la réalisation d'une tâche. Les concepts sont également rendus plus réalistes grâce à la manipulation d’objets. Un glissement progressif du concret vers l’abstrait qui permet aux élèves de dire adieu au « par coeur » et d’échanger entre eux sur leurs incompréhensions. Le secret des bons résultats de Singapour s'explique aussi par les cours de soutien scolaire que suivent massivement les enfants, soumis parfois à un rythme de travail inhumain. À Singapour, 80 % des élèves du primaire et 60 % de ceux du secondaire suivent des cours particuliers après les cours afin d’obtenir les meilleurs résultats possibles aux examens nationaux. Sous prétexte de bénéficier d'une extrême plasticité cérébrale, certains tous jeunes enfants se voient en effet dispenser des ateliers de « stimulation du cerveau » qui ont quelque chose d'absurde. les cours de soutien devenant monnaie courante, les écoles élèvent le niveau, et le niveau devient de plus en plus élevé. Impossible pour les familles, donc, de laisser leur enfant échapper au soutien scolaire - payant bien sûr - qui constitue un business très lucratif pour tout un réseau d'écoles privées » (4).

« En 2015, 27 Singapouriens âgés de 10 à 19 ans se sont donnés la mort Un phénomène qui ne fait que creuser les inégalités socio-économiques que le gouvernement singapourien défend en déclarant que la ville ne possède pas d'autre ressource naturelle que l’intelligence de ses habitants. Il est vrai que cette ville Etat à un PIB de près de 360 milliards de $ Là-bas, le rythme scolaire est parmi les moins intenses au monde : de 4 à 6 heures par jour, 5 jours par semaine. Les enseignants donnent également peu de devoirs à la maison (l'équivalent de 10 à 20 minutes chaque jour) . Des principes tels que la pédagogie des points forts, la bienveillance, le respect de l’autre et l’empathie sont ici établis en priorités. 

Le système éducatif français : Un lourd héritage de l’Algérie

« Le niveau d’instruction de la population française progresse, mais les inégalités aussi », écrit Éric Charbonnier, membre de la direction éducation de l’OCDE Non seulement l’école ne gomme pas les inégalités, mais elle tend à les aggraver. (.. ;) L’Éducation nationale a beau employer plus d’un million de personnes elle a beau avoir investi 146 milliards d’euros en 2014 dans son système scolaire, la France continue de se traîner dans les bas-fonds du classement Pisa. (…) » (5)

« Les parents voient dans le privé un système moins rigide, qui s’ajuste mieux aux besoins des élèves. « La compétition scolaire est la conséquence de la massification de l’enseignement. Aujourd’hui, avec un objectif affiché de 50 % d’une génération au niveau master, les parents cherchent des moyens pour leurs enfants de se distinguer. Et leur disposition à payer pour leur réussite n’a jamais été aussi  S’il est un domaine où la culture jacobine qui structure la pensée et les institutions françaises fait du dégât, c’est bien l’éducation. Au lieu de déléguer toujours plus de compétences aux régions ou aux académies, au lieu de s’appuyer sur les communes et les associations, l’Éducation nationale demeure désespérément verticale et rigide. Dernier grief que l’on peut adresser à l’Éducation nationale en matière de formation des profs : le déni de certaines spécificités propres aux écoles françaises, comme les difficultés scolaires importantes rencontrées par les élèves garçons issus de l’immigration, mises à jour en janvier 2016 par l’enquête « Trajectoires et origines » menée par l’Ined et l’Insee. « Il y a une sorte de chape de plomb dans l’institution scolaire française : on ne veut pas voir qu’il y a des origines différentes, on fait comme si cela n’existait pas » (5) 

 « Il vient que l’on peut parler d’une véritable fabrication parentale de l'excellence scolaire : « Dans les catégories sociales moyennes et supérieures, écrit Sandrine Garcia les parents interviennent massivement dans la scolarité de leurs enfants : Pourquoi les enfants des milieux favorisés réussissent-ils mieux à l’école ? Dans leurs ouvrages phare, Les Héritiers et La Reproduction, Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron mettaient l’accent sur la transmission « par osmose » du capital culturel parental. Les enfants des classes moyennes et supérieures bénéficieraient « par des voies indirectes plutôt que directes (…) d’un système de valeurs implicites et profondément intériorisées qui contribue à définir entre autres choses les attitudes à l’égard du capital culturel et à l’égard de l’institution scolaire ». Ayant accès aux livres et aux musées, entendant les conversations parentales, ces enfants vivent dans un « bain culturel ». Ce qui suffirait à les rendre spontanément disposés à répondre aux exigences scolaires. » (5)

