lundi 14 mai 2012 - par GHEDIA Aziz

Réflexion sur les élections législatives algériennes de 2012

Heureusement qu’il y a une fin à tout !

En Algérie, les élections législatives ont eu lieu sans véritable engouement de la population. Le rideau est tombé. Les résultats sont connus et largement commentés par la presse de ce samedi 12 mai. Le FLN a fait un raz-de-marée, un tsunami électoral en s’octroyant 220 sièges sur les 462 que comptera la prochaine APN. L’explication donnée par les pouvoirs publics à cette montée fulgurante du parti qui a libéré le pays en 1962 est qu’il s’agit cette fois-ci d’un « vote refuge ». Ceci par opposition à ce qui s’est passé, il y a une vingtaine d’année, lorsque le FLN avait été sanctionné (« vote sanction ») au profit de l’ex FIS qui était alors au faîte de sa gloire.

Le RND, un autre parti du pouvoir, crée, rappelons-nous, de toutes pièces en 1995, est en deuxième position avec 68 sièges. Il vient, cependant, de bénéficier de 4 sièges supplémentaires ( ?). Ce qui fait de ce parti la deuxième force politique du pays.

Quant à l’alliance verte (les islamistes) qui était sûr de faire un tabac comme c’était le cas il y a quelques mois chez nos voisins Tunisiens et Marocains, elle n’occupe que la troisième position. L’erreur politique des trois partis qui compose celle-ci réside, à notre avis, dans le fait d’avoir justement contracté cette alliance avant les élections. S’ils s’étaient présenté séparément, ils auraient pu, sans aucun doute, obtenu plus de sièges. L’alliance pouvait attendre.

En France, c’est la fin du pouvoir de la droite et de l’homme qui l’a incarnée depuis pratiquement une dizaine d’années. La différence c’est qu’en France, on a assisté à des débats d’un très haut niveau politique, particulièrement lors du duel Hollande-Sarkozy. Qui n’a pas, de ce côté-ci de la méditerranée, les yeux rivés sur la télé, suivi jusqu’à la fin ce débat passionnant et passionné en même temps ? Qui n’a pas rêvé, ne serait-ce qu’un très court instant, que de tels débats politiques puissent s’instaurer chez nous, en Algérie ? Comparaison n’est pas raison, me diriez-vous ! Effectivement. Entre un pays de tradition démocratique de longue date et un pays dont les dirigeants, pour s’imposer, ont toujours recours à la ruse, il ne peut y avoir de comparaison. Entre un pays dont la révolution (1789) est l’aboutissement d’un long processus de maturation des esprits (siècle des Lumières) et un pays qui a complètement travesti le sens de sa révolution une fois libéré du joug du colonialisme, il ne peut, là aussi, y avoir de comparaison.

Voilà, mes chers amis, où réside les raisons de la morose campagne électorale de notre pays. Nous savions tous que ça allait être une mauvaise pièce théâtrale, nous savions tous que les acteurs choisis n’allaient pas jouer comme il se doit leurs rôles. Dans certaines wilayas, nos candidats (Jil Jadid), par exemple, n’ont pas du tout été combatifs. Ils ont même jeté l’éponge bien avant la fin du combat, bien avant que l’arbitre siffle la fin de la partie. En effet, que doit-on attendre d’un candidat qui s’est retrouvé « tête de liste » le soir du 26 mars alors qu’il n’a jamais entendu parler de Jil Jadid ? Ce candidat incarne-t-il vraiment l’idéal de Jil Jadid ? Pour moi, qui suis bête et discipliné, notre parti, qui dénonce pourtant ces pratiques d’un autre âge, a gaffé. Il doit se ressaisir et reconnaître ses fautes. Il doit faire son autocritique.

Le cri de détresse de mon ami Abdelaziz, je le comprends bien. Il l’a parfaitement exprimé dans cette phrase : « les opportunistes, les arrivistes, les charlatans, les calculateurs ... bref les machiavéliques n'auront pas de place parmi nous et nous continuerons notre combat pour une Algérie démocratique, libre, forte et unie ». Et, je comprends bien que ce « parmi nous » ne renvoie pas nécessairement uniquement à notre parti politique, à notre famille de Jil Jadid qui n’est pas encore si nombreuse, mais à toute la société algérienne, à tous les hommes et les femmes sincères, honnêtes et épris de justice que compte encore, heureusement, l’Algérie. Cette prise de conscience du fait que ces élections à l’algérienne ont drainé beaucoup de gens qui n’ont rien à voir avec la chose politique est, cependant, bénéfique pour nous tous. Et, elle n’a été possible que grâce à la participation de nos candidats à ces élections. C’est l’un des points positifs que je retiens personnellement de notre participation à ses joutes électorales. 

