lundi 12 septembre 2005 - par nico

Statistiques et médias, une mauvaise alchimie

Fumer augmente les risques d’avoir un cancer. Manger gras augmente les risques de maladie cardiaque. Manger épicé augmente les risques d’avoir des hémorroïdes. Ne vous êtes-vous jamais posé de questions à propos de résultats scientifiques présentés dans la presse et exhibant des chiffres parfois abscons ?

Nous parlons ici en particulier des résultats statistiques, souvent en médecine, sur le modèle que l’on pourrait appeler du "résultat général" : x augmente les risques de y de z %. Il semble que, pour tout x et y, il soit possible de faire une publication scientifique pour décider de la valeur de z. Nous aussi, jouons avec les chiffres.

Plus clairement et par l’exemple, disons que x est "passer au moins deux heures par jour devant un ordinateur" et y "avoir un gros bouton vert sur le bras droit". Alors trouvons un échantillon de 1000 personnes dont 500 passent plus de deux heures par jour devant un ordinateur. Il nous suffit de déterminer z, et de publier ça dans un journal. Ensuite, la presse généraliste s’emparera du "chiffre", et dénoncera les risques que nous fait prendre notre nouvelle société électronique. Ce sera scientifiquement prouvé, nos enfants auront plus de gros boutons verts sur le bras droit que notre génération ! Une révélation, un scoop.

Rassurez-vous, il est probable que z vaille 0, c’était pour l’exemple. Mais en voici d’autres, des exemples, réels :

  • x = "la cigarette", y = "présenter un excès de graisse à la taille", z = 1800 [source]
  • x = "manger des frites entre 3 et 5 ans, plus d’une fois par semaine", y = "développer un cancer du sein à l’âge adulte", z = 27 [source]
  • x = "l’obésité", y = "développer un cancer du pancréas", z = 72 [source]
  • x = "naître d’un père âgé de plus de 50 ans", y = "devenir schizophrène", z = 200 [source]
  • x = "fumer", y = "contracter une dégénérescence maculaire", z = 100 [source]
  • x = "le traitement antirétroviral", y = "’infarctus du myocarde", z = 17 [source]
  • x = "la prise de l’antidépresseur Seroxat", y "suicide", z = 600 [source]
  • x = "prendre la pilule", y = "développer un cancer du sein", z = 200 [source]

C’est en général alarmant. Par exemple, concernant cette étude sur les effets de la pilule, et son traitement médiatique, il y a de quoi réagir. La "découverte" du lien entre cancer du sein et prise de la pilule contraceptive, a été largement exploitée par la presse généraliste cet été. Les médias ont eu très peu de recul par rapport à cette information et ont paru ignorer les effets que peuvent avoir de telles annonces sur les femmes concernées. Même si, admettons-le, ça n’est pas une généralité puisque l’Humanité par exemple citait un médecin :

« Ce n’est pas une nouvelle », commente Marie-Claude Zalamansky, médecin et présidente départementale du Mouvement français pour le planning familial, agacée par ce qu’elle considère comme un faux scoop médiatique. « Ça ne changera rien du tout à la façon de prescrire ce médicament », conclut-elle [...]

Finalemet, c’est cela. Evoquer de telles statistiques dans la presse constitue de faux scoops. Que signifie le fait que les jeunes filles qui mangent des frites présentent plus de risques de développer un cancer du sein ? Les parents doivent-ils priver leur fillette de frites ? Le fait est que pour tout x, on trouvera un y tel que z soit supérieur à 0. Pour ceux qui n’aiment pas le formel, disons que, quoi que vous fassiez, vous augmentez vos risques pour une quelconque chose. Après tout, plus vous vivez plus vous augmentez vos risques de mourir.

Ce mauvais traitement médiatique des résultats scientifiques est d’autant plus frappant qu’il vient de paraître une étude, avançant que plus de 50 % des études statistiques sont probablement fausses (voir New Scientist). Remarquez que c’est quelque peu paradoxal, à la manière du paradoxe du menteur, et que les pourcentages traduits plus haut dans cette note sont peut-être faux également. Néanmoins, il en ressort que si l’on prend au hasard deux tels articles scientifiques, probablement l’un d’entre eux aura des résultats erronés.

