vendredi 27 janvier 2006 - par PAF 2.0 (Politique arabe de la France)

Choix palestinien - choix israélien : vers quelle polarisation ?

Les jeux sont faits : les Palestiniens ont choisi leurs élus dans une véritable fête démocratique. Les résultats, encore incertains, montrent une percée - victoire ? - du Hamas. Il convient d’examiner ces élections dans la forme et dans le fond.

Pour la forme, ces élections sont une grande claque sur la joue des intello-fascistes anti-américains qui n’ont pas cessé de nous asséner leur litanie antidémocratique. Elles ont prouvé au monde entier que le peuple arabe « est prêt » pour la démocratie. Le Yedihot Aharonot israélien souligne, ce matin, la satisfaction des forces de sécurité israéliennes quant au déroulement des élections. Les craintes de violences et d’attentats se sont révélées vaines. T. Livni, ministre des affaires étrangères, a confirmé qu’aucune plainte n’était arrivée au QG du ministère, mis en place à cette occasion, ni de la part des forces de sécurité ni de celle des observateurs internationaux. Le taux de participation très élevé est aussi un indice de la démocratie, tout comme le ballot des résultats, bien loin des 99% des plébiscites arabes habituels. Mais pour que la démocratie soit entière, il faut, comme le souligne Sami el Soudi, « qu’un parti reconnaisse la victoire d’un autre, matérialisant une autre étape incontournable du processus démocratique » (Métula News Agency, repris par Primo-Europe). D’ailleurs, toujours selon le Yedihot Aharonot, une personnalité du Fatah aurait déclaré qu’Abou Mazen (Mahmud Abbas) devra démissionner si la victoire du Hamas se trouve confirmée.
Pour le fond, quelle est la signification de ces élections ? Les Palestiniens ont fait leur choix, et voté massivement pour un parti extrémiste qui détient une branche armée, prône la destruction totale d’Israël dans sa charte, se voit partie intégrante du Djihad mondial et refuse tout dialogue avec Israël. Ce matin encore, le Hamas a réaffirmé son refus de désarmer et de changer quoi que ce soit dans sa charte. Pour beaucoup, cette extrémisation de la société palestinienne va conduire à la catastrophe. D’autres, plus optimistes, rappellent, comme les médias électroniques israéliens hier, que les élections ont eu lieu sous le signe des problèmes intérieurs palestiniens, l’économie, la corruption, etc. Khaled Abou Toameh, du Jerusalem Post, souligne dans un long article repris par le Wall Street Journal le « besoin de changement » de la société palestinienne, le vote pour le Hamas ne signifiant pas automatiquement un vote pour le « génocide ».
Cette "extrémisation" palestinienne, qui renforcera certainement le pessimisme israélien, aura des conséquences sur les positions israéliennes aux prochaines élections de la Knesset.
Le vote « Hamas » des Palestiniens risque de pousser beaucoup d’Israéliens vers la droite : on assistera à une polarisation de la région, les pôles étant les positions extrémistes des deux camps. Une confrontation sera alors inévitable à court terme.
Dans un autre scénario possible, les Israéliens camperont dans leurs positions centristes, derrière la barrière de sécurité : le gouvernement continuera l’entreprise de Sharon des actions unilatérales. Ce sera une autre forme de polarisation de la région, les pôles étant la perception différente du conflit par les parties, perception israélienne du manque de « partenaire » pour faire la paix tant souhaitée, perception extrémiste, du côté palestinien, et « fuite en avant ».

Le vote palestinien renforce donc l’incertitude caractéristique de la région.
La situation évoluera en fonction des facteurs internes aux deux camps et des faits sur le terrain dans les semaines à venir.
Pour les facteurs internes, citons l’évolution pragmatique du Hamas, la perception de la nouvelle situation par les Israéliens et leur vote aux prochaines élections, et enfin le leadership que saura montrer Olmert. Quant aux faits du terrain, il est certain qu’un attentat en Israël entraînerait une réponse violente et une symétrisation du conflit.



