jeudi 11 avril - par C’est Nabum

Effectivement

 

En effet, trop c'est trop.

 

Le terme “EFFECTIVEMENT” est outrancièrement mis à toutes les sauces dans les médias que ce soit par les personnes interrogées ou par les journalistes eux-mêmes. La redondance de ce terme en devient insupportable d'autant plus quand cet adverbe surgit 2 ou 3 fois dans la même phrase, devenant une forme de ponctuation faute de conviction. C'est à croire que loin de le proscrire au nom des usages abusifs de ce mot dans les officines de communication, les gourous des éléments de langage l'imposent pour suppléer le vide sidéral des propos de leurs protégés.

Effectivement, quand un individu à qui l'on tend un microphone se trouve en difficulté de conviction, il convient pour lui d'enfoncer le clou en assénant un terme qui lui donnera cette crédibilité que ses actes sont incapables de lui conférer. Alors, comme des experts le lui ont recommandé, il use jusqu'à la nausée d'adverbes qui souvent manquent cruellement de bonnes manières.

Parmi ces mots outils avant qu'ils fassent éventuellement leur valise, celui-ci tient le pompon grâce à un avantage considérable qui le distingue de nombre de ses camarades. Il permet de débuter la phrase, de le déployer telle une oriflamme qui revendique l’honnêteté et la sincérité de son locuteur. C'est hélas aller bien vite en besogne et lui demander l'impossible tout en oubliant que l'usage exige de recourir à un adverbe de son espace pour enrichir, modifier ou préciser le sens d'un verbe ou parfois d'un adjectif qualificatif.

Lorsque ce malheureux adverbe ne peut compléter un verbe car justement, il n'y a aucune action réelle et avérée à enrichir, il devient un colifichet qu'agite le discoureur pour avoir l'air sans n'avoir rien à dire. C'est aussi pathétique qu'insupportable tout en affirmant haut et fort que la politique n'est que l'art de vendre du vent en agitant le miroir aux alouettes.

Dans d'autres cas, quand ce sont des sportifs, des artistes ou de simples quidams qui sont interrogés, il est alors fort commode puisqu'il permet de répondre à une question posée de telle manière qu'elle implique la réponse. C'est une manière de mâcher le travail, de tendre le micro à des gens qui en la circonstance, ne sont pas en état de répondre posément. Le questionneur n'attendant rien de plus qu'une longue litanie des « Effectivement » qui pleuvent en cascade.

Sorti des fonds baptismaux du langage au xve siècle, cet adverbe vient du nom commun : « Effectif » non pas pour désigner l'immense cohorte de ceux qui parlent pour ne rien dire mais plus précisément pour évoquer ceux qui produisent, qui agissent, qui ont un effet sur le cours des choses, un rôle effectif dans l'agir.

Nous assistons donc au dévoiement de son sens puisque l'action est repoussée dans le flot d'une parole qui se contente d'enrober l'inaction par la répétition comme une rengaine ou une pensée magique de l'adverbe qui laisse supposer que le mouvement est en marche.

Au terme de cet exposé rébarbatif, je vous suggère effectivement et désormais de faire le compte de cet adverbe lors d'un discours d'un palabreur de tribune (il n'est guère permis de les prétendre tribuns) et de lui faire part de son score. Vous pouvez en profiter pour fonder votre prochain vote sur ce critère qui en vaut un autre dans le concert d'une campagne qui se fera fort de jouer de la langue de bois pour présenter des projets qui sont en définitive, au-delà de minuscules nuances, parfaitement identiques en matière européenne.

Effectivement, le débat tombe misérablement dans une redondance de propos qui aliènent durablement l'avenir à une institution qui se passe de l'opinion d'un peuple nonobstant un parlement qui n'est qu'une illusion de pouvoir démocratique.

 



26 réactions


  • Sirius Brutus 11 avril 10:25

    tout-à-fait !


  • Fergus Fergus 11 avril 11:40

    Bonjour, C’est Nabum

    « Effectivement » ou « en effet » (cette locution étant omniprésente dans les prises de parole de Natacha Polony) sans cesse répétés est agaçant, vous avez raison.

    Cela dit, je ne jette pas la pierre aux personnes incriminées, ayant moi-même eu tendance à user plus que de raison desdites locutions.

    Ces tics de langage n’en sont pas moins fâcheux lorsqu’ils sont par trop récurrents dans la bouche des journalistes, pourtant passés par la moulinette du media-training.

    Du côté des sportifs, c’est moins l’usage de l’adverbe « effectivement » qui est agaçant que celui, encore plus fréquent, de « voilà » ou « et voilà » dans la majorité des phrases de certains et certaines d’entre eux.