Quel crédit leur apporter alors ? Solomon Snyder, neurophysicien et éditeur de Proceedings of the National Academy of Sciences déclare :

« Lorsque je lis ce genre de littérature, je ne la lis pas comme le texte d’un livre. Je la lis pour en retirer des idées. Donc, même si quelque chose est faux dans l’article, s’il présente les bases d’une idée nouvelle, c’est quelque chose d’important. »

Mais comment les journalistes lisent-ils ce genre de littérature généralement ? Comme des scoops potentiels scientifiquement fondés. Le public visé, lui, n’a plus qu’à avoir peur de vivre. Malgré la volonté initiale d’informer, cela ressemble plus à du terrorisme médiatique, avec la paranoïa qui l’accompagne. Alors faites attention, vous prenez des risques, ils l’ont dit dans les journaux...



8 réactions


  • Evelyne Bessière (---.---.192.69) 12 septembre 2005 23:26

    Et cancériène de type 1 ça veut dire Cancérigène de type 1 c’est à dire de plus haut degré cancérigène. Que va faire la recherche, que vont faire les industries pharmaceutiques ? Faire comme ci !Attendre ! C’est un grâve problème. Cherchons comment le résoudre au lieu de dire : y a pas de problème. Qui va prendre le problème en face ? Les femmes concernées sont en droit de savoir les effets de leur contraception. C’est un choc d’avoir un cancer du sein chez une femme de 50 ans. Dès la puberté les filles prennent la pillule, pour réguler leurs règles pour diminuer leur problèmes de peau. Elles utilisent en plus des préservatifs au moments de leurs premiers rapports sexuels ( on peut l’espérer en tout cas).Est ce necessaire de prendre la pillule si tôt ? A quel prix ! Il faut y réfléchir sérieusement. Je comprend bien que la vente de pillule rapporte beaucoup d’argent aux industriels. Qu’ils cherchent. Qu’ils proposent autre chose. Qu’ils donnent la pillule aux hommes ! Ou est le progrès. Plus la science progresse moins la société suit une démarche scientifique. C’est grave. Bonsoir


  • nico 13 septembre 2005 10:33

    Ma note doit être mal écrite. Le propos n’était pas la pilule cancerigène, la cigarette aveuglante le brocoli anti cancérigène ou le vin anti maladie cardiaque.

    Il se trouve que les de tels résultats exposés dans la presse sont souvent inachevés, et probablement (éventuellement) faux. Laissons d’abord les scientifiques concernés les interpréter. Lorsqu’il y aura des certitudes, il y aura lieu d’en parler dans les médias. Pour reprendre le commentaire précédent, voilà le modèle d’une société qui suit une démarche scientifique.


  • Evelyne Bessière (---.---.196.170) 13 septembre 2005 17:31

    Les scientifiques ont rendu leur rapport !!! « Pour la première fois, le risque est officiellement reconnu. Le CIRC (Centre international de recherche sur le cancer), dépendant de l’OMS, vient de classer la pilule contraceptive parmi les produits cancérogènes du « groupe 1 », ceux dont l’action est « certaine ». Une donnée à prendre désormais en compte, sans oublier pour autant les autres causes des cancers, connues, et méconnues. » voir adresse ci dessous. J’ai regardé l’emission de Thalassa l’autre soir sur Muroa et les essais nucléaires. Les archives sont encore bloquées. La population locale, les officiers qui étaient sur le site sont encore en procès. Cancers Cancers et Cancers. On peut penser que les scientifiques et les politiques n’étaient pas au courant des effets des emissions nucléaire dans l’atmosphère. Pas du tout !Ont-ils informé la population ? Pas du tout. La population a t-elle eu le choix de partir ? Non puisse qu’elle n’était pas informée.

    La pilule est cancérigène et il faut informer la population féminine. Il faut qu ’il y est un suivi, une réflexion sur cette méthode contraceptive, qui n’est pas la seule. Il peut y avoir des périodes de la vie d’une femme ou elle serait prise (5ans) alternées avec des périodes de sevrages. Enfin c’est à réfléchir. A vrai dire je ne crois pas que nos dirigeants sont prêts. la majorité ne sait pas ce qu’est une cellule. Alors l’action des hormones dans le corps !!! Faut pas rêver. Enfin comme d’habitude, chacuns , chacunes doient se débrouiller pour faire le tri dans tout ce qu’on nous propose. Faut pas compter sur les hautes sphères !!! Bonsoir.


