mardi 15 avril 2014 - par ZEN

Reterritorialisons ?

Questions sur un (vieux) projet.

 Découpage et charcutage sont les deux mamelles de la France.

 On prend les ciseaux, pour un nouveau découpage.

 Découpage ou charcutage  ?

 On revient aux vieilles recettes...sans grande originalité.

 Technocrates, à vos crayons ! On redessine la France....

 Madame Labranchée s'est collée au mécano territorial.

 Les départements, héritages de la Révolution Française passeraient-ils à la trappe ? Combien de services importants de proximité disparaîtraient, surtout si on fait fondre les régions ? La proximité citoyenne avec les pouvoirs et les services territoriaux n'y gagnerait rien.

 Combien de régions ? 8 ? 15 ? 22 ?.. Pourquoi pas 12 ou 9 ? L'arbitraire étatique et les querelles de barons vont-ils faire la décision, d'autant plus qu'au plus haut sommet, les argument semblent bien faibles. "Il n'y a pas de raison que (ce nombre) soit le même dans quelques années", a indiqué François Hollande. C'est tout ?

 Pourquoi ne pas revenir à la plus grande simplicité : 2 mégarégions : revenir à l'antique distinction ethno-linguitique : les pays d'Oc et d'Oil...(lol !)

 Des économies ? Vraiment ?

 La réforme territoriale ne rapportera rien (dans le meilleur des scénarios)

 "Les régions ne pèsent que 2% de la dépense publique, explique à FTVi Claude Gewerc, président PS de la région Picardie. "Où sont les marges de manœuvre économique ? Si c'est là que François Hollande veut faire des économies, il s'est trompé..."

 ".... Il y a quasi consensus pour considérer que la réduction du nombre de régions n'aurait guère d'impacts ni en termes d'économies budgétaires, ni en termes d'efficacité de l'action publique..."

 Il y a trop d'idées reçues sur la décentralisation.

Arrive-t-on à un degré 0 de la géographie ?

 La question (des régions)n’est pas nouvelle, la réponse non plus : Pierre-Joseph Proudhon proposait 12 provinces (1846), Auguste Comte 17 intendances (1854), Frédéric Le Play 13 provinces (1864), Ferdinand Lepelletier 27 provinces (1896), Pierre Foncin 32 régions (1898), si on s’en tient au seul XIXe siècle…

Se focaliser sur le nombre est malheureusement un moyen d’esquiver la problématique de fond : des régions pourquoi faire ?...

   La régionalisation en France s’oriente désormais du haut vers le bas. Elle devient de plus en plus l’affaire de l’État central passant d’une logique jacobine à une logique girondine. Celle-ci est formalisée par le régime de Pétain puis consacrée par le fédéralisme européen et le principe de subsidiarité, social-chrétien puis social-démocrate, triomphant après la Seconde guerre mondiale.

De la création de la Fédération Régionaliste Française (F.R.F.) en 1900 jusqu’à l’adoption des 21 régions en 1955, on recense des dizaines de projets de régionalisation, dont on peut extraire les plus emblématiques. La proposition de loi déposée par le député Jean Hennessy le 29 avril 1915 s’inspire des idées du géographe Vidal de la Blache, également membre de la F.R.F. Elle prône 17 régions organisées autour de grandes villes (les futures « métropoles »). Alors ministre, le député auvergnat Étienne Clémentel instaure en 1919 dix-sept « groupements d’intérêts régionaux » organisés d’après le territoire des chambres de commerce.

 Vichy invente 19 régions. Sous le régime de Pétain, la loi du 4 avril 1941 institutionnalise pour la première fois des régions en France, soit dix-neuf régions-provinces dirigés par des préfets régionaux et des chambres régionales cooptés. À trois exceptions près (l’Auxerrois, l’Yssingelais, le Viganais) et contrairement à la quasi-totalité des projets précédents, le découpage régional ne touche pas les départements. Il les regroupe en effet, un procédé que l’on retrouve jusqu’à nos jours.

Sa logique prend en compte les fonctions économiques, mais aussi la dimension culturelle de concert avec les mouvements régionalistes (Bretagne, Corse, Occitanie et Provence notamment) et la réactivation du folklore. Avec la circulaire Ripert (octobre 1940) et l’arrêté Carcopino (décembre 1941), l'Etat français autorise pour la première fois à l’école des « cours de langue dialectale ».

Le découpage régional du régime de Pétain applique des idées remontant à Charles Maurras ou à Maurice Barrès, lequel est l’inventeur du terme « régionalisme » en 1899, et notamment véhiculées par la F.R.F. dont la figure emblématique, Jean Charles-Brun (1870-1946), devient membre du Conseil national sous Vichy....

