mardi 6 mars 2018 - par Lucchesi Jacques

Les contradictions sémantiques du macronisme

Alors que la ministre du travail n’hésite pas à présenter sa réforme de la formation professionnelle comme un « big-bang », retour sur deux termes révélateurs du discours macroniste

 Parmi les différents éléments de langage employés par Emmanuel Macron et ses proches collaborateurs depuis leur arrivée au pouvoir, deux mots – deux concepts – reviennent singulièrement qui sont, l’un et l’autre, des images du mouvement : la révolution et la marche.

La révolution – titre de l’ouvrage programmatique du candidat Macron – est une terminologie que l’on est surpris de trouver chez un libéral assumé comme lui. Qu’est-ce qu’une révolution dans son sens premier du terme ? Un retour à un point d’origine, un mouvement, circulaire ou elliptique qu’accomplit une planète autour d’une étoile pour revenir, au bout d’une certaine durée, à sa position initiale. En politique, c’est différent, même si ça peut signifier aussi le retour à un ordre plus ancien que le régime abandonné (la république en lieu et place de la royauté, par exemple). Plus généralement, la révolution est synonyme d’un grand chamboulement. On change tout pour espérer ainsi repartir à zéro ; c’est une sorte de tabula rasa, selon la formule cartésienne bien connue. Macron veut-il tout changer ? Sûrement pas ! Il s’inscrit parfaitement dans la mouvance néo-libérale qui est celle, à quelques arrangements près, de tous les gouvernants depuis au moins Giscard d’Estaing. Et ce n’est pas le principe de non-contradiction – ni droite ni gauche- qu’il brandit volontiers qui peut faire encore illusion.

Quant à la marche, son autre idée-force inscrite dans la dénomination de son parti, elle ramène aussi aux origines de notre espèce, tant l’homme est un animal voyageur et que l’immobilité durable lui est pesante. Elle n’implique pas moins, tout comme la révolution, une direction, un but, un sens. Or, dans le macronisme - contrairement à d’autres programmes politiques un peu plus anciens comme le communisme - on distingue mal le terme qu’il s’assigne, même si on suppose que, de réforme en réforme, il aboutira à un allègement des dépenses publiques. On a plutôt l’impression d’une exaltation du mouvement pour le mouvement, afin de faire oublier la prétendue inertie de ses prédécesseurs. Les moyens ici sont plus importants que la fin. Il y a peut-être un chemin, mais où mène t’il ? 

Enfin, si le mouvement de la marche est généralement rectiligne, celui de la révolution est toujours circulaire. Conjuguer l’un et l’autre s’avère ainsi fort improbable. A l’extrême, c’est l’image d’un homme tournant en rond qui s’impose. A quoi bon aller de l’avant si c’est pour revenir au même point ? Certes, les contradictions ne font pas peur à l’actuel président français. Mais il se pourrait fort que l’immodeste projet d’En Marche devienne bientôt - selon le titre tout aussi laconique d’un roman de J K Huysmans - en rade.

 

Jacques LUCCHESI  



5 réactions


  • Christian Labrune Christian Labrune 6 mars 2018 11:06

    à l’auteur,
    Je ne vois rien à objecter à votre article. Je m’étonne quand même que vous preniez soin de relever des « contradictions » dans le macronisme, comme s’il avait été possible de croire, à un moment donné, qu’une politique cohérente ait jamais été proposée aux Français par cette idéologie fumeuse par essence.

    Le macronisme ressemble à une bulle de savon qui fait voir, en diffractant la lumière, mille reflets chatoyants lors même qu’il n’y a pas de soleil et que tout est gris aux alentours. Les petits enfants sont charmés et battent des mains si la bulle s’élève et dure un peu plus qu’on ne l’aurait prévu. A la fin, elle finit quand même toujours par éclater.

    Le Drian était hier à Téhéran. Sourires de Javad Zarif et des mollahs. Superbe claque avant l’avion du retour, et que le gouvernement aurait pu aisément s’éviter s’il avait eu deux sous de cohérence : l’objectif de l’Iran est de se rendre maître du Moyen-Orient en attendant de pouvoir, dans huit ans, quand les missiles seront nucléarisés, commencer à terroriser l’Europe. Gaza, le liban, la Syrie, l’Irak et peut-être demain le Yémen sont déjà entièrement contrôlés par l’Iran. Est-ce qu’un Macron n’aurait pas pu s’en rendre compte ?

    J’apprenais ce matin que le Louvre envoie à Téhéran de quoi réaliser une très belle exposition d’oeuvres d’art. Voilà qui va probablement être extrêmement efficace pour maintenir la paix. Si la France était encore un pays chrétien, on aurait pu demander aussi aux curés de paroisses de dire des prières pour la paix dans le monde, c’est aussi très efficace.

    En tout cas, les tableaux pour cette exposition, dans la soute d’un avion ou d’un bateau doivent tous tenir dans un seul container. C’est beaucoup moins cher que d’envoyer un porte-avions nucléaire du côté du détroit d’Ormuz. Je ne suis pas certain que l’efficacité soit exactement la même.

    La politique étrangère du macronisme dans un monde de plus en plus dangereux ressemble à celle des alliés à Münich en 1938. Macron-Le Drian, c’est Chamberlain.


  • Le421... Refuznik !! Le421 6 mars 2018 18:20

    Ni droite, ni gauche, c’est forcément de droite.
    Faux-cul en plus !!  smiley

    Ceci dit, tout ce qui se passe correspond parfaitement à ce que j’avais ou nous avions prévu à LFI.

    Donc, pas de surprise.

    Juste le regret de voir les gens, moi y compris par ricochet, se faire baiser avec du gros calibre !!
    Pourtant, j’ai fait tout ce que je pouvais.
    Grosse consolation, la blonde buraliste du coin qui me faisait des sermons sur les qualités de Macron, à peine un an après, elle a changé d’optique !!

    Moi, je lui ai juste dit : « Il a raison Macron d’augmenter le prix des clopes, ça fait du boulot pour le marché noir !! »
    Je ne sais pas pourquoi elle a tiré la gueule...  smiley


  • rhea 1481971 6 mars 2018 19:05
    • C’est un bébé de la sphère Jean Jaurès, elle même qui un bébé de la NED
    • la NED qui a remplacé la CIA pour les manœuvres électorales.

  • Hervé Hum Hervé Hum 7 mars 2018 18:29

    La révolution de Macron consiste à, comme les précédentes, tout changer sur la forme, pour que rien ne change dans le fond.

    Comprendre qu’il s"agit de changer les tetes, changer le lexique utilisé (fondamental), utiliser le principe des vases communiquant pour changer d’emballage sans changer le contenu. Ainsi, de révolutions en révolutions, nous avons changé la forme des gouvernances, mais sans jamais toucher le fond.

    Mais comme chacun sait, pour toucher le fond, il faut l’atteindre ! A priori, y a encore de la marge...

    Bref, du très grand art manipulatoire que les gens adorent... Surtout les opposants à Macron !

    Quelqu’un disait que goûter le fait de se faire traiter d’idiot par un imbécile, est un plat de fin gourmet.

    Macron doit beaucoup se délecter ! cela dit, pour goûter vraiment ce genre de plat, il faut avant tout avoir un profond mépris pour l’imbécile. Ce qui fait que je ne goûte pas ce genre de plat. J’espère juste que cela ne changera pas.


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