L’un des industriels qui avait le plus utilisé la gestion pré-informatisée, en dehors des industriels nazis, était bien .. Henry Ford. Des témoignages éloquents subsistent : ainsi cette magnifique carte de 1956 de production d’un modèle
Fairlane Sedan, numéroté M6NT106197, équipé d’un moteur type 292 V-8, à l’intérieur de tissu vert et de vinyl, e
t fabriqué à Norfolk. Chez Ford, le système Hollerith-IBM n’était donc pas un vain mot : l’efficacité de l’usine reposait aussi sur l’usage intensif des cartes perforées et non pas seulement sur l’organisation de son travail à la chaîne ! Ou plutôt c’était entièrement complémentaire : pour approvisionner en pièces au bon moment et rester maître du flux de production, il fallait une gestion serrée, que seuls permettaient les pré-ordinateurs. Et ce, dans toutes les filiales de Ford dans le monde. Telle celle de Cologne, dont il avait posé la première
pierre en 1930. A l’époque, le maire de Cologne s’appelle Konrad Adenauer... Comme Henry Ford avait tenté de faire manger des hamburgers en pleine jungle à des amazoniens (voir notre épisode précédent), il désirait que toutes ses usines soient faites sur le même moule. Elles avaient donc toutes la même gestion, à base de machines... IBM-Hollerith. Ford fut le premier à s’équiper d’ordinateurs, et ce n’est pas un hasard. Dans l’après-guerre, entre 1950 et 1956 l’utilisation des ordinateurs
(des "mainframes") va faire un bon prodigieux, et Ford va y participer en en achetant plusieurs. Dans les années 60, les photos de l’I
BM 1401 seront souvent prises in situ chez Ford. A Cologne, sa filiale allemande gère l’usine par cartes perforées Hollerith bien avant 1940.
En 1946, c’était indéniable, le bilan était fait : Ford avait largement bénéficié de la guerre, à un point assez inimaginable qu’il convient de préciser ici. Avec un exemple simple : lorsque les troupes américaines, lors de leur ultime remontée vers le nid d’aigle d’Hitler avaient un problème de camion, ils se précipitaient sur les
épaves de camions allemands qui jonchaient les routes ou les chemins : dedans, c’était le même moteur Ford, à qui ils pouvaient subtiliser des éléments, et cannibaliser le modèle allemand, quand ce n’était pas strictement le même camion en entier : par quel miracle, c’est ce que nous allons voir. Ford avait vendu en fait à tout le monde sans distinction, avant le conflit, et même surtout après Pearl Harbor : des voitures, des camions mais aussi des moteurs. C’était le coup de Krupp (qui produisait des camions à Kulmbach) et de Vickers ou Armstrong d’avant 1914 qui recommençait, chacun vendant obus et blindages pour y résister. En 1942, Krupp sera dirigé par s
Alfried Krupp von Bohlen und Halbach, membre des SS dès 1931. Alfred Krupp fut lui jugé en 1951... et acquitté !
En France, par exemple, via la fir
me Matford, Ford avait équipé une bonne partie de l’armée française avant guerre. L’accord Ford-Mathis avait été signé le 27 septembre 1934, est avait été annoncé officiellement le 8 octobre 1934 lors du salon de l’auto de Paris.
"Cet accord donne naissance à la société Matford SA, détenue à 52 % par Ford, qui souhaite développer ses moyens de production en France. La nouvelle société dispose, en plus de l’usine Ford d’Asnières, de l’usine Mathis de Strasbourg, prises en location par Matford. Strasbourg, équipé d’une fonderie, fabriquera le moteur V8 et Asnières poursuivra le montage des véhicules" précisait le communiqué de l’époque. Personnellement, je ferais connaissance tout bébé avec une Ford, la
Ford Vedette modèle 1952, premier modèle de Ford-SAF, le successeur de FordMat en 1948. souvenirs,
souvenirs. Un modèle bien entendu vendu en
même temps en Allemagne.. .Le moteur perdu dans le capot immense faisait le même bruit que le camion d’essence qui passait régulièrement remplir les cuves du garage de mon père : logique, c’était le même moteur qui l’animait. Le
Simca-Ford Cargo, un des modèles les plus répandus après-guerre. Et encore une fois répandu également... dans l’armée française, notamment sous le nom de
SIMCA F 569 WML. Où il sévirait pendant des dizaines d’années, notamment pendant la guerre d’Algérie...