12 réactions


  • David Wynot (---.---.197.97) 27 janvier 2006 18:48

    Bonsoir J’ai le regret de dire que la rue palestinienne a pris le contre-pied la modération de ses dirigeants et de la voie de la paix. Le Hamas c’est l’Ahmenidjab ou le GIA de la Palestine. Au pouvoir en Iran ou combattu en Algérie Je ne voie que Bargouti (sorte de Sharon palestinien en prison) pour reprendre un jour la main vers la démocratie, la vraie, pas celle qui permet de prendre le pouvoir pour mieux enterrer la démocratie. Qu’en sera t il des Leila Chahid qui ont tant apporté au dialogue Israelo-palestinien ? Une femme peut-elle s’exprimer dans l’ideologie du hamas ?? Bon WE

    David


  • (---.---.172.244) 27 janvier 2006 19:20

    Excellente analyse. Il est a noter que plus de 60% des palestiniens ont vote pour un parti qui ne pronne rien d’autre que la violence et la haine envers Israel. Il a gagne du au deficit du parti au pouvoir qui est plus celebre pour sa corruption que pour des actions en faveur de son peuple. Les elections desormais derriere nous il va etre difficile de convaincre que le peuple palestinien veut la paix quand il met au pouvoir les pires ennemis de la paix qui n’hesitent pas a dire que le processus de paix ne commencera que quand Israel disparaitra.

    Les moderes ont recu si peu de votes qu’il est difficile de croire que Israel a un partenaire pour avancer vers une solution pacifique.

    J’imagine que nombreux vont etre les palestiniens chretiens qui vont etre chasses ou qui vont partir d’eux memes pour ne pas rester dans un territoire domine par un pouvoir islamiste nihiliste.

    Reste a savoir si les gouvernements occidentaux vont continuer a alimenter financierement les palestiniens, si oui comment peuvent ils geler les avoirs des organisations terroristes sur leurs territoires et a la fois financer le futur gouvernement palestinien.


  • Stéphane (---.---.67.160) 27 janvier 2006 22:21

    Bonsoir Emmanuel,

    Ayant eu un aperçu de vos convictions et de votre tropisme idéologique, j’avoue que j’ai été assez dubitatif voire perplexe, par le ton de vote article.

    Cette attitude « détachée » et « clinique » dans analyse à priori ne vous correspondent pas.

    C’est le commentaire mi-laudatif, mi-jésuitique de notre jeune ami le « freedom fighter »(qui ne cache pas son engagement sioniste) qui m’a fait mieux comprendre votre attitude.

    Finalement, cette victoire du Hamas n’est pas vraiment une mauvaise nouvelle.

    Comme le disait un article du NYT de ce jour,« Israël will get a free hand ». En d’autres termes les faucons vont se retrouver en famille et vont enfin pouvoir en découdre sans ambages.Comme l’un parait manifestement plus fort que l’autre, tant pis pour le plus faible !

    Comme tout ceci est puérile et surtout irresponsable !

    A priori, je ne verrais pas d’un mauvais oeuil que les extrémistes des deux bords s’exterminent.Le problème de ces va-t-en guerre c’est qu’ils entrainent toujours des innocents. Par ailleurs, je crois que le schéma n’est malheureusement pas aussi limpide que cela.

    Car entretemps la donne à changé.Nous avons déjà eu l’occasion d’en débattre à propos de l’Iran.Le centre de gravité s’éloigne petit à petit de Washington (pour ne pas parler de l’Europe). Le centre de gravité se déplace vèrs l’est.

    Il est trop tôt pour le regretter ou s’en réjouir.

    L’avenir le dira.

    Ce qui est certain c’est que l’est a besoin de ressources énergétiques...

    En ce qui me concerne, je ne suis absolument pas certain de l’issue des évènements et il n’est pas exclu que d’autres « séismes » se préparent.

    L’édito de Primo( qui, il est vrai, a l’art de faire dans le catastrophisme)était éloquent !

    Pour terminer, j’avoue que je n’ai pas très bien compris votre salve sur les « intello-fascistes ».

    Si j’ai bien compris, si l’on ne se réjouit pas de l’arrivée du Hamas au pouvoir, l’on est fasciste ?

    Pousser la logique neocon à ce point me parait un peu absurde...


  • BB (---.---.175.207) 28 janvier 2006 08:57

    Je ne sais pas si je fais partie des « intello-fascistes anti-américains », mais il me semble que le peuple (ou le monde) Arabe glisse vers la théocratie radicale et djihadiste généralisée.

    Utiliser la voie démocratique ne rend pas plus démocrate.

