Une Gauche timide, malade de ses Gauchistes
Tiède. Au Canada, on est dans les limbes d'un centre-gauche tranquille qui va, à Québec, de Madame Marois du PQ au bon docteur Couillard du PLQ et, à Ottawa, de Justin Trudeau, fils de l'Autre, à Mulcair qui vient après Jack Layton. On est dans la politique du tiède.
On se console en France ? N’en rêvez même pas ! En France, à gauche, rien de neuf non plus....
Je deviens bien vieux, car je crois que je deviens sourd. J’écoute Melenchon qui hausse le ton et je n’entends toujours pas très bien … À gauche, en France, j’ai une impression de déjà entendu. C’est le ton qui déçoit ou le langage ? Disons le discours… Mettre le micro à Matignon ? Bof…. Ça ne changerait que le volume, pas le message.
Je vous mets ici un lien vers ce que j’écrivais juste après l’élection de Sarkozy, un quinquennat plus tôt. Ça nous vieillit, hein ? Se plagier soi-même, quand on est vieux, ça se dit radoter. J’avoue. Mais j’ai un peu le goût de demander : "Qui a commencé ?". Refondation de la Gauche…, mort ou métamorphose imminente du PS.., la France qui fait un pas vers la droite, etc, etc… Quoi de neuf ?
En 2007, je disais « Vae Sinistris » : malheur à ces petits Gauchistes vaincus… Je n’ai pas changé d’avis, mais je ne pensais pas alors que, vainqueurs aujourd’hui, ils auraient l’air encore plus petits. Mélenchon est bien timide. La Gauche est bien tiède.
La Gauche est malade de ses Gauchistes… Puisqu’on nous sert, cinq ans après, les mêmes couplets de la même rengaine….Permettez-moi de reprendre ici le même refrain.
La Gauche est sinistrée, parce qu’elle a rentré les voiles et ne va plus au large, mais fait du sur place. La Droite, elle, peut motiver ses gens par le succès personnel, l'égoïsme pur et dur, mais la Gauche, quand elle n’a pas un projet de société, un espoir collectif, un « grand dessein » à proposer n’intéresse pas. Nous avons aujourdhui une Gauche sans dessein… et elle ennuie.
Il faut faire le constat que la Gauche s’est scindée entre une faction organisée, corporatiste, qui a réussi sa rentrée à la mezzanine, sinon au piano nobile de la société bourgeoise... et les autres. Une faction de Cahuzac qui sont tout a fait comme des Guéant... et les autres dont cette faction s’est sommairement délestée pour parvenir à ses fin.
Les autres, ce sont les démunis, les marginaux, les précaires, les irrécupérables, dont on n’assume plus vraiment les combats, sauf du bout de la plume, tenue à longueur de bras par des intellectuels qui ne voient même pas le clivage.
De telle sorte qu’on a une Gauche victorieuse, mais pusillanime, qui devient de centre-gauche "à la canadienne" et qui ne demande qu’à devenir le parti d’alternance à un parti de centre droite, dans une démocratie à l’Américaine où il n’existera qu’un seule politique qui fera consensus et dont tout désir de changement sera exclu.
On a une Gauche qui se veut « Mouvement Démocrate », n’attendant qu’un « Mouvement Républicain », collé tout contre elle à sa droite et qui naîtra pour lui donner la réplique.
À gauche de cette Gauche "sans dessein", se coagulent en groupuscules ceux qui voudraient des changements plus radicaux, mais qui n’ont ni la voix ni les moyens de devenir un parti sérieux.
Ce sont ces radicaux à gauche, pourtant, qui pourraient innover et tracer les plans pour une nouvelle société ; mais seuls ils ne constitueront jamais une option électorale crédible. Il resteront du folklore, aussi longtemps les mutins et les naufragés du vaisseau PS ne leur tendront pas la main, mais préfèreront se mettre en ligne au centre, pour avoir épisodiquement accès au peu de pouvoir que peuvent avoir les gouvernements "démocratiquement" élus dans un régime néolibéral.