Filiale de la Ford Motor Company en France, par le biais de Ford SAF,
Matford diffusera également en France les autres produits du groupe Ford (Lincoln, Mercury), leurs camions et les tracteurs
Fordson , ...de
"technique américaine, production française" disait-on dans les publicités
de l’époque. Certains Matfords, pendant la guerre, feront la joie des allemands,
une fois capturés. Bref, l’armée française à ce moment là est équipée de modèles Ford, pourquoi pas, se dit-on... Aux USA, ça paraît plutôt normal : Ford construit ainsi le char sur
pneus T-17 sur les plans de Chevrolet, une Division de General Motors Corporation : "
Production of 2,260 vehicles was authorized in January 1942, to be constructed at the St. Paul, Minnesota, Branch of the Ford Motor Company. Production of 1,500 additional vehicles was authorized in June 1942, making a total commitment of 3,760 vehicle", et proposait ses moteurs qui équipent les chars construits par d’autres : le
char léger M8, le fameux char
Sherman par exemple en est é
quipé. Le modèle
lourd Pershing également. En camions, idem : les petits
trois tonnes, comme les
autres, dérivés directement des
modèles civils. Des moteurs ou des véhicules vendus partout : on les retrouvera
jusqu’en Finlande.
En revanche, quelle ne sera pas la surprise de beaucoup de soldats américains à bord de leur camion Ford de se trouver nez à nez avec le même véhicule
V3000 e
n camouflage allemand ! Quelques v
ariantes de cabine par-ci, q
uelques occupants de plus, par-là, mais c’était bien le
même des deux côtés ! !! Même avec des
chenilles, en plus, d
evenu alors le "Maultier", on le
reconnaissait aisément !!! Il servira même lors des
débandades à la fin du conflit ! Ford et GM avaient
travaillé avant guerre pour les deux bords, et la liste des véhicules produit
s est aujourd’hui effarante à établir. Steyr (en Autriche), Hanomag, Maybach, Horch, Hansa, Audi, Buick-allemagne, Opel, Mercedes, Adler, Wanderer, BMW, DKW, Hanomag, tous avaient fait des Ford ou des General Motors sous licence ou avaient mis des moteurs Ford ou GM dans leurs véhicules ! Même les p
ick-ups américains avaient été intégrés à la Wehrmarcht ! Les
camions de pompiers allemands étaient aussi américains ! Même quand on ne le reconnaissait pas facilement comme ici avec
un Horch.. dedans c’était bien un moteur Ford ! Des V-8 Ford "flathead", ici modèle 51, il y en avait
plein la Wehrmacht ! Certains ont été retrouvés et restaurés, tel celui-ci construit à
Cologne en 1944. Ford produisit à
Cologne le BB, de 1,5 à 2,5 tonnes, le V8-51 préféré par la
Lutwaffe, comme par la W
ehrmacht, mais aussi le
G-917 de 3 tonnes, et s
urtout le V3000, et aussi les
moteurs du
Horch particulier des troupes de
Rommel. Au même moment, les anglais roulent à quelques kilomètres de troupes allemandes en
Ford C12AS... et les américains dans la célèb
re Jeep Ford GPW (fabriquée sur plans Willys).... Ford en produira , 277 896 exemplaires... pendant
qu’Opel produira sous licence des modèles
Diamond T.... reconnaissables de loin à leur calandre caractéristique....
