Les gauches européennes se réunissent pour s’unir

« Dans une tribune commune, Jean-Luc Mélenchon, Stefano Fassina, (député, ancien vice-ministre de l'Économie et des Finances d'Italie), Zoe Konstantopoulou (présidente du Parlement hellénique) Oskar Lafontaine (ancien ministre des Finances d'Allemagne, co-fondateur de Die Linke) et Yanis Varoufakis (député, ancien ministre des Finances de Grèce) appellent à préparer un plan B face à l'Europe austéritaire... »
Voici comment commence le blog de Mélenchon cette semaine ;
« Le Français Jean-Luc Mélenchon, l'Italien Stefano Fassina, les Grecs Zoe Konstantopoulou et Yanis Varoufakis, et l'Allemand Oskar Lafontaine s'associent et proposent « la tenue d'un sommet international pour un plan B en Europe, ouvert aux citoyens volontaires, organisations et intellectuels. Cette conférence pourrait avoir lieu dès Novembre 2015. Nous lancerons ce processus samedi 12 Septembre lors de la Fête de l'Humanité ».
Voilà qui se précise.
Avant d'aller plus loin, je voudrais souligner le fait que voici deux fois en peu de temps, que notre gauche française offre aux citoyens volontaires l'occasion de s'investir dans la vie de la cité ; hors toute échéance électorale, hors propagande, juste mettre ses neurones, du temps et de l'énergie à préparer notre avenir. Je n'ai pas souvenir d'une telle opportunité dans le passé ou ailleurs. J'ai déjà exprimé plusieurs fois à quel point cette démarche me touche : ne plus revendiquer ou quémander, mais travailler et offrir. C'est un point positif. Bien évidemment cela n'atteindra que ceux qui ne souffrent pas de crampes stomacale au seul nom de Mélenchon .
( Je viens de lire une entrevue de Michel Onfray qui dénonce le « moi je » pathétique parce qu'exclusif, de tous nos leaders politiques, incapables de s'unir pour affronter le danger qui ne nous guette plus mais qui nous happe ; j'ai la nette impression que ce symptôme atteint tout un chacun.)
Après un petit récapitulatif de l'histoire récente en Grèce et de ses terribles effets, voici ce que disent les signataires :
« Tirons les leçons de ce coup d’État financier. Cet euro est devenu l’instrument de la domination économique et politique de l’oligarchie européenne, cachée derrière le gouvernement allemand et qui se réjouit de voir Mme Merkel faire tout le « sale boulot » que les autres gouvernements sont incapables de faire. Cette Europe ne produit que des violences dans les nations et entre elles : chômage de masse, dumping social féroce, insultes attribuées aux dirigeants allemands contre l’Europe du Sud et répétées par toutes les « élites » y compris celles de ces pays. L’Union européenne alimente la montée de l’extrême-droite et est devenue un moyen d’annuler le contrôle démocratique sur la production et la distribution des richesses dans toute l'Europe.
Affirmer que l’euro et l’Union européenne servent les Européens et les protègent contre la crise est un mensonge dangereux. C’est une illusion de croire que les intérêts de l’Europe peuvent être protégés dans le cadre de la prison des règles de la zone euro et des traités actuels. La méthode Hollande-Renzi du « bon élève », en réalité du prisonnier modèle, est une forme de capitulation qui n’obtiendra même pas la clémence. Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker l’a dit clairement : « il ne peut y avoir de choix démocratiques contre les traités européens ». C’est l’adaptation néolibérale de la « souveraineté limitée » inventée par le dirigeant soviétique Brejnev en 1968. A l’époque, les soviétiques écrasaient le Printemps de Prague par les tanks. Cet été, l’Union européenne a écrasé le Printemps d’Athènes par les banques.
Nous sommes déterminés à rompre avec cette Europe. C’est la condition pour reconstruire des coopérations entre nos peuples et nos pays sur une base nouvelle. Comment mener une politique de partage des richesses et de création d’emplois notamment pour les jeunes, de transition écologique et de refondation démocratique face à cette Union européenne ?Nous devons échapper à l’inanité et l’inhumanité des traités européens et les refonder afin d’enlever la camisole de force du néolibéralisme, abroger le traité budgétaire, refuser le traité de libre-échange avec les Etats-Unis (TTIP).
La période est extraordinaire. Nous faisons face à une urgence. Les États-membres doivent avoir l'espace politique qui permet à leurs démocraties de respirer et d’instaurer des politiques adaptées au niveau national, sans craindre d’être empêchés par un Eurogroupe autoritaire dominé par les intérêts du plus fort des États-membres et du monde des affaires, ni par une BCE utilisée comme un rouleau compresseur menaçant d’écraser tout "pays non coopératif" comme ce fut le cas avec Chypre ou la Grèce.
