La Lutte des superclasses dans l’Histoire
Le communisme moderne fondé par Karl Marx et Friedrich Engels est basé sur la théorie de la lutte des classes. La lutte entre la classe capitaliste et la classe salariée devrait, d'après cette théorie, mené à la révolution communiste.
Mais aujourd'hui les résultats des recherches sur le passage entre l'esclavagisme antique et le féodalisme (Marc Bloch, Georges Duby, Pierre Bonnassie), l'expérience du mouvement ouvrier depuis le XIXe siècle y compris l'expérience soviétique, la théorie de la lutte des classes est devenue insuffisante pour expliquer les bouleversements et révolutions des rapports sociaux dans l'Histoire. Si elle est insuffisante, la théorie de la lutte des classes demeure toujours nécessaire.
La nouvelle solution que j'ai trouvé pour dépasser ces insuffisances chez Marx est la lutte des superclasses. Chez Karl Marx et Friedrich Engels, c'est la lutte des classes entre maîtres et esclaves qui conduit à l'abolition de l'esclavagisme antique, c'est la lutte entre les seigneurs féodaux et les serfs qui conduit à l'abolition du servage, et par déduction, la lutte entre capitalistes et salariés qui doit nécessairement mené à l'abolition du salariat.
La faiblesse principale de cette théorie réside dans le fait que les esclaves n'ont pas pu abolir l'esclavage antique lorsqu'ils représentaient l'immense majorité de la population active mais l'esclavage n'a été abolie que lorsque les esclaves étaient devenus très minoritaires dans la population active (Voir par exemple « Survie et extinction de l'esclavage antique » de Pierre Bonnassie ).
À la veille de la Révolution française, le servage était à l'état de vestiges on ne peut donc pas dire que l'abolition du servage soit le fait des serfs (Voir par exemple, l'histoire de la Révolution française par Alexis de Tocqueville). Pourquoi les serfs n'ont pas aboli le servage lorsqu'ils représentaient l'immense majorité de la population durant les siècles passés ? Poser cette question, c'est déjà y répondre.
De même depuis la publication du Manifeste communiste en 1848 jusqu'à nos jours le salariat n'a été aboli nulle part (y compris en URSS ). Et pourtant dès le Second Empire en France jusqu'à nos jours, la classe des salariés représentaient l'immense majorité de la population active. Depuis plus d'un siècle, l'immense majorité de la population active en Allemagne, en Angleterre, États-Unis, etc. sont salariés, pourquoi les principes du Manifeste n'y sont pas dominants ? À plus forte raison qu'ils provoquent une révolution communiste ?
En réalité, l'Histoire est gouvernée par une lutte encore plus vaste, plus lente mais décisive. En effet, dans l'Antiquité l'abolition de l'esclavage n'a été possible sans la très lente (plus de 1000 ans) transformation économique de l'immense population esclave en paysans alleux (petites propriétés paysannes semi-libres). La concentration de la propriété alleutiere donne naissance d'un côté à une infime minorité de grands seigneurs féodaux capables de lever des armées privées et de l'autre côté des serfs sous domination des seigneurs. Les seigneurs féodaux très minoritaires mais constituant l'élite économique concentrent la richesse et deviennent à la longue l'élite politique féodale. Serfs et seigneurs forment la superclasse féodale. C'est la lutte entre la superclasse esclavagiste et la superclasse féodale (lutte entre le mode de production esclavagiste et féodale) qui conduisit à la révolution féodale c'est-à-dire l'abolition totale de l'esclavagisme antique.
Au moyen âge, il a fallu plusieurs siècles de transformation économique des serfs en paysannerie libre (mais liberté incomplète) jusqu'à ce que la superclasse bourgeoise (paysannerie libre majoritaire + classe bourgeoise minoritaire ) représente l'immense majorité de la population active. La Révolution de 1789 n'a donc été possible que parce-que le rapport de force économique s'est inversé, au cours de plusieurs siècles de lente transformation économique, entre la superclasse féodale et la superclasse bourgeoise.
Actuellement, la lutte des classes entre capitalistes et salariés existe mais ces deux classes s'unissent en superclasse capitaliste-salariale contre la superclasse des chômeurs.
Tant qu'il forment la majorité de la population active, le salariat, autrement dit le capitalisme, ne pourra pas être aboli. Pourquoi ? Parce que l'intérêt objectif du capitaliste-salarié (entreprise privée) est opposé à celui du chômeur (communisme).
Inévitablement, l'évolution économique conduira à la transformation de l'immense majorité en chômeurs. C'est au cours de cette période où la superclasse des chômeurs est majoritaire dans la population active que la conscience communiste devient aussi dominante dans population et que la révolution communiste devient ainsi possible.
Déjà la superclasse des chômeurs prend conscience d'elle-même, il est vrai de façon très lente et difficile mais réelle, notamment le mouvement des chômeurs en France de l'hiver 1997-1998. Et plusieurs organisations de chômeurs de différents pays s'organisent sur le plan national pour défendre leurs intérêts. Mais la superclasse des chômeurs ne réalisera son œuvre historique, œuvre émancipatrice de l'Humanité toute entière, que lorsque ce mouvement devient communiste c'est-à-dire inscrit sur son drapeau : l'abolition positive du capitalisme-salariat.Puisque les chômeurs eux-mêmes par leur simple existence étant l'abolition douloureuse(négative) du salariat. Négation qu'il s'agit de rendre positive par la réappropriation des biens de production et des biens de consommation éloignés par leur situation de chômage ou de précarité.
NB : Par Révolution communiste des chômeurs, il faut entendre un mouvement révolutionnaire composé majoritairement de chômeurs et minoritairement de salariés. Dans les sciences sociales, l'individu ne pèse pas c'est la dialectique entre majorité et minorité qui constitue le moteur de l'Histoire c'est à dire la transformation, au sein de la structure sociale d'une minorité en majorité et inversement, qui provoque les grands bouleversements politiques et idéologiques dans l'Histoire.