"Qui dit fin de la notation dit aussi fin du baccalauréat, ce rituel de passage hérité de la IIIe République, aujourd’hui désuet. À quoi bon maintenir un examen coûteux (1,5 milliard d’euros) et décroché en 2015 par 87,8 % des candidats (contre 67,2 % en 1970) ? En lieu et place du bac, qui forme surtout au bachotage et aux petits calculs compensatoires, le contrôle continu pourrait enfin prendre toute la place qu’il mérite. Grand théoricien de l’instruction publique, Condorcet lui-même conseillait de ne pas enseigner les valeurs de la République comme s’il s’agissait des Tables de la Loi. « Les élèves ont besoin d’expérimenter concrètement les valeurs de la République en tissant des liens, de se mettre en situation de citoyens en apprentissage », confiait en janvier 2016 au Monde Isabelle Bailleul". (5)

C’est ce lourd héritage dont nous avons hérité, en Algérie nous n’avons rien innové de spécifique Pire encore nous appliquons mal certaines dispositions des textes  

Enjeux 2030 : L’Ecole de Papa est morte

C’est un fait que le monde change à vive allure. L’Ecole de papa aussi vénérable qu’elle ait été est morte. L’Ecole du futur est dématérialisée. Il n’y aplus de strutruces staliniennes inopérantes. : « Dans le bus, dans leur lit ou en vacances chez leurs grands-parents : la technologie permet aujourd’hui aux enfants d’accéder au savoir, peu importe où ils se trouvent. Du e-learning aux serious games, de nombreux entrepreneurs planchent sur les méthodes pédagogiques de demain, numériques et accessibles, permettant d'apprendre au-delà des quatre murs de la salle de classe. Formation de l’esprit critique, compréhension du fonctionnement d’une société, accès à la culture, développement de la créativité... L’école se doit de préparer les générations futures au monde qui vient. Jean-Yves Hepp, l’un des pionniers de l’EdTech (technologies numériques pour l’éducation) en France, met l’accent sur la nécessité de diffuser la culture numérique dans les pratiques éducatives, allant jusqu’à déclarer que « ne pas comprendre le numérique aujourd’hui, c’est devenir analphabète demain ». (6)

Un virage qui se matérialise par l'élaboration d'un plan numérique pour l’éducation, dont les objectifs sont - entre autres - la formation des enseignants au numérique, une adaptation des ressources pédagogiques et l’équipement de 100% des écoles en tablettes à l’horizon 2018. Les élèves préfèrent-ils, aujourd’hui plus qu’avant, apprendre de façon autonome ? En tout cas, Internet et la révolution numérique ont permis de faire émerger de nouveaux modes d'apprentissage. Le e-learning et les MOOCS n’ont jamais été si nombreux, et l’adaptive learning, qui repose sur la personnalisation de l’apprentissage, est un marché en plein boom. . « La technologie permet aujourd'hui d'apprendre partout et tout le temps » Si l’école demeure le lieu de savoir par excellence, un élève peut aujourd’hui accéder à toutes les informations ou les cours qu’il désire en étant confortablement assis sur son canapé, son smartphone à la main. 

Créative, connectée, participative, l’école de 2030 se passera donc sûrement des pupitres et des tableaux noirs pour adapter l’apprentissage à l’élève - et non l’inverse. C'est en tout cas le scénario que tentent de faire advenir plusieurs nouveaux acteurs de l'éducation, dont nous vous présentons ici les projets » (6).