C’est notre plan A : travailler dans chacun de nos pays, et ensemble à travers l’Europe, à une renégociation complète des traités européens. Nous nous engageons à collaborer avec la lutte des Européens partout, dans une campagne de désobéissance aux pratiques européennes arbitraires et aux règles irrationnelles jusqu'à ce que la renégociation aboutisse.
Notre première tâche est de mettre fin à l’irresponsabilité de l’Eurogroupe. La seconde tâche est d’en finir avec le caractère prétendument « indépendant » et « apolitique » de la Banque centrale alors qu’elle est hautement politisée (de la façon la plus toxique), totalement dépendante de banquiers en faillite et de leurs agents politiques, et prête à mettre fin à la démocratie sur une simple pression de bouton.
La majorité des gouvernements représentant l’oligarchie européenne et se cachant derrière Berlin et Francfort, ont aussi un plan A : ne pas céder à la demande de démocratie des citoyens européens et utiliser la brutalité pour mettre fin à leur résistance. Nous l’avons vu en Grèce en juillet. Pourquoi ont-ils réussi à étrangler le gouvernement démocratiquement élu de la Grèce ? Parce qu'ils avaient aussi un plan B : éjecter la Grèce de la zone euro dans les pires conditions possibles en détruisant son système bancaire et en achevant son économie.
Face à ce chantage, nous avons besoin de notre propre plan B pour dissuader le plan B des forces les plus réactionnaires et antidémocratiques de l’Europe. Pour renforcer notre position face à leur engagement brutal pour des politiques qui sacrifient la majorité au profit des intérêts d'une infime minorité. Mais aussi pour réaffirmer le principe simple que l'Europe n’est rien d’autre que les Européens et que les monnaies sont des outils pour soutenir une prospérité partagée, et non des instruments de torture ou des armes pour assassiner la démocratie. Si l'euro ne peut pas être démocratisé, s’ils persistent à l’utiliser pour étrangler les peuples, nous nous lèverons, nous les regarderons dans les yeux et nous leur dirons : « Essayez un peu, pour voir ! Vos menaces ne nous effraient pas. Nous trouverons un moyen d'assurer aux Européens un système monétaire qui fonctionne avec eux, et non à leurs dépens ».
Notre plan A pour une Europe démocratique, soutenu par un plan B qui montre que les pouvoirs en place ne peuvent pas nous terroriser dans la soumission, vise à faire appel à la majorité des Européens. Cela exige un haut niveau de préparation. Les éléments techniques seront enrichis par le débat. Beaucoup d'idées sont déjà sur la table : l'introduction de systèmes parallèles de paiement, les monnaies parallèles, la numérisation des transactions en euros pour contourner le manque de liquidités, les systèmes d'échange complémentaires autour d’une communauté, la sortie de l'euro et la transformation de l'euro en monnaie commune.
Aucune nation européenne ne peut avancer vers sa libération dans l'isolement. Notre vision est internationaliste. En prévision de ce qui peut se passer en Espagne, en Irlande, pourquoi pas de nouveau en Grèce selon l’évolution de la situation politique, et en France en 2017, il faut travailler concrètement ensemble à un plan B tenant compte des caractéristiques de chaque pays. »
On voit là qu'il n'est pas question de faire la révolution, de tout chambouler, mais enfin...
Je fais partie de ces gens qui ont rejeté l'Union depuis qu'elle fut proposée, comme une évidente mystification : il s'agissait ni plus ni moins d'un empire imposé par le haut, avec, comme arme, le consentement du peuple soumis aux arguments d'une propagande éhontée. Mais cela a marché, et quand ça n'a plus marché pour une majorité du peuple de chez nous, ça a marché quand même ; la machine emballée n'a pas cru bon de faire proposition à tous les peuples, d'autant plus que les peuples à qui cette proposition fut faite ont répondu « non ». Normal après cela qu'on ne lui demande plus son avis, au peuple, et que le jeu se joue plus clairement jusqu'à dire : on ne peut tenir compte de l'avis des peuples !
Quel bazar ce serait !!
Seulement, ce que veulent ces signataires, ce n'est pas la refonte de l'UE ; nous n'avons pas le temps, il y a urgence même si cette urgence était déjà ressentie par certains en 92 et 2005 !
C'est une lutte qu'il faut engager, et pour lutter, il faut le nombre, et qui dit nombre dit nivellement par le bas jusqu'à obtention d'une trame partagée qui laissera libre, après la victoire, chaque pays de faire ce que bon lui semble.
En France, Sapir fait la proposition d'unir tous les souverainistes mais ceux-ci ont toutes les couleurs de l'arc-en-ciel pour étendard et leur union n'est pas gagnée, mais est-elle souhaitable ? C'est une question.
