Terrorisme : de l’ambiguïté des concepts
Il existe en France une loi Avia (24 juin 2020), visant les contenus haineux sur les réseaux sociaux, où se déchaînent trop souvent propos injurieux, menaces, antisémitisme et racisme.
Aucun pouvoir, aucun gouvernement n’est parfait. Et l’injustice ressentie par certains, ou par des groupes, incite à la colère, qui déborde parfois en haine.
La première injustice se trouve dans la Bible. Caïn tue Abel par jalousie. Dieu préférait ce dernier qui lui procurait de la bonne viande bien rôtie, au fumet mettant l’eau à la bouche. C’est la symbolique de l’histoire humaine : l’injustice de Dieu à l’égard de Caïn qui ne pouvait offrir à la divinité que légumes fades et quelques fruits.
Le terrorisme est une barbarie, c’est certain. Il n’y a aucune déclaration de guerre, il tue sans prévenir, n’importe où, n’importe quand. Les terroristes sont-ils encore des humains ?
Mais l’injustice est humaine. L’Histoire se soucie peu de ce qui est juste, et ce sont le plus souvent les vainqueurs qui l’écrivent. Gare d’Austerlitz à Paris, gare de Waterloo à Londres.
J’ai vécu ma jeunesse en Algérie pendant les "Évènements". Ainsi appelait-on, à l’époque la guerre d’indépendance de l’Algérie. Dans les bus, les vitres étaient grillagées afin que les grenades, lancées par les "fellaghas" n’y pénètrent pas. Avant, cela faisait de nombreux morts, pieds noirs et arabes, mélange des sangs.
Chaque jour je lisais dans le journal les fermes attaquées, les occupants tués, les femmes violées. Un jour je suis allé chez le coiffeur à vélo. Je pris la rue Tiers près du cours Bertagna à Bône (Annaba aujourd’hui). J’avais dépassé la boucherie « Grec Frères » d’une cinquantaine de mètres, quand j’entendis une explosion. Une bombe dans un sac posé à terre n’avait attiré l’attention de personne. Jusque sur le trottoir, du sang. Humain, mélangé à celui de l’étal. Pour les uns, c’était l’œuvre de résistants, des héros. Pour les autres c’étaient des actes barbares commis par des terroristes.
Trois ans plus tard, après les accords d’Evian, avec mes parents, nous fîmes partie des "rapatriés". Parmi les terroristes d’hier, certains furent chefs d’Etat, ministres, chefs de Wilaya, président de tribunal, commissaires de police, etc.
Il est arrivé, et il arrivera peut-être encore dans ce monde, qu’un terroriste soit torturé à mort pour lui faire avouer le nom de chacun de ses comparses ; autant d’actes de terrorisme en moins. Et après le changement de pouvoir, son nom sera donné à la principale rue d’une grande ville.
Ainsi va l’Histoire. Plus le sentiment d’injustice est pressant, plus le fanatisme risque d’imprégner le mental.
Les animaux, certes doivent survivre et donc manger. Le meurtre est dans l’ADN des carnivores. Mais il est extrêmement rare qu’un animal tue un membre de sa propre espèce, à la différence de l’"homo sapiens", une exception au sein du monde vivant !
Philippe Annaba, auteur de « Journal d’un anthropophobe ».