L’hôpital public doit cesser d’être géré comme une entreprise
Les urgences d’hôpitaux publics ferment dans le pays. Que ce soit pour quelques heures, des nuits, chaque jour ou pendant plusieurs semaines, ces services doivent fermer leurs portes faute de personnels soignants. Cela illustre la gestion selon le modèle de « l'hôpital entreprise » avec l'obsession de la performance et de la rentabilité en cours depuis des décennies.
Réduction des coûts et augmentation des activités de l’hôpital public
Au cours de ces 10 dernières années l'hôpital a réduit de plus de 8 milliards d'euros ses coûts tout en augmentant d'au moins 14 % ses activités. Le modèle de « l'hôpital entreprise » avec l'obsession de la performance et de la rentabilité, au détriment d'une approche respectueuse de la personne malade dans ses choix et ses droits, s'est aujourd’hui imposé comme un dogme. Au point de ne plus distinguer certaines pratiques du service public.
A l’évidence, c’est désormais la primauté de la rentabilité et l'évaluation des filières et des dispositifs selon des critères de management, comparable au secteur privé.
Pour autant l'hôpital public assume encore sans discriminations des missions d'excellence dans les domaines biomédicaux les plus innovants, parfois les plus coûteux et les moins rentables. Mais pour autant, parfois des considérations financières déterminent la sélection et les conditions de leur offre, dans le but de parvenir à un profit assuré.
Il faut aussi considérer que ces dernières années, nos hôpitaux publics se sont appauvris du départ de nombre de professionnels préférant à un combat épuisant, injuste et incertain les faveurs du secteur privé.
Il y a moins de 20 ans, la France avait le meilleur système de santé parmi les pays de l’UE. Aujourd’hui elle n’est même pas dans les dix premières places de ce classement.
Depuis plusieurs semaines, des annonces de fermetures de services d’urgences dans différents lieux du pays
- Le service des urgences de l’hôpital de Givors dans le Rhône ferme temporairement la nuit jusqu’au 30 novembre prochain”
- Les urgences de l’hôpital de Laval fermaient quatre nuits la première semaine de novembre
- Le service de soins non programmés de la polyclinique Maynard de Bastia était fermé du lundi 1er au mardi 9 novembre 2021”
- Jusqu’au 31 décembre, les urgences de l’hôpital du Gier à St. Chamond (Loire) seront ouvertes uniquement de 9h à 19h”
- Ou encore : “Le Pôle Santé Sarthe et Loir (PSSL) avait fermé ses urgences le 8 Novembre de 20h30 à 8h30.
Actuellement, environ 20 % des des lits sont fermés dans l’hôpital public et la situation est tout aussi préoccupante pour les urgences pédiatriques. Une situation gravissime qui oblige parfois certain(e)s patient(e)s à être transférés vers d’autres hôpitaux, quitte à mettre leur vie en danger. Ce n'est pas soutenable !
Il est urgent d’entendre enfin la souffrance des personnels de l'hôpital public
L'exemplarité de l’engagement du personnel médical, avec la conviction de s'opposer à la dissolution de nos valeurs démocratiques et à l'abandon des plus vulnérables, nous est indispensable. Ils nous l'ont démontré depuis le début de la pandémie.
Il n’est pas acceptable que tant de préconisations, de plans, d'encadrements et de procédures gestionnaires cumulées se soient avérées, à l'épreuve des faits, plus néfastes qu'efficaces. Les contraintes de toute nature entre suppression des postes, fermetures des lits, régulations strictement administratives et comptables des décisions stratégiques et organisationnelles, y compris d'ordre médical, ont abouti à des circonstances aujourd'hui considérées comme insupportables, incompatibles avec un devoir de reconnaissance de ce que l'esprit soignant signifie dans un service public.
L'inattention, voire parfois le dédain de la part des directions hospitalières à l’égard du personnel médical de terrain qui incarne un sens exigeant du bien commun, auquel est confiée la mission de soigner et de réparer notre bien commun, c’est à dire la santé, ne peuvent que ressentir un sentiment d'abandon, voire de mépris. Alors qu’ils puisent en eux et dans la vocation du service public leur capacité à intervenir, mais très souvent souvent avec le sentiment de résister seuls… Ce n'est plus acceptable.
En 2020, les salaires des infirmier(e)s et des aides soignant(e)s étaient parmi les plus bas de l’Union Européenne
En 2020, La pandémie du Covid-19 a mis en exergue le fait que le personnel soignant en France n’était pas rémunéré à sa juste valeur. Le personnel infirmier hospitalier gagnait ainsi 6 % de moins que la moyenne française. Le gouvernement avait alors promis une revalorisation « significative », pour atteindre « la moyenne européenne ».
En annonçant le lancement du Ségur de la Santé à partir du 25 mai 2020, le ministre de la Santé Olivier Véran avait jugé à propos des infirmières que la nation allait devoir faire un effort important pour reconnaître leur rôle. Le ministre souhaitait rapidement atteindre un niveau de rémunération correspondant au moins au niveau de la moyenne Européenne.
Le personnel infirmier hospitalier est en effet souvent considéré comme mal payé en France, par rapport aux pays voisins. Qu’en est-il exactement ? Et quelle augmentation serait nécessaire pour atteindre au moins la moyenne européenne ?
Le Ségur de la santé a-t-il porté ses fruits ?
Après sept semaines de discussions, le ministre de la Santé Olivier Véran et les syndicats sont parvenus à un projet d'accord sur la répartition de plus de 7,5 milliards d'euros promis aux salariés des hôpitaux, en première ligne face au Covid-19. Trois syndicats ont décidé après discussion interne de valider le document : Force ouvrière (deuxième syndicat de la fonction publique hospitalière avec 24,7% des voix), la CFDT (24,1%) et l'Unsa (5,6%), permettant de franchir le seuil des 50% de représentativité.
Le document prévoyait 20 mesures, dont une hausse de salaire de 183 euros net mensuels pour l'ensemble des personnels des établissements hospitaliers et des EHPAD, à l'exception des médecins, qui font l'objet de négociations séparées. Cette augmentation de salaire dite " socle" a été votée en fin d'année 2020 dans le budget de la Sécu et est intervenue en deux temps : une première revalorisation de 90 euros « avec un effet rétroactif » au 1er septembre et une autre de 93 euros au 1er mars 2021.
Plus de 500 000 agents publics sont par ailleurs concernés par la revalorisation de leurs grilles salariales. Mais le compte y est-il ?
Cet effort a semblé malgré tout insuffisant : ces annonces n’ont toutefois pas stoppé les départs des hôpitaux. Dans le public comme le privé, puisque la fédération de l’hospitalisation déplore également de « pénuries alarmantes de professionnels de santé, notamment paramédicaux ». Inquiétant, alors que La France risque probablement d’affronter une nouvelle vague de Covid-19 pendant la période hivernale de 2021. il ne faudrait pas également oublier que le personnel soignant a aussi besoin de vacances…
Comparaison des salaires des infirmier(e)s et aides soignant(e)s avec d’autres pays
Israël = 1,6 fois le salaire moyen
C’est donc en Israël que les infirmier(e)s sont proportionnellement au niveau de vie le mieux payés. Plus d’une fois et demi le salaire moyen qui s’établit autour de 2200 euros. Les infirmier(e)s gagnent donc un peu plus de 3000 euros mensuels.
Le Luxembourg = 1,4 fois le salaire moyen
Sachant qu’au Luxembourg le salaire moyen est le plus élevé d’Europe et s’établit à 3500 euros, soit le salaire des infirmier(e)s à 4900 euros mensuel.
La Grèce = 1,2 fois le salaire moyen
Comme l’Espagne, la Grèce, durement touchée par la crise, a essayé de maintenir un niveau de salaire correct pour ses fonctionnaires. Les infirmiers en Grèce gagnent donc un peu plus que la moyenne des salaires qui est de 1500 euros, soit environ 1800 euros.
L'Australie = 1,2 fois le salaire moyen
Salaire moyen 3500 euros par mois en moyenne. Les infirmier(e)s gagnent un peu plus, autour de 4200 euros.
L'Allemagne = 1,2 fois le salaire moyen
Le salaire moyen en Allemagne s’établit autour de 3200 euros. Mais les disparités régionales sont importantes et donc ce salaire indicatif est difficile à comparer aux autres pays dans la mesure où la fiscalité peut être tout à fait différente d’un lander à l’autre. Toutefois les infirmier(e)s gagnent en moyenne un peu plus qu’en France, mais qu’avancer un chiffre ne servirait à rien.
Le Japon = 1,1 fois le salaire moyen
Avec un salaire moyen à 2630 euros par mois, le Japon est bien évidemment l’un des pays les plus riches du monde. Et trouve quand même le moyen de payer pas mal ses infirmier(e)s, autour de 2900 euros.
Toutes ces informations sont recueillies sur le site :https://www.topito.com/top-pays-payent-le-mieux-infirmiers
Il faut cependant rappeler que les comparaisons des rémunérations entre pays sont toujours délicates et sujettes à caution, quelle que soit la profession. Les impôts et charges, le nombre d’heures travaillées, les avantages et primes varient d’un pays à l’autre, et on ne peut pas aligner simplement les salaires bruts pour les comparer.
Pour conclure
Il est urgent de refonder l'hôpital public, sortir de gestion du modèle de « l'hôpital entreprise » pour enfin avoir l'ambition de reconnaître comme une des priorités de notre République les valeurs d'hospitalité, l'exigence de solidarité, de compétence et de bienveillance du personnel médical. Cette ambition doit être affirmée dans les engagements proposés à la nation par les candidats à l'élection présidentielle, car nos « forçats » de la santé méritent mieux !