Commentaire de Frédéric D
sur 2 milliards de degrés : l'humanité découvre le feu absolu et tout le monde s'en fout !


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Frédéric D (---.---.52.242) 22 juillet 2006 09:56

un autre post intéressant d’un certain tokamac dans le forum d’Oleocene.

post de tokamac : http://www.oleocene.org/phpBB2/viewtopic.php?t=2510&postdays=0&postorder=asc&start=195

il mentionne le calcul par tenseur, soit il a lu ça quelque part soit il a un certain niveau.

ci-joint ce nouveau post (20 juillet)

Le problème est complexe, et « tout est relatif ». Ce n’est pas qu’une question de température, mais aussi de « section efficace » liée à la densité, ou encore du temps de confinement, tout ceci étant lié dans le critère de Lawson.

Mais la faiblesse du temps de confinement n’est qu’une illusion. Plus vous jouez sur la température et la densité atteinte, moins le temps de confinement a besoin d’être long (c’est exactement l’inverse du tokamak où la densité est faible et la température relativement limitée, et où l’on joue beaucoup plus sur l’allongement du temps de confinement, d’où un régime « en continu »).

On ne sait rien encore de ce genre de plasma porté à ces niveaux de température en quelques nanosecondes, notamment parce que la situation est totalement nouvelle également pour d’autres raisons que cette ultra haute température :

- Dans cette configurations, les ions sont 100 à 120 fois plus chauds que les électrons. Ça n’a jamais été le cas avant en physique des plasmas, là le gaz d’électron et d’ions est très hors d’équilibre. On avait bien bien des « plasmas froids » dit « bitempérature », mais c’étaient les électrons qui étaient chauffés et pas les ions (comme dans un tube au néon où les recherches en furtivité plasma dans l’aéronautique).

- Ensuite, le champ magnétique est de 4500 teslas. C’est gigantesque. Malcolm Haines indique que le paramètre de Hall des électrons est supérieur à l’unité. Si c’est le cas, les grandeurs mathématiques des équations se décrivent vraisemblablement avec des tenseurs. Pas simple...

- Enfin, la pression atteinte dans le plasma a atteint... 90 mégabars, 90 millions de fois la pression atmosphérique... avec 18 millions d’ampères injectées. On est dans une situation de la matière hyperdense très mal connue. Rien à voir avec les accélérateurs de particules où mêmes les plasmas des tokamaks.

Le « chauffage ionique visqueux par instabilités MHD », avancé par Haines pour expliquer le chauffage anormal du plasma (4 fois la température attendue), qui est une sorte de transfert de l’énergie magnétique extérieure au plasma en énergie thermique des ions dasn le plasma (de nature collisionnelle, vibrationnelle, rotationnelle...) est une hypothèse qui n’a pas été modélisée.

Du coup, personne ne peut être à l’aise du point de vue des calculs appliqués à une fusion Li7-H1 dans un tel dispositif. Avec autant de flou dans les théories, comme le dit JP Petit le plus simple serait plutôt de monter une expérience afin d’« interroger la nature ».

anciens posts (20 juillet)

J’indique aussi que plus le temps de fonctionnement est court pour une énergie de départ donnée, plus la puissance injectée dans la cage est élevée. La puissance, c’est l’énergie divisée par le temps durant lequel elle est distribuée. C’est pour ça qu’on travaille en dessous des 100 nanosecondes. Même principe pour les lasers terawatts, qui distribuent leur joules (pas toujours très nombreux) en quelques nanosecondes voir picosecondes. Si ces lasers, avec la même énergie, tiraient non pas en un pulse ultra bref mais en un temps de l’odre de la seconde, leu puissance serait infime et ils n’auraient aucun effet.

Je rajouterai ici une intervention de Petit en fin de sa page « Éclaircissements » où on comprend qu’il y a une autre raison pour laquelle on doit injecter l’énergie en un temps le plus bref possible :

- Citation - Pourquoi les Z-machines doivent-elles délivrer leur « pèche » en un temps si bref ?

20 millions d’ampères en 100 nanosecondes ! Pourquoi devoir viser un temps si bref ? Pourquoi pas une ou plusieurs microsecondes ?