    Ces élections permettent au Hamas de s’exprimer « officiellement » sur la scène internationale fort de la légitimité des Urnes. Entendrons-nous la voix du peuple palestinien en mal d’une patrie stabilisée et en paix celle du retrait des territoires occupés ou celle de Téhéran qui se pense comme centre de la lutte contre l’occident avec ses thèses révisionnistes et la suppression de l’état d’Israël ?

    En choisissant la voie des urnes, le Hamas prend une nouvelle position stratégique, qui ne pourrait que s’affaiblir si les actions terroristes devaient se poursuivre.


  • Sylvain Reboul Sylvain Reboul 28 janvier 2006 10:44

    ll ne faut pas réduire la démocratie à une simple procédure électorale, ni croire que celle-ci puisse suffire à entraîner, comme par magie, un changement démocratique de et dans la la société.

    Encore faut-il qu’ un certain nombre de principes d’organisation politique de la société soient reconnus et garantis par la loi, à savoir :

    la reconnaissance des droits égaux entre tous (hommes et femmes) ; la question du statut des femmes étant le meilleur marqueur du fonctionnement de la société démocratique qui soit.

    Les libertés individuelles fondamentales : économiques, politiques et de penser.

    Ce qui implique la reconnaissance pleine et entière de la laïcité et de la séparation entre la religion et la politique

    Pour le moment la victoire du Hamas n’est donc pas plus une victoire de la démocratie que la victoire de Hitler en 33. La majorité d’une population peut toujours devenir une tyrannie majoritaire dès lors que les principes susnommés ne sont pas reconnus...

    Compte tenu de l’idéologie et du programme actuels du Hamas, sa victoire est donc tout sauf celle de la démocratie !

    On peut toujours rêver à une « conversion » du Hamas...mais la réalité actuelle de ce mouvement nous interdit de soutenir par nos impôts un gouvernement dirigé par une organisation politique dont le programme est radicalement anti-démocratique.

    Le rasoir philosophique


  • ericfrel (---.---.184.205) 30 janvier 2006 12:30

    Finalement, toujours les memes commentaires d’intellectuels, on juge mais on oublie de réfléchir, on constate un mal mais on ne veut ni en voir la cause ni appliquer le remède : infection > gangrène > amputation. Ce conflit dure depuis des décennies suite au partage du monde de pays impérialiste (dont une dictarure avérée : staline). Messieurs, imaginez que des puissants aient imposé qu’Israel remplace la Bretagne (par exemple), et que les Bretons devaient laisser leurs terres ou accepter de devenir des israeliens, ne serions-nous pas EXTREMEMENT choqués ? ne seriez-vous pas toujours en « résistance » ? il n’est pas question de religion ici, mais de spoliation, d’injustice pure et simple. Et je vous dénie le droit de me traiter d’anti-sémite, de racisme, de révisioniste, d’anti-démocrate, etc... (mais j’accepte anti-impérialiste). Par contre, je vous conseille une bonne auto-psychanalyse pour vérifier qu’il ne vous reste pas finalement un zeste de culture colonialiste (objectivement). A chaque fois que vous vous exprimez, vous devriez appliquer ce filtre à vos propos : « faites ce que je vous dis, pas ce que je fais ». Et comme je le lisais récemment, quand on compare des situations, s’assurer qu’on ne sait pas donné bonne conscience en remplaçant certains termes comme souvent de nos jours : résistant par terroriste, colonisation par libération, collabo par démocrate, victime civile per dommage collatéral. Une autre façon de voir ce conflit (et d’autres), et de juger objectivement qui est le « pot de fer » et qui est le « pot de terre », si vous faites de décompte des morts depuis l’intifada2, c’est 1 israelien pour 4 palestiniens. Je m’arrèterai là, j’ose meme pas parler du mur de « idem-berlin »...


  • Igor (---.---.213.150) 1er février 2006 12:00

    A Ericfrel

    Ne vous-êtes vous jamais demandés pourquoi, à partir des années 1880, de plus en plus de Juifs choisirent de s’installer en Palestine et pas ailleurs (Afrique, Patagonie ou Australie). Et pourquoi ces mêmes Juifs firent en sorte d’obtenir leur Etat ? Tout simplement parce la Terre d’Israël (Eretz Israel en hébreu) avait une place centrale dans l’identité juive en exil. A vous lire, j’ai l’impression que que vous niez tout lien entre la Terre d’Israël et le peuple juif.

