Evangile cannibale et zombification politique du couple Macron-Merkel
« On a toujours nos blouses blanches.Ridicules.Elles ne ressemblent plus à rien.Des traînées sales de sueur.Les gribouillis noirs des goules.[...]
C’est nous les anges, les messagers.On vient apporter la bonne parole, ce nouvel évangile des morts, l’évangile cannibale.Le temps nous lavera de nos souillures.On reviendra immaculés.Nous serons juges ! »
Fabien Clavel, « L’évangile cannibale », Mnémos éd. (2018)
Qu’il s’agisse des efforts désespérés d’une camarilla qui s'évertue à sauver les fondements vermoulus d’une classe politique à la tête d’une Europe littéralement zombifiée, qu’il s’agisse des gesticulations d’un président qui perd toute crédibilité et tente de rassembler ses troupes en prévision de la Bérézina des prochaines élections européennes en 2019, les déclarations de M. E.Macron et de sa partenaire Mme A.Merkel ont tout d’un véritable évangile cannibale qui n’aura pas d’autre effet que de compter les ossements d’une politique arrivée en fin de course avant même que d’avoir commencé.
Tenter de gagner une partie d’échecs en ignorant les pièces maîtresses de l’adversaire pour ne s'appuyer que sur de simples pions ne fait que précipiter l’issue fatale.
Que les choses soient claires : le rêve européen de M. Macron est déjà mort et enterré dans la mesure où, empêtré qu’il est dans un salmigondis où la confusion des genres se mêle à la confusion des sentiments et à la cécité face à une situation irrémédiablement compromise, le chef de l’Etat se refuse à voir et à admettre une réalité pourtant aveuglante et facile à comprendre : les peuples européens se sont réveillés et ont une toute autre idée des valeurs européennes que celles que des équipes gouvernementales démonétisées, désormais dépourvues de légitimité tant politique qu’économique ou sociale, tentent encore de leur imposer en prêchant un évangile mortifère et cannibale.
Les élections européennes de 2019 seront, qu’on le veuille ou non, un referendum à l’échelle continentale sur l’unique question qui mobilise déjà et mobilisera encore plus les Européens : le refus complet de l’immigration-invasion du continent.
Le reste est secondaire.
Un spectacle pitoyable
Voici un an, profitant de l’état de grâce postélectoral, le chef de l’Etat qui se sentait animé d’une mission sacrée proposait alors d’organiser partout en Europe des exercices dits de « démocratie participative » pour favoriser les liens entre les peuples et restaurer une construction européenne à laquelle plus personne ne croit dans sa forme actuelle et dans les dérives qui l'ont profondément obérée.
« Je souhaite avec ardeur, déclarait-il à ce propos à Athènes le 7 septembre 2017 dans son discours face à l’Acropole, que, dans chacun des Etats membres, nous puissions pendant six mois organiser des consultations démocratiques qui seront le temps durant lequel partout dans nos pays nos peuples discuteront de l’Europe dont ils veulent ».
Il eût été préférable, par honnêteté intellectuelle, de corriger le propos et de parler "de l'Europe que nous voulons, nous, dirigeants européens, et nous seuls", tant il est vrai que depuis le referendum de 2005 et cette terrible déclaration de J-C. Juncker en janvier 2015 : « Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens. »
Professant la Bonne Nouvelle, de Lisbonne le 27 juillet à Copenhague le 28 août et enfin à Luxembourg jeudi 06 septembre 2018, la parole présidentielle n’a plus qu’un seul objectif pour son auteur : gagner à tout prix les élections européennes – question de survie politique à titre personnel comme pour son parti LREM – en tentant de roder un argumentaire construit sur la fumisterie d'une "Europe qui protège, sans renoncer à ses valeurs ».
Particulièrement gêné par les divergences européennes autour de la question des migrants, le président s’efforce ainsi de proclamer la nécessité de faire respecter le droit d’asile en sanctionnant les « Etats contrevenants », en l’occurrence la Hongrie, la Pologne, l'Autriche et désormais l'Italie, dont il se refuse à comprendre les positions qu’il écarte sans même en discuter les fondements en leur opposant un argumentaire fallacieux. « Je suis pour qu’on soit clairs et fermes avec tous les pays qui ne respectent plus l’Etat de droit, la base de ce qui est au fondement même de nos traités, et du Conseil de l’Europe. On ne doit transiger en rien », a-t-il ainsi déclaré jeudi 06 septembre 2018 sous le regard approbateur et enamouré du Premier ministre Luxembourgeois M. Xavier Bettel.
Il est vrai que la mayonnaise a eu le temps de prendre dès lors que quelque heures plus tôt les deux dirigeants ont pris le temps de déjeuner avec les Premiers ministres belge, Charles Michel, et néerlandais, Mark Rutte, pour évoquer la préparation du sommet de Salzbourg du 20 septembre prochain dont l’ordre du jour sera précisément… la question migratoire.
Le feu couve donc et à huit mois des prochaines élections européennes l’urgence est désormais de se lancer dans cette « confrontation » dont le chef de l’Etat entend être le champion autoproclamé face à ses adversaires, désireux qu’il est de défendre une solution « progressiste et efficace » contre les solutions « simplistes et inefficaces » prônées par le dirigeant hongrois et son nouvel allié, le ministre de l’Intérieur italien d’extrême droite et donc certainement et à tout le moins crypto-fasciste, qui sait ?, Matteo Salvini, dont des juges bien intentionnés tentent de détruire le parti en l’asséchant financièrement.
On le voit, tous les coups sont permis, car dans l’évangile cannibale du président français en particulier et Bruxellois en général, les progressistes dont il se veut le chef de file doivent se retrouver autour de la « plateforme » dont il a défini les contours l’an dernier à la Sorbonne, dans son discours sur la refondation d’une UE décrite et voulue comme « plus intégrée et plus solidaire ».
Mais, Fatalitas ! il se trouve que les rêves sont souvent incompatibles avec la réalité et que les doigts crochus du Destin pourraient bien déchirer la trame de ce songe politique.
II- Obstacle majeur
Il est vrai que sans Angela Merkel le processus macronien est condamné. On ne saurait en effet méconnaître le fait que parallèlement aux aspirations macroniennes l’Allemagne reste fidèle à un objectif primordial qui est celui de conserver à sa main le directorat européen qu’elle n’envisage nullement de partager avec qui que ce soit d’autre qu'elle. Voici en effet que la chancelière a apporté mercredi dernier son soutien au conservateur allemand Manfred Weber, candidat de la droite européenne (PPE) à la présidence de la Commission européenne. Mais M.Weber étant plutôt un défenseur de Viktor Orbán – l’ennemi de M. Macron -, ce soutien pourrait bien éloigner Angela Merkel du camp d’éclopés et de zombies politiques que tente de fédérer le chef de l’Etat. Celui-ci semble avoir perçu le danger puisqu’il s’est cru obligé de déclarer à Luxembourg que les décisions concrètes de la chancelière la plaçaient « totalement du côté des progressistes ».
Fichus progressistes et maudits nationalistes, « populistes » et « illibéraux » de tout acabit, empêcheurs de voter en rond et qui défendent une "mauvaise" Europe !
Rien ne vas plus car l’entrevue de M. Macron et de Mme Merkel de ce vendredi, à Marseille, n’aura pas permis de savoir de quel côté penchera la chancelière qui n’est plus que l’ombre d’elle-même et qui demeure très attentive à l’arbitrage que M. Orbán ne va pas manquer d’effectuer au sein de la droite européenne.
III- Faire de la question migratoire « une chance et pas une crainte », ou quand les incantations deviennent des foutaises
M. Macron a en effet choisi Marseille, « ville symbole des migrations » (…), pour marquer sa volonté de faire de la question migratoire « une chance et pas une crainte » en Europe, et cela alors que Mme Merkel est de nouveau fragilisée au sein de sa coalition comme l’a révélé sa passe d'armes sur l'immigration de ce jeudi 6 septembre avec son ministre de l'Intérieur, M. Horst Seehofer, deux mois seulement après avoir évité l'éclatement de sa coalition sur ce sujet.
M.Horst Seehofer, président du très conservateur parti bavarois CSU, a en effet affirmé avec une lucidité certaine que « la question migratoire est la mère de tous les problèmes » en Allemagne, disant comprendre les manifestations anti-migrants de Chemnitz consécutives à des meurtres commis par des migrants sur des ressortissants Allemands qui ont, on peut le comprendre, donné lieu en retour à de sérieuses échauffourées. Des débordements qui « ne sont pas tolérables dans un Etat de droit », a alors rétorqué la chancelière qui semble avoir oublié qu’un véritable Etat de droit ne peut valablement accepter sans réagir que des éléments allogènes puissent perpétrer des crimes sur son territoire…
L’Allemagne s’est en effet gravement compromise et piégée - entraînant avec elle l'Europe toute entière, à l'exception des pays du Groupe de Visegrad et de l'Italie - avec un appel d’air criminel à une immigration qu’elle ne maîtrise plus, comme le montrent les graves événements de Chemnitz, et il n’est pas impossible que le revirement politique que va connaître la Suède dont la survie suppose qu’elle mette un terme définitif à une immigration irresponsable et mortifère puisse conduire à un revirement européen de l’Allemagne.
Ce changement qui est en train de se produire et de gagner du terrain lfinira par laisser M. Macron, sa politique et son « arc progressiste pour faire face à la montée des populistes » sur le sable, achevant de le transformer en mort-vivant ou en zombie politique face à l’Italie de M. Salvini et à la Hongrie de V. Orbán.