Les affinités sélectives
Tel le monstre du Loch Ness qui vient périodiquement chatouiller les amoureux de l’Écosse ou du moins de ses mystères, on a pu dernièrement voir resurgir le débat ou plutôt la diatribe sur le burkini
Quelques activistes fondamentalistes ayant "envahi" une piscine parisienne pour se baigner en burkini, la piscine a été évacuée prestement, interdisant ainsi l’accès au bassin non seulement aux femmes en burkini mais aussi aux autres personnes présentes ou désireuses de se baigner.
Je suppose, sans en être vraiment sûr, que cette décision a été prise en fonction d’un article du règlement intérieur et du grand danger que faisaient courir, je suppose, aux autres usagers ces baigneuses d’un nouveau genre.
Même si l’on peut comprendre que l’interdiction s’articule sur une volonté émancipatrice à laquelle n’importe qui devrait pouvoir adhérer, il n’en reste pas moins qu’il est très dangereux de vouloir libérer les femmes et les gens en général malgré eux.
On a pu voir les dégâts occasionnés par ce zèle un peu particulier qui consiste à vouloir fixer des normes intangibles quels que soient et quoi qu’en pensent ceux à qui elles sont destinées supposément pour leur bien.
Les régimes staliniens ne voulaient officiellement que le bien du peuple et c’est pour son bien que le goulag a été créé afin de le purger des éléments asociaux.
L’enfer est pavé des meilleures intentions.
Il ne sert pas à grand chose non plus d’apporter, comme s’échinent certains, des preuves coraniques de l’ineptie de certaines coutumes qui étaient préexistantes à l’essor de cette religion comme le démontre d’ailleurs l’iconographie chrétienne.
Un excellent article d’Astus sur Agoravox en apporte la preuve quasi scientifique pour autant que je puisse en juger du haut de mon ignorance en la matière.
Derrière le burkini il y a une entreprise commerciale qui exploite la naïveté de celles qui veulent bien se laisser convaincre ou de celles qui, militantes d’une cause régressive ( en psychiatrie cela s’apparente au masochisme ), voient dans les réactions que suscite cette initiative une possibilité d’élargir leur audience auprès des couches les plus arriérées de la population.
Cependant que le burkini soit devenu un symbole de la lutte de certaines factions n’est jamais que le produit des réactions imbéciles qu’ont suscitées les premières tentatives non de l’imposer à tout le monde ( comme veulent le faire croire les rabiques de l’anti-islamisme ) mais d’en assurer le droit de cité.
Au demeurant, l’accoutrement n’a jamais concerné au départ que quelques dizaines ( peut-être quelques centaines ) de personnes qui ont réussi, malgré leur nombre infinitésimal, à capter l’attention des médias puis des autorités.
On est là dans une opération de marketing finalement très réussie avec la complicité active de ceux qui font mine de s’opposer.
Le fait n’aurait pas fait l’objet d’une exploitation jusqu’à plus soif que l’on ne l’évoquerait même plus ou, en tout cas, qu’il passerait inaperçu ne suscitant que dérision ou indifférence affligée…
Il faut donc s’interroger sur les raisons d’une telle instrumentalisation qui ne peut que servir les intérêts de ceux que l’on prétend combattre.
L’extrême-droite rejointe par tous les obsédés de la laïcité à géométrie variable a voulu utiliser ce vêtement en se cachant derrière un vocabulaire convenu, la défense de notre identité voire de notre civilisation comme si cette dernière n’était pas en constante évolution, pour complaire à une certaine frange carrément raciste de l’électorat et l’a ainsi transformé en un thème commode pour soutenir le combat d’autres excités.
Tant il est vrai que les extrêmes se nourrissent l’un l’autre, autrement dit ces deux faces d’un même crétinisme ont besoin de se confronter pour exister et prospérer.
Je me suis laissé dire que le voile ( niqab ) qui recouvre le visage avait d’abord dans les temps anciens ( avant l’avènement de l’Islam donc ) une fonction sanitaire à savoir protéger les voies respiratoires de ceux qui étaient soumis aux tempêtes de sable ; les touaregs dans le désert utilisent encore ce paravent pratiquement pour les mêmes raisons que ceux qui, au Japon ou en Chine ou même chez nous, mettent des masques sanitaires pour se protéger des effluves malsaines de la pollution.
Il y aurait peut-être d’autres problèmes infiniment plus préoccupants dont il faudrait s’occuper sérieusement et ce n’est pas le fruit du hasard si un polémiste d’Extrême-droite au demeurant talentueux comme Eric Zemmour fait une fixation sur une gamine suédoise qui porte un combat pour l’avenir de la planète qui ne lui plaît pas et dont il nie d’ailleurs la réalité.
Le jeune âge de Mademoiselle Thunberg n’est pas un critère suffisant pour la disqualifier et les opinions qu’elle défend devraient plutôt avoir bonne presse devant l’accumulation des dégâts que l’on doit au processus de réchauffement climatique, il est donc particulièrement malsain de les nier au prétexte qu’ils sont portés par une adolescente rejointe par tant d’autres du même âge.
Si ce n’est pour des raisons nécessairement malsaines d’opportunité politique.
Ce qui, dans nos sociétés actuelles, est malheureusement quasiment la norme : l’intérêt général s’efface devant les intérêts particuliers, la récente pantalonnade à propos des pesticides en apporte malheureusement une preuve douloureuse surtout pour ceux qui sont confrontés dans leur environnement direct aux nuisances de ces pratiques…
Où l’on rejoint ainsi le battage fait autour du burkini qui permet de dérouter l’attention d’un certain public de conséquences infiniment plus préoccupantes mais auxquelles le monde politique tarde ou n’a pas la volonté ni la capacité d’apporter de réponses.