La déconstruction permanente et l’adaptation obligatoire

La déconstruction est permanente ; ce qu’on apprend aujourd’hui ne va pas servie dans dix ans encore moins dans trente ans ! Pour L'historien Yuval Noah Harari  Aujourd’hui, notre espèce «  fait face à des révolutions sans précédents », pose d’emblée l’historien. «  Nos vieilles histoires s’effondrent et aucune nouvelle histoire n’a jusqu’ici émergé pour les remplacer  ». La question centrale de son nouvel ouvrage est ainsi de savoir ce que l’on doit apprendre à un enfant né en 2018 pour se dépatouiller dans un monde en perpétuelle mutation, et dont l’avenir sera marqué par « la technologie qui nous permettra de concevoir corps, cerveaux et esprits ». Pour Yuval Harari, tous les aspects de la vie sont concernés : travail, relations femmes-hommes, espérance de vie. Comme nous vivons à l’âge de l’incertitude, « nous n’avons aucune idée de ce à quoi ressemblera le monde en 2050  » et « la plupart de ce que les enfants apprennent aujourd’hui sera inutile en 2050  ». Nous sommes inondé par d’énormes quantités d’informations  », souvent contradictoires. «  Les décisions que nous prendrons dans les prochaines décennies vont façonner le futur de la vie elle-même […] Si cette génération n’a pas de vision globale du cosmos, le futur de la vie sera fixé au hasard  ». Pour lui, les élèves d’aujourd’hui doivent apprendre une chose essentielle pour « tenir le choc du monde en 2050 » : se réinventer constamment, et s’adapter aux changements. Parce que selon l’historien, c’est ce qui nous constitue en tant qu’êtres humains qui risque de subir une mutation. » (7)

« À l’horizon 2050, « les individus auront sans doute à faire face à une possible migration vers le cyberespace, à des identités de genre de plus en plus fluides, et à de nouvelles expériences sensorielles générées par des implants électroniques ». Pour faire face à « des choses que personne n’a jamais vu auparavant, comme des machines intelligentes, des corps augmentés, des cataclysmes climatiques suscités par l’activité humaine ou des algorithmes qui manipulent nos émotions  », il nous faudra «  beaucoup de souplesse psychique et d’importantes réserves d’équilibre émotionnel ». Comment faire, donc, pour que l’humanité s’adapte au mieux aux changements à venir ?  Les années à venir marqueraient donc selon l’historien le grand retour du « Connais-toi toi-même », puisque « Coca-Cola, Amazon, Baidu et les gouvernements se font tous la course pour vous hacker. Pas votre téléphone, votre ordinateur ou votre compte en banque, mais vous, et votre système d’exploitation organique ». (7)

Y aura t-il u marché du travail dans le futur ?

Un adversaire de plus ne plus présent. On dit que la robotique va amener à la suppression de centaines de milliers d’emplois L’intelligence artificielle va-t-elle faire disparaître le travail ? C’est l’une des questions que l’on entend le plus, autour de l’IA. Elle est légitime : à chaque révolution technique, certaines tâches deviennent obsolètes ou sont automatisées Pour Yuval Harari « Nous n’avons aucune idée de ce à quoi ressemblera le marché du travail en 2050 » Ce qui n’est pas l’avis de Denis Pennel pour qui nous allons retourner à l’artisanat  « Durant tout le XXe siècle, écrit il nous avons vécu dans une économie de « rattrapage » : Aujourd’hui, nous sommes, à l’inverse, dans « l’économie de l’abondance » : il suffit d’aller sur un site de vente en ligne pour avoir accès à des milliers d’offres et services. Ce que réclament les gens, désormais, c’est plus de produits personnalisés et délivrés à la demande. L’entreprise doit fournir des biens et services qu’elle n’a même pas encore fabriqués ! (…) » (8)

 Au salon du Livre, à Paris, et j’ai pu, poursuit l'auteur, faire imprimer directement un livre en choisissant mon image de couverture. Ça veut dire que dans la librairie de demain, on ne trouvera sans doute plus aucun ouvrage physique, mais une immense photocopieuse. Les libraires n’auront plus à s’embarrasser d’un énorme stock. Et puis, il y a aussi les fab labs, ces mini-ateliers où chacun peut venir fabriquer son produit à partir d’un simple schéma. On va assister à la relocalisation de certaines activités qui étaient parties dans des pays à bas coût. Enfin, les plateformes ont démocratisé l’accès au client. Ma nièce de 16 ans vend les bijoux qu’elle réalise directement sur Internet. Avec des sites comme Etsy ou Uber, chacun peut créer sa petite entreprise et devenir indépendante (8).