Mais, ce que je déplore personnellement, c’est que si, en France, la campagne électorale présidentielle a été une occasion pour les intellectuels de tout bord de s’exprimer, de donner leurs avis et de faire même leurs pronostics quant à l’issue du deuxième tour, en Algérie, malheureusement, le peu d’intellectuels que nous avons s’était tenu à l’écart et ne s’etait pas du tout manifesté ni à la télévision ni sur la presse. 



10 réactions


  • Al West 14 mai 2012 10:37

    Bonjour,

    « La différence c’est qu’en France, on a assisté à des débats d’un très haut niveau politique, particulièrement lors du duel Hollande-Sarkozy. »

    « en France, la campagne électorale présidentielle a été une occasion pour les intellectuels de tout bord de s’exprimer, de donner leurs avis et de faire même leurs pronostics quant à l’issue du deuxième tour »

    Ben on n’a pas dû voir la même campagne... Aucun sujet d’importance n’a été traité. Qu’est-ce que ça devait être en Algérie ! 

    Sinon, quelle politique le FLN semble-t-il vouloir mener ?

    Merci.

  • GHEDIA Aziz GHEDIA Aziz 14 mai 2012 14:01

    « S’ils s’étaient présenté séparément, ils auraient pu, sans aucun doute, obtenu plus de sièges ». Excusez-moi chers lecteurs pour cette faute d’inattention. Je ne l’ai pas remarquée avant l’envoi à la rédaction de mon article. Évidemment, il faut lire « S’ils s’étaient présenté séparément, ils auraient pu, sans aucun doute, OBTENIR plus de sièges ». 


    • Al West 14 mai 2012 15:06

      Vous etes pardonne smiley

      Que pensez-vous des declarations de Louisa Hanoune qui pretend que les resultats ont ete truques ? (Et qui a un peu plus de credibilite que les islamistes...) Voir ici entre autres : http://www.maghrebemergent.com/actualite/fil-maghreb/12108-algerie-louisa-hanoune-qualifie-de-qprovocationq-les-resultats-des-legislatives.html

      Merci de votre reponse.


    • GHEDIA Aziz GHEDIA Aziz 14 mai 2012 17:12

      Il n’y a pas de doute la-dessus. En Algérie, les élections ont toujours été truquées. La fraude électorale ne date pas d’aujourd’hui. On a joué le jeu, mais le pouvoir algérien continue à ruser et à vouloir coûte que coûte s’opposer au changement. Je partage donc le point de vue de Louiza Hanoune. 


    • Al West 14 mai 2012 17:16

      Merci. Et que compte faire le FLN a votre avis, notamment en terme de politique internationale ?
      Est-ce que vous pensez que les comites dont parle Hanoune ont une chance de voir le jour ?

      Je suis assez mal renseigne sur la situation algerienne actuelle, desole...


    • GHEDIA Aziz GHEDIA Aziz 14 mai 2012 17:34

      Je ne suis pas du FLN. Désolé, je ne peux pas répondre à votre question. Mais, je pense qu’avec le changement survenu récemment en France, la politique du FLN qui va gouverner presque seul (étant donné qu’il est presque majoritaire au parlement) va être beaucoup plus conciliante avec la France. Il fera certainement l’impasse ssur des questions d’ordre mémorial qui empoisonnaient jusqu’ici les relations algéro françaises. 


    • chapoutier 14 mai 2012 20:00
      Hanoune : “Une provocation énorme contre la majorité du peuple” http://www.liberte-algerie.com/actualite/hanoune-une-provocation-enorme-contre-la-majorite-du-peuple-elle-remet-en-cause-les-resultats-annonces-177937

      La secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune, a qualifié, hier à Alger, les résultats des législatives 2012 de “provocation énorme contre la majorité du peuple, ceux qui ont voté comme ceux qui se sont abstenus”, appelant les citoyens à constituer “des comités populaires” pour débattre de leurs revendications et discuter de la nature du régime à mettre en place dans la prochaine Constitution. Ces résultats sont “une provocation énorme contre la majorité du peuple, ceux qui ont voté comme ceux qui se sont abstenus”, car ne correspondant en rