lundi 23 juillet 2012 - par Montagnais .. FRIDA

De Dien Bien Phu à Occupy Wall Street

Variations sur les thèmes du capitalisme destructeur et de la pérennité des luttes.

Variations sur une multitude d’images du même combat, environnementalistes contre capitalisme, Giap contre Navarre, Viets émaciés contre GI’s gonflés, traders insolents contre va-nu-pieds, Giap contre Westmorland, OWS contre Wall Street, David contre Goliath, Jacques contre Bobo’s, pauvres contre riches..

Céline le cynique nous avertit, qui ne se trompe jamais : entre fortunes égales, les différences de religions ou de races ne sont que vétilles, le véritable rideau de fer, il passe entre les riches et les pauvres.

On doit ajouter que le rideau de fer, il passe de nos jours entre ceux qui voient s’opérer la destruction de la planète et ceux qui n’en ont – et n’en veulent avoir – aucune conscience.

A ce niveau, devrait intervenir un travail d’épistémologie, une mise en question radicale du sens des mots et de leur emploi, car le capitalisme falsifie tout, les comptes, la monnaie, les mots, les rôles..

- Environnementalistes ?

- Démocraties ?

- Occident ?

- Développement ?

- Croissance ?

- Riches, pauvres ?

- Liberté ?

- ..

Nous n’en viendrons pas à bout ici.

Les proles à mille Euros sont certes enchaînés, endettés, aliénés. Ils ne sont pas pauvres en regard de plus des deux tiers des humains, la preuve, c’est grâce à nombre d’entre eux que sont payés les saltinbanques, les paillasses et les banquistes à 14 millions de dollars . Le soldat viet nourri de riz et de poisson séché, cheminant pieds nus dans la jungle, a une « empreinte écologique » combien de fois moindre que celle de son ennemi français ou américain ?

Le soldat viet de Giap serait ainsi du bon côté.. de tous les bons côtés même pourrait-on dire.

Wall Street, les capitalistes, ont été battus pour la première fois dans l’histoire par les soldats de Giap. Pour ceux qui penserait que Dien Bien Phu ne serait qu’une affaire française, rappelons notamment que les équipements étaient américains, chars, avions.. que la France avait encore reçu des milliards d’aide en septembre 53, que 20 nations composaient le CEFEO, y compris les allemands rescapés de la guerre en Europe, que pas grand chose ne se faisait sans en informer Foster Dulles..

 

Qu’on ne se méprenne pas.

L’évocation de la bataille de Dien Bien Phu et le rapprochement opéré avec l’OWS – Occupy Wall Street - ne nous permet pas de revendiquer ou d’attribuer au travers de nos textes la moindre once de la gloire attachée au sacrifice tant des vainqueurs que des vaincus de la première grande bataille d’hommes livrée et perdue par les capitalistes.

La mémoire des sacrifiés, si nombreux, quels que soient leur camp, invite à la prudence et à l’humilité.

Il s’agit simplement d’essayer d’indiquer au mouvement de lutte OWS et à ceux qui s’opposent à la puissance destructrice de Wall Street une partie de l’intelligence, de la détermination, de la patience, des méthodes qui ont permis à un Giap d’offrir la victoire à son camp. Vastes et ambitieux objectifs néanmoins. Il s’agit aussi de montrer nombre de similitudes entre des situations à 60 ans d’intervalle qui, si éloignées soient-elles en apparence, relèvent exactement de la même problématique.

Il s’agit encore, et simplement, d’exposer quelques réflexions alternatives, d’indiquer d’autres voies, d’observer et éventuellement d’accompagner le mouvement de la Kehre, du tournant historial en cours et à l’œuvre en notre époque, de dénoncer le désastre capitaliste à grande échelle, même s’il approche de sa fin.

Bigeard lui-même dans « Pour une parcelle de gloire » relate que, prisonnier des Viets, il est qualifié d’ « officier des capitalistes », égoïste, mercenaires.. par les commissaires en charge de sa « rééducation ».

 

« Bandes de cons » pensaient-il avec Langlais..

Il n’empêche. La réalité était bien là.. Les Français plongés dans le drame (pas tous de la même façon s’entend..) ont bien été obligés de la regarder en face cette vérité : la « lutte de l’Occident contre le communisme » déguisait difficilement une guerre capitaliste et purement coloniale, au sens de « colonie d’exploitation », et encore, plus capitaliste que coloniale.