  _______________________ La donne change depuis le krach de l’économie financière en 2008. Les banques nationales, européennes et internationales flouées par leur spéculation financière réclament le paiement de leur monumentale ardoise auprès des États, donc des contribuables-citoyens. Les grandes infrastructures utiles au capital étant désormais réalisées, il faut désormais « faire-des-économies » et « rembourser-la-dette ». Pour l’État, le moyen le plus simple est de couper dans les budgets des services publics et de taper dans le mille-feuille politico-administratif : les départements et les régions en font logiquement les frais. C’est le seul sens que comporte l’actuel projet du gouvernement Valls, le seul.

 Foin d’imagination, fichtre d’adapter les collectivités locales et régionales aux bassins de vie et d’emploi, au diable un redécoupage des départements, bref adieu l’innovation. Non, le plus simple pour la technobureaucratie soutenue par des politiques en panne d’inspiration, c’est de jouer à nouveau au mécano territorial : on ajoute des régions les unes aux autres pour faire de grandes institutions, on les fait passer de 22 à 11. Autrement dit, on divise par deux, comme une poire. C’est le degré zéro de la géographie..."

 La faisabilité d'un tel projet est semée d'obstacles politiques et économiques.

L'histoire le montre. On l'a vu à propos de l'Alsace.

 Si un unité bretonne semble facile à constituer, d'autres fusions sont problématiques. Certaines parties du territoire n'ont pas vocation à être rattachées à telle région ou à telle autre : La Picardie, par exemple, va-t-elle vallser ?

              On peut se demander si cette réforme lourde, qui rapportera si peu et qui pourra coûter cher dans sa mise en place, n'est pas actuellement une diversion pour ne pas effectuer d'autres réformes de fond plus importantes et plus urgentes. La réforme fiscale, qui pourrait rapporter beaucoup, attend toujours...Et ces 50 ou 60 milliards d'évasion fiscale qui manquent au Trésor chaque année, faute de mesures courageuses et de moyens conséquents ?

 Pour ne pas parler de divers gaspillages et argent prêté sans contre-partie à des entreprises qui se contentent d'engranger les effets d'aubaine.

 Certes, le train de vie de certains départements et régions pourrait facilement être réduit (dépenses en communication et de prestige, investissements discutables de baronnies locales ...), leurs missions mieux définies pour éviter doublons et concurrence, mais pourquoi aujourd'hui mettre en chantier un système qui ne marche pas si mal, qui coûterait cher en temps et en argent à remettre en chantier, qui va ouvrir des débats sans fin, alors qu'il y a d'autres urgences.

 On ne change pas un système qui ne marche pas si mal.

Et puis notre histoire propre ne peut se comparer à celle d'autres pays, comme l'Allemagne, dont les Land, très divers et parfois très petits, s'enracinent dans l' histoire d'un pays il y a peu encore non unifié,morcelé (royaumes de Bavière, de Saxe, etc...jusqu'en 1870) et remodelé après 1945 par les Alliès.

 On peut soupçonner l'Etat de vouloir mieux répartir l'impôt en transférant aux nouvelles régions un pouvoir plus grand sur ce point. On peut y voir aussi l'influence de Bruxelles, qui pousse à la régionalisation, pour affaiblir les pouvoirs centraux, les Etats, que J.Monnet déjà considérait comme les obstacles à la construction de son Europe rêvée, politiquement fédérée, qui ne semble plus qu'un mirage...



13 réactions


  • Michel DROUET Michel DROUET 15 avril 2014 11:47

    Bonjour ZEN

    « On ne change pas un système qui ne marche pas si mal. »

    Pour avoir vécu le système de l’intérieur, je peux vous dire qu’on est loin du compte !

    Doublons entre collectivités sur des politiques valorisantes pour les élus (l’économie, bien sûr, pas le social qui ne rapporte rien politiquement), financements croisés pour les dépenses de prestige (les grands stades ou les équipements culturels) avec dans chaque collectivités des élus et des fonctionnaires qui travaillent sur le même dossier, dépenses de communication, à la gloire des Présidents ou Maires (0.32 €/habitant pour les seuls conseils généraux, soit plus de 200 Millions d’euros par an), sans parler des indemnités et frais divers des élus des mêmes conseils généraux, soit environ 150 Millions d’euros par an, sans compter les budgets de fonctionnement des assemblées départementales (pareil pour les Régions).

    Quant à la proximité entre les élus et les citoyens...je vous laisse juge.