Car c’est simple, en 1930 déjà, Ford
était partout :"
Though it is widely acknowledged to be the most American of American companies, it is more accurate to describe the Ford Motor Company as having been built by the whole world’s labor, land, and natural resources. By the end of the 1920s, Ford was operating factories on every continent, in over 20 countries, and was selling more cars, trucks, and tractors than any other manufacturer." Mais ce qui l’est moins, c’est la forte présence de Ford dans la Wehrmacht une fois en guerre. Les véhicules allemands de l’armée d’Hitler étaient en forte majorité... américains d’origine, et c’est un peu logique, en fait. Une enquête d’après-guerre notait en effet que le marché civil allemand, d’où découlait les matériels de l’armée, avait été littéralement envahi de matériel américain : "
En 1939, les filières allemandes de General Motors et Ford approvisionnaient 70% du marché allemand de voitures." Les fameux camion
s "Blitz" d’Opel n’avaient
rien d’allemands :
"à la fin de la guerre, Henry Schneider, un enquêteur de l’armée américaine, qualifiait la filiale allemande de Ford d’’arsenal du nazisme, du moins pour les véhicules militaires". D’après Schneider, ce dispositif avait l’approbation des dirigeants de Ford, aux USA. La reconnaissance des Nazis pour Ford et GM était bien fondée : les camions "Blitz", produits dans une usine construite par GM à Berlin, étaient une composante majeure de la "Blitzkrieg", l’agression allemande contre ses pays voisins : la Pologne, l’URSS et la France. Opel, la filiale allemande de GM, et Ford-Allemagne étaient les deux premiers constructeurs de camions pour les forces militaires allemandes".
GM avait racheté Opel à 70% de ses parts à la suite du grand crack de 1929. En 1930, GM avait augmenté sa part et pris la totalité du contrôle de l’entreprise. La firme allemande était bien depuis lors américaine, et avait intensément participé à l’effort allemand de réarmement. "
L’usine Opel de Brandenbourg changea ses activités pour produire des camions pour la Wehrmacht, tandis que celle de Russelsheim travailla pour la Luftwaffe, en assemblant des avions tels le JU-88, cheval de bataille de la flotte de bombardiers allemande." Cétait net : les américains ne pouvaient donc l’ignorer. D’autant moins qu’il n’y avait pas que les Junkers, mais aussi leur kérosène :
"en 1938, la Luftwaffe a un besoin urgent de 500 tonnes de plomb tétraéthyle, que lui « prête » l’Ethyl Export Corp. de New York. La garantie pour la transaction est fournie par le biais de Brown Brothers, Harriman, dans une lettre datée du 21 septembre 1938." Tout le monde connaissait le réarmement en cours, donc, et l’industrie US y réalisa des profits substantiels. Et ce, sans aucun doute possible : aucun Junkers 88 n’a eu un jour de version civile ou commerciale ! Autre exemple :
Carl Krauch, l’industriel de la Vermittlungstelle Wehrmacht, était aussi comme par hasard le directeur de Ford Motor Co, en Allemagne !
Politiquement, les liens étaient donc forts et débouchaient naturellement vers des idées comme celles qui avaient traversé la tête de Prescott Bush, l’ami des Thyssen : établir une dictature nazie aux Etats-Unis ! La GM a certainement œuvré dans l’ombre contre Roosevelt. Selon Charles Higham, les représentants de GM se sont réunis secrètement avec
Manfred Von Killinger le chef de l’espionnage nazi et Vo
n Tippleskirsch, le chef de Gestapo, à... Boston, le 23 novembre 1937. Selon Higham, le groupe y
"a signé un accord commun montrant l’engagement total à la cause Nazie à l’avenir indéfini," et a proclamé qu’ "
en raison de l’attitude de Roosevelt envers l’Allemagne, tout effort devait être fait pour le vaincre à la prochaine élection. L’influence juive dans la vie politique, culturelle, et publique en Amérique doit être boutée hors du pays. La pression et la radio doivent être subventionnées pour attaquer l’administration,". Le groupe est alors soutenu par le sénateur
Burton Wheeler, élu du Montana, un démocrate au départ, t
rès en vue dans les années 20, antisémite connu, qui s’était comme par hasard particulièrement distingué au sein du mouvement anti-guerre mené par Lindbergh. Wheeler était un précurseur du Maccarthysme, à sa façon, en proposant d’énumérer le nombre de juifs à Hollywood, par exemple et de le citer au grand jour :
"Wheeler announced in August 1941 he would investigate “interventionists” in the motion picture industry. Most studio heads, he would soon be surprised to learn, were Jews.Wheeler questioned why so many foreign born were allowed to shape American opinion". C’est l’annonce avant l’heure d’une chasse aux sorcières anti-juive. Selon
Philip Roth, Wheeler aurait eu une part importante en cas de réussite du complot nazi aux USA. La
nouvelle de Roth, une fiction, malgré ses g
rossières erreurs, est basée sur un nombre incroyable d’événements véritables. Wheeler est très nettement comparé à Dick Cheney dans le livre ! En 1946, un violent pamphlet écrit par D
avid George Plotkin, "The Plot Against America : Senator Wheeler and the Forces Behind Him" avait déjà fait de même et décrit le même danger. En 1941, 24 membres du Congrès US seront pris la main dans le sac à avoir offert gratuitement leurs services postaux au groupe "
America First" de Lindbergh,
pro-nazi avéré, financé par H. Smith Richardson, le dirigeant de
Vick Chemical Company et dirigé par le patron de
Sears Roebuck, le General Robert E. Wood.
