lundi 11 mai 2020 - par Denis Szalkowski

Repensons la gauche

En ce jour de célébration de la victoire le 10 mai 1981 de l'homme qui envoya 45 fellagas à la guillotine de 1956 à 1957, je voulais vous reparler de reconquête, de reconstruction d'une gauche qui n'existe plus que dans nos cerveaux malingres.

Un astre mort

Après les deux branlées successives prises en 2017 et en 2019, la gauche de gouvernement n'existe plus électoralement dans notre pays. Malgré - ou à cause de - l'alliance passée avec l'ancien sarkozyste Raphaël Glucksmann, le Parti Socialiste exsangue de militants est à ranger aux oubliettes de l'histoire. Un lointain souvenir pour certains, un mauvais souvenir pour d'autres.

Sur un malentendu...

Je reste convaincu que les élections de Mitterrand et de Hollande, l'arrivée de Jospin se sont faites sur des malentendus. En 1981, le RPR et Chirac voulaient se débarrasser de Giscard. En 1997, l'intuition dévastatrice du Conseiller du Prince aura propulsé la "gauche" plurielle à Matignon. Quant à Hollande, face à Sarkozy, il est passé de justesse, à une semaine de campagne près, malgré un niveau de détestation exceptionnelle de la personnalité de l'ancien Président !

La trahison

Le tournant de la rigueur opéré en 1983, le référendum sur le TCE en 2005 et la ratification du Traité de Lisbonne en 2007 ont produit deux gauches irréconciliables. La majorité d'entre nous qui avons voté NON en 2005 se souviennent encore de ces photos où les deux futurs présidents de la France riaient ensemble dans les colonnes de Paris-Match. Hollande et le Parti Socialiste trahirent la démocratie, en s'alliant en 2007 avec la droite sarkozyste, pour adopter la Traité de Lisbonne au Parlement. Ce copinage malsain et cette proximité idéologique non feinte m'ont décidé à quitter le PS en 2008. La droite et la gauche auront enfanté Emmanuel Macron.

Le trou noir de la pensée

Dès la fin des années 90, les partis de gauche ont aimanté des assistants parlementaires aux compétences très incertaines qui, munis de leurs quelques diplômes issus des universités, puis des écoles de commerce, hors sol, ont investi les appareils. Incapables de faire grand chose d'autre, toutes ces grenouilles ont cherché à se faire plus grosses que les éléphants. Encore empreints de la philosophie politique du XIXe siècle, ils n'ont pas cherché à comprendre les mouvements profonds de la société, incapables qu'ils étaient de la penser. Embourbés dans la représentation de la fabrique, les militants devaient être les pieds, les caciques la tête, les salariés l'encadrement. Une tête vide d'idées faisant appel aux think-tanks néo-libéraux qui ont fait basculer la gauche de gouvernement sur une ligne droitière. Et des militants de moins en moins nombreux dont la seule ambition était de devenir calife à la place du calife. Tous voulaient faire carrière. La politique, dorénavant, devenait l'affaire des professionnels, des assistants parlementaires, des conseillers, des consultants et surtout des communicants. L'émergence des réseaux sociaux et des blogs se chargea de consacrer l'hypertrophie du vide sidéral de la pensée ! Les petites seigneuries féodales locales se chargèrent alors de dissoudre les partis de gauche dans le néant, en les transformant en clubs de supporters. Imaginez que, dans l'Eure, Marc-Antoine Jamet, secrétaire de LVMH et bourgeois au grand cœur à ses heures perdues, fut le 1er fédéral du PS de 2012 à 2017, du fait du nombre d'aficionados encartés à Val de Reuil.

