vendredi 22 avril 2011 - par
Un dessin pro-islamiste dans « Le Canard enchaîné » !
On reste surpris de voir comme, en 2011 encore, le voile islamique peut avoir des défenseurs inattendus qui avancent à visage découvert ou masqué. Cet instrument d’asservissement ostentatoire des femmes ne devrait-il pas pourtant faire l’unanimité contre lui en France et en Europe, à l’exception des croyants fanatiques ? Un dessin de Lefred Thouron, paru dans Le Canard Enchaîné du 13 avril dernier, illustre cette attitude complaisante.
Malgré la gaucherie rébarbative du trait de crayon propre à ce dessinateur, la scène campée reste reconnaissable : un plan d’ensemble montre, sur une plage, un policier en train d’enjoindre à une femme totalement nue d’enlever le haut de son tchador qu’elle a conservé pour se voiler la tête : « La plage est un lieu public », lit-on en titre. « Retirez-ce voile, je vous prie… », commande l’agent.
Le choc du paradoxe
Le choc du paradoxe a été choisi pour cueillir le lecteur à froid et le faire s’esclaffer : est-ce bien par son couvre-chef que la dame contrevient à la loi ou par son exhibitionnisme ? En se préoccupant de la présence d’un voile, ici, et non de son absence, là, le policier n’est-il pas la métonymie d’un monde devenu fou qui inverse l’ordre des valeurs ? L’auteur et le journal qui le publie, entendent apparemment traiter du voile islamique dont la loi d’interdiction dans l’espace public vient d’entrer en vigueur, sur le mode comique. Mais les ingrédients de ce prétendu comique atteignent-ils leur but ?
Un gag d’une invraisemblance outrancière
Par une mise hors-contexte absolue, la scène de farce choisie recule, en effet, les bornes de l’invraisemblance au-delà du raisonnable. Imagine-t-on une femme soumise à l’intégrisme islamiste venir bronzer sur une plage publique ? Quand bien même elle aurait échappé aux chiens de garde de sa famille, s’exhiberait-elle nue en gardant le haut de son tchador au risque d'alerter un islamiste de passage ? Dès lors, l’intervention du policier est totalement inconcevable et donc relève de la fiction, voire du délire.
Des contradictions dévoyées en symptomes pathologiques
Cette invraisemblance outrancière paralyse du même coup le sourire attendu. Les contradictions des personnages qui devraient le provoquer, perdent toute consistance à ne plus être crédibles : ils deviennent plutôt les symptômes d’une pathologie qui ne fait pas rire du tout. Une baigneuse nue sur une plage qui garde seulement sur la tête son tchador islamiste, suscite des interrogations sur sa santé mentale. Et l’intervention de l’agent qui la somme de le retirer, apparaît comme inappropriée à la situation pathologique à traiter. On a plutôt envie d’appeler le SAMU pour tous les deux.
L’aveuglement d’un parti pris islamiste inavoué
Comment expliquer alors que l’auteur et son hebdomadaire dont on connaît l’intelligence, aient été à ce point insensibles à cette mise hors-contexte absolue génératrice de ces invraisemblances dramatiques au point de désamorcer les contradictions qui sont les ressorts du comique ? C’est que leur parti pris idéologique les aveugle.
Pour dénoncer la légitimité de l’interdiction du voile intégral dans l’espace public, ils quittent sans s’en rendre compte la vraisemblance de la réalité pour s’égarer dans la fiction de leur idéologie qui procède ici à un amalgame insoutenable : le droit de porter le voile intégral est ici assimilé abusivement au droit à la nudité sur les plages, et la servitude sexiste, à la liberté des corps sur les plages conquise en un siècle.
La pudibonderie du dessinateur comme du journal les conduit alors à inventer une scène surréaliste totalement fictive où, dans notre société qu’ils jugent sans doute licencieuse et décadente, des policiers sont chargés de verbaliser le port du voile mais non la nudité impudique sur une plage. Qu’importe que cette nudité intégrale n’existe pas, qu’elle soit interdite sur les plages publiques, qu’elle ne soit autorisée que dans les camps naturistes, et que le dévêtement dans certaines limites soit laissé à la discrétion de chacun tandis que la burqa , elle, soit au contraire, imposée aux femmes dans les lieux publics par les militants fanatiques d’une mythologie archaïque ! On a connu, en revanche, un temps, dans les années 80, où en Algérie la police pourchassait les attitudes jugées impudiques des amants qui venaient pour finir se réfugier dans les escaliers des HLM habités par les résidents français.
L’aveuglement idéologique se moque de la réalité dont il offre une représentation fictive à sa convenance : c’était trop beau de tenter de ridiculiser, à travers le symbole d’un policier, une société française qui pourchasse le voile intégral mais autorise un exhibitionnisme imaginaire, quitte à exposer une malade mentale toute nue avec un tchador sur la tête sur une plage, à moins que ce ne soit une provocatrice téléguidée pour les besoins de la cause.
Ce dessin trahit à quel point une idéologie peut rendre aveugle ceux qu’elle habite. Ce ne sont pas les invraisemblances et les contradictions qui les arrêtent pour la défendre. On est tout de même surpris de voir Le Canard Enchaîné publier un dessin que les islamistes ne désavoueraient pas. Pour une fois, il ne donne pas envie de sourire mais de s’attrister. L’hebdomadaire satirique, si anticlérical depuis sa création quand il s’agit du Christianisme, serait-il devenu bigot, lui aussi, quand l’Islamisme est en cause ? Paul Villach