Dessalement de l’eau de mer : un domaine de pointe pour l’industrie française
Un domaine dans lequel l’histoire des relations industrie/communautés locales en France, souvent décriées, a placé nos grands industriels nationaux en positon de leadership mondial est celui des services aux communautés, fourniture d’eau et assainissement, gestion des déchets et propreté auxquels nos industriels essayent de rajouter de nos jours les transports publics ou la fourniture d’energie.Mais le domaine dans lequel nos industriels sont le plus en pointe est un domaine très technique et spécifique, celui du dessalement de l’eau de mer.Vous connaissez leurs noms, il s’agit de nos duétistes bien connus de la Générale des eaux et de la Lyonnaise des eaux, devenus depuis Véolia et Suez.
La pénurie d’eau est en effet de deuxième problème majeur du monde nouveau qui se profile à l’horizon avec celle de l’énergie. L’eau n’est pas rare à la surface du globe mais par contre l’eau douce l’est et est surtout mal repartie à la surface du globe.Depuis des décennies, les précipitations, l’utilisation des eaux pompées dans les rivières, lacs naturels et artificiels ou dans les nappes phréatiques et le traitement des eaux usées avant rejet dans les rivières, ont suffit pour satisfaire les besoins des humains pour l’agriculture, très grosse consommatrice, et pour les usagers familiaux et la proprété. Malheureusement, l’accroissement de la demande de populations elles-mêmes en forte augmentation, les besoins croissant d’une agriculture demandant de plus en plus d’irrigation et l’accroissement des températures et des sècheresses nous font atteindre maintenant les limites du recours à l’eau douce.
Il existe bien sûr une solution radicale pour entrer dans le domaine de l’eau sans limite : c’est celle du dessalement de l’eau de mer pour la rendre buvable et utilisable.Seul problème cela coûte bien plus cher que l’utilisation de l’eau du ciel ou des rivières, de 0,7 à 1,8 euros contre 0,25 pour l’eau de rivière. Pourtant, c’est d’autant plus attractif que 40 % de la population mondiale vit à moins de 100 km des côtes !
Il existe deux méthodes de dessalement, la distillation de l’eau de mer qui permet de séparer l’eau des sels minéraux qu’elle contient mais qui coûte très cher en énergie et donc de plus en plus en prix. C’est Véolia qui est le leader de cette voie dite thermique. L’autre est l’osmose inverse qui est une filtration de l’eau au travers de membranes poreuses spéciales sous forte pression (80 bars) et à grande vitesse qui est particulièrement maitrisée par Dègremont, la filiale de Suez dans le traitement des eaux. Par contre le thermique offre l’avantage, si on le couple à des centrales, en particulier nucléaires, existantes, de pouvoir récupérer des calories qui y sont perdues. Celles que vous voyez surmonter d’un panache de vapeur blanche les échangeurs des centrales.
Quels sont les pays les plus demandeurs ? Les plus arides bien sûr comme les pays riverains du golfe Persique, Arabie Saoudite, Oman, Koweit, Qatar et les plus peuplés dans des zones à climat chaud comme l’Australie qui en est à sa sixième année de sécheresse, la Chine ou même... l’Espagne.
Suez par exemple a installé une usine de dessalement de 62 millions de M3/an à Fujaraih sur le golfe Persique et participe aux appels d’offres en cours pour la distribution d’eau à Abou Dhabi (500 000 habitants) et à Ryad en Arabie Saoudite (5 millions d’habitants). En Oman, c’est dans le port de Sohar qu’elle opère une usine de dessalement couplée à un centrale de 585 MW et la société fourni 50 % des besoins du sultanat. Enfin Suez vient de remporter l’appel d’offre pour la construction d’une usine de dessalement de 200 000 M3/jour à Barcelone, la plus grande d’Europe.
Veolia, quant à lui, vient de remporter le contrat de la plus grande usine thermique au monde en Arabie Saoudite qui fournira pas moins de 800 000 M3 par jour d’eau dessalée. Elle y sera couplée à une centrale électrique gérée par... Suez. Au moins, ils auront une langue commune.
C’est dire que le marché du dessalement progresse considérablement dans le monde à un rythme de 15 à 20 % tous les ans. Dans les dix ans à venir, elles serviront à alimenter pas moins de... 300 millions de personnes dans le monde.
Merci donc aux collectivités locales qui en surpayant sans doute un peu leur eau depuis des années ont permis l’édification d’une industrie d’avenir chez nos industriels du secteur.
A suivre dans un message prochain.