Ce qui confère de la chaleur au gaz d’ions ça n’est pas l’effet Joule, puisqu’il existe un certain découplage énergétique entre le gaz d’ions et le gaz d’électrons, c’est l’énergie cinétique acquise par les fils le long de leur course quand ils convergent vers l’axe, brutalement convertie en chaleur au moment de l’impact (stagnation conditions).

Le courant qui parcourt les fils est électronique, et non ionique. Ce sont donc les électrons qui subissent la force de Laplace V x B. C’est le gaz d’électrons qui se trouve projeté vers l’axe. Les électrons acquièrent ainsi de l’énergie cinétique, qui sera redistribuée dans toutes les directions par collisions électrons-électrons et électrons-ions. Mais les ions fer et les électrons ont des masses très dissemblables. Le rapport est de l’ordre de cent mille. Dans ce processus d’accélération vers l’axe puis d’échauffement à l’impact, ce sont les ions qui sont gagnants, ce qui crée d’emblée cette situation hors d’équilibre, bitempérature, à laquelle nous ne sommes pas habitués.

Dès l’impact, la température dans le gaz d’ions est déjà plus élevée, et de beaucoup, que celle du gaz d’électrons. Pourquoi les ions suivent-ils les électrons lorsque ceux-ci, subissant l’action de la force de Laplace plongent vers l’axe ? Est-ce du fait des collisions ? Très partiellement. Electrons et ions restent étroitement liés par le champ électrique et ne peuvent être séparés que d’une distance qu’on appelle la distance de Debye, qui est faible.

Si le temps d’implosion est trop important, parce que l’impulsion de courant est trop étalée dans le temps (le nombre de joules disponibles dans la décharge est limité) les fils auront le temps de se sublimer. Quittant leur prison métallique solide, les électrons interagissant avec le champ magnétique, représenteront une imporatnte perte d’énergie radiative par rayonnement de freinage. Si la matière du liner passe à l’état de plasma, les forces de pression s’opposeront plus tôt au collapse. L’efficacité maximale sera obtenue si on parvient à amener la matière sous forme de fils solides le plus près possible de l’axe du système. L’ensemble du processus reste complexe. Tout ce qu’on sait c’est que dans les conditions actuelles, avec les paramètres choisis ça marche.

- fin de citation -

Enfin, sachez que ce surchauffage est doublement anormal. Outre le fait que la température atteinte soit 4 fois plus élevée que ce que prévoit la théorie (par rapport à l’énergie cinétique acquise par les fils au moment de l’impact), ce surchauffage se produit bien après le moment de l’impact, au moment où les ions devraient avoir refroidi, pendant la phase où le cordon de plasma est déjà en expansion. Il y a donc « quelques chose » qui apporte de l’énergie supplémentaire au plasma (Haines a avancé une hypothèse pour l’expliquer), dont l’effet est même assez important pour contrebalancer le refroidissement par radiations et par détente du gaz.

autre post (19 juillet)

Merci pour ton accueil.

Concernant le court historique de la fusion nucléaire par confinement inertiel électromagnétique (z-pinch à multifilaments métalliques), on sait que les laboratoires de Sandia ont déjà réussi à faire fusionner des cibles de deutérium-tritium dans la Z-machine, dès 2003.

En conséquence, ce laboratoire a déjà lancé un projet de centrale électrique de recherche (le programme Z-IFE) Lien pour tester les solutions d’ingénierie et la faisabilité de la génération d’électricité issue de la fusion par z-pinch, toutes les 10 secondes dans ce dispositif.

Vous pouvez lire un article complet de présentation du projet de fusion par striction axiale sur le site du Laboratoire de Physique des Plasmas de Princeton (PDF).

Ce projet a été initié alors qu’en 1999, les laboratoires de Sandia avaient obtenu un « fantastique » 1,6 millions de degrés, et espéraient ainsi « bientôt obtenir les 2 ou 3 millions de degrés requis pour des réaction de fusion ». [source]

Mais par la suite, et de plus en plus fort entre 2003 et 2005, la température a été multipliée par un facteur mille de manière totalement inattendue car non prévue par la théorie, simplement en remplaçant les fils de tungstène par des fils en acier inox (on conjecture encore sur cette température qui auraît du être en principe 4 fois moins élevée).

