vendredi 10 février 2012 - par cyrilcab

Les recommandations du conseil de l’union européenne sont-elles contraignantes ?

Certaines personnes contestent le caractère obligatoire des recommandations du conseil sur les grandes orientation de politiques économiques (les GOPE).

Qu'en est-il réellement ?

Commençons par la définition

Article 288 du TFUE
Pour exercer les compétences de l'Union, les institutions adoptent des règlements, des directives, des décisions, des recommandations et des avis.

Le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout État membre.

La directive lie tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens.

La décision est obligatoire dans tous ses éléments. Lorsqu'elle désigne des destinataires, elle n'est obligatoire que pour ceux-ci.

Les recommandations et les avis ne lient pas.

A première vu, l'affaire est entendue, les états membres de l'union ne sont pas obligés de respecter les recommandations de la commission, cependant...

Supposons, un état membre de l'union, qui respecterait scrupuleusement les directives européennes en matière de déficit budgétaire et de dette (respectivement 3% et 60% du PIB), mais qui, malgré tout, ne suivrait absolument pas les recommandations sur les GOPE.

Fixation de l'âge de départ à la retraite à 57 ans et demi, large remboursement des soins médicaux, hausse des rémunérations dans le secteur public, etc…

Quels seraient les pouvoirs de la commission européenne pour obliger cet état à suivre les recommandations ?

Penchons-nous sur les textes des traités européens.

Dispositions communes :

Par le présent traité, les HAUTES PARTIES CONTRACTANTES instituent entre elles une UNION EUROPÉENNE, ci-après dénommée "Union", à laquelle les États membres attribuent des compétences pour atteindre leurs objectifs communs (article premier du TUE).

Les différentes prérogatives :

Le Conseil européen :

Le Conseil européen donne à l'Union les impulsions nécessaires à son développement et en définit les orientations et les priorités politiques générales. Il n'exerce pas de fonction législative (article 15.1 du TUE).

La Commission européenne :

La Commission promeut l'intérêt général de l'Union et prend les initiatives appropriées à cette fin. Elle veille à l'application des traités ainsi que des mesures adoptées par les institutions en vertu de ceux-ci. Elle surveille l'application du droit de l'Union sous le contrôle de la Cour de justice de l'Union européenne. Elle exécute le budget et gère les programmes. Elle exerce des fonctions de coordination, d'exécution et de gestion conformément aux conditions prévues par les traités (article 17.1 du TUE).

La Cours de justice de l'Union Européenne (CJUE) :

La Cour de justice de l'Union européenne comprend la Cour de justice, le Tribunal et des tribunaux spécialisés. Elle assure le respect du droit dans l'interprétation et l'application des traités (article 19.1 du TUE).

Les Etats membres :

(…) Les États membres facilitent l'accomplissement par l'Union de sa mission et s'abstiennent de toute mesure susceptible de mettre en péril la réalisation des objectifs de l'Union (article 4.3 du TUE).

En clair, le Conseil européen a pour mission de dire quelles doivent être les orientations politiques nécessaires au développement de l'Union, la Commission européenne doit prendre les initiatives appropriées afin de mettre en œuvre ces orientations, les Etats membre s'engagent à ne pas mettre en péril les objectifs de l'Union.

Quand à la CJUE, elle veille au respect de l'application des traités.

Dans ce cas, la Commission européenne peut parfaitement décréter qu'un état ne respecte pas les obligations inhérentes à l'article 4.3 du TUE. Elle peut donc, évoquer l'article 258 du TFUE.

Article 258 du TFUE

Si la Commission estime qu'un État membre a manqué à une des obligations qui lui incombent en vertu des traités, elle émet un avis motivé à ce sujet, après avoir mis cet État en mesure de présenter ses observations.

Si l'État en cause ne se conforme pas à cet avis dans le délai déterminé par la Commission, celle-ci peut saisir la Cour de justice de l'Union européenne. 

En conclusion, même si techniquement, une recommandation n'a pas de pouvoir contraignant, dans la pratique, nous voyons bien que la commission a les outils nécessaires pour se faire obéir.

Par ailleurs, comme nous le constatons tous les jours, et très étrangement, les gouvernements des états n'ont de cesse que de présenter des politiques économiques compatibles avec les recommandations du Conseil sur les GOPE, quitte à subir les foudres de leurs concitoyens.

