jeudi 30 mars 2006 - par Jean-Michel Aphatie

Le scénario du gouvernement pour sortir de la crise du CPE

L’impression de blocage domine, après les manifestations importantes de mardi. Déjà pourtant, le gouvernement s’apprête à tourner une page et à modifier ainsi assez profondément la situation.

Trois temps devraient rythmer la séquence.

D’abord, aujourd’hui, la décision du Conseil constitutionnel concernant le CPE. Selon plusieurs sources, l’examen du projet de loi dit "Égalité des chances", dans lequel figure l’article 8 instaurant le contrat controversé, cette discussion entre les neuf membres du Conseil est maintenant terminée, et la rédaction de la décision est commencée. Elle devrait être rendue publique aujourd’hui. L’hypothèse qui prévaut est une déclaration de conformité à la constitution concernant le CPE.

Une fois cette décision rendue publique, le chef de l’Etat devrait intervenir. On évoque, dans son entourage, une déclaration solennelle prenant acte de la décision du Conseil et se prononçant donc sur la suite. Deux possibilités s’offrent au chef de l’Etat. Soit, constatant les désordres dans la rue, il propose au Parlement de procéder à une deuxième lecture. Soit, prenant acte de la légalité du processus législatif et du refus des organisations syndicales de négocier les modalités d’application du texte, il décrète la promulgation de la loi qui, dans ce cas de figure, pourrait être très rapide.

Reprenons les deux hypothèses.

La demande d’une nouvelle lecture de la loi est constitutionnellement possible et politiquement très difficile. En effet, mardi matin, devant le groupe UMP, Dominique de Villepin a, selon plusieurs témoignages concordants, prononcé cette phrase : "Je n’accepterai jamais une deuxième lecture." Ce refus, il l’a dit expressément à plusieurs reprises au chef de l’Etat. Autrement dit, si ce dernier passait outre le refus du chef du gouvernement, il pourrait dans la foulée enregistrer sa démission.
Tout indique au contraire que le chef de l’Etat est décidé, pour l’instant, encore, à soutenir Dominique de Villepin. Plusieurs raisons l’y poussent. Nommer un autre chef de gouvernement maintenant, à un an de la fin de son quinquennat, et à la suite d’un fiasco aussi retentissant que celui qui provoquerait l’enterrement du CPE, ce serait abdiquer de tout pouvoir pour la suite. Accessoirement, désavouer Dominique de Villepin reviendrait à dégager un boulevard pour Nicolas Sarkozy, ce à quoi ne peut se résoudre facilement Jacques Chirac.

L’hypothèse donc de l’annonce d’une promulgation de la loi par le chef de l’Etat lors de sa déclaration solennelle est celle retenue aujourd’hui dans les cercles du pouvoir. Plusieurs éléments de raisonnement ont été présentés durant ces derniers jours au chef de l’Etat pour tenter d’emporter sa décision.

Tout d’abord, Dominique de Villepin estime qu’une fois la loi promulguée, les syndicats pourront difficilement poursuivre une mobilisation aussi intense. En clair, le chef du gouvernement parie sur un certain réalisme, et si cela n’était pas le cas, il escompte que petit à petit, impressionnés par la résistance de l’Etat, les contestataires s’effilocheront.
Dans cette réflexion, certains s’alarment du ressentiment qui pourrait alors être très fort chez les Français et peser, le moment venu, dans les choix électoraux. Pour parer à l’objection, l’Hôtel Matignon assure que de très nombreuses entreprises se saisiraient du CPE dès sa promulgation et établiraient ainsi, dans les statistiques, le bien-fondé de la réforme.

En terme de calendrier, selon ce schéma, le printemps serait difficile à passer, il faudrait peut-être gérer des désordres et des expressions de colère, mais à la rentrée de septembre, le chômage des jeunes baissant, le calme devrait revenir en même temps que la confiance envers le gouvernement. Scénario optimisme dont Dominique de Villepin pense qu’il est aujourd’hui partagé par le chef de l’Etat.
Une dernière question demeure : la promulgation de la loi doit-elle être immédiate, ou bien faut-il laisser passer le délai dans sa totalité, neuf jours à partir de la décision du Conseil constitutionnel, pour la faire entrer dans l’ordre juridique ? Pour trancher cette question, les éléments sont les suivants :

Attendre, c’est entretenir auprès de l’opinion publique l’espoir d’un dialogue avec les syndicats, et montrer ainsi de quel côté se trouve l’ouverture d’esprit et la bonne composition des caractères. Mais attendre, c’est risquer de voir la fronde qui couve à l’UMP s’exprimer au grand jour. Les participants ont noté qu’hier, mardi, Dominique de Villepin a été écouté fraîchement par les députés présents, lors de la réunion du groupe. Retrouver les parlementaires dans un été d’incertitude, mardi prochain, paraît à beaucoup dangereux. Ceci plaide donc pour une promulgation rapide de la loi. Ce pourrait être dès vendredi.

