Quoi de nouveau dans la chasse aux pesticides ?
Certains lecteurs se souviennent sans doute de cette interview magnifique de Coline Sereau publiée ici même sur AgoraVox .
Un an après (environ) j’ai trouvé opportun d’en remettre une petite couche sur le sujet : ça nous changera des sarconneries et autres pitreries politiciennes et sondagières…

D’autant que voilà un sujet dont devrait se préoccuper régulièrement tout citoyen-consommateur soucieux de sa santé et de celle de son entourage.
L’information en matière de traitements chimiques des denrées alimentaires est rare et parcellaire comme si ce sujet faisait parti de ceux qui fâchent et qui émergent rarement à la une des médias qui roulent plutôt pour l’Industrie Chimique que pour la protection de l’environnement et des consommateurs.
Il arrive cependant que de grandes parades médiatiques soient organisées pour faire penser aux citoyens-électeurs que l’on se préoccupe d’eux : voir notamment le battage fait en son temps sur « Le Grenelle de l’Environnement » !
Qu’en reste-t-il aujourd’hui ? Peu de choses en final, sauf quelques déclarations gouvernementales pour rappeler au bon peuple que l’on pense à lui…
Ainsi, les grandes orientations pour la deuxième partie du plan « Santé Environnement » ont été dévoilées récemment, par Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’Écologie. Le catalogue des objectifs pour la seule année 2011, est impressionnant. Tous plus louables les uns que les autres, ils portent aussi bien sur la qualité de l’air intérieur que sur les ondes électromagnétiques et les polluants chimiques.
Concernant les produits phytosanitaires il avait été convenu dans les conclusions du fameux « Grenelle » que ce plan « Santé-Environnement » viserait à interdire les substances les plus dangereuses, et à réduire de moitié d’ici 2012 l’utilisation de 13 produits chimiques considéré comme « sensibles ».
Les lecteurs familiers d’AgoraVox sont assez bien informés pour savoir que la France est championne du monde toutes catégories pour ce qui est de la quantité de pesticides répandue par hectare de terre agricole.
Mais ce que beaucoup savent maintenant, c’est que notre pays est également très bien placé en matière de tartufferie et de faux semblants, car au moment même des déclarations de la ministre, un rapport réalisé par l’association Pan-Europe et Générations futures nous montre que tous les moyens sont bons pour contourner la législation sur les pesticides : en 2010, la France apparaît clairement comme la championne européenne des dérogations permettant à ses agriculteurs d’utiliser certains pesticides interdits. En effet, la directive européenne sur les pesticides accorde aux États membres la possibilité d’obtenir une dérogation de 120 jours « en cas de danger imprévisible ». La France a ainsi demandé 74 dérogations l’année dernière, et ceci bien que les circonstances ne justifient pas vraiment l’argument accepté de « danger imprévisible ». Il faut dire que 24 autres pays ont également accordé de telles dérogations. Le nombre de matières actives qui sont donc entrées dans les exploitations agricoles a finalement beaucoup augmenté !
Et parmi ces 152 produits, ne sont pas rares ceux dont les dangers sont bien connus à l’instar des fumigants ou du glyphosate (1) . Ainsi, sous la pression des lobbys, perdurent toutes les mauvaises habitudes que l’on se vante par ailleurs d’amender : Qui a dit faux-culs ?
Pourtant une grande enquête dite de « cohorte » avait été lancée en 2005 pour enfin mesurer un peu mieux l’impact sur la santé des agriculteurs qui sont finalement les plus exposés aux effets nocifs de cette agrochimie.
L’enquête dite « Agrican » lancée auprès des exploitants agricoles dans douze départements métropolitains devait publier ses résultats en 2008…Cette publication serait reportée en 2013, apprend-on. Il semble donc qu’il y ait un peu de retard à l’allumage, mais ne désespérons pas…
Enfin ne désespérons pas trop, mais un petit peu quand même car : certains résultats partiels qui ont été publiés ne sont pas encourageant pour les agriculteurs, ce qui pourrait inciter les lobbies de la profession (vous savez, la fameuse main invisible du marché) à faire pression pour diluer les conclusions de l’enquête voir à en occulter une partie.
Malgré ces manœuvres de retardement l’on peut cependant constater une lente amélioration de la prise de conscience des principaux acteurs, agriculteurs, professions de santé, pouvoirs publics, des effets dévastateurs, directs ou induits de cette agrochimie sur la santé des agriculteurs et des consommateurs.
Car il ne s’agit pas seulement, dans le cadre de la réduction des dépenses de santé par les pouvoirs publics, de prôner la prévention d’un côté et de laisser de l’autre les populations s’empoisonner à dose constante contribuant ainsi à ruiner les efforts consentis par ailleurs.
Les associations de consommateurs, les écolos, et de plus en plus de citoyens lambda, suivent ces évènement au plus près et restent prêts à se mobiliser pour améliorer la transparence des décisions et dénoncer les tentatives de collusions entre décideurs de l’Etat et industries privées.
A suivre…
Bien à vous tous.
(1) Infos selon Principe de Santé : (http://www.principes-de-sante.com/)
Notre poison quotidien, de Marie-Monique Robin - extrait : Les pesticides (Enquête diffusée ce mardi 15 mars à 20h45 sur ARTE) par AgoraVoxFrance