Jusqu'à ce que la politique internationale de l'UE nous submerge, dans ses aberrations, horreurs guerrières et autres incompétences aliénées aux maîtres de l'empire US, c'est-à-dire la finance internationale, la volonté farouche d'hégémonie d'où tous les drames que les peuples du monde subissent, je ne trouvais pas de réponses à la question : faut-il sortir de l'UE. Je savais qu'aujourd'hui n'est pas hier, que sortir d'une nasse n'est pas comme y avoir jamais été.
Qu'on regarde la Russie, rétive, farouche, déterminée à ne pas se plier aux desiterata des maîtres du monde. Quelle est sa situation ? Entravée, « punie », contrainte de battre le fer pour s'armer, faire face à tous les fronts ; quelle énergie d'un gouvernement fort soutenu par son peuple. Je ne parle même pas de la grandeur et la richesse de la Russie, comparées aux nôtres.
Certains prônent la sortie de l'UE comme condition sine qua non ; bien, ça se tient, mais l'argument qui vient juste après est : d'abord on sort, après on verra.
On verra un pays désindustrialisé, endetté jusqu'au cou, divisé politiquement mais dont le peuple est divisé tout autant : quelle force a-t-on là pour faire face au cataclysme inévitable, car on se doute bien que la France, aussi grande fut-elle, n'offre aucun intérêt à l'empire pour qu'il la ménage. Si rien n'est préparé pour l'après, le sort de la Grèce nous guette, en pire puisque le peuple – en grande partie- n'en a pas assez bavé jusqu'ici pour avoir organisé la débrouille et s'unir vaille que vaille.
Nous pouvons, bien évidemment, au cours de ce sommet international, lancer le « non remboursement de la dette illégitime » ! Mais qui dit qu'après la sortie, la gauche gagnera les élections ?
Tout est à faire, nous avons attendu bien trop longtemps, nous avons été dupes et passifs bien trop longtemps. Le mal est fait, il nous faut d'abord nous soigner avant de recouvrer la santé.
D'abord faire un diagnostique, dans l'ordre décroissant des urgences – déjà se mettre d'accord- puis trouver les remèdes nécessaires – déjà se mettre d'accord- ! Mais le fait que tout ce travail soit à faire par des gens de gauche, canalise déjà le flot ; le travail n'est donc pas impossible.
Je vois se dessiner là une Europe du sud ( avec l'Irlande ?) bien qu'encore bien chancelante ; parce que l'Espagne de gauche n'a rien dit, à ma connaissance, or on sait que Podemos n'est guère différent de Syriza, on voit le résultat. Les Portugais non plus ; la Slovénie de gauche prend des contacts, semble vouloir grossir en sortant de ses frontières mais je n'en sais pas assez sur elle pour prendre la mesure de son éventuel engagement.
Bien sûr, il y a Oskar Lafontaine, le pionnier ; le travail de cette gauche en Allemagne est énorme et pèse, mais quelque chose me dit qu'elle ne fera pas chanceler la chancelière et ses soutiens.
La désobéissance est notre unique arme, beaucoup plus acérée si nous sommes nombreux à la manier.
Alors, on s'en tient à son quant-à-soi ? La révolution prolétarienne ou rien ? La sortie de l'UE en solitaire ou rien ? Ou bien on passe ces deux prochaines années à réfléchir, agir pour parer au plus pressé, plutôt que râler, s'injurier, se diviser ?
Critiquer, démasquer les hypocrisies, dévoiler les entourloupes, juger les crimes, ça fait du bien, l'étape est nécessaire mais quand elle commence à tourner sérieusement en rond, elle assomme.
J'ai toujours pensé qu'on apprend plus en inventant collectivement, qu'on se consolide en se colletant à la tâche, qu'on est plus forts d'une confiance instaurée et que ce temps passé est plus constructif. En tout cas, cela inhibe la force de l'impuissance, qu'elle soit force d'inertie ou violence, donc, donne le moral, abat les digues qui nous isolent les uns des autres.
La vie m'a appris qu'il faut toujours faire face au dangers, aux attaques, qu'on ne le fait guère à l'instant ; d'abord, voir, comprendre, puis rassembler ses forces pour sortir de l'état de sidération dans lequel nous a plongés la conscience du réel, et que, si on y parvient, c'est rarement de la manière dont on l'avait rêvé.
Alors, je suis vraiment prête à m'y fier et à chercher le moyen, même une petite cuillère, même un cure-dent, pour touiller, à ma mesure, la sauce pour qu'elle prenne !
Oui, l'union fait la force, est-ce un hasard si ce sont ceux de gauche qui en prennent l'initiative ?