Les diseux et les faiseux

En 40 années, la gauche politique a perdu tous ses repères. Elle est devenue un canard sans tête, dans tous les sens du terme. Il est urgent de se débarrasser de tous ces professionnels de la parlote politique, nés avec une cuillère en argent dans la bouche qui ne connaissent rien à la vie des gens. Dans les partis, la parole d'un militant devrait être supérieure à un de ses représentants et aussi aux salariés qui doivent s'en tenir à un rôle de strict exécutant. Par des statuts rénovés, il faut à tout prix empêcher que les partis soient des machines à construire des professionnels de la politique, en même temps qu'ils doivent permettre la prise en main du fonctionnement des appareils par les bénévoles militants.

La meilleure façon de reconstruire la gauche dans ce pays, c'est d'investir le champ associatif où le bénévolat, le don et l'empathie, la connaissance et l'éducation populaire, la culture et la création, la recherche de l'intérêt général devraient être les moteurs de l'action. C'est dans l'économie non marchande que la gauche peut regagner la bataille des idées et des valeurs en se débarrassant de son rêve mimétique de s'enrichir en dormant.



19 réactions


  • Attila Attila 11 mai 2020 11:00

    Il n’est pas interdit de repenser la justice sociale et la défense des classes populaires sans faire référence à la gauche : les Gilets Jaunes du début l’ont fait.

    .


    • xbrossard 11 mai 2020 11:48

      @Attila

      vous n’avez toujours pas répondu à la question : êtes vous prêt à prendre un placebo pour le covid ?


    • Fergus Fergus 11 mai 2020 13:06

      Bonjour, Attila

      Sauf que « repenser la justice sociale et la défense des classes populaires », c’est bâtir un projet de gauche !

      Encore faudrait-il, pour que ce projet ait quelque chance d’être crédible en vue de conquérir le pouvoir, qu’il lui soit adjoint une dimension écologique au moins égale à l’ambition de justice sociale !

      C’est un tel projet que je défends, le seul capable de faire échec tout à la fois à Macron et Le Pen.


    • Attila Attila 11 mai 2020 20:16

      @xbrossard
      Le cancre insulte les gens et il faudrait répondre à ses questions de merdre : ça va pas, la teuteute ?
      « Sinon un conseil, fermez votre putain de gueule de troll. »
      Lien


    • mmbbb 11 mai 2020 21:11

      @Attila ou en est on des tests randominsés , Les 25 000 morts en France seront contents d apprendre que ces tests randomises ou autres protocoles autorises auraient pu les sauver ! 


  • Clark Kent Séraphin Lampion 11 mai 2020 11:17

    La notion de « gauche » en France a subi un glissement concomitant à l’inondation de la culture anglo-américaine par le cinéma, la télévision et internet.

    Aujourd’hui, le terme « gauche » se réfère au parti « démocrate » américain qui gère la société « libérale » des Etats-Unis en alternance avec le parti « républicain » pour donner l’illusion d’un démocratie et d’un changement possible alors que l’un et l’autre servent les mêmes lobbys en modifiant les dosages de leurs influences.

    Le contenu social du l’ancienne « gauche » française a été remplacé par des pièges sociétaux (féminisme, mariage pour tous, environnement...). Il n’y a rien à « repenser ». Il faut sortir de cette dépendance qui a fait de notre pays une colonie de l’« empire ».


    • Albert123 11 mai 2020 18:24

      @Séraphin Lampion

      la gauche n’est tombée dans aucun piège elle a suivit son protocole : séduire, asservir et prendre le contrôle, c’est dans ses gênes de perverse narcissique et donc son mode opératoire


  • zygzornifle zygzornifle 11 mai 2020 13:38

    Repensons la gauche

    Pour cela il faut avoir un cerveau !!!


  • Albert123 11 mai 2020 18:12

    Pourquoi vouloir repenser une idéologie qui a atteint en l’instant son apogée ?

    la gauche a gagné, nous subissons déjà son mondialisme mortifère, son communautarisme néfaste, son constructivisme débilitant et son totalitarisme idéologique.

    vous voulez la repenser pour récupérer ce vile mâle (blanc) hétéro cisgenre dans son giron et regagner le coeur de ces pourritures de gilets jaunes qui ont eu le malheur de réclamer un minimum de dignité auprès d’une gauche qui les méprise dans son essence ?