Ultime interrogation dans le duopole Elysée-Matignon : que ferait dans ce cas-là Nicolas Sarkozy ? Résultat de la réflexion : rien. Le président de l’UMP-ministre de l’Intérieur fait entendre aujourd’hui une petite musique, celle de la suspension pour négocier. Celle ci se trouverait tout à fait démodée aussitôt la loi promulguée. Nicolas Sarkozy n’aurait alors plus le choix qu’entre l’acceptation et le silence, ou bien la critique et donc la démission. Comme personne ne croit à ce geste, Dominique de Villepin est convaincu qu’il faut y aller.

C’est sous cette forme qu’une page importante pourrait se tourner dès la fin de la semaine. Nul ne sait ce qui s’écrira, à partir de là, sur le livre de cette histoire.



209 réactions


  • moniroje (---.---.246.62) 1er avril 2006 22:53

    J’ai bien aimé vous lire ; quelle diversité d’opinions !! bien des choses vraies et bien des choses fausses à mon avis.A relire plus attentivement pour mieux connaître... Oui, j’avoue que j’ai été surpris que Sarkozy profite de la situation pour se distinguer de Villepin ; c’est assez moche et préjudiciable pour son camp qu’ainsi il divise. Mais c’est la règle du jeu démocratique : chacun pour soi et que le meilleur gagne... Règle que je déplore, étant plutôt anarchique d’opinion, de pensée et d’action du haut de mes 63 bâtons ; en république anarchique ce serait différent : le gouvernement ne serait point constitué de chefs assoiffés de pouvoirs mais de serviteurs de l’Etat. Rassurez-vous, j’arrête là ma propagande. Quant à Chirac, il agit en malin ; que le licenciement permis dans la période de ce CPE soit accompagné de son motif est une bonne chose ; il en va de la dignité du jeune travailleur licencié. Bravo ! mais réduire sa période de deux ans à un an, si ça peut calmer le peuple, ça diminuera l’intérêt du patron à user de ce CPE et donc ça annihilera les effets positifs contre le chômage. En fait, comme je l’ai lu chez vous, c’est surtout la mentalité du patron qu’il faudrait surveiller de près. En règle générale, ce ne sont pas des philantropes et à trop penser à leurs poches, ils ont le don de tourner en leur faveur une loi en faveur de leurs employés. Le CPE réduit à un an !! ils en verraient vite le moyen de le tourner à leur avantage et tant pis pour la précarité augmentée de leurs jeunes employés. Mais nous serions immatures de penser que c’est toujours de la faute du gouvernement en place ou du patron ; j’avoue que j’ai été sidéré de voir cette jeunesse si apeurée par la précarité de son avenir, si désireuse d’un CDI immédiat et résiliable que par eux-mêmes mais valable jusqu’à leur retraite ! Les voir à la télé gémir qu’ils ne pourront ainsi pas avoir de crédits, pas avoir de locations ; la vache, sont sérieux les mecs !!! des vieux avant l’âge !Il me souvient qu’à leur âge, un patron me faisait bosser au noir, ah le salop !! mes points retraite dont je m’en foutais à l’époque !! à l’as !! et m’offrait généreusement son arrière-boutique comme logement et pouvait me foutre dehors selon son humeur...Bien sûr, je ne leur souhaite pas ce que j’ai vécu, mais je les trouve bien douillets et frileux, nos jeunes ou du moins cette jeunesse là. Faire la révolution, tomber le gouvernement comme nous avons fait tomber De Gaulle, pourquoi pas ??? mais pour le CPE, sourire ... Quant aux élections qui ont mis Chirac au pouvoir, je m’insurge contre ceux d’entre vous qui disent que c’est par peur du mouvement puissant pour Le Pen. Je me souviens très bien que à l’époque, on en avait marre de Jospin et de son équipe particulièrement élitiste ; que les sondages s’étaient trompés complètement. Ceux qui ont voté Le Pen n’étaient pas lepénistes ; ils en avaient marre de leur gouvernement et celui-ci ne s’en rendait absolument pas compte : sourdingues complètement. Alors, comment se faire entendre ??? en votant Le Pen au premier tour, sachant qu’ensuite on ne voterait pas pour lui. Ce ne sont pas les gens de droite qui ont voté Le Pen à part les 8% habituels. Ils ont voté pour leurs candidats de droite. Le succès éphémère de Le Pen, il le doit surtout à ceux qui avaient élu Jospin. Ce que ce dernier a parfaitement compris d’ailleurs...


