Le paradigme de l’émergence communicationnelle
Bien que connu depuis plus d’un siècle, le concept d’émergence désigne un ensemble de conjectures systémiques ayant été posées, configurées, analysées, détaillées, sans que des réponses tangibles aient été formulées pour expliquer « l’émergence ». Pour preuve le constat d’échec consigné dans les actes du colloque de Cerisy sur l’auto-organisation tenu en 1981. Les anciennes théories des systèmes se seraient-elles égarées en se plaçant sous l’égide du paradigme de l’auto-organisation ? Le concept d’émergence reste présent dans les mouvances systémiques. Il s’applique aussi dans des domaines où on l’attend moins, en cosmologie, en physique de la matière condensée ainsi que dans la science de l’évolution. Les espèces sont des émergences. La vie est une émergence. Les propriétés de la matière sont des émergences. Les sociétés sont des émergences.
Sans Matière, il n’y a pas de système émergent. Pour attaquer frontalement la conjecture de l’émergence, il faut disposer d’une compréhension la plus complète possible de la Matière ce qui suppose d’interpréter le sens physique des formules quantiques en contournant l’interdit de Copenhague. Certes, seule l’observation permet d’acquérir une information sur le « système quantique » expérimenté, mais cette procédure ne peut pas occulter une dimension ontologique sur la substance quantique. En réalité, la substance quantique se présente comme un réservoir d’informations pouvant être extraites par l’expérience. L’expérience quantique étudie les « particules » qui sont les interfaces permettant à la matière de communiquer. C’est ce qui rend cette physique étrangère à la mécanique classique dont le principe est la séparation entre le système de mesure et le système mesuré. Les systèmes classiques ne communiquent pas, ils sont autarcique, réglés par le principe de moindre action. Les systèmes quantiques ne font que communiquer. Ils sont réglés par la physique du non-équilibre et parcourus par l’énergie du soleil transformée en énergie électromécanique et en communications chimiques. La vie émerge comme dispositif dont les molécules parviennent à un degré de communication et de réglage des communications. Elle émerge parce que l’essence de la matière possède une propension à se produire en de multiples exemplaires. La nature produit des molécules, des cellules et des spécimens en masse. Elle a aussi tendance à se diversifier en combinant les informations partagées et accéder à de nouvelles essences.
Le paradigme de l’émergence communicationnelle repose sur quelques principes. D’abord la séparation entre le bruit et l’information. Un système émerge lorsqu’il est capable de capter des signaux et de les ordonner. Le darwinisme sémantique est une thèse qui en découle et postule une sélection des signaux et des systèmes capables de les capter et interpréter. Un système émergé se maintient tant que ses éléments parviennent à communiquer. Quand ce n’est plus le cas, il s’effondre, altéré par une baisse des communications ou alors ce qui est différent, par une accumulation de bruit. Cela est valable pour les cellules du vivant dont les communications utilisent des messagers moléculaires, des vésicules contenant des ARN, ou bien les sociétés et les langages employés. Une société qui perd sa langue se décompose.
La philosophie de l’émergence communicationnelle est bien trop vaste pour être présentée en quelques lignes. La question du Temps intervient, avec les deux orientations, le kronos et le telos, résolues trinitairement par le kosmos.
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