    Il n’y a rien à repenser, si le bateau coule c’est uniquement car la gauche à atteint son objectif : celui de fourguer au plus grand nombre sa bouillie idéologique, aussi pourquoi ses mécènes continueraient d’abreuver ceux qui l’incarnent désormais devenus inutiles ?

    a part idiotement croire que les derniers irréductibles se laisseront berner pour faire taire à jamais ceux qui dénoncent l’imposture criminelle qu’est la gauche je ne vois pas.

    nous n’avons surtout pas besoin de la gauche et de ses fausses oppositions vraiment controlées pour un espoir de monde meilleur.

    la gauche n’est pas la solution mais juste un problème supplémentaire qui se superpose aux problèmes de la vie réelle.

     


  • Octave Lebel Octave Lebel 11 mai 2020 18:30

    C’est une lucidité glaçante de la part d’un homme de gauche.

    Y a-t-il des lucidités qui ne soient pas glaçantes ?

    Celle-ci contient sa part de forces, d’énergie et d’espoir. D’élan vital tout simplement.

    Quatre ingrédients redoutables pour ceux qui pensent pouvoir placer définitivement le travail et la créativité des autres êtres humains sous leur tutelle et prioritairement à leur profit.

    Quatre ingrédients (faut-il rappeler que la lucidité est une des multiples formes de l’intelligence individuelle et collective) encore trop dispersés dans nos sociétés mais bien présents qui cherchent tel l’ADN une combinaison féconde qui tarde il est vrai à l’échelle de nos vies légitimement impatientes. Le chemin est long et tortueux mais il y a un chemin toujours en construction qui vient de loin.

    Merci pour cette réflexion.


  • mmbbb 11 mai 2020 20:26

    Je trouve incongru de refaire le proces de Mitterrand désormais , Ce fut un homme retors fourbe et peut etre le plus cynique de la 5 eme . Par essence , il ne fut pas de gauche mais il faut reconnaître que la droite notamment celle des campagnes d alors n etait pas tres ouverte.

    Mitterrand pouvait aisément se presenter comme un homme politique ,novateur notamment en matiere de culture Il fut l initiateur du Louvre alors que la droite n en avait rien a battre . Je me rappelle de la crise de nerf de Chirac lors de la proposition de la pyramide de Pei qui aurait défiguré cette cours alors que celle ci servait de parking La droite francaise a une dose d itiotie 

    Il aurait fallu que Pean ecrive son livre en 1975 mais la gauche s est tu, une omerta entretenu avec une partie de la droite qui voulait savonner la planche de Giscard Un des coups de genie de la gauche est d avoir politiser l enseignement et de nous faire accroire que la droite etait le mal absolu.

    Quoi qu il en soit , la gauche portait en elle le germe de sa destruction puisqu elle n avait pas prédit l effondrement de l est et qu elle etait enfermée idéologiquement. Par ailleurs sous l ere Mittérrand , la micro informatique allait changer le monde du travail et la Chine s éveillait , Le monde commencait a changer et l economie d alors etait un modele caduc 

    Elle se fait debordée desormais par les mouvements portant des « projets sociétaux » groupe de pression LGBT et écologistes radicaux Elle est incapable d avoir une force de proposition autonome , on le constate en matiere d immigration incontrôlee , le refus de voir le délitement de cette societe , la montée de la violence dont pourtant elle fustigeait le delire securitaire de droite , une soumission aux ecolos , et l achat des voix par la distribution de l argent public aux travers d association qui viennent nous les casser a longueur d année un exemple le CRAN , un renoncement aux valeurs republicaines , la laicite désormais qui n est plus normative mais se resume depuis Mittérrand par l acceptation de « l altérité » en masquant la montée du communautarisme .

