Qu’ils s’abstiennent !
Douze candidats en galère …
Décidément le débat n’a pas le vent en poupe. Non, je n’évoque pas notre bon Freluquet et son art consommé du monologue devant les différentes strates d’une société entièrement vouée à admirer la grandeur et l’éloquence du bonhomme, mais plutôt cette caricature immonde de démocratie que nous ont infligé les têtes de listes en quête d’électeurs.
Douze personnages à la poursuite de nos voix et qui, pour ce faire se coupent la parole, s’invectivent, se laissent tancer comme des garnements par des journalistes qui pour une fois se montrent impitoyables avec ceux qu’ils reçoivent. C’est à l’aulne de cette remarque du reste que l’on mesure mieux combien les élections européennes concernent les seconds couteaux de la vie politique.
Douze premiers de classe dont dix hommes. La Parité a encore de beaux jours devant elle ! Du beau linge, le costume cravate demeure majoritaire dans un univers où être bien habillé, bien maquillé également permet de se conduire comme de vulgaires gougnafiers. Il n’est pas question de distinguer tel ou telle dans ce marigot détestable qui a fait le jeu du camp des abstentionnistes.
Ils se coupent la parole, ils ne s’écoutent pas, ils tentent de couvrir les propos du voisin, ils parlent tous en même temps et curieusement prétendent tous vouloir devenir Parlementaires… Ils ont tout à apprendre de l’art oratoire et des règles de courtoisie qui prévalent au débat. Ce n’est d’ailleurs pas leur souci. Ce sont des représentants de commerce à la recherche d’une fonction lucrative pour laquelle ils feront tout le contraire de ce qu’ils ont promis.
Quant à prétendre que la démocratie puisse se nourrir d’une émission où les arguments doivent être présentés en une minute avec une horrible sirène pour couper la parole de l’orateur, c’est bien la preuve que nous sommes définitivement passés dans l’ère de la communication, de l’apparence et du vide sidéral.
Seule la forme importe et tant pis pour le fond, qui d’ailleurs aime à se faire abyssal dans notre classe politique. J’admire les téléspectateurs qui sont allés jusqu’au bout de ce pensum. Quant à moi, voulant éviter les mimiques de ces clowns aussi dérisoires que pathétiques, j’avais choisi la radio pour me concentrer sur les arguments. Peine perdue, ce fut une telle cacophonie, j’ose même le néologisme Cacaphonie, que bien vite, je renonçai à la farce.
Que retenir de tout ça ? Rien et c’est sans doute le but recherché par le pouvoir qui espère diluer tant l’électorat qu’il trouvera moyen de placer ceux dont il n’a plus l’usage dans cette caisse de retraite des serviteurs du patron. À ce titre, le drôle d’oiseau qui tient lieu de produit d’appel vaut son pesant de cacahuètes. Totalement dépassée, mal à l’aise, voûtée même, la dame fut mise en pièces par des vautours qui ne se montraient efficaces que dans l’art de casser la malheureuse.
Faut-il distinguer un candidat dans cette effroyable bouillabaisse ? J’ai le sentiment que deux ou trois personnes ont cherché à se retirer de la mêlée, regrettant sans doute d’avoir été convié à ce pugilat électoral indigne et dégradant. Je pense qu’à l’avenir, il conviendrait qu’ils aillent jusqu’au bout de leurs convictions et qu’ils déclinent une invitation qui favorise plus le déclin de la politique que le désir de voter.
Voilà donc ceux qui se prétendent appartenir à l’élite de notre nation. La démocratie représentative a plus que jamais du plomb dans l’aile et ce n’est pas madame Loiseau qui dira le contraire. Dire qu’il existe des concours d’éloquence dans lesquels, j’en suis persuadé, aucun de nos douze candidats en galère, ne brillerait vraiment. Le peuple souverain n’a certes pas besoin d’être ainsi représenté pour se grandir. J’en reste sans voix tandis que je m’interroge sur la manière après ce cirque honteux de savoir comment donner la mienne autrement qu’au hasard …
Cacophoniquement leur.