    Ceux qui sont le plus vent debout contre toute réforme, ce sont les élus avant tout, gauche et droite confondue qui craignent de perdre une part de leur fromage, pas les citoyens qui commencent à entrevoir le gaspillage de leurs impôts.

    Si vous souhaitez conserver le système d’empilement des collectivités, alors ne vous plaignez pas de payer trop d’impôts locaux.

    Enfin, s’agissant de la peudo influence de Bruxelles qui serait derrière cette réforme, je ne crois pas à cette théorie du complot et je pense que les citoyens français sont capables d’exiger des réformes pour leur Pays.


  • Michel DROUET Michel DROUET 15 avril 2014 11:56

    Re-ZEN

    « Les départements, héritages de la Révolution Française passeraient-ils à la trappe ? »

    Cette phrase beaucoup reprise par les opposants à toute réforme est de l’enfumage.

    Les départements, héritage de la révolution ne disparaîtront pas. Ils resteront toujours avec à leur tête les Préfets qui continueront à diriger les services de l’Etat (Education, police, justice,...).

    C’est le Conseil Général (ou départemental) qu’il est prévu de supprimer, c’est à dire l’assemblée des conseillers généraux, les compétences qu’il exerce étant transférées à d’autres collectivités (Région, intercommunalités, communes).

    Il faut être précis.


  • ZEN ZEN 15 avril 2014 12:15

    Bonjour Michel
    Merci pour votre réponse chargée d’expérience.
    Je me suis contenté de lancer une bouteille à la mer, pour un retour d’expériences vécues
    J’ai insisté sur les dépenses en communication, le plus souvent de prestige.
    Je soupçonne bien les résistances des baronnies locales et la défense de leur fromage
    Je vois mal les intercommunalités prendre en charge les services techniques et sociaux divers et variés. Comment pourront-ils être assurés dans des zônes très peu urbanisées, comme la Haute-Marne, par exemple ?...
    Il reste bien des points en suspens...
    Bien à vous


    • Michel DROUET Michel DROUET 15 avril 2014 16:59

      Bonjour ZEN

      Les intercommunalités actuelles de 2 ou 3000 habitants qui n’ont aucun moyens et ne servent à rien et ne pourront pas prendre de nouvelles compétences. Je suis bien d’accord avec vous.

      C’est pourquoi les intercos doivent être constituées autour des bassins de vie de habitants et non pas de manière artificielle comme c’est le cas actuellement, c’est à dire au bon vouloir des élus, sans recherche de cohérence et souvent par affinités politiques.

      On peut imaginer à terme que des départements n’aient que 2 ou 3 intercommunalités (à l’échelle des Pays) au lieu de 15 ou 20 actuellement. Dès lors elles seront en capacité de gérer de nouvelles compétences.


  • Rincevent Rincevent 15 avril 2014 13:15

    Tout ça a démarré avec la loi Defferre sur la décentralisation. Un point de vue intéressant par un haut fonctionnaire qui y avait participé : http://www.slate.fr/tribune/50571/lois-defferre-decentralisation-trente-ans


  • alberto alberto 15 avril 2014 14:19

    Salut ZEN,

    Tels qu’on connait nos zénarques, y vont nous pondre, sous couvert d’économies, une machine cornecul où le pékin ne saura plus à qui s’adresser pour renouveler, par exemple, sa carte d’identité, ou établir une demande de subvention : de belles parties de ping-pong administratif en perspective !

    Et une belle gabegie à venir...

    Et pis, dans 6 ou 8 ans, on aura changé de gouvernement, alors devine ce qu’on fera ? 


  • ZenZoe ZenZoe 15 avril 2014 15:09

    Moi franchement j’attends de voir.
    Déjà, dans les années 50, avant même d’établir la carte des régions que nous connaissons, tout le monde ou presque pensait qu’il y en avait trop. Et ça s’est fait quand même ! Alors maintenant qu’il faut tout détricoter et refaire le tricot, ça promet. J’ai comme un gros doute.
    Mais si jamais on arrive à une fusion « sur le papier », je fais confiance aux personnels et élus concernés pour entamer sournoisement une résistance à la Gandhi, exactement comme celle qui s’est produite lors de la « fusion » ANPE- ASSEDIC, où toutes les agences continuent de fonctionner exactement comme c’était avant, sauf que les contribuables ont entre temps payé des millions pour le changement de logo et les formations des agents...


  • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 15 avril 2014 16:49

    Faut faire une seule grande région ,et Paname entourée d’un grand mur construit sur le périf afin d’empêcher les paristiniens de venir nous emmerder ...


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