Nguyen Binh, envoyé en 45 en Cochinchine avec les pleins pouvoirs pour organiser la guerre, par Ho Chi Minh lui-même n’était même pas communiste.

Des tas d’observations du type de celles faites par Bodard, particulièrement inspiré, au sujet de la guerre d’Indochine permettront d’en confirmer le caractère capitaliste et continuerons d’expliquer notre réalité au XXIème siècle, celle-ci par exemple :

« Un jour, l’on s’apercevra que, face à notre Vietnamien de la piastre, se dressera « l’Homme vietminh » - un être nouveau, un inconnu que l’on croirait moralement et physiquement d’une autre race – un immense cas de mutation. »

« Un jour, face au prole de la société de surconsommation.. »

Bodard toujours : « La guerre d’Indochine, (est) menée objectivement au nom de l’intérêt du commerce français, pas de la France. » 

« Maintenant, même le peuple a assez d’argent pour satisfaire sa passion du jeu : autrefois, il était trop misérable pour cela. »

« Les milliards s’abattent sur l’Indochine comme une pluie fécondante. La production, le travail ne comptent presque plus. Ce qui est important, c’est la dépense, tout ce qu’elle entraine : le commerce, les plaisirs, les importations, les circuits financiers, les spéculations, les trafics.Dans la nouvelle économie, artificielle mais merveilleuse, la piastre roule, tout grouille d’activité. »

« la guerre se fait au milieu des pacotilles.. »

« Jamais les sociétés n’ont payé de pareils dividendes à leurs actionnaires. »

Jusqu’à de Lattre qui s’emporte : « Et dire que c’est pour les hommes d’affaires et leur sale argent que mes soldats se font tuer. »

« Qu’importe si le colonialisme meurt si le capitalisme reste. » note-t-on ailleurs.

Que tout cela sonne d’actualité ! Que de similitudes de Dien Bien Phu à Occupy Wall Street, ou à Wall Street plutôt !

De nos jours, le mensonge s’est étendu au concept de démocratie, de liberté, de développement, qu’on nous assure durable désormais, de morale, d’éthique et d’esthétique..

L’Occident a disparu, n’en déplaise au grand Jules Roy, qui y fait pourtant amplement référence en tordant sans ménagement l’ordre des choses et en évoquant Crécy, Azincourt, la chevalerie.. dans son ouvrage « La bataille de Dien Bien Phu ».

Faut-il le rappeler ? L’Occident, c’était le règne de l’homme blanc, de la Chrétienté, de l’héritage classique, de la philosophie, du semis à l’infini d’églises et de cathédrales, de la musique sacrée, de la vision transcendantale du monde, de la spiritualité. L’Occident, c’est le Lieu où la mort n’existe pas, pas même un instant, le Lieu où il n’y a que deux vies, sans autre alternative.. A mille lieux du Cordicopolis actuel, du règne de la matière et de la pacotille et du système marchand, à mille lieux du Kali Yuga, de l’abrutissement irrémédiable des masses.

L’Occident a disparu il y a 200 ans peut-être, dans les derniers grands flamboiements des quatuors de Beethoven et les écrits de Hegel. Talleyrand note dans ses Mémoires que l’Amérique représente la plus grande menace pour la France.. Le 19ème siècle inaugure ensuite l’engouement généralisé pour les expositions de marchandises, le règne triomphant de la boutique, les guerres pour le lucre..

 

L’Occident a disparu, englouti sous le matérialisme et l’impérialisme américain et Wall Street.

 Le Corps Expéditionnaire en Indochine, tous comme les Américains ensuite et jusqu’à nos jours, ne font que consommer de l’industrie de l’armement et défendre le trafic de la piastre et du dollar, les plantations d’hévéa, le commerce de la cuisse, l’industrie du divertissement et de la réclame.. En ce sens il ne représente plus l’Occident qu’au travers d’une illusion.

Etaient-ils dupes de leur métamorphose et de leur état mercenaire au service des capitalistes les Navarre, Cogny, Castries, Bigeard.. ? Ne voyaient-ils pas que l’armée française n’était que le chef-d’œuvre d’une civilisation morte, pour reprendre les termes de Bodard, comme un fauteuil Louis XV ?

Il est vrai que pour Bigeard on s’émerveille encore : il vivait comme les Viets lui, un peu, il avait, comme eux, la maladie d’un idéal absolu, la France pour lui, comme eux avaient de façon absolue l’idéal de la Liberté. Bigeard, Il a conduit sa vie comme un moine selon ses propres termes, il n’a eu qu’une femme dans sa vie, une seule passion, la France, Gaby.. Il vient du monde pauvre et austère autant par choix que par nécessité. Ses facultés de penser, taillées à la hache, simplifiées à l’extrême, montrent à l’évidence qu’il aurait été un excellent soldat allemand, ou un excellent soldat soviétique, ou un excellent soldat américain ou viet, selon les circonstances. Un des rares « fana mili » point-barre au milieu des carriéristes abondamment pourvus de femmes, de putes, de dollars, de wiskies, de pinard, largement décorés par un pouvoir politique de copains-coquins corrompus, stipendiés-vendus..

On se reportera, pour approfondir, à « La guerre d’Indochine » de Bodard, ou a des revues comme « NAM » qui, sans vergogne, font leur fond de commerce du scandale de l’époque, comme le font actuellement les media du scandale de la Lybie ou de la Syrie.. « Saigon, capitale du vice »..

Guerres, belle aubaine pour le Spectron et la presse vide-pot, au même titre que le foot ou le vélo, au même titre que les grand-messes de madame Madona, Bob dit l’Âne et autres chanteurs de variétés qu’on a tôt fait de nous faire avaler comme Phoenix du monde de la « Culture »..

Bodard écrit : « les sociétés et compagnies capitalistes financent des bandes privées pour défendre leurs plantations, leur hévéas et leurs mines ».

Qui peut encore croire en l’Occident ? En la défense de l’Occident ?

Puisse l’OWS éviter la confrontation armée avec ses adversaires, assurer sa victoire en manoeuvrant habilement ses idées plutôt que d’envoyer 100 000 contestataires à la mort. Le déchainement de la violence est la réaction naturelle du capitalisme, la bataille de Dien Bien Phu a été décidée à Saigon et Hanoï. Le capitalisme aux abois a toujours relancé son système en organisant et déclenchant la guerre.

Puisse-t-il aujourd’hui s’effondrer sur lui même et périr par des raisons qui n’appartiennent qu’à lui. Cet espoir n’est pas insensé a ce jour, Mais..

Malheureusement, le capitalisme contemporain a encore des moyens quasi infinis de financer des bandes privée lui aussi, il ne s’en prive pas, pour défendre ses plantations, ses hévéas, ses mines et, ce qui est nouveau, son système généralisé d’argent faux et de show-biz mondialisé..

 

Wall Street, métonymie par excellence

Dans ce texte, on aura compris que « Wall Street » désigne tout à la fois, par effet de métonymie, l’impérialisme de l’Amérique et de ses vassaux, le capitalisme, leurs multiples bras armés et serviteurs, appareil militaire, industrie de la réclame et de l’amusement publique, le Nouvel Ordre Mondial, la « Démocratie » ainsi que la vision mono dimensionnelle qu’ils incarnent. On devrait d’ailleurs plutôt parler d’absence de vision du monde..

Logiquement, il s’en suit que l’OWS – Occupy Wall Street – désigne le tout petit David confronté au géant mononucléé Goliath. L’OWS prend ainsi le rôle du maigre petit Viet contre le gros mercenaire de Wall Street décervelé, bardés de mille jouets meurtriers, tout gonflé de son or et de ses illusions sur la démocratie, le bien, la Liberté.. qu’il ira au besoin enfoncer dans le crâne de ses adversaires à mille lieux de chez lui à coup de missiles.

 

L’entreprise de Wall Street, c’est la destruction du monde

Wall Street et ses avatars, depuis 150 ans, ne produit rien, absolument rien en dehors de ses illusions et de ses mystifications et de ses cauchemars. Wall Street ne fait que bouffer son substrat, bestialement, jusqu’à épuisement.

Les êtres qu’il a fabriqués, grand-prêtres de son culte à Mammon ou obscurs dévots collaborateurs tout au bas de l’échelle se caractérisent par leur incapacité totale à penser le monde au delà de quelques images simplifiées que leur délivrent à plein seaux le Spectron et le réseau des réseaux.. Ces zombies adhèrent totalement et docilement au modèle comportemental concocté pour le plus grand bénéfice de ses affaires par le Haut-Clergé de cette église de Satan.