    Il n y a plus rien a attendre .Les deux derniers présidents dit de gauche l on démontré .


  • ddacoudre ddacoudre 11 mai 2020 22:00

    bonjour

    une analyse succinte mais juste. en 88 je qualifié déjà mon parti d’attrape mouche, c’est grâce à cela que mittérant a pu être réélu. espérant en vain qu’il redevienne socialiste je l’ai quitté en 95. il a fallu attendre hollande pour qu’il reconaisse être devenu une social démocratie.

    mélenchon l’a quitter en 2008, jai mis quelques espoir en lui pour retrouver un parti socialiste et non un parti qui gére le capitalisme, mais la voie est difficile car le PS a pourri l’idée du socialisme.

    cordialement http://ddacoudre.over-blog.com/2015/02/il-faut-que-l-ump-et-le-ps-implose-le-25-aout-1976-raymond-barre-devient-premier-ministre-son-objectif-arreter-l-inflation-qu-il-dec


  • Jonas 12 mai 2020 09:04

    La place de la gauche , est dans l’opposition et seulement dans l’opposition , parce qu’elle peut faire des grands discours utopiques, sans être affrontée a la réalité. 

     Car une fois au pouvoir , elle oublie tout , sauf , sa marotte , les impôts et les taxes dont elle est es qualité. 

     Aujourd’hui en France 50% de familles , ne payent pas d’impôts sur le revenu. La France est championne du monde des prélèvements obligatoires et de distribution , que peut faire la gauche de plus ? Supprimer les riches c-à-d , tous ceux qui ont plus de 4000 euros de revenus 

     Nationaliser toutes les entreprises au début puis de les subventionner après comme la SNCF, Air France, Crédit Lyonnais , avant de changer de nom, etc doubler le nombre de fonctionnaires puis solliciter le FMI.


    • Denis Szalkowski Denis Szalkowski 14 mai 2020 20:39

      @Jonas C’est très caricatural de dire que la gauche ne serait pas dans la réalité, quand on voit la manière dont la gestion de la France a été réalisée sous Giscard, Chirac, Sarkozy et Macron. Sans doute, êtes-vous un homme de droite ?


    • Jonas 15 mai 2020 12:39

      @Denis Szalkowski
      Si Giscard , Chirac, Sarkosy et Macron , sont arrivés au pouvoir par les urnes , cela montre que la gauche , fait illusion dans l’opposition et une fois au pouvoir , elle est chassée , pour son manque de réalisme et d’adaptation .

       Sa mantra sont le matraquage des entreprises , les augmentations des taxes , et les dépenses a tout bout de champ sans tenir compte , que pour distribuer , il faut produire. 

      La gauche au pouvoir a poussé même les lycéens à manifester pour leur retraite , alors , qu’ils ne savent pas ce qu’ils seront à l’heure du troisième âge. 

      Pour votre gouverne @Denis Szalkowski, de tous les gouvernements qui se sont succédés , celui, qui a privatisé le plus est celui de Jospin. Gouvernement auquel a appartenu Mélenchon. 

      La gauche , dans l’opposition dit une chose et au gouvernement fait autre chose « Mon adversaire est la finance » disait un ancien président de gauche. 


    • Denis Szalkowski Denis Szalkowski 24 mai 2020 15:59

      @Jonas

      Donc, vous êtes bien un homme de droite.

      Les impôts n’auraient, selon vous, jamais augmenté sous la droite qui, depuis 1974, a gouverné la France (en intégrant Macron) 26 ans contre 15 à la gauche ?


  • chantecler chantecler 12 mai 2020 09:05

    Droite, gauche , RN ....

    De toutes façons la politique c’est (devenu) l’art de plumer la volaille .

    Pour certains il reste quelques plumes sur le croupion , avec d’autre l’endroit est à vif .

    Le système : mondialisation , néolibéralisme est déterminant .

    Le souci c’est de savoir s’il va s’effondrer de lui même ou s’il faut l’aider .


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