mardi 12 janvier 2010 - par Francesco Piccinini

La Fabbrica, histoire d’une classe en quête de futur

S’il y a bien un artiste italien qui raconte la contemporanéité italienne c’est Ascanio Celestini. Auteur, acteur, depuis toujours engagé dans le social. Il a notamment réalisé ou soutenu plusieurs documentaires, écrit un album de chansons, écrit des textes courts pour la télévision et participe actuellement à la réalisation d’un film adapté de son roman la Pecora nera -La Brebis galeuse. Son dernier spectacle, « Il razzismo è una brutta storia », lui a été demandé par l’Arci dans une campagne de sensibilisation contre le racisme.
 
Avec Marco Paolini et Giulio Cavalli il représente la nouvelle génération d’acteurs italiens engagés, même si Moni Ovadia dit de lui : « Marco Paolini et moi jouons à être ce qu’Ascanio Celestini est vraiment ». Un peu plus qu’un acteur, donc, un narrateur. Un narrateur d’un pays à la recherche d’un futur.
 
Avec son dernier spectacle : la Fabbrica mise en scène à Paris, au Théâtre de la Ville jusqu’au 16 janvier Ascanio Celestini entraîne le spectateur dans les rouages de la réalité industrielle et politique de l’Italie du XXe siècle, dont l’histoire est avant tout celle des ouvriers : de Fausto, le chef manoeuvre qui a perdu une jambe, de son père et de son grand-père qui portent le même prénom, de Paride Pietrasanta, patron de l’usine, d’Assunta, belle comme une Madone et au secret indicible et de tous ceux qui ont croisé leur destinée.
 
Entre témoignages, situations extraordinaires, visions magiques et légendes construites jour après jour dans les températures torrides d’un haut fourneau, ce récit hors du commun retrace les grandes étapes de l’usine.
 
Celle de l’origine où les ouvriers étaient forts comme le bronze et hauts comme les géants ; celle des ouvriers aristocratiques rendus indispensables à la production jusqu’à être exemptés du service militaire durant la Grande Guerre et tolérés par le régime fasciste malgré leurs idées communistes ou anarchistes ; et enfin la période contemporaine avec une usine qui réduit le nombre de ses travailleurs.
 
Ascanio Celestina racconte l’Italie des derniers, ceux que ne vont jamais passer à la télé, l’Italie des « mortes  blanches », l’Italie des ouvriers qui ne se sentent plus représentés par une gauche bourgeoise, mais en même temps ne pourront jamais voter pour la droite berlusconienne faite de télé, ballerine et jeux concours.
 
Une Italie ancienne, faite d’homme et femmes, de noms qui sortent d’un passé lointain à la recherche d’un espoir pour le futur.
 



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