  • wil (---.---.176.42) 1er avril 2006 23:28

    Nous entrons dans une crise de régime qui conduira à une confrontation entre l’aristocratie gouvernante et la souveraineté populaire qui ne se laissera pas abuser.


  • Mister Kaplan (---.---.49.162) 3 avril 2006 12:43

    Tout semble indiquer à cet instant (lundi 3 avril midi) que Dominique de Villepin (et J Chirac) soit désavoué par l’UMP (donc par Nicolas Sarkosy) qui reprend la main et consulte déjà laissant entendre que le CPE est bel et bien mort. Ce scénario n’était pas prévu par le « gouvernement » si l’on en croit Mr Apatie...Sarkosy gagne la mise....


  • chris (---.---.2.151) 3 avril 2006 15:07

    Voyant que la mobilisation ne faiblie pas et que chirac a fait une faute ( promulgation d’une loi qui ne s’applique pas ) et confier à un parti ( unique ) le soin de refaire une loi. Chirac démissionne pour laisser la place à un nouveau président. Comme cela la démocratie reprendra sa place car cela fait trop longtemps que j’ai l’impression qu’il y a un gouvernement qui gouverne contre le peuple.


  • moniroje (---.---.246.62) 4 avril 2006 14:29

    Tiens donc !!! enfin quelqu’un de franc !!! que Chirac démissionne, est, je pense, la véritable raison des partis de l’opposition et des syndicats qui se refusent à négocier. Les jeunes et leur frousse de la précarité, c’est le bon cheval de bataille ; trop bêtes pour penser qu’ils ont voté pour cette précarité en votant non à la constitution européenne (hi hi, même la loi bolkeinsthen qui est passée, modifiée pour la forme !! ) Mais que « la démocratie reprendra sa place avec un nouveau président » allons donc !! Le peuple de gauche a voté Le Pen pour que le gouvernement Jospin entende qu’on ne voulait plus de lui.Ben oui, le peuple de droite à part les 8% habituels du FN, a voté pour son candidat habituel. Et c’est aussi tous les gauchistes qui ont porté Chirac au pouvoir. Maintenant, on en a marre de lui ; on, ceux qui crient et qui manifestent...Va-t-en savoir qui gagnera 2007 ??? Probablement quelqu’un de la gauche : vous avez remarqué ??? ils disent rien sinon reprendre les slogans de la rue et des syndicats. Et surtout, ils ne proposent rien à la place du CPE ; parce que ils n’en ont aucune idée ; et aussi parce que c’est pas le moment de se mettre à dos tous ces électeurs...Regardez la charmante Ségolène : on ne la voit plus, on ne l’entend pas ; et sa côte monte, monte !!! Sarkozy jubilait en faisant la même chose et hop, plombé par son chef !! Mais moi aussi, je m’égare, entraîné par le message précédent. Le problème est cette partie de la jeunesse qui a peur pour son avenir et en oublie de penser avec un esprit jeune ; frilosité qui risque fort d’entraîner notre pays dans les rangs des pays sous-développés de l’Europe misant sur son tourisme pour survivre. Mais heureusement, ce n’est qu’une partie de la jeunesse ; les autres préparent leurs exams.


  • raffadavinci (---.---.31.15) 10 avril 2006 08:23

    Je ne suis en fait pas intéressé de débattre sur votre forum, sois disant, citoyen pour gogos parceque si vous ne l’avez pas encore compris dans une démocratie et a fortiori dans le pays des droits de l’homme de la « Liberté » et de l’ »Egalité » tout le monde devrait être libre d’exprimer une opinion, même ceux qui appellent au renversement de ce gouvernement de gangsters et de voyous mafieux affidés a la MAFIA CORSE et le fait que vous ne permettiez pas aux citoyens qui contestent totalement la légitimité d’une bande de malfrats est tout simplement ola preuve que vuos en faites partie et si vous ne voulez pas que cela soit dit, il n’y a qu’une seule solution, laissez s’exprimer même ceux qui ne sont pas d’accord avec vous,et même ceux qui appellent au soulèvement même si vous le reprouvez ! La liberté d’expression et la démocratie ne souffrent pas d’interprétation « a la carte » sinon, chacun peut avoir sa conception de la démocratie et de la liberté d’expression et ça, ça peut porter plusieurs noms, « anarchie » ou encore « dictature », mais pas démocratie. Votre démocratie politiquement correcte nous a amené d’une, le FN, de deux, une pensée franchouillarde très volontiers fascisante, ce en quoi je reconnais que des gens comme vous prétendent au « débat citoyen », les débats citoyens de gogos on en a marre et on finira par s’en affranchir totalement, vos manières d’imposer votre conception des choses en prétendant de surcroît au débat citoyen, on n’en veut plus on veut avoir le droit de s’exprimer et de dire qu’on ne veut pas du libéralisme tout crin, qu’on ne veut plus la bande de voyous de Chirac et Sarkozy et De Villepin que cela vous plaise ou non et si vous ne nous laissez pas nous exprimer dans un débat citoyen, si nous n’avons plus la possibilité de nous faire entendre et de ne donner ne serait ce que notre avis, il ne faudra pas venir pleurer le jour ou vous aurez une révolte qui vous balayera, c’est par ce genre d’attitudes que vous mettez les gens dans la rue et que vous les envoyez brûler des bagnoles et commettre des dégradations. Je crois que vous faites partie de tous ceux qui n’ont pas encore compris ce qu’il se passe dans ce pays quelqu’en soit la raison. Vous ne pourrez faire ni vous ni personne d’autres, l’économie d’affronter la vérité parceque la vérité vous affrontera et ce n’est pas ni en pratiquant la politique de l’autruche, ni la méthode Coué que vous règlerez les choses, la nature et l’essence des choses sont trop bafouées pour que vous réussissiez avec des remèdes d’apothicaires, le Cancer est une grave maladie qui requière des traitements appropriés, du courage et un esprit combatif et il y a encore des gens capables de cela dans ce pays. TOUS LE GOUVERNEMENT ACTUEL ET SA COMPOSANTE POLITIQUE SONT UN CANCER POUR CE PAYS Ciao !