Si c’est ce choix que font les sinistrés du PS, les radicaux à leur gauche ne pourront même pas espérer un progrès lent, mais au moins constant vers la justice sociale par les voies de la démocratie. Ils resteront indéfiniment sur le rivage où ils se sont échoués.
Rien ne changera avant une génération, peut-être deux, quand ces démunis, ces marginaux, ces précaires, ces irrécupérables dont le nombre et la colère augmenteront reviendront alors en force - et par la force - reprendre leurs droits. Il est dommage qu’on ne lise plus l’Histoire.
Il n'y a plus maintenat d'autre Gauche que bavarde et velléitaire. La vraie Gauche, celle qui mériterait de vivre, est au-dela de la Gauche qui est là. Si la Gauche veut se refonder sur ses racines, et non dans une potiche, il faudrait qu’elle se donne pour but de changer la société. Rien de moins.
Changer la société prend du temps ? Peut-être, mais la Gauche, à Québec et Ottawa comme à Paris, pourrait tout de suite se fixer au moins quelques objectifs. Pour qu'on voit sur le miroir la buée rassurante qui prouve qu'elle respire.
A titre d’illustrations seulement, car il y a tellement plus à faire, je répète quelques-uns des objectifs IMMEDIATS qu'on devrait se fixer. Les mêmes qu'il y a 5 ans, 10 ans, 20 ans...
1. Mettre en place un programme universel de recyclage/formation afin que TOUS puissent être réinsérés dans le processus de production ;
2. Augmenter les salaires et le prix du travail, pour qu’ils coïncident avec le niveau de consommation compatible avec la production ;
3. Éliminer toute sécurité d’emploi et la remplacer par une sécurité du revenu par paliers ;
4. Modifier le système électoral pour que les élus représentent leurs électeurs et non des partis ;
5. Nationaliser les banques et redonner à l’État le contrôle direct sur l’émission de monnaie ;
6. Eliminer l’impôt sur le revenu et la TVA, ainsi que toute mesure fiscale directe ou indirecte, à l’exception d’un impôt sur le capital ;
7. Rembourser la dette publique en l'imputant au patrimoine des contribuables au prorata de leurs avoirs ;
8. Restructurer la profession médicale et augmenter le nombre des ressources en santé pour en faire la première priorité ;
9. Nationaliser la recherche médicale et l’industrie pharmaceutique ;
10 Assurer la totale gratuité de tout processus judiciaire et universaliser l’arbitrage en première instance en matières contractuelles ;
11 Reconnaître la violence comme une pathologie et en tirer les conséquences sur le crime, la récidive et le système carcéral ;
12 Rendre toute immigration conditionnelle à l’adhésion formelle à un Contrat Social explicitant les valeurs républicaines ;
13 Mettre fin à toute immigration illégale... sans créer une société de délation, en réservant simplement l’accès aux services sociaux aux seuls signataires du Contrat Social ;
14 Alléger la fonction publique et en accélérer les processus, en réglant par internet la plus grande partie des contacts avec les administrés ;
15 Remplacer le mondialisme par un politique d’import-export en complémentarité avec l’optimisation de la production nationale ;
16 Reconnaître les effets négatifs de la période colonaiale et payer durant 50 ans aux ex-colonies une compensation annuelle à débattre, en lieu et place d'une assistance discretionaire qui est une arnaque
17 Assurer la défense nationale, mais en réaffirmant les principes de non agression et de non ingérence ;
18 Favoriser l’intégration à l’Europe et l’appartenance à des entités supranationales, mais en cela seulement qui ne contrevient pas aux objectifs ci-dessus.
Cela pour un début, bien sûr. Seulement pour que renaisse une façon de voir le monde qui fasse la part belle à l’innovation et à un progrès vers l’égalité ; il faudra ensuite exiger plus.
Il faudra tout changer ; c'est a ça que doit penser une Gauche respectable. Et quand, citant le Sage Vyasa, on verra que « ces plaisirs ne sont pas suffisants, qu’on s’en remette à l’inspiration" … Et qu’on la crée, cette Gauche qui n’existe pas.
Pierre JC Allard