    • Sirius Brutus 11 avril 12:19

      @Fergus

      et avez-vous remarqué que les jeunes femmes interviouvées commencent toutes la première phrase de leur réponse à une question par « en fait » et la deuxième par « du coup » ?
      elles ne font pas de troisème phrase soit parce qu’elles ont perdu le fil de leur « pensée », soit parce que l’interviouveur est déjà passé à autre chose 


    • C'est Nabum C’est Nabum 11 avril 12:33

      @Fergus

      Effectivement ce voilà est exaspérant


  • ZenZoe ZenZoe 11 avril 12:49

    Du coup, vous voulez dire qu’en fait, le mot effectivement vous gêne quelque part au final ?


  • Seth 11 avril 14:28

    Employé en début ou en fin de phrase ça relève du langage « phatique » qui ne signifie rien mais sert uniquement à garder le contact avec l’autre interlocuteur.

    Ce que je ne supporte pas c’est l’emploi du mot « conséquent pour signifier »important« . Bien qu’on le trouve dans ce sens, conséquent signifie logique, normal, qui est accord avec...

    Toucher un salaire »conséquent", qu’il soit important ou pas, signifie en adéquation avec le service fourni.


    • C'est Nabum C’est Nabum 11 avril 15:43

      @Seth

      Conséquemment je vous donne raison dans l’instant


    • Fergus Fergus 11 avril 15:48

      Bonjour, Seth

      « je ne supporte pas (...) l’emploi du mot « conséquent pour signifier »important«  » 

      C’est pourtant l’un des sens de ce mot. Vérification faite, même le Larousse l’admet, tout en reconnaissant qu’il s’agit d’un « emploi critiqué ». 
      A mon avis, cette acception du mot est bien partie pour être pérennisée, à l’image de ce qu’il s’est passé pour de nombreux mots dont le sens initial a été perdu ou est tombé en désuétude.
      Exemple : « canonique » signifiait originellement « conforme aux canons de l’Eglise ». Or le temps passant, l’« âge canonique », qui faisait référence aux 40 ans minimum exigés pour devenir servante de curé (histoire de ne pas trop émoustiller les prêtres ou d’éviter des grossesses malvenues), est devenu synonyme d’« âge avancé ». Et c’est dans ce sens que cette expression est désormais comprise la plupart du temps.


  • rogal 11 avril 15:01

    De fait.


  • mosel 11 avril 18:20

    Désintéressement,dévouement,fraternellement. hein ? quoi ? c’est dans le dico ça !.


  • ETTORE ETTORE 11 avril 21:31

    Bonsoir Nabum .

    EFFECTIVEMENT, est utilisé par les z’homs politiques, parce que dire « OUI », peut parfois être condamnable.

    Alors, effectivement, il y a répétition de cet accord, qui en plus d’être long, leur permet de réfléchir à la suite, sans bafouiller, tout en faisant semblant d’être raccord, mais dans des termes ( pas romains) effectivement....Vaseux !


  • Jean Keim Jean Keim 12 avril 08:14

    Oui !

    Cependant n’oublions pas que la complexité et le lieu des études des cadres, aide à la préparation et à la réalisation des nouvelles propositions structurant le système de formation, favorisant ainsi effectivement l’émergence d’un axe de progrès, dont il suffira de garder la direction.


  • ilias 12 avril 16:21

    Ode de trahison du cher vocable “Effectivement" translaté en seul adverbe envahissant


    Effectivement, tel un refrain lassant,

    Il hante nos médias, discours incessant.

    Des politiques aux experts, tous l’utilisent,

    Un mot galvaudé, qu’ils abusent.


    Dans chaque phrase, il s’impose, pesant,

    Un tic verbal, lassant et agaçant.

    Son usage excessif, vide d’idées,

    Trahit un esprit pauvre, aux pensées bridées.


    Derrière ce mot, on cherche à paraître,

    Convaincant et sûr, mais le masque est défaillant.

    Discours creux et vides, sans aucun poids,

    Effectivement ne cache que le vent des mots.


    Le fainéant s’y réfugie, faute d’argument,

    Pour combler le silence, son arme préférée.

    Masquer l’indigence de sa pensée en sommeil,

    Effectivement devient son unique outil.


    N’est-il pas issu d’ « effectif », ce mot ?

    Qui évoque l’action, le concret et le vif ?

    Mais détourné de son sens originel,

    Effectivement sert un discours artificiel.


    Dans un flot de paroles, il crée l’illusion,

    D’un mouvement, d’une action en construction.

    Mais derrière ce rideau de mots superflus,

    Se cache l’inaction, et un esprit reclus.


    Soyons vigilants face à ce langage creux,

    Qui sape notre intelligence, d’un pas insidieux.

    Comptez les « effectivement », dans chaque discours,

    Et jugez de la vacuité des propos qui en courent.


    Que ce critère guide votre choix, sans détour,

    Lors des prochaines élections, votez sans effroi.

    Punissez les bavards et les phraseurs encombrants,

    Qui abusent du langage, pour nous rendre abrutissants.


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