  • moniroje (---.---.246.62) 17 avril 2006 22:05

    Vous dites : « tout le monde devrait être libre d’exprimer une opinion, même ceux qui appellent au renversement de ce gouvernement de gangsters et de voyous mafieux affidés a la MAFIA CORSE et le fait que vous ne permettiez pas aux citoyens qui contestent totalement la légitimité d’une bande de malfrats est tout simplement la preuve que vous en faites partie et si vous ne voulez pas que cela soit dit, il n’y a qu’une seule solution, laissez s’exprimer même ceux qui ne sont pas d’accord avec vous,et même ceux qui appellent au soulèvement même si vous le reprouvez ! » et pourtant c’est ce qui est fait : vous vous exprimez et moi aussi ; et notre jeunesse s’est exprimée et la police n’a pas été répressive ; rien à voir avec certains pays, même voisins, où tout cela est impossible. Oui, admettons que ce gouvernement soit comme vous dites ; mais vous rappelez-vous de celui de Miterrand ?? avec son scandale du sang contaminé bien étouffé, et, ah oui, cette escroquerie du Crédit Lyonnais, gigantesque mais sur le dos du contribuable... C’est vrai que c’est loin et on a une faculté merveilleuse d’amnésie ; plus près de nous, l’autre gouvernement, celui de Jospin, refoulé par le peuple qui a rajouté ses voix aux 8% habituels du FN pour qu’ils entendent !!!! Donc, à essayer de vous comprendre, je ne vois pas la solution démocratique pour sortir de la maffia que vous voyez : vous allez remplacer les voyous Sarkozy et Villepin par d’autres voyous. Et si vous ne voulez plus du libéralisme à tout crin, pourquoi avez-vous voté pour Maestricht ??? dans ce traité, il n’y avait que ça, du libéralisme ! C’était là qu’il aurait fallu voter Non. Et pourquoi avez-vous voté Non à la constitution européenne ??? Grâce à votre Non, l’Europe continue son parcours sous le traité de Nice, pire que celui de Maestricht ; et, trop drôle, la truc Bolkeistein que Chirac et Raffarin avaient foutu en l’air par leur refus, eh oui, c’était eux les gauchistes chiants pour l’Europe des 15, eh bien, elle a été adoptée par l’Europe des 25 et là, on ne les a plus entendus, les Besancenot et Marie-georges Buffet qui nous avait promis plein de choses après notre Non à la Constitt ; et là, heureusement pour eux, le peuple français a oublié qu’ils avaient promis moins de libéralisme en votant Non et qu’on en a encore plus. Donc, monsieur, si vous en avez marre de ce libéralisme en France, vous n’avez qu’à vous en prendre à ceux qui ont dit Oui à Maestricht et Non à la Constitt, et probablement à vous-même qui confondez ce cri de la jeunesse contre le CPE précarisant leur avenir avec votre intention véritable de foutre en l’air ce gouvernement ; oui à vous-même qui, probablement, avez voté Non à la Constitt surtout pour foutre en l’air Chirac et son gouvernement. Quant à l’anarchie, vous usez du mot sans savoir qu’elle serait la clé de vos rêves : les gouvernants ne seraient plus des chefs assoiffés de pouvoir et d’argent mais ils seraient des serviteurs du peuple.


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