Abbas et le droit de parler au nom des Palestiniens
Le président palestinien Mahmoud Abbas a peut-être été désinformé sur l’annonce par les EAU d’établir des relations avec Israël. Sinon, il ne se précipitera pas pour dire que « ni les EAU ni aucun autre pays n’a le droit de parler au nom des Palestiniens. » C’est tout à fait ça, mais là où le bât blesse, c’est qu’on vous a menti quand on vous a dit que les EAU parlaient au nom des Palestiniens, qui ne manquent pas de porte-parole.
Tout le monde sait que sur l’échiquier palestinien, il y a une multitude de porte-parole du peuple palestinien, depuis le président Abbas lui-même à une longue liste de petits leaders de factions, de mouvements, d’organisms et de milices, en passant par des centaines de personnalités, de négociateurs en chef, et de représentants.
Les EAU n’ont pas non plus utilisé la question palestinienne comme prétexte pour établir des relations bilatérales avec Israël. Il n’y en a pas besoin. Vous et votre autorité avez des relations officielles avec Israël.
De plus, il y a des précédents politiques arabes, ainsi que des intérêts, des données et des faits stratégiques qui font que traduire le principe que « la paix est un choix stratégique arabe » n’est pas une question de polémique.
Abbas et ses compagnons savent que les Arabes boycottent Israël depuis la catastrophe de 1948. Ce boycott n’a rien changé à la question palestinienne. Ils savent très bien aussi que la décision des EAU d’établir des relations avec Israël est une affaire de souveraineté émiratie qui n’a rien à voir avec les droits des Palestiniens.
On ne voit pas comment la décision est « une atteinte à Al Qods et à ses lieux saints » et une influence sur la décision nationale palestinienne comme l’a considéré un responsable palestinien. Les EAU n’ont jamais dit qu’Abou Dhabi était le bon endroit pour négocier la question palestinienne. En revanche, ils ont insisté que la paix dépendait des négociations directes et des conditions fixées par les parties palestinienne et israélienne.
Il y a des commentaires et des déclarations de responsables palestiniens qui sont absurdes. Un d’entre eux a dit : « Assez d’utiliser la Palestine. La Palestine a besoin de ceux qui lui sont utiles, pas de ceux qui ne cessent de l’utiliser. Assez, c’est assez. » Je lui dis que vous avez raison, mais vous devez vous adresser aux camarades de lutte palestiniens, ainsi qu’à ceux qui prétendent défendre la cause en Iran, au Sud-Liban, à Doha et à Ankara. Les EAU n’ont pas utilisé et n’utiliseront pas la Palestine à des fins politiques.
La Déclaration commune des États-Unis, de l’État d’Israël et des Émirats arabes unis a noté que la diplomatie des Émirats arabes unis a eu le mérite d’arrêter l’annexion, bien que temporairement. Aucun représentant des Émirats n’a indiqué que la décision israélienne avait été annulée, par exemple.
« Grâce à cette avancée diplomatique et à la demande du président Trump avec le soutien des Émirats arabes unis, Israël suspendra la déclaration de souveraineté sur les zones décrites dans la » Vision du président pour la paix « et concentrera maintenant son action sur l’élargissement de liens avec d’autres pays du monde arabe et musulman[,] » lit-on dans la déclaration.
Il est connu que les dirigeants palestiniens sont les parties qui ont le plus nui à la cause. Celui qui aujourd’hui accuse les EAU de se lancer dans ce qu’il appelle une ruée vers la normalisation a oublié les termes des accords d’Oslo de 1993 et les nombreuses années de négociations ratées menées par le président Abbas, lui-même l’un des principaux artisans de cet accord, qui stipulait le droit d’Israël à vivre en sécurité et en paix.
Ce sont les mêmes qui avaient autrefois accusé le défunt président égyptien Anouar el-Sadate de trahison, d’avoir abandonné les Palestiniens et la cause palestinienne lorsqu’il a signé le traité de paix avec Israël dans les années 1970 et ensuite les accords d’Oslo.
Autre chose : qu’est-il advenu de cette cause et du projet d’État palestinien alors que ces dirigeants ont été incapables de réunir les Palestiniens pendant de nombreuses années ? Ils se sont enlisés dans des conflits, des guerres de mots et d’intérêts personnels, se sont disputés des postes de direction vides et ont abandonné la cause et le peuple à un sort inconnu.
Et qu’a fait l’armée des négociateurs palestiniens et leur chef ? Durant des années, ils n’ont fait que tergiverser et échouer sans réfléchir à d’autres solutions réalistes. Pendant ce temps, Israël allait de l’avant en vue de liquider la cause en annonçant l’annexion de Jérusalem-Est et en mettant fin au travail de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens alors que les les dirigeants palestiniens étaient incapables d’unifier les rangs et de combler le fossé entre Gaza et Ramallah.
Enfin, je suis convaincu que les dirigeants palestiniens ont enfin trouvé dans l’annonce d’un accord de paix émiratio-israélien quelque chose à redire. Ils s’efforcent de jeter tous leurs échecs sur les EAU et les autres pays arabes qui veulent trouver une nouvelle réalité géostratégique régionale alors que les nouveaux régimes hégémoniques régionaux en Iran et en Turquie avancent leurs projets expansionnistes.
Mais l’histoire retiendra des dirigeants palestiniens leurs tergiversations et leur fuite en avant. L’histoire n’oubliera pas qu’ils ont fait un grand bruit autour d’un effort sincère des Émirats pour voir une lueur d’espoir au bout d’un tunnel sombre dans lequel vit le peuple palestinien désemparé.