"Millions of pieces of Nazi propaganda are mailed at the taxpayers’ expense. Most notable among the Nazi stooges is Republican Senator Burton K. Wheeler, long a prominent figure in disseminating Nazi propaganda in the U.S. It is also discovered that Wheeler has acted as a conduit for top secret U.S. defense plans."
La tentative de 1937 n’était pas la première. Plusieurs complots furent ourdis dès 1933 aux USA, à partir de ligues fascisantes copiées sur celle des Croix de Feu français, qui faillirent réussir à prendre le pouvoir, on le sait, le
6 février 1934. "Parallèlement à la montée d’Hitler en Allemagne, les DuPont commencèrent à financer l’American Liberty League and Clark’s Crusaders, qui comptait 1 250 000 membres en 1933. Pierre, Irenee et Lammot DuPont, John Jacob Raskob, ancien dirigeant du Comité national démocrate, ainsi que Alfred Sloan, de General Motors, contribuaient de leur côté financièrement à la ligue. Par ailleurs, Irenee DuPont et William Knudsen, directeur de General Motors,
avec des amis de la banque Morgan, financèrent l’orchestration d’un coup d’Etat perpétré par une armée de terroristes modelée sur les Croix de feu françaises, moyennant trois millions de dollars. Les armes et munitions nécessaires auraient été fournies par Remington, une filiale de DuPont. Le complot était soutenu par Hermann Schmitz, le baron von Schröder et d’autres nazis".
Le premier d’entre eux avait fait chou blanc, car les complotistes n’avaient pas vraiment choisi le bon bougre, choisi car il avait la cote avec les vétérans : "Cependant, le général Smedley Butler de Pennsylvanie, pressenti pour diriger le coup d’Etat, en fut si horrifié qu’il révéla le complot aux autorités. Butler avait déclaré publiquement : « La guerre est largement une question d’argent. Les banquiers prêtent de l’argent aux pays étrangers et quand ceux-ci ne peuvent rembourser, le Président envoie les marines pour l’obtenir. Je le sais - j’ai fait partie de onze de ces expéditions. » En 1934, la Commission d’enquête du Sénat confirma « les soupçons [de Butler] selon lesquels le big business - Standard Oil, United Fruit, le trust du sucre, les grandes banques - avait été derrière la plupart des interventions militaires qu’on lui avait ordonné de conduire". Butler avait écrit en 1935 un pamphlet contre la guerre... mais qui restait hautement patriotique et nationaliste, à l’instar des idées de Lindbergh...
Parmi les autres comploteurs potentiels, on trouvait Robert Clark, le patron de Singer (les machines à coudre), Grayson Murphy, de Goodyear, et la famille Pew, de la Standard Oil, à la tête d’une milice fascisante, "T
he Sentinels of Republic" créés par Louis A. Coolidge. Défini comme l’ "anti-Semitic wing of the first really important American Fascist movement". Un de ses dirigeants ira jusqu’à dire dans une correspondance que les "
old-line Americans of $1200 a year want a Hitler"... Singer, qui fabriquait aussi
des pistolets (M1911), avait une usine installée sur l’Elbe qui fabriquait déjà des mitrailleuses pour Hitler. Les deux groupes principaux de candidats à la dictature d’extrême-droite aux USA étaient soit l’American Legion, so
it l’American Liberty League. Deux dirigeants de la Legion, William Doyle et Gerald Mc Guire faisaient effectivement partie du groupe de comploteurs désireux de renverser Roosevelt. Irénée duPont, dans le lot de comploteurs, avait les pires vues : lors d’une conférence le 7 septembre 1926, il avait préconisé l’avènement d’une race supérieure en injectant des drogues à des enfants, soigneusement sélectionnés selon des critères raciaux ! C’est duPont qui investit, via General Motors, qu’il contrôlait, plus de 30 millions de dollars chez
IG Farben. Pour y produire (à Auschwitz) du
néoprène, inventé en 1930 par
Wallace Hume Carothers, et le caoutchouc
Butyl de Standard Oil.
