L’OCDE n’aime pas les biocarburants
Les biocarburants sont soudain apparus, il y a maintenant quelques années, comme une des solutions à la pénurie qui se rapproche des carburants et à la lutte contre le réchauffement climatique. Grâce, dans ce dernier cas, à une argumentation spécieuse dite "de la terre à la roue" qui permet de soustraire des émissions de CO2 du moteur, le CO2 absorbé par la plante durant sa croissance sous le prétexte que la période pendant laquelle se passait la croissance de la plante jusqu’à sa consommation comme carburant était annuelle. Car, en ce qui concerne les émissions brutes de CO2 émises par les biocarburants lors de leur combustion, elles sont rigoureusement identiques à puissance émise égale à celle d’un carburant pétrolier.
Lorsque l’on consomme un carburant d’origine pétrolière, on remet finalement en circulation dans l’atmosphère du carbone qui y a été emprisonné, il y a des millions d’années. C’est également vrai d’ailleurs pour toute combustion de charbon, de tourbe ou de lignite ou encore de gaz.
L’histoire ne dit pas non plus si, lorsque l’on effectue ce calcul d’émission de CO2 "de la terre à la roue", on tient compte du CO2 qui aurait été piégé par toute autre culture qu’une culture "à biocarburants". En fait ce calcul ne tient que si les végétaux utilisés pour produire ces biocarburants l’ont été sur des terres en jachère. C’est la raison peut-être pour laquelle l’OCDE dans un rapport sur les biocarburants qui vient de paraître s’étonne du peu d’impact de leur utilisation, maintenant assez répandue, sur les émissions globale de CO2 qu’elle estime à moins de 1 % de diminution...
L’OCDE a donc refait dans son rapport le calcul réél de l’efficacité environnementale des biocarburants des différents types connus en tenant compte de toute l’énergie consommée pour les produire, de celle utilisée par les tracteurs et les équipements qui sont utilisés pour les planter, les traiter et les ramasser à celles nécessaires pour transformer les végétaux en éthanol (moteur à essence) ou en ester d’huile végétale pour le gazole des moteurs diesels.
Les résultats ci-contre montrent que seul l’éthanol issu de la culture de la canne à sucre est efficace à 80 %, c’est-à-dire ne consomme pour sa production que 20 % de l’énergie qu’il rend lors de sa combustion dans un moteur. Tous les autres biocarburants produits à partir de cultures de blé, de maïs, de betterave ou de colza ou de tournesol consomment pour leur culture et leur transformation en carburant entre 40 et 60 % de l’énergie qu’ils restituent dans les moteurs !
Pourquoi cet avantage pour la canne à sucre ? Parce que la coupe de la canne à sucre est toujours assurée manuellement et à pas cher et que la paille des cannes, la bagasse, est utilisée comme combustible dans le processus de distillation de l’alcool alors que les processus dans les pays développés sont infiniment plus mécanisés donc coûteux en énergie.
C’est dire que ce n’est pas brillant comme efficacité environnementale. Si vous rajoutez à cette efficacité discutable le fait qu’il faut investir lourdement pour les produire (Cf. les véritables unités de raffinage que vous pouvez trouver dans les campagnes pour les produire), que vous utilisez des surfaces arables qui seraient autrement utilisées pour la nourriture humaine et que toute cette production est fortement subventionnée, vous croyez rêver.
Ces éléments étaient évidents dès le départ pour tout scientifique et étaient même connus à quelques pourcentages près. Pourquoi alors nous sommes-nous lancés tête baissée dans ces cultures pour découvrir aujourd’hui qu’elles n’apportent pas grand-chose à la lutte contre le réchauffement climatique ? Une combinaison du lobby agricole qui a sauté sur un débouché prometteur pour notre agriculture en recherche de revenus, de la pression des ONG écologistes qui comme chacun sait soutiennent des positions sur les principes sans jamais faire les calculs de ce que ça coûte et de ce que ça rapporte, du relais des médias qui nous offrent toujours ce que nous voulons entendre parce que ça fait vendre et bien sûr à cause du besoin de nos hommes politiques de montrer qu’il font des choses importantes et dans le vent pour les populations. Le défaut de la cuirasse bien connu de la démocratie...
Que va-t-il se passer maintenant ? On va poursuivre sur les biocarburants, mais à plus petite vitesse, avec bien moins de subventions et en passant aux biocarburants de seconde génération, ceux qui ont un rendement semblable à celui de l’éthanol de canne à sucre. Et on va enfin se décider à subventionner les actions qui sont susceptibles d’apporter le maximum d’économie à coût raisonnable, mais qui sont bien moins "glamour" et médiatiques que les biocarburants... l’amélioration de l’habitat ancien bien sûr.