Racisme, islamophobie et homophobie : sachons raison garder
A croire certains, la France serait gangrenée par les haines communautaristes. Et si on regardait précisément les chiffres ?
Le CFCM, nous apprend le Nouvel Observateur, est préoccupé par les montées des actes antimusulmans, signalant 50 actes antimusulmans pour le premier trimestre 2013. Si l'on extrapole à l'année 2013, nous arrivons au chiffre de 200 actes anti-musulmans par an. Dans le même temps, en un an, on compte environ 3,5 millions de délits (source : Insee, qui indique un taux de criminalité de 54,64 pour mille en 2012, et en considérant une population de 65 millions de personnes). Ainsi, les fameux actes antimusulmans dont se préoccupe le CFCM représente moins de 0,01% des délits.
Il est difficile de donner une estimation précise pour la population musulmane ; sous-estimons volontairement le nombre de musulmans en prenant le chiffre de un million, pour renforcer notre argumentation. Cela veut donc dire que 0,02% des musulmans sont confrontés à des actes anti-musulmans, donc par opposition, 99,98% ne le sont pas. Même si un acte anti-musulman peut concerner plus d'une personne (par exemple un vandalisme d'une mosquée, qui touche toute la communauté des fidèles), cela montre toutefois que l'immense majorité des musulmans est épargnée par ces actes anti-musulmans. Ainsi, si l'on considère que chaque musulman vit 100 ans, en moyenne, au cours de toute sa vie, un musulman sur 50 sera confronté une fois à un acte anti musulman.
Si l'on prend maintenant notre chiffre de 3,5 millions de crimes et délits, qui se répartit équitablement sur toute la population française, cela fait, en moyenne, 0,05 crime ou délit. C'est à dire qu'en 100 ans, statistiquement, une personne lambda (musulmanes ou non) sera confrontée à 5 crimes ou délits, et donc 50 personnes seront confrontées à 250 crimes ou délits en 100 ans, c'est à dire 250 fois plus que des actes antimusulmans.
Ainsi, à force de se focaliser sur ces actes anti-musulmans, on risque de passer à côté des délits non dirigés vers une communauté en particulier, qui en représente l'immense majorité, et qui consituent des problèmes bien plus graves pour les communautés que l'on prétend défendre. Cette approche a en outre un autre aspect : elle risque de provoquer les maux qu'elle voulait réprimer, par le fait que des personnes n'appartenant pas aux communautés pourraient se demander pourquoi les moyens policiers et judiciaires seraient consacrés en priorité à la lutte contre les actes dirigés vers une communauté précise.
J'ai pris l'exemple de l'islam, mais on pourrait faire la même étude pour d'autres communautés ; ainsi, SOS Homophobie (en feignant de considérer son impartialité) indique 1556 signalements homophobes ; alors que l'Insee indiquait qu'il y a en France 100 000 couples homosexuels, soit 200 000 personnes, cela fait donc moins de 0,1% des homosexuels confrontés à ce genre de problèmes, à comparer avec notre chiffre de délits non communautaires (dont sont également victimes les homosexuels) de 5%.
Enfin, la Commission nationale consultative des droits de l'homme déplore dans son rapport de 2012, 606 menaces et 118 actes racistes, soit 724 actes, à mettre en rapport avec les millions de personnes d'origine immigrées vivant sur notre territoire.
D'ailleurs, le fait que l'immigration, en majorité venant d'outre-Méditerranée, se poursuive au rythme de 150 000 à 200 000 personnes par an, montre bien que les ressortissants étrangers de ces communautés n'ont pas tellement l'air de trouver la situation en France si dramatique que cela.
J'arrête la liste ici, mais on peut supposer raisonnablement que les faits pointés ici se retrouvent à peu près pour n'importe quelle communauté ethnique/religieuse/etc.
Si, bien entendu, être victime d'une insulte ou une attaque xénophobe ou raciste est douloureux, et peut l'être davantage que d'une attaque pour d'autres raisons, et s'il est normal de souhaiter que cela prenne fin, il n'y a pas non plus de raison de vouloir noircir le tableau, au risque notamment de déclencher des tensions communautaires dramatiques. Parce qu'il s'y a une communauté victime, il n'en faut pas beaucoup pour se demander s'il y a une communauté coupable.