    D’autre part, contrairement à ce que vous écrivez, ce ne sont des « puissants » qui ont « imposé Israël ». Ce sont les Juifs eux-mêmes qui ont obtenu le droit de s’auto-administrer au sein d’un Etat libre et démocratique.

    Pas besoin d’une « bonne auto-psychanalyse » pour s’en rendre compte Eric.


    • (---.---.84.94) 1er septembre 2006 22:49

      @igor, Bien sûr que les Juifs ont un lien particulier avec la terre de Palestine, comme d’ailleurs les chrétiens et les musulmans, mais ce lien entre les juifs et la terre de Palestine leur donnait-il le droit d’exproprier les Palestiniens, de les expulser ?

      La Bible instaure un lien spirituel entre les Juifs et la Palestine et ne constitue en aucun cas un registre de cadastre donnant un droit de propriété.

      ET puis au nom de quoi peut-on justifier le fait qu’israél accorde la nationalité et le droit de s’établir sur son sol à toute personne prouvant ses origines juives alors qu’elles refuse aux réfugiés Palestineins le droit de retour sur leurs propres terres et aux Arabes vivant en Israél le droit au regroupement familial, n’est-ce pas là des pratiques de l’Apparthied ?!


  • (---.---.123.107) 10 février 2006 16:50

    En plus quand on voit ce que les palestiniens font à gaza (chomage, misère, haine dans les ecoles, manifestations de kamikazes auxquelles participent les enfants, poster de kamikazes partout) on se demande bien pourquoi leur donner tout israel !


  • David Wynot (---.---.222.202) 12 mars 2006 02:20

    Je lis en ce moment « Batisseurs de Paix » de David Chemla Ed. Liana Levy. C’est un livre à 2 voix : les interviews d’Israeliens et de Palestiniens (chacun son tour) qui ont participé à l’accord de Genève. Des gens profondément réalistes, souvent des soldats qui se sont battus des 2 cotés, la plupart des palestiniens interrogés ont passé des années en prison, et bien ce livre me redonne espoir.

    Une correction pour Ericfrel : le MUR israelien, qq soit les injustices qu’il provoque, n’a rien à voir avec le mur de Berlin.

    Le mur israelien va séparer 2 ennemis (avez-vous un autre nom ?) tandis que le mur de Berlin enfermait une partie du peuple allemand dans une idéologie orwellienne. Il n’y pas de Palestiniens qui veulent passer à l’Ouest (il y a trop de colons à l’Est OK).

    Je vous accorde que ce mur est une carapace au sens psychanalitique du terme, c’est une ligne Magino israelienne.

    Dans les années 70, j’ai tenté de mettre en garde qqs amis israeliens et juifs sur le fait que l’annexion des territoires risquait de provoquer une similitude historique avec l’Algérie ou l’Afrique du Sud (je me suis fait traité de tous les noms bien sur).

    Dommage qu’il n’y ait eu aucun pied-noir parmi les travailistes d’alors. Les « Batisseurs de Paix » font le meme constat aujourd’hui et Sharon s’est retiré de Gaza avant de refermer les yeux.


  • Ishak (---.---.42.241) 1er septembre 2006 22:26

    « Le mur israelien va séparer 2 ennemis (avez-vous un autre nom ?) tandis que le mur de Berlin enfermait une partie du peuple allemand dans une idéologie orwellienne. Il n’y pas de Palestiniens qui veulent passer à l’Ouest (il y a trop de colons à l’Est OK). »

    — j’aurais cru à ta sincérité David ,si le mur était bati sur la terre d’Israel reconnue par l’ONU,or ce n’est pas le cas.d’ailleurs les résolutions internationales le condamnent.


  • Ishak (---.---.42.241) 1er septembre 2006 22:39

    Higor

    en 1910 la population de la Grande Palestine était composée de 9 pour cent de juif et de 91 pour cent d’Arabes chrétiens et musulmans.Alors ne vient pas nous raconter des monsonges .La plupart de la population actuelle d’Israel sont des immigrés Polonais ,russes,hongrois,qui se sont installés sur cette terre,d’abord ,avant 1948 avec l’aide et l’appui des forces colonialistes qui occupaient la région ,ensuite, après la reconnaissance d’Israel par l’ONU,par spécialement l’aide Massive de l’ancien URSS.


Réagir