Roosevelt ne pouvait arrêter tout ce gratin de patrons industriels sans provoquer de crise majeure dans le pays. Il joua donc habilement la partie en s’appuyant sur les aveux de Butler pour faire pression sur les industriels concernés. Comme la plupart étaient démocrates, ç’eût été aussi suicidaire pour le parti présidentiel : l’enquête du Congrès sur le coup d’état projeté fut donc enterrée, et la presse tenue à l’écart de ses conclusions. Un autre complot était mené par les Républicains, emmenés alors par un nazi avéré, Edmond Furholzer, qui retourna en allemagne en 1933 avant de passer la main à Sydney Brooks, le patron d’ITT, à la tête du groupe des
"Order of 76", qui souhaitait fusionner avec les "Silver Legion of America o
u Siver Shirts", de
William Dudley Pelley,
nazi notoire, d’une fran
ge tournée mystique, et en tout cas un autre gr
oupe fascisant (décrit par Kurt Vonnegut dans un de ses chefs-d’œuvre). Ils projetaient de gagner les élections grâce aux voix allemandes du pays, entretenues par des programmes radios haineux appelants à la haine du juif. Un sondage de 1938 dans le pays annonçait en effet que 53% des américains voyaient dans les juifs des gens différents, et 10% souhaitaient même les déporter ! Le dernier groupe important pro-nazi étant le German-American Bund. Le gro
upe pro-nazi aura son
heure de gloire en 1939 :
"the zenith of the Bund’s history occurred onPresident’s Day, February 19, 1939 at Madison Square Garden inNew York City. Some 20,000 people attended and heard Kuhn criticize President Franklin D. Roosevelt by repeatedly referring to him as “Frank D. Rosenfeld”, calling his New Deal the "Jew Deal", and stating his belief of Bolshevik-Jewish American leadership." Comme tout groupe purement nazi, il entretint longtemps deux camps d’entraînement paramilitaire,
présentés so
us des aspects boy-scouts. Leur chef, Fritz Kuhn, allait jusqu’à
singer Htiler lui-même lors de ses meetings. Comme le dit fort justement un site, pour
les résumer,
"On the eve of World War II, the German American Bund insisted the Nazi salute was as American as apple pie". On le voit : en 1939, les supporters américains d’Hitler abondent. Et de 1920 à 1939, l’Amérique est passée à plusieurs reprises très près de devenir hitlérienne. En 1925,
ne l’oublions pas le KKK remplit les stades, s
e montre, fait la
fête,
joue, p
rend le train en tunique, se
réunit,
s’acoquine avec la religion dominante, se
marie ou court
les rues, han
te les villes,
endoctrine, et
défile en pleine capitale. Et
assassine impunément.
L’admiration pour Hitler suit, l’e
ndoctrinement avec. Et laissera une emprein
te qui durera...Trè
s longtemps.
Ford et GM, en dehors de soutenir financièrement l’extrême droite aux Etats-Unis, avaient tout simplement directement et ouvertement participé à l’édification de l’arsenal de guerre allemand, en espérant sa réussite !
Chez GM, il est vrai, son directeur,
Alfred P.Sloan n’avait rien à envier côté amitiés hiltériennes avec Henry Ford. Les deux avaient permis la Blitzkrieg, qui nécessitait avant tout des transports rapides : "
The outbreak of war in September 1939 resulted inevitably in the full conversion by GM and Ford of their Axis plants to the production of military aircraft and trucks," according to a 1974 report printed by the U.S. Senate Judiciary Committee. ’On the ground, GM and Ford subsidiaries built nearly 90 percent of the armored ‘mule’ 3-ton half-trucks and more than 70 percent of the Reich’s medium and heavy-duty trucks. These vehicles, according to American intelligence reports, served as ‘the backbone of the German Army transportation system" dit Edwin Black dans son ouvrage de 2007
"Hitler’s Carmaker : The Inside Story of How General Motors Helped Mobilize the Third Reich." La Blitzkrieg chère à Hitler devait tout à ses camions Opel, sortis d’une usine... américaine.
En 1941, Sloan avait été mis au courant de ce qui se passait pour les juifs en Allemagne. en 1960 ; voilà ce qu’il en dit : "I am sure we all realize that this struggle that is going on though the world is really nothing more or less than a conflict between two opposing technocracies manifesting itself to the capitalization of economic resources and products and all that sort of thing." En fait de "technocratie" quand il avait fallu déterminer l’emplacement de la nouvelle usine GM en Allemagne, le critère retenu avait été simple : à un endroit pour éviter les futurs bombardements : "In 1935, GM agreed to locate a new factory at Brandenburg, where it would be geographically less vulnerable to feared aerial bombardment by allied forces. In 1937, almost 17 percent of Opel’s Blitz trucks were sold directly to the Nazi military." Sloan savait donc très bien ce qu’il faisait et à quoi il pouvait s’attendre, sinon il aurait installé son usine au milieu de Berlin ou de Dresde !
Evidemment, les deux ont nié après guerre y avoir
été pour quoi que ce soit . "Both General Motors and Ford insist that they bear little or no responsibility for the operations of their German subsidiaries (...) But documents discovered in German and American archives show a much more complicated picture. In certain instances, American managers of both GM and Ford went along with the conversion of their German plants to military production at a time when U.S. government documents show they were still resisting calls by the Roosevelt administration to step up military production in their plants at home". Selon le chercheur Charles Higham, les filiales de Ford qui se trouvaient dans la France occupée par les Allemands continuèrent de produire des camions pour l’armée nazie bien après 1941 (et Pearl Harbor). Selon lui aussi, Ford avait aussi construit une filiale en Algérie, pour fournir directement au Général Rommel des camions et des voitures blindées. Les mêmes camions que
ceux des alliés. En avril 1943, le secrétaire américain au trésor Henry Morgenthau estimait clairement que la production de la filiale française de Ford était
"au seul profit de l’Allemagne", qui avai
t "clairement démontré sa volonté de protéger les intérêts de Ford."
Ford, à partir de 1941 et Pearl Harbour, sait donc qu’il doit infléchir son propos et son attitude s’il ne veut pas être banni du pays ou voir ses bien saisis comme ceux de... Prescott Bush. Son engagement avec Lindbergh auprès d’une extrême-droite qui a bâti tout un discours de "paix" pour ne pas intervenir en Allemagne s’est effondré du jour au lendemain. On commence en haut lieu à trouver que sa sympathie hitlérienne commence à peser. La grande-croix reçue en 1938 commence elle aussi à peser. Lourd :" Ford was the first American and the fourth person given this award, at the time Nazi Germany’s highest honorary award given to foreigners. Earlier the same year, Benito Mussolini had been decorated with the Grand Cross. The decoration was given "in recognition of [Ford’s] pioneering in making motor cars available for the masses." The award was accompanied by a personal congratulatory message from Adolf Hitler. [Detroit News, July 31, 1938.]"
Pour ne rien arranger, Henry Ford avait aussi refusé de produire les moteurs Merlins anglais qui auraient permis de fabriquer plus vite le meilleur modèle de P-51 Mustang, alors qu’il fabriquait en même temps, on l’a vu, des Junkers 88 depuis 1939
: "Henry Ford had been originally opposed to American involvement in World War II, and in 1941 he cancelled a contract to build 6,000 Rolls-Royce Merlin aircraft engines for the British Royal Air Force and 3,000 for the United States Army." Deux
Rolls-Royce Merlin anglais 65 avait été finalement importés, le 25 juillet 1942, puis copiés, des moteurs qui deviendront des
Packard V-1650-3, une version encore améliorée du Merlin 68. Il faudra attendre mai 1945 pour voir voler les premiers à moteur Merlin, au cockpit en goutte d’eau (celui de "
L’Empire du Soleil" de Spielberg) si reconnaissable. Ford sait alors qu’il doit faire quelque chose, sinon...
Sa réponse, pour sauver sa tête, politiquement, sera un des plus grands projets industriels de la guerre 39-45 : Ford va hériger le plus grand hangar de construction d’avions au monde, à l’époque, à
Ypsilanti, à quelques kilomètres à l’Ouest de Detroit, et se lancer dans l
a réalisation de bombardiers B-24, dont la mission principale sera... d’aller écraser l’allemagne sous les bombes !
