lundi 6 mars 2006 - par Henry Moreigne

Amiante : une substitution difficile

L’ubuesque pérégrination du porte-avions Clemenceau a témoigné à sa façon de la reconnaissance universelle de la dangerosité de l’amiante. Dans le même temps, le rapport de la mission parlementaire française sur l’amiante, rendu public en ce début d’année, émet des « regrets » quant à l’absence d’étude épidémiologique sur les salariés exposés aux fibres de substitution.

Pendant très et trop longtemps, l’industrie a abondamment utilisé l’amiante, tant en raison de ses propriétés exceptionnelles (résistance au feu, à la traction et à l’usure, faible conductivité électrique et thermique...) que de son coût particulièrement faible. Bien que ses effets néfastes soient connus depuis l’après-guerre, la théorie selon laquelle un usage contrôlé permettait d’écarter sa dangerosité a prévalu pendant de nombreuses années, sous l’influence du lobbying des pays producteurs mais aussi en raison du silence coupable de l’industrie et des autorités sanitaires.

Il faudra attendre une directive européenne de 1999, entrée en vigueur le 1er janvier 2005, pour voir s’appliquer une interdiction totale de l’usage de l’amiante sur le territoire de l’Union.

Dès lors, il a bien fallu rechercher des solutions alternatives. Schématiquement, ce remplacement s’est opéré soit par le recours à des matériaux déjà existants sur le marché, soit par l’utilisation de matériaux de substitution fibreux ou non. Et c’est là que les problèmes commencent.

Les effets sur la santé de tous les matériaux fibreux sont à ce jour, loin d’être totalement évalués. Le programme international sur la sécurité des substances chimiques a clairement recommandé que l’exposition à toute fibre respirable et durable soit contrôlée de la même façon que l’amiante, jusqu’à ce que les données prouvent que des contrôles moindres seraient suffisants.

Sur ces bases, l’Allemagne classe les laines de verre et de roche ainsi que les laines minérales parmi les produits probablement cancérigènes. Dans le même temps, les études épidémiologiques sont particulièrement difficiles à mener. En France, pour diverses raisons, dont un manque de coopération du secteur industriel, l’INRS vient d’ailleurs de jeter le gant sur ce sujet.

On ne peut ignorer que les producteurs d’amiante sont les premiers à dénoncer et à utiliser cette situation. Leur crainte est grande de voir aboutir la demande d’une interdiction mondiale de l’utilisation de l’amiante. Pour autant, il serait fou de prendre les travailleurs en otages et de risquer de reconduire un drame sanitaire de l’ampleur -sans précédent- de celui de l’amiante, en ne s’assurant pas de l’innocuité des produits de substitution.

_________________________________________________________

DROIT DE REPONSE :
Le 25 avril 2006, nous avons reçu un courrier recommandé du Syndicat National des Fabricants d’Isolants en Laines Minérales Manufacturées (FILMM) qui conteste la phrase "l’Allemagne classe les laines de verre et de roche ainsi que les laines minérales parmi les produits probablement cancérigènes". Cette phrase pouvant porter atteinte à l’image des produits en laines minérale. Par ailleurs, les laines minérales produites par les industriels membres du FILMM sont toutes exonérées du classement cancérogène car elles ont passé avec succès les tests prévus par la directive européenne. Voir le courrier au format PDF en fin de page.

Cela dit, sur les actes d’un colloqué organisé en 2005 par le Ministère de la Santé, le Ministère de l’Environnement, le Ministère de l’Emploi et le Ministère de la Recherche il est declaré que les "laines minérales (laines de verre, de roche, de laitier) sont classées cancérogènes de catégorie 3, employées essentiellement par les professionnels du bâtiment, préoccupantes en raison d’effets cancérogènes pressentis mais non encore avérés". La même information a été publiée également dans un article de l’INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité).

Par ailleurs, en plus du droit de réponse que nous venons de publier, nous sommes ouverts à avoir plus de précisions à ce sujet de la part de FILMM au travers des commentaires liées à cet article qui restent ouverts pour la discussion et pour apporter davantage de précisions sur ce sujet.
Carlo Revelli



5 réactions


  • velleda (---.---.112.184) 7 mars 2006 08:11

    la grande difficulté de ce type de problèmes est que leur résolution est confiée à des experts, or beaucoup de ces gens se qualifient eux-mêmes d’experts alors qu’ils n’en sont pas et se trompent souvent. Il est impossible de tout prévoir, avec le principe de précaution on n’aurait jamais fait de lignes de chemin de fer, d’avions, la plupart des médicaments... Qu’est-ce qui vous dit qu’une consommation exagérée comme elle l’est actuellement, de sucre, de gras, de colorants, de conservateurs ne tuera pas plus de gens que l’amiante. Si l’espérance de vie a tellement augmentée c’est bien que la sécurité au travail et ailleurs a augmenté plus vite que les problèmes créés. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut rien faire, mais il ne faut pas partir avec un objectif zéro risque, sinon on ne fera plus jamis un produit nouveau ; pas de transistor, de téléphone portable, d’Ipod...


    • alberto (---.---.213.118) 7 mars 2006 10:58

      Completement d’accord avec toi Velleda le progrès des techniques implique la prise de quelques risques au passage. Mais ne pas être aveugle prendre, les risques avec conscience, être informé ! Tu ne crois pas que les entrprises qui gagnaient beaucoup d’argent avec l’amiante ont un petit peu caché sa dangerosité au bon peuple ? Ma maison est isolée avec de la laine de roche : je ne me fait pas d’illusions ce n’est guère mieux que l’amiante mais je le sais, alors je calfeutre, j’étanchéifie, je confine. Bref je calcule le rique en fonction de l’information dont je dispose... Dito pour le téflon dans les poêles, le mercure dans les dents et le papier alu pour les papillottes...


    • velleda (---.---.91.4) 8 mars 2006 17:52

      je n’ai pas d’info sur le papier alu de mes papillotes. Il y a un doute ?


    • alberto (---.---.200.123) 10 mars 2006 13:05

      Oui, il y a un doute sur le fait que les ions d’aluminium sont succeptibles de migrer dans les aliments... La présence d’aluminium (ainsi que d’autre métaux) dans l’organisme humain est (de plus en plus) suspectée d’être à l’origine de maladies dégénératives du cerveau, d’ou la substitution faite par les industriels de proposer des ustensiles de cuisine en inox plutôt qu’en aluminium, le remplacement des oxydes d’aluminium dans les vaccins, bref d’éloigner le plus possible l’utilisation de ce métal dans des emplois pouvant être à l’origine de son absorbtion par des organismes humains. P.S. De nombreux sites web, dont je n’ai pas la référence sous la main, traitent du sujet... Bien cordialement.


  • martin (---.---.52.162) 10 mars 2006 15:21

    Velleda,

    Si une récente étude américaine, d’ailleurs confirmé par le journal de la sante de la cinq, fait état de l’influence de l’aluminium sur le développment de la maladie d’alzeimer. Et l’alumine intervient dans la sclérose des neurones.

    L’alu génére du chlore très néfaste pour les bactéries et microbes voir eau de javel. Et le corps ne fonctionne qu’avec l’aide des bactéries.

    Martin


Réagir