 « On peut même parler poursuit Denis Pennel, du salariat comme d’une simple parenthèse dans l’histoire du travail. Avant la révolution industrielle, beaucoup de travailleurs étaient établis à leur compte : paysans propriétaires, vendeurs itinérants, commerçants… Demain, nous assisterons au retour de « l’artisanat de masse », avec des petits producteurs agricoles ou des créateurs indépendants.  Il est illusoire de croire qu’on va encore construire des immenses usines automobiles ou continuer à produire des milliers de tonnes d’acier chez nous. D’abord car ces métiers seront largement robotisés. Mais surtout car ce modèle industriel ne répond plus à la nouvelle économie de la demande. Les entreprises industrielles vont se reconvertir dans le service. Plutôt que de vous vendre une voiture, Renault vous louera un véhicule avec tout un tas de prestations derrière : assurance, entretien, échange gratuit… D’autre part, le service nourrit l’industrie : regardez comment le boom des vélos en libre-service a relancé la fabrication de vélos ! » (8)

« Quand vous réservez un billet de train sur Internet et que vous l’imprimez chez vous, vous faites quelque part le travail de l’agent SNCF.(…) Une connexion Internet et un ordinateur suffisent pour effectuer le travail, où que l’on se trouve Cela participe à une remise en cause des frontières du travail, que vous décrivez aussi dans votre livre sous les termes de « mobiquïté » et de « blurring ». La « mobiquïté », c’est la déconnexion entre l’espace et le travail. Une connexion Internet et un ordinateur suffisent pour effectuer le travail, où que l’on se trouve : salon d’aéroport, train, salle d’attente du médecin ou même à la plage ! Le terme « blurring » (« flou » en anglais, Ndlr) fait quant à lui référence à la porosité croissante entre vie privée et sphère professionnelle : je consulte mes emails le soir chez moi, et je réserve mes vacances durant mes heures de bureau. Dans une économie de rente comme la nôtre, il y a forcément de la résistance au changement. Chaque profession essaye de défendre ses privilèges. Mais je pense que cela va à l’encontre de l’aspiration profonde des gens, et même de l’intérêt de la nation à long terme. Car tous ces nouveaux services créent de l’emploi » (8) 

Une expérience intéressante

La nouveauté pédagogique de cette année en France ( Région Paca) est le don à chaque lycéen d’une tablette pour lire les manuels scolaires numériques. :« Cela a donné lieu à un grand débat au sein de notre majorité. Nous avons débattu avec le Rectorat avec lequel nous sommes tombés d’accord sur l’idée de laisser chaque lycée choisir entre livres et tablette. Parents d’élèves et enseignants ont ainsi pu s’exprimer. Nous pensions que nous aurions entre 60 et 65% de lycées qui feraient le choix de la tablette, nous en avons eu 85%. D'ici la fin du mois d'octobre, les élèves de 240 lycées de la région Sud Paca travailleront avec des tablettes numériques. Elles remplacent les manuels traditionnels et permettent de se connecter à Internet. Le Conseil régional fournit le matériel et le contenu gratuitement. Il s'agit d'une tablette de la marque Lenovo d'une valeur de 280 euros, négociée à 180 euros par la Région. Le lycéen en restera le propriétaire. Les manuels numérisés y sont installés. Les textes vont peuvent être annotés, zoomés et parfois enrichis de vidéos, de sons et d'animations » (9).

Quelles sont les contraintes du système éducatif algérien ?

 Pour le gouvernement ce qui est important est qu’il n’y ait pas de vague à la rentrée. Ensuite on oublie les jeunes pendant une année, sauf en cas de grèves des enseignants pas pour des motifs pédagogiques mais surtout pour des mobiles pécuniaires Nous remarquons que nulle part il n’est fait cas de l’acte pédagogique de la performance, on inaugure des classes, des cantines – préoccupation qui doit être celle du ministère de l’Habitat- et on met à disposition 60 millions d’exemplaires dont la durée de vie est d’une année, les programmes n’ayant pas évolué, fondamentalement nous avons toujours le quantitatif avec une efficacité faible, les documents étant peut attrayants et, à la limite, inutile.

En tout état de cause, ce n’est pas au Premier ministre de décider du niveau du recrutement, ce ne devrait être que des concours objectifs avec des normes. Ce n’est pas au président de décider de l’ouverture d’une Faculté de médecine, c’est encore une fois un problème de la stricte compétence des scientifiques de la discipline. Nous avons trop souffert de la démagogie où le président intronise des établissements qui ne disposent pas du smic de compétence de prétendre à être université.

On s’étonne ensuite que l’on soit les derniers partout. Nous l’avons voulu, car la légitimité historique révolutionnaire, la légitimité de la force brute a stérilisé toute velléité de parler vrai. Dans 10 ans, à Dieu ne plaise, si on ne fait rien pour sauver le système éducatif, les élèves qui entrent aujourd’hui en première primaire trouveront en 2030 à la fin de leurs études secondaires un désert, où rien ne pousse où la rente n’est plus qu’un souvenir du fait d’un pompage frénétique, où les spécialités et programmes ne correspondent à aucun métier du XXIe siècle. 