"The Willow Run Aircraft Plant, completed in 1942, was the largest manufacturing facility in the world, occupying 2.5 million square feet of floor space, with an assembly line three miles long."Les américains, avant l’arrivée du B-29 gagneront la guerre en Europe ave
c deux types de bombardiers : le B-17 et le B-24 Liberator, au nom prédestiné :
"These planes," declared Fortune magazine in April 1942, "represent our supreme bid to regain the initiative. They may save our honor, our hopes—and our necks."
L’effort de guerre incroyable et démesuré consenti par Ford lui rachète aussitôt une conscience : tout le monde salue l’exploit et surtout l’engagement patriotique.
"Sir Oliver Lyttleton, Britain’s minister of production, noted that if Hitler and Goering visited Will Run they "Would have thrown in their hands, or blown out their brains." He concluded, "Five men with the imagination of Henry Ford would end this war within a period of six months." Ford va méthodiquement améliorer la production démarrée à 31 avions/mois en janvier 1943 pour atteindre en Decembre 1944, 365 appareils ce mois-là. Résultat, en juillet 1944, l’usine a déjà produit 5 000 bombardiers.. (il en sortira 8 685 au total au final !) et le président Truman vient alors féliciter Henry Ford sur place :
" In April 1944 Senator Truman, after visiting the bomber plant, called Henry Ford "the production genius" of the United States. In mid-April, following the announcement of the bomber-per-hour production rate, dozens of newspapers hailed Willow Run as "the war production miracle that has been wrought in Detroit" and as the plant that furnished "a sky-full of bombers to wreck the Nazi war machine." Henry Ford was accorded similar praise. " Selon son fils, Henry Ford n’était pas venu une seule fois dans le hangar, sauf le jour de la visite de Truman. Au dernier exemplaire sorti, sur lequel on a apposé son nom seul, il demande à ce qu’il soit effacé et remplacé par la signature de tous les ouvriers. L’homme s’est visiblement racheté une conduite. Les films de propagande à la gloire de la "Willow Run" feront le reste. Pendant ce temps, sous les bombes des Liberator...
on retrouva des Ford V3000 en construction, dans les usines allemandes visées... Des camions Fords, bombardés par des avions Fords...
A la fin de la guerre, on fera un sondage aux USA :
"In the spring of 1945 Roper found that Henry Ford ranked second only to Henry J. Kaiser, a major West Coast shipbuilder, as the man to have done more to win the war than any other American, not counting Presidents Roosevelt and Truman and military figures Ford received approximately twice as many votes as the men ranked third and fourth in the pool" : le fabricant de B-24 et celui des Liberty Ships seront considérés comme ayant vaincu le nazisme, davantage que les deux présidents qui ont été en exercice durant la guerre ! Personne n’a fait attention aux camions de la Wehrmacht.. ; qu’on va pourtant exposer dans des musées américains en prenant soin de ne pas évoquer la fabrication, mais la "capture" par les allemands ! (ici un
Dodge 1941 marqué plus loin "capturé", là u
n Chevolet indiqué comme étant fabriqué par une entreprise française saisie par les allemands !)... Voilà comment on retourne l’histoire à son profit. Et comment on oublie
Ohrdruf (Kaufering4/Schwabmunchen).
Selon beaucoup, propagande bien absorbée, Ford avait fabriqué
"l’arsenal de la démocratie" !!! Après avoir fait celui de l’hitlérisme et comploté contre Roosevelt, mais de cela on ne parlera plus jamais... l’hitlérisme avait été certes vaincu, mais Henry Ford, l’homme qui était à son origine était toujours là. Et ses adeptes toujours en place. Le
successeur de Roosevelt notamment, qu
i écrivait en 1911 :
"I think one man is just as good as another so long as he’s not a nigger or a Chinaman. Uncle Will says that the Lord made a White man from dust, a nigger from mud, then He threw up what was left and it came down a Chinaman. He does hate Chinese and Japs. So do I. It is race prejudice, I guess. But I am strongly of the opinion Negroes ought to be in Africa, Yellow men in Asia and White men in Europe and America."
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