Les hordes d’esclaves lobotomisés n’ont qu’une exigence : qu’on les mène pâturer gras, qu’on ne les prive pas de leurs stupides jouets et de leurs stupides occupations. Tout prole qui a quarante ans n’a pas de tondeuse à gazon a raté sa vie. C’est Ségala qui l’a dit, grand organisateur et chantre enthousiaste aux grand-messes..

Le troupeau est ainsi bien gardé, enlacé dans une mortelle tautologie : sa vision est formatée par ses maîtres et ses maîtres lui procurent les images qui s’y conforment, le gave sans compter de ce à quoi on l’a habitué.

Jules Roy peut bien relayer l’imagerie populaire des Viets termites cruelles, Bodard des hommes-insectes.. Quels noms donner à nos hordes d’esclaves pansus et motorisés, alcoolisées, abruties de foot et de variétés ?

Cette destruction du monde entreprise par Wall Street, elle se fait pour des besoins économiques, pour satisfaire les besoins d’un système de surconsommation. Elle s’opère aussi pour des besoins militaires, toujours liés dans le système des capitalistes et qui se poursuit sans relâche, à vaste échelle désormais, en dépit de la résistance de façade de quelques ONG ou de quelques écolos, en dépit de l’impuissante résistance – pour l’instant impuissante – de mouvements comme l’OWS.

 

Dans l’actualité : « Industries continue to pollute and cause irreparable environmental damage in their quest for higher profit. »

Cette destruction systématique de la planète, après celle des hommes, a démarré il y a plus d’un demi-siècle.

C’est au début des années 50 que furent utilisés, par exemple, et pour la première fois les défoliants au Vietnam, utilisation expérimentale qui se transforma rapidement en véritable et efficace programme de destruction systématique des cultures. Lorsqu’en 1970 l’opération Ranch Hand se termine – rappelons au passage avec quelle finesse Wall Street nomme ses opérations militaires, Geronimo.. – c’est plus de 70 millions de litres de produits toxiques, agents orange, bleu, blanc, qui avaient été pulvérisés sur un cinquième de la superficie totale de la jungle vietnamienne dont plus d’un tiers de ses forêts de palétuviers, soit environ 2,3 millions d’hectares, plus que la superficie de la Belgique pour donner une idée, ou de la Suisse..

Mais, dans cette forme moderne de la guerre totale qui porte en elle-même la coopération entre ennemis, le vainqueur sera très certainement celui qui sait diriger scientifiquement les compromissions, celui qui se vouera totalement à sa cause – peut-être aidé par Maman Terre ou par les Dieux..

La leçon du cochon nous rappelle que ceux qui se régalent de cochon ne sont en général pas près à mourir lorsqu’il n’y a plus de cochon..

Voilà ce qu’il leur aurait fallu à Occupy Wall Street, le 12 septembre 2012, à Zuccotti Park, New York, au côté des vétérans qui s’étaient joints : Giap et Bigeard..

 



7 réactions


  • lsga lsga 23 juillet 2012 13:46

    analyse intéressante, malgré la confusion sur le terme matérialisme. Pour rappel, le matérialisme ce n’est pas le consumérisme :


    En tout cas, cela fait plaisir de lire un article reposant sur l’analyse du fonctionnement naturel du Capitalisme. 

    ça nous change de tous les délires complotistes et anti-européistes distillés par le Cercle des Volontaires, l’UPR ou le FN. En effet, la question n’est pas de savoir si les bourgeois dînent au Siècle ou si les salariés mangent du cochon.

    Ce qui se produit aujourd’hui est ce qui produisait déjà au temps de la Vème République : il s’agit du simple développement de la machine Capitaliste. 

    Ceux qui font croire qu’un retour à la Vème République permettrait de résoudre les problèmes sont des menteurs. Ceux qui font croire que les problèmes proviennent de Sociétés secrètes judéo-maçonniques sont des fascistes qui s’ignorent. 


    Le Capital, le Capital, le Capital. Voilà l’ennemi. 

  • easy easy 23 juillet 2012 14:30

    «  »«  » Jusqu’à de Lattre qui s’emporte : « Et dire que c’est pour les hommes d’affaires et leur sale argent que mes soldats se font tuer. »«  »« 

    Autre citation du même De Lattre « Que toute la chasse y soit, que cela mitraille, que cela bombarde. Du napalm, du napalm en masse ; je veux que, tout autour, ça grille les Viets » 

     

    Je n’ai rien contre le fait d’utiliser Giap ou Bigeard, DBP...pour offrir une perspective inédite. Il y en a qui auront du mal à suivre mais pourquoi pas.


    Je ne vous disputerai que votre anti capitalisme.

    Le mot en lui-même et originellement, ne contient pas de sens d’objectif ni d’ambition. Il veut seulement dire que l’entreprise matérialiste passe par le seul capital ou se sert essentiellement du capital. A entendre aussi que le capital, quand il est conjugué en isme, peut générer du capital.

    Ca montre un moyen, un mécanisme, un système, non une fin.
    Le capitalisme est un moyen.

    Quelle est la finalité de ceux qui utilisent cet outil ?
    Elle est diverse et peut éventuellement tenir en volonté de pouvoir, voire d’hégémonie, elle peut consister à accumuler de l’argent pour le seul plaisir d’avoir de l’argent, mais elle pourrait, rien ne l’interdit, consister en une volonté de créer un autre outil, plus spécialisé et d’en faire partager l’usage (un parc, une piscine, une biblio, un dispensaire, une école, un musée, un concert, d’accès libre pour tous).

    Le capitalisme est certes très souvent utilisé comme moyen par des égocentriques (il est apparu à la suite de nos révoltes contre les moyens métaphysiques utilisés par les théologiens égocentriques. Voltaire anti clérical devenu aussi riche que Richelieu le cardinal), il se retrouve donc associé au concept de pouvoir et d’hégémonie.
    Mais cette association n’est pas juste et nous conduirait en un rien d’énervement à jeter le bébé avec l’eau du bain.

    Le capitalisme a l’énorme défaut d’être un excellent moyen pour certains de s’imposer mais ce serait un erreur que de le jeter au lieu de le purifier.




    L’homme le plus riche de France est Bernard Arnault. Il a été l’inventeur de Férinel et on lui doit donc le bétonnage des montagnes et littoraux. Il n’est pas parfait. Mais laissons Férinel de côté et posons que sa fortune tienne aux seuls produits de luxe avec LVMH. En quel endroit serait-il alors directement un écraseur de pauvres, un producteur de miséreux et de misères ?

    Il est ambitieux, il utilise le capitalisme comme outil mais pour en faire quoi ?
    Certes il fabrique des objets de luxe qui seront achetés par des riches sans aucun scrupule.
    Mais pour sa propre part, il a des scrupules et n’apprécierait pas du tout de produire directement des miséreux, des affamés.

    Il est évident que quelque part dans la chaîne de fabrication de ses produits, au bout des sous-traitants, il y a des miséreux (par exemple des gens qui doivent subir de très dures conditions pour creuser des mines de diamants ou d’or dont ses orfèvres se servent)
    Mais, lui Bernard, ne supporterait pas que ça se produise dans les entreprises dont il a le contrôle direct.

    Si l’on considère par exemple un fabricant de piscines en polyester. Il utilise au maximum le capitalisme mais ne parvient pas à autre chose qu’à la fabrication de 100 piscines par an avec 10 ouvriers et il n’a que 2 M€ de fortune. Or très directement dans son usine, sous ses yeux, il condamne ses employés à bosser dans des vapeurs toxiques (il n’améliore éventuellement leur sort que sous la pression des syndicats ou CHSCT)

    Bernard Arnault qui a 40 milliards, devrait, selon les mêmes proportions de capital, condamner 200 000 ouvriers à des conditions insalubres. Or ce n’est pas le cas, bien au contraire.
    Les gens qui bossent directement pour les marques de luxe, se retrouvent dans de meilleures conditions que la moyenne. Ca aurait pu être les pires conditions mais ce sont en réalité les meilleures.

    De son côté, Lakshmi Mittal fait probablement travailler péniblement des gens dans ses propres entreprises, mais pas Bernard Arnault.

    Quant à la sensibilité, Bernard Arnault fait partie des meilleurs pianistes amateurs, sa femme, ses enfants font tous de la musique. On pense à l’argent quand on joue Chopin ? On pense à dévorer le monde quand on offre à entendre du Mozart ?


    Si nous n’apprenons pas à dire de manière plus précise où se trouve le diable, si nous nous contentons de confondre la hache et le bourreau, nous ne sortirons pas de la pétaudière actuelle.


