mardi 10 mai 2011 - par
Laïcité : ne « Mélenchon » pas tout !
Choyé des médias officiels, M. Mélenchon, co-président du Parti de Gauche, court de studio en studio. Il était encore, samedi matin, 7 mai 2011, l’un des deux invités de l’émission « Répliques » d’Alain Finkielkraut, qui avait pour thème « Laïcité et identité française ».
L’Islamisme ne pouvait manquer d’être évoqué. L’animateur a été conduit à rappeler des conduites qui posent problème dans la République laïque française : les prières dans les rues, les cantines scolaires soumise au rite hallal, les horaires de piscine aménagés pour séparer femmes et hommes, les exigences de médecins féminins dans les hôpitaux pour l’examen des femmes, et bien sûr le développement du port du voile jusqu’à la burqâ, qui a nécessité récemment l’adoption d’une loi d’interdiction dans l’espace public.
Or, sur le sujet, M. Mélenchon a un point de vue arrêté depuis longtemps qu’il répète de micro en micro : l’Islam n’est pas un problème en France ! Et sa démonstration recourt à deux leurres principaux pour reconfigurer la réalité à sa convenance : l’un est le leurre de la vaccine, l’autre est la mise hors-contexte par anachronisme.
1- Le leurre de la vaccine
1- La procédure du leurre de la vaccine
Le leurre de la vaccine, décrit par R. Barthes, consiste à reconnaître un peu de mal pour faire admettre un grand bien, comme le vaccin inocule des germes inactivés pour susciter des anticorps salvateurs.
- Ainsi M. Mélenchon ne nie-t-il pas d’abord toutes ces atteintes publiques à la Laïcité : il les minimise seulement en nombre et les impute à une minorité d’excités.
- Mais c’est pour ensuite inviter à ne pas confondre cette minorité avec la grande majorité des musulmans qui vit sa foi dans le respect des règles de la République et sans se faire remarquer.
2- Une première mise hors-contexte
On est bien prêt à admettre l’existence de deux groupes principaux dans la communauté musulmane française, une minorité d’intégristes, d’un côté, et une majorité de modérée, de l’autre. Mais cette photographie présente du rapport de forces ne rend pas compte d’une évolution en cours depuis une vingtaine d’années.
- Dans les années 80, les atteintes à la Laïcité étaient quasi inexistantes. Elles ont commencé à croître quand a commencé à se poser le problème du voile à l’École en 1989. Or, plutôt que de le résoudre aussitôt, le ministre de l’Éducation nationale de l’époque, M. Jospin, a préféré, par calcul politique sans doute, solliciter un arrêt du Conseil d’État qui, en laissant toute latitude aux chefs d’établissement pour y répondre au cas par cas, a permis à la situation de s’envenimer et aux intégristes de s’engouffrer dans la brèche pendant quinze ans au point que deux lois sont devenues nécessaires, l’une pour interdire le voile à l’École en 2004 et l’autre, la burqâ dans l’espace public, en 2010.
- Parallèlement, au cours de ces vingt années perdues, les autres atteintes à la Laïcité se sont développées en nombre au point de devenir ostentatoires comme les prières dans les rues. Il existe donc une montée en puissance de l’Intégrisme islamiste qui se fait de plus en plus revendicatif. Mais M. Mélenchon se garde bien d’en parler.
- Enfin, il semble aussi ignorer que dans un conflit, ce sont les extrémistes qui dominent les modérés, toujours suspects de tiédeur patriotique ou de collaboration. Le danger est d’autant plus grand quand l’adversaire annonce clairement son intention de soutenir les modérés pour contenir les extrémistes, comme le conseille imprudemment M. Bernard-Henri Lévy.
2- La mise hors-contexte par anachronisme
On le voit déjà ci-dessus, une photographie d’un groupe d’intégristes ne rend pas compte du film de son accroissement progressif en vingt ans. La mise hors-contexte par anachronisme est, en effet, le deuxième leurre préféré de M. Mélenchon.