  • Evelyne Bessière (---.---.196.170) 13 septembre 2005 18:15

    Encore une petite réflexion dans le même genre sur un sujet différent : Que s’est-il passé sur les connaissances à propos du prion de la vache folle transmissible à l’homme. Y a une question vraiment intéressante : Comment le prion passe des voies digestives (on le mange) au voies nerveuses( il rend fou) ? C’est simple et logique comme question. Par le sang ? Par les nerfs ? Par les cellules du corps ? Par la lymphe ? Faut bien que ça passe par quelque part. Ce n’est pas extra terrestre !!! Et bien comme les scientifiques n’ont pas les outils pour le mettre en évidence, ils concluent : on ne sait pas. Que s’est il passé dans les abatoirs, ils ont suprimé la moelle épinière et les abats !!! Pas les nerfs, pas le sang pas la lymphe. Tant que cette question n ’avait pas été résolue on ne pouvait pas vendre de la viande de boeuf !!!! Et poutant ! Si vous êtes au courant des avancées sur la question, n’hésitezpas. Que va t-il se passé pour cet épineux de la pilule cancérigène ? Bonsoir


  • Michelle (---.---.5.9) 13 septembre 2005 20:12

    tout à fait d’accord avec vous : c’est un scandale de se contenter de dire que c’est cancérigène, je sais de quoi on parle, j’en ai eu un grâce à la pilule à la mode quand j’avais 30 ans (il y a trente ans), mais pourquoi les médecins sont-ils si réticents à prescrire et installer le stérilet, c’est tout de même plus sûr ?


  • pqs (---.---.19.224) 8 octobre 2005 16:42

    De plus, il est très aberrant comment on transforme les corrélations en causalités. Une corrélation entre tabac et obésité peut être due à que le tabac provoque l’obésité ou à que le tabagisme et l’obésité ont une cause commune, par exemple, une manque de culture qui ferait que les gens prennent de mauvaix habits.

    Une corrélation n’implique toujours une causalité ! Le monde est très complexe et il est très difficile de comprendre les chaînes de causalité.


  • Martine Schwarts (---.---.75.141) 8 octobre 2005 18:00

    A propos de pilule et cancer : les médecins disent que les femmes qui ont des enfants sont mieux protégées contre le cancer du sein. Alors : cancer ou enfants, il faut choisir... pourtant je connais un tas de femmes qui ont et des enfants et un cancer du sein. Que font les statistiques : les enfants donneraient-ils le cancer ?! Voilà à quelles absurdités on aboutit qd on prend tout à la lettre !


  • prudence (---.---.62.229) 28 mars 2006 06:51

    Je pense que beaucoup de gens sont bien conscient des risques de cancer avec la pilule mais l’affirmer entrainerais trop de remous.Il est malheureux que seulement quelques medecins osent dire tout haut ce qu’ils en pensent et plusieurs d’entre eux se font meme ridiculiser.J’ai ete frappee par le cancer du sein il y a 1 an,j’ai voulu comprendre...J’ai donc beaucoup lu sur le sujet et je pense avoir trouver certaines reponses.J’ai pris la pilule a l’age de 15 ans pour diminuer des douleurs menstruelles insupportables et j’ai du continuer par la suite car c’etait le seul moyen connu des medecins.J’ai donc pris la pilule pendant une vingtaine d’annee avec la benediction des medecins qui me rassurais chaque fois que j’osais mettre en doute l’innocuite de cette pilule.Avec le recul,je peut dire que je deconseille vivement la prise a long terme de la pilule ainsi que la prise a un trop jeune age.L’alcool et la pilule ne font aussi pas bon menage ;augmente le niveau d’oestrogene de 300% creant une surcharge pour le foie responsable d’eliminer les surplus. On dois aussi a tout prix gerer son stress,ce que j’ai oublier de faire.Cela debalance le systeme hormonal sans compter tout le reste.Une bonne facon est de marcher a l’exterieur d’un bon pas.L’exercice diminue le risque de cancer.Pour terminer une bonne alimentation est primordiale. Je pense que l’on dois absolument se pencher serieusement sur le phenomene du cancer du sein qui s’en viens une epidemie selon les dires de ma chirurgienne.La prevention est de mise et je pense qu’elle commence par une juste information non biaisee par des justifications economiques. Une survivante ...


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