Si notre système éducatif en est arrivé à ce degré de décrépitude, c’es tous autant que nous sommes avons été complice de cette descente aux enfers. D’abord les pouvoirs publics pour qui ce n’est pas la priorité et croire qu’ensardiner les élèves chaque année en septembre et les oublier ensuite, participe d’une forme de complicité . Ce sont les enseignant (e)s notamment les anciens qui n’ont pas dénoncé les travers de l’approximation du « maaliche » ( Cela ne fait rien) du social de la « « 3atba » (seuil) qui est le fait de s’indexer sur l’établissement le moins performant pour fixer le niveau des épreuves du baccalauréat. Les ministres qui se sont succédés ont laissé faire et ont même innové dans l’approximation aussi bien dans l’éducation que dans les établissements supérieurs. L’enseignant n’est rien devant l’administration directeur recteur pour qui il faut plaire au ministre du moment.

Enfin la responsabilité des parents est totale du fait que les élèves sont pour la plupart livrés à eux-mêmes pas de suivi régulier Ils réagissent en fin d’année quand on leur dit que l’enfant double ou pire est orienté vers la vie active. ET à ce propos l’hypocrisie est totale. Personne ne s’occupe des recalés du bac qui pour la plupart se retrouvent dans la rue. Il n’ y a jamais prêté la moindre considération à l’enseignant, ce « formateur des générations futures ». Quand un professeur meurt c’est une bibliothèque qui brûle affirme un proverbe africain. Pourtant en Algérie c’est un fait divers ignoré par sa tutelle, par l’Etat et sans faire dans une concurrence macabre, le décès d’un footballeur, d’un chanteur, et pire d’un politicien, font l’objet d’un traitement médiatique surdimensionné. 

Nécessité d’un Etat des lieux sans complaisance et maitrise de la démographie

 Il y a 20 ans un première évaluation a été faite .Notre réflexion n’a jamais vu le jour. La réforme a été enterrée Des choses ont été proposés. Vingt ans après il nous faut après cet état des lieux. Ce mastodonte de 750000 fonctionnaires dont autant d’administratifs que d’enseignants est à revoir, Plus de 28 000 établissements. Dont plus de 20.000 écoles primaires 5000 CEM 3000 lycées. Avec un budget de 780 milliards de dinars, il est loin de pouvoir permettre un enseignement de qualité les enseignants n’ont pas les moyens, notamment pédagogiques, ni, pour certains parmi eux, les compétences pour dispenser un enseignement de qualité. C’est une force de frappe importante mais inutilisée rationnellement Comment préparer l’avenir c'est-à-dire le chantier de l’Ecole en 2030

 La situation a changé nous sommes au XXIe siècle et nous nous retrouvons sans moyens après avoir gaspillé 1000 milliards de dollars dans des projets qui ne créent pas de richesse. Plus grave encore nous étions 32 millions il y a vingt ans, nous avons une démographie galopante qui fait que nous sommes à près de 44 millions. 12 millions de naissance que nous ne pourrons pas absorber avec un minimum de qualité. La situation financière devenant de plus en plus dramatique. Il est logique de penser à une planification rigoureuse des naissances car nous ne pourrons pas à ce rythme de 1 million de naissances /an absorber 12 millions de personnes soit un total de 56 millions d’habitants. Si on veut réaliser des avancées dans le système éducatif, il nous faut contrôler les naissances au strict niveau que l’on veut assurer

Par ailleurs il est indispensable d’être extrêmement rigoureux dans le recrutement, la formation des enseignants et leurs performances, tout au long de carrière – il ne saurait y avoir de titularisation à vie dans le système éducatif Cependant même si les enseignants les universitaires et les intellectuels étaient longtemps marginalisés , qu’ils sont très mal payés- En Europe l’enseignant est payé pratiquement cinq à dix fois plus- Il est de leur devoir d’être toujours en phase avec les savoirs. L’enseignant du futur doit être un coach qui explique à l’enfant comment s’en sortir dans la cloud de données disponibles.