Ceci expliquant surement cela… 

Cyril CARBONNEL



3 réactions


  • latortue latortue 10 février 2012 13:45

    ahhhh elle est belle l’Europe et que nous a t’elle apporté de bon a part le chômage la récession le malheur la spéculation sur des dettes démentielles ,elle qui devait d’après les politiques nous emmener bonheur et prospérité ne nous a apporté que des ennuis .Les pauvres Grecs qui subissent la tyrannie de l’Europe et toute la pléiade de pays au bord de la faillite .
    Rappelez vous la France avant l’Europe rappelez vous un instant !!!!!! nous en avons marre de l’Europe et toute cette merde qu’elle nous impose de cette fuite de fric de cette quantité de profiteur qui vive au crochet des pays grassement .
    MARRE DE L EUROPE


  • B comme Bubu B comme Bubu 15 février 2012 01:31

    Je ne suis pas d’accord avec cette analyse. 


    Dans le respect de l’application des traités, la Commission a un rôle de police mais pas de juge : en aucun cas elle ne peut dire le droit, c’est exclusivement le rôle de la CJUE.
    Ainsi, aux termes de l’alinéa 2 Art 258 TFUE, «  Si l’État en cause ne se conforme pas à cet avis dans le délai déterminé par la Commission, celle-ci peut saisir la Cour de justice de l’Union européenne. »

    La CJUE saisie à la demande de la Commission devra donc se prononcer sur le fait de savoir si l’Etat en question a ou non violé la réglementation UE.
    Si la Commission invoque une recommandation, l’Etat opposera logiquement son caractère non contraignant tel que résultant clairement de l’Art 288 TFUE.
    La CJUE a-t-elle rendu à ce jour des décisions contraires à l’Art 288 TFUE ? Je n’en ai pas connaissance.

    Donc, sauf à me prouver le contraire jurisprudence à l’appui, je maintiens que les recommandations ne sont pas contraignantes.

    • cyrilcab cyrilcab 15 février 2012 02:19

      Bonjour, Bubu. 


      A ce jour je n’ai effectivement pas fait de recherche sur la jurisprudence, cependant, je peux appuyer mon argumentaire par plusieurs points. 

      1 • l’observation 
      2 • l’interprétation des textes

      1) il me parait extrêmement suspect que TOUTES les mesures que l’on est en train de nous préparer ou que l’on a déjà mises en oeuvre collent parfaitement avec les recommandations du Conseil sur les GOPE. 
      Déjà les recommandations de 2003, demandaient à la France une plus grande ouvertures des marchés de l’énergie, une augmentation de l’âge de départ à la retraite, une baisse des charges sur l’assurance maladie (dé-remboursement des médicaments), une stagnation générale des salaires, avec en particulier une fixation des salaires de la fonction publique pour « l’exemple » (sic), des mesures incitant les chômeurs à une retour à l’emploi plus rapide, une plus grand flexibilité des contrats de travail, etc...

      Alors pourquoi ? 
      En effet, ces mesures ne sont absolument pas populaires, nos gouvernants auraient alors pu s’en affranchir et ce concentrer sur les seules directives, la dette et le budget (60% et 3% du PIB), de façon à respecter les seules mesures contraignantes en la matière. 

      2) Comme je le disais dans mon article, tout est une question d’interprétation. 
      En effet, techniquement vous avez raison, la CJUE diraient, dans le cas que vous présentez, qu’en vertu de l’article 288 du TFUE, une recommandation n’est pas contraignante et débouterait la Commission.
       
      Oui mais voila, dans mon exemple, la commission attaquerait sous un autre angle. Elle assignerait l’état en question sur le fait que, par ses agissements, il ne respecte pas son engagement de l’article 4.3 du TUE « Les états membres facilitent l’accomplissement par l’Union de sa mission et s’abstiennent de toute mesure susceptible de mettre en péril la réalisation des objectifs de l’Union » 

      Je vous rappelle que « le conseil européen a comme prérogative de donner les impulsions nécessaires au développement de l’Union et d’en définir les orientations(...) (art. 15.1 du TUE). » 
      Les recommandations sur les GOPE sont donc la direction à prendre en politique économique - d’après le conseil - pour que l’Union puisse se développer. 
      Un état qui n’irait pas dans le sens « recommandé » par le Conseil ne respecterait pas l’article 4.3 du TUE. 

      Bien entendu, tout est dans la nuance, ne pas respecter les recommandations à cause d’une impossibilité passagère est une chose, qui peut être accompagnée bienveillamment par la Commission, y désobéir ouvertement, en est une autre.
       
      Action qu’aucun état de l’Union n’a encore entreprise, pour l’instant. 

       

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