    C’est le capitalisme qui a permis le canal de Suez, de Panama, le train transcontinental et Albert Schweitzer, quand sa pharmacie était vide, arpentait l’Europe pour récolter des fonds.

    C’est bien entendu le capitalisme qui a été utilisé pour soumettre l’Indochine puis le Vietnam. Mais si la France a utilisé le capitalisme pour s’enrichir de l’Indochine (pour enrichir ses entreprises privées) le EU ont utilisé le capital uniquement pour faire barrage au communisme et n’ont jamais espéré en tirer quoi que ce fût d’autre. 
    Dans les deux cas, ce n’était qu’égocentrique mais il ne faut pas pour autant confondre l’outil capital financier avec les ambitions de ceux qui l’utilisent.

    Dénonçons certains capitalistes par leurs manières irrespectueuses et égocentriques mais ne dénonçons pas le capitalisme qui pourrait servir aussi puissamment les petits s’il était employé de meilleure manière.

     
    Madame Boucicault, très pauvre au début de sa vie, ainsi que son mari, avait fini à force de travail intelligemment investi, par avoir du capital (capital boule-de-neige). Et bien dès qu’elle a eu de la puissance grâce à cet outil, elle en a fait bénéficier d’abord tout son personnel puis des quidams en créant toutes sortes de dispensaires dont l’hôpital homonyme.
    Cognac & Jay pareillement.
    Monsieur Odon Valet a fait encore mieux, tout le capital dont il a hérité, il l’a donné et poursuit son métier de prof.




    Le capitalisme a clairement ses perversions mais quelle chose n’en a pas ?
    Alors, ce capitalisme, on le soigne ou il faut carrément le tuer ?

    Je vous rappelle que l’oncle Ho, avant sa déclaration d’indépendance définitive, avait concocté un projet de société incluant sans état d’âme le profit pécuniaire. Il avait envisagé des commerçants comme il y en a plein à Paris (et cela pourtant après avoir fondé le PCF).
    C’est uniquement parce que la France est restée sourde et que ses seuls soutiens étaient les communistes soviétiques et chinois qu’il a corrigé sa copie pour ne plus proposer qu’un projet communiste où il n’apparaissait plus aucun profit individuel.

    A l’époque, il était impossible de réussir une révolte contre le colonialisme utilisant le capital sans soutien des régimes communistes (qui tiraient leur force de l’ouvriérisme sans aucun avenir individuel, hormis pour les dirigeants, comme toujours)

    Cette époque est révolue, le capitalisme méchamment utilisé produit encore des millions de miséreux mais par d’autres biais que le colonialisme du XIX ème siècle. Il faut lutter contre ce fléau mais ce ne sont plus les centralismes staliniens ou maoïstes qui peuvent aider.
    Désormais, le mal est infiniment plus diffus et monsieur Bobo comme monsieur Bidochon ont tous deux de mauvaises manières.

    Nous sommes tous colonisés par nous-mêmes, par notre consumérisme x 6 milliards
    (les problèmes énergétiques, les Fukushima ne sont en rien dûs aux milliardaires mais à la masse populaire devenue énorme.

    Ce qui pollue nos océans ce ne sont pas les sacs LVMH ni même les bouteilles de champagne vides mais les pochons à deux balles, les mégots et les canettes de bière que les gueux jettent par milliards. Ce qui défigure les côtes, ce ne sont pas les folies à la Sarah Bernard ou les villas de luxe mais les milliers de barres en béton de 20 étages.

    Ce qui pollue Hanoï et Saigon, ce ne sont ni les chaises à porteurs, ni les »boîtes d’allumettes" ni les cylo-pousses ni les 4x4 Mercedes mais les millions de vélomoteurs.

    Ce qui a enlaidi Saigon, ce n’était pas son quartier résidentiel français quoique d’un style incongru, mais les millions d’habitats tubes qui se sont construits n’importe comment autour


    Ce qui nous pourrit la vie, quel que soit notre pays, ce ne sont pas les bombardements de tomahawks valant des fortunes car ça ne se produit que rarement. C’est la montagne de merdouilles produites par la masse, tels les embouteillages, tel le chômage, telles les meurtres pour une cigarette, telles les fusillades dans les cinémas, telles les bombes artisanales qui nous déchiquètent dans un marché, tels les amoncellements d’ordures. Et ce sera bientôt les flash attacks. S’il n’y a plus de thons si nous mangeons des poulets forcés, ce n’est pas à cause du capitalisme, c’est essentiellement en raison de notre masse totale.