Nous devons réhabiliter le système éducatif algérien, Nous ignorons ce qui se passe dans le monde méthodes révolutionnaires en phase avec le développement scientifique mondial notamment dans le domaine de l’informatique et de l’équivalent des cours en ligne (MOOC) (Massive Open Online Course, formation en ligne ouverte à tous formation à distance capable d'accueillir un grand nombre de participants) pour tous les niveaux, ce qui évitera les cartables fastidieux et les manuels sans importance que l’on réimprime chaque année Mieux encore en France l’innovation est telle que les élèves ont des tablettes où tous les cours sont enregistrés. Il y a des possibilités de lire partout et même de poser des questions des questions aux professeurs en dehors des heures de travail.

Finis le cartable fastidieux les dépenses inutiles à imprimer chaque année comme c’est le cas où 60 millions de manuels sont imprimés à la hâte . Pourvu que le chiffre y soit peu importe ce qu’il y a dans le manuel. En moyenne le cartable sur le dos d’un enfant du primaire pèse jusqu’à 7 kg ! Matin et soir qu’ul vente, qu’il pleuve. Naturellement ces manuels ont une durée de vie réduite chaque année le rituel est le même. C’est tout cela qu’il nous faudra examiner dans cet état des lieux pour arriver à innover ; Certains pays arrivent à mettre à la disposition des enfants des laptop pas chers à moins de 50$ comme en Inde. Des expériences ont été faites au MIT. peut être qu’il faille s’en inspirer pour un « choc informatique » ce qui nous permettra de brûler plusieurs étapes.

Plus que jamais, si l’on veut que le pays s’en sorte, il ne faut plus faire dans la démagogie, un état des lieux sans complaisance devra être fait et expliqué au peuple en lui indiquant à la fois les insuffisances et les défis à relever pour sortir du goulag actuel où l’école est prise en otage par l’idéologie qui en fait un fonds de commerce. Nous devons militer pour un système éducatif de valeurs qu’il nous faut graver dans le marbre mais aussi tournée vers la modernité qui ne laisse personne sur le bord de la route et ceci pour être en phase avec le mouvement du monde.

Bonne rentrée à nos enfants qui sont la prunelle de nos yeux et l’espérance du pays, en souhaitant que cette promotion de la révolution tranquille soit celle de la naissance de la deuxième République. 

1.Adam Jezard https://www.wethetalent.co/fr/formation-education/la-finlande-peut-etre-concu-lecole-parfaite/ 25 janvier, 2018 

https://www.weforum.org/agenda/2017/10/why-finland-is-tearing-down-walls-in-schools/

3.Penny Spiller https://www.bbc.com/news/world-europe-39889523 29 mai 2017

4.Eva-Marie Debas https://usbeketrica.com/article/singapour-vs-finlande-quel-modele-pour-l-ecole-du-futur

5.Sandrine Garcia https://www.scienceshumaines.com/la-fabrication-parentale-de-l-excellence-scolaire_fr_41309.html

6.https://usbeketrica.com/article/enjeux-2030-apprendre-au-dela-de-la-salle-de-classe 

7.Guillaume Ledit https://usbeketrica.com/article/pour-yuval-harari-ce-que-les-enfants-apprennent-aujourd-hui-sera-inutile-en-2050 13/08/2018 

8.Céline Deluzarche 04/12/2017 https://usbeketrica.com/article/demain-retour-artisanat-masse-fin-salariat

9.https://www.francebleu.fr/infos/education/86-des-lycees-de-la-region-sud-paca-ont-abandonne-le-livre-papier-1567783738

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique Alger



3 réactions


  • Désintox Désintox 14 septembre 2019 16:39

    Tout secteur d’activité ne peut progresser qu’en investissant massivement en recherche & développement.

    Où en est la R&D du secteur éducatif ?

    À qui la faute ?


    • popov 15 septembre 2019 14:19

      @Désintox

      Quand j’étais étudiant, j’ai entendu cette phrase terrible à la cafétéria :

      Ceux qui savent font de la recherche ; ceux qui ne savent pas enseignent ; ceux qui ne savent pas enseigner, soit deviennent inspecteurs, soit écrivent des livres de pédagogie.


  • popov 15 septembre 2019 15:13

    @Chems Chitour

    Le problème de l’Algérie se pose en ces termes tout simples : comment réparer les dégâts occasionnés par 14 siècles d’islam.

    Mais cela, même un universitaire comme vous, qui avez un grand nombre de publications en sciences appliquées à votre actif, ne pouvez l’admettre.

    Vous êtes prisonnier de ce tabou, comme les autres Algériens, comme tous vos politiciens.

    La libération de ce carcan du VIIe siècle bédouin viendra-t-elle de la Kabylie ?


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