Sandia a alors obtenu un plasma chauffé à un maximum de plus de 3 milliards de degrés. Cette température a été doublement confirmée :
- tout d’abord indirectement via la classique « formule de Bennet » en partant de l’énergie des rayons X émis, qui donne la vitesse d’agitation thermique des électrons, qui permet de connaître la valeur du champ magnétique (4500 teslas soit dit en passant...) et dont enfin on déduit la température ionique.
- mais aussi directement, par spectroscopie à élargissement des raies qui donne précisément la température pour chaque type d’ion (maximum de 3,94 milliards de degrés pour les ions manganèse par exemple).

Cette perspective ouvre la voie, du moins l’hypothèse, pour d’autres types de fusion, telles que deutérium-deutérium (D-D), lithium-hydrogène (Li7-p), ou bore-hydrogène (B11-p). Ces deux dernières réactions sont particulièrement intéressantes puisqu’elles génèrent uniquement de l’hélium et pas de neutrons rapides (elles sont a-neutroniques) et donc pas de radioactivité.

Ces réactions a-neutroniques n’ont pas encore été testées. Le problème étant que si la réaction LiH fonctionne, les résultats risquent forcément de ne pas être publiés, car classés secret défense. C’est en effet de l’hydrure de lithium qui est précisément le combustible utilisé dans les bombes H. D’où l’idée de monter une expérience civile ailleurs qu’à Livermore ou Los Alamos.

Mais ce n’est pas fini, parce que ZR (le successeur de la Z-machine) est prévu pour être opérationnel à Sandia au tout début 2007. ZR ira encore plus haut en température. La Z-machine débite 18 millions d’ampères, ZR en débitera 1,5 fois plus (27 MA). Comme la température dans ce type de dispositif croît en gros comme le carré de l’intensité, on peut espérer dépasser les 5 milliards de degrés d’ici 6 mois, et pourquoi pas continuer vers les 10 milliards ensuite.

Et il y a toujours un déclic de retard technologiques sur les découvertes. Savez-vous que la Z-machine n’a jamais été conçue au départ pour faire du z-pinch ? C’était un accélérateur radial de faisceaux d’ions, convergeant vers une cible centrale. La focalisation n’étant pas satisfaisante, elle a été reconvertie au milieu des années 80. Et paf, 3 milliards de degrés, alors qu’on espérait jamais dépasser 100 millions et que ce n’était pas le but.

ZR (pour « Z Refurbishment ») est en fait une mise à niveau de la Z-machine, sur le même lieu, avec un retrofit de 6 mois pour la « mettre à niveau ». C’est un upgrade et pas intégralement une nouvelle machine, mais au moins elle sera prévue à 100 % pour le z-pinch. ZR est la concrétisation du « programme X-1 », mais qui avait été initié avant qu’on sache pouvoir obtenir ces ultra hautes températures.

Alternativement, les Français qui bossaient sur l’ECF de Gramat (la« Z-machine française ») dans le cadre des projets Sphinx et Syrinx (principalement les Dr. Jean-François Léon et Mathias Bavay), sont partis il y a un an ou deux aux USA, emportant là-bas leurs plans pour un générateur à autocompression de flux pouvant débiter 60 millions d’ampères en 100 nanosecondes dans une Z-machine. On leur a en effet refusé ici les crédits pour sa réalisation, alors qu’il était prévu à l’origine pour mettre à niveau le réacteur ECF-2, désormais quasiment à l’abandon.

Ainsi après ZR à l’horizon 2010, son successeur pour produire la fusion s’apelle Z-ETF (Z-pinch Engineering Test Facility), de classe 60 MA et 500 MJ, single-shot pour la « Phase 1 » tout comme Z et ZR.

Z-ETF « Phase 2 » sera par contre le modèle à tir répétitif, à 0,14 Hz, avec une puissance d’injection de 70 MW. Ce sera le dernier prototype avant la « Phase 3 Demo » démonstrateur technologique d’une véritable centrale électrique à fusion.

Gardez cependant en tête que cette roadmap concerne la fusion faisant intervenir le tritium, et qu’elle a été développée avant les 3 milliards de degrés, ce qui peu faire changer pas mal de choses.


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