    • Patrick Samba Patrick Samba 23 juillet 2012 16:28

      Bonjour Montagnais,

      bonjour Easy,

      remplacez tous vos « ce ne sont pas » par des « si ce sont aussi, mais ce ne sont pas seulement », et votre commentaire devient vraiment bien plus intéressant. Néanmoins, des puissants, aussi philanthropes soient-ils, et de la masse, il ne faudrait pas oublier qui a le pouvoir...
      cordialement


    • easy easy 23 juillet 2012 19:29

      OK Patrick, je veux bien distribuer les responsabilités. Les milliardaires aussi jettent des mégots partout.

      Mais dans ma vie, j’ai souffert beaucoup plus souvent des effets de la masse de 2 milliards de smicards que des effets des mille milliardaires.

      Le capitalisme existe et produit d’innombrables nuisances quand il est utilisé par des égocentrique. Comme les gens sont le plus souvent égocentriques, c’est la masse des 2 milliards qui jouent le capitalisme avec leurs petites économies mais aussi avec leur premier capital qu’est leur maison, qui fait l’ampleur des dégâts. 




      Je vous rappelle que les Français ont 10 000 milliards d’Euros de patrimoine constitué à 61% de capital immobilier, de 33 % de capital mobilier et qu’ils ont 2 millions de piscines. 


      Vous pensez tous au capital qui vous semble énorme de ces entreprises, de toutes les entreprises alors que le total du capital de toutes les entreprises françaises ne représente que 6% du patrimoine des Français.
      Par exemple, le CAC 40, selon son cours, c’est environ 75 milliards seulement de valeur totale.




      Ces 6 % de capital placé en entreprises et qui cristallisent les haines anticapitalistes produisent plus de la moitié de nos emplois.
      Alors que les 61% + 33% de capitaux détenus par la masse des Français et leur servant capitalistiquement, ne produisant qu’une partie des emplois du bâtiment et les postes de concierge, ces 94% là, ces 9 400 milliards de capital en très grande part capitalistiquement utilisés, ils sont totalement inconnus des anticapitalistes.

      Leur père, leur tante, leur enfant, eux-mêmes sont capitalistes mais comme ça ne porte pas sur un gros montant, chacun s’empresse de croire que ça ne compte que broutille ./. aux énormes capitaux des entreprises et industries. Ce qui est complètement faux.

      Si une part de ces 61% de capital immobilier détenu par els Français consiste en leur propre domicile ne générant pas de revenus locatifs mais de la plus-value tout de même, l’autre part du capital immobilier est productif de rentes et de plus-values. Ce qui est la définition exacte du capitalisme.


      La fortune des Arnault Pinault et Muliez n’est rien en comparaison de la masse des petits capitalistes. Et eux, ça leur arrive souvent d’offrir quelque chose au public.

       


    • Patrick Samba Patrick Samba 23 juillet 2012 23:24

      Dommage que lorsque vous parlez d’argent, vous ne sachiez regarder les choses que par le petit bout de la lorgnette, à l’inverse de ce qui fait votre démarche quand vous vous aventurez en philosophie ou en histoire.
      Mais à ce qui relève peut-être de l’impossible nul n’est tenu...
      Au plaisir néanmoins de vous lire dans ces domaines-là.


    • easy easy 24 juillet 2012 09:12

      Je suis Eurasien extrême.
      Lorsqu’il fait jour sur une moitié de moi, il fait nuit sur l’autre. Lorsqu’il fait canicule sur l’une, il gèle sur l’autre.

      Mon propre n’est pas de regarder les choses par un certain bout de la lorgnette mais de savoir les regarder par tous les bouts possibles, tant par le bout commun, que par d’autres.
       
      Et comme j’ai toujours vu les choses sous tous les angles, je les ai traitées sous tous les angles. J’ai accumulé plus d’expériences de vie que la plupart des gens. Alors quand j’expose un des points de vue possibles, toujours hors mainstream sinon c’est inutile, j’abonde d’arguments et d’exemples. J’expose des choses que j’ai vécues et intégrées. Je ne propose donc jamais de liens comme font tant d’autres qui renvoient à des exposés de tiers mais qui semblent incapables de les faire eux-mêmes.