1- Les années 1950 fort différentes des années 2000
Ainsi prétend-il n’être pas choqué par les usages islamistes sous prétexte que, né à Tanger au Maroc, au début des années 50, il a été dès son enfance familiarisé avec les rites musulmans. L’intolérance manifestée par une partie de la société française viendrait donc de son inaccoutumance à la culture musulmane. N’est-ce pas nier que la situation des années 1950 diffère de celle d’aujourd’hui et que Tanger est au Maroc et non en France ? L’intégrisme militant qui s’est développé, n’a-t-il pas changé la donne ? Est-ce à la Laïcité française de s’adapter à ces nouvelles mœurs religieuses ou l’inverse ?
2- La religion catholique ralliée à la Laïcité en France
Surtout, un anticatholicisme primaire amène M. Mélenchon à concentrer ses attaques contre l’Église catholique, sans se rendre compte qu’il commet un anachronisme encore plus flagrant. Pour défendre l’Islam, il ne cesse pas de rappeler que l’Église catholique a été en France l’ennemie des Lumières par l’obscurantisme de son Inquisition qui a, pendant tant de siècles, tenu la société française dans une main de fer. Qui le nie ? Inversement, M. Mélenchon se plaît à célébrer les royaumes éclairés andalous médiévaux. Libre à lui, même si l’image qu’il en donne est cette fois une mise hors-contexte propre à l’exotisme !
- On remarque, cependant, que s’il a le souci d’éviter l’amalgame entre intégristes et modérés musulmans, il n’a pas la même sollicitude envers la communauté catholique : or, ne s’est-il pas trouvé dans l’Histoire ou n’existe-t-il pas des groupes catholiques toujours attentifs à dénoncer des décisions fautives de leur hiérarchie qui, des années plus tard, finit par leur donner raison et ne se prive pas de s’en prévaloir pour faire oublier ses fautes ?
- Ce qu’occulte plus particulièrement M. Mélenchon, ce sont deux données historiques.
* L’une est que, bon gré mal gré, l’appareil ecclésiastique catholique a dû se résigner depuis 1905 à se soumettre à la loi de Séparation de l’Église et de l’État en France. Quatre siècles de conflits souvent féroces y ont conduit. Malgré un refus ecclésiastique initial et des poussées de fièvre épisodiques comme en 1984 ou 1994, cette loi a fini par entrer dans les mœurs, surtout après deux guerres mondiales où « celui qui croyait au ciel » et « celui qui n’y croyait pas » se sont retrouvés face au même ennemi et ont connu une même solidarité.
* L’autre donnée est que l’Islam dans l’Histoire ne s’est jamais trouvé confronté à une société laïque qui entendît le rester. On ne dit pas que dans trois ou quatre siècles, après de terribles affrontement répétés, cette religion ne finisse pas par accepter le partage entre le public et le privé qu’impose la Laïcité. Mais, en attendant, les vivants d’aujourd’hui n’ont pas la vie assez longue pour s’offrir le luxe d’attendre. Car pour l’heure, cette religion ne peut concevoir l’idée même de Laïcité, puisque qu’elle prétend gouverner la vie publique et privée de ses fidèles. Il n’est que de lire ses « textes sacrés » qui glacent le sang. Mais cette prétention hégémonique a beau être écrite noir sur blanc, il se trouve toujours des aveugles comme M. Mélenchon pour ne pas vouloir voir. Lénine les appelait, dit-on, « les idiots utiles ». Ancien trotskiste, M. Mélenchon doit le savoir.
En somme, si, à ses yeux, l’Islam n’est pas un problème en France, c’est M. Mélenchon qui en devient un. Ses multiples interventions dans les médias, s’apparentent à une campagne pro-islamiste. Et on se demande même s’il n’est pas si fréquemment invité dans les studios des médias officiels, à la place de Besancenot qui, ne faisant plus recette, s’y fait plus rare, justement parce que son parti-pris pro-islamiste a deux effets favorables à la Droite dans la campagne présidentielle en cours : diviser la Gauche en attirant à lui ses militants sensibles aux sirènes pro-islamistes et en éloigner d’elle un électorat populaire ou non qui, lui, ne les supportent plus. Donc, en matière de Laïcité, ne « Mélenchon » pas tout ! Paul Villach