      Ici, j’ai fait ressortir un argument que personne n’expose :
      Le capital des entreprises qui font notre vie matérielle c’est 6% seulement de notre capital total et les autres 94% sont donc aux mains des particuliers, des messieurs Bobo et Bidochon qui les utilisent de la manière la plus capitaliste possible, qui en tirent des rentes sans avoir à transpirer ni même y penser.

      Je me doute bien qu’en exposant ce fait indiscutable et que ce qui pollue la mer ce sont les pochons à deux balles non les malles Louis Vuitton, je vais chagriner ceux qui préfèrent croire que le diable c’est l’autre de tous. Et quel meilleur ou plus évident « autre de tous » que Picsou n’est-ce pas ?

      Ces milliardaires qui créent tout ce que nous consommons, qui provoquent toutes les transformations et pollutions industrielles, qui font 90% des emplois, qui fournissent toutes nos énergies, qui traitent tous nos déchets, ne se servent que de 6% de notre patrimoine mais ils sont responsables de tous nos maux pendant que 59 999 000 Français qui utilisent capitalistiquement les 94% de ce patrimoine, qui ne créent aucun produit de consommation, aucune énergie, qui ne traitent aucun déchet mais qui sèment des ordures n’importe où, sont totalement innocents.

      Hier, j’ai fait la vidange d’un très bon ami prof de piano. Une fois l’huile usagée mise dans un bidon, pour le sonder, je lui ai demandé où nous allions la jeter. Il m’a répondu 
      « Bin dans les toilettes...Non ?...Bin dans un égout alors ».
      Il a 60 ans, ça fait 30 ans qu’il vit en France et il est très cultivé de la chose philosophique. Il méprise les milliardaires et fait très souvent preuve d’un bon sens pratique. Mais il m’a tout de même fallu dix minutes d’explications pour qu’il découvre effaré un autre bout de la lorgnette concernant le problème des déchets. Sur ce coup là, il était vraiment innocent par méconnaissance. Tant il est vrai qu’on peut passer 30 ans dans le milieu de la musique sans jamais papoter de vidange.

      (Ca me fait penser qu’Hélène Mercier était si exclusivement tournée vers la musique qu’avant de rencontrer Bernard Arnault, elle n’avait des milliardaires que l’idée mainstream : Ils sont autoritaires, brutaux, frustres, froids, insensibles, dénués d’humour, ne comprenant rien aux douleurs de la vie...Maria Calas et Nadine Lhopitalier pareil)

      Mais bien d’autres jettent leurs saletés n’importe où en sachant très bien qu’ils font mal.
      Vous connaissez l’histoire qui est arrivée il y a quelques mois : Un Bidochon avait entrepris de jeter son huile de vidange dans un regard à l’abri des regards. S’inclinant pour une manoeuvre discrète, son portefeuille est sorti de sa poche et est tombé dans le fond. Il s’était alors penché au maximum pour le récupérer. Il est tombé la tête la première mais n’a pas osé appeler tout de suite au secours tant il tenait à son image d’innocent. Quand il s’est décidé à hurler, il ne passait absolument plus personne et il n’a été extirpé que plusieurs heures après. Pour un de pris la main dans le sac, combien font ça en douce sans être jamais découverts ?

      (Je vais finir par croire que les vis de vidange devraient être spéciales pour n’être plus dévissées que par des professionnels afin que ces huiles sales soient toujours correctement traitées)




      Quand s’annonce un procès, chacun sachant ses cochonneries et abus, c’est tous aux abris et il se forme alors toujours un coagulât de gens qui désignent de leur saint index un bouc émissaire

      Or en ce moment, s’ouvre le procès de notre civilisation. Il se forme donc un regroupement pour stigmatiser un petit groupe : 99% contre 1%.


      Il y a plein de ministres, de députés, de célébrités, de leaders d’opinion qui pourraient dire sans erreur que 33% de notre patrimoine est confié aux banques et assureurs par les particuliers qui y trouvent intérêt et que cette masse monétaire représente 3 300 milliards rien que pour la France.
      Mais ils n’en disent rien, trop contents que les accusations se concentrent sur les banquiers et quelques grands entrepreneurs. Pendant ce temps, ils peuvent poursuivre leurs petites affaires tranquillement.



  • tf1Goupie 23 juillet 2012 20:38

    Ce serait bien de nous dire où il est ce « rideau » qui sépare les riches et les pauvres : tous les membres d’OWS font partie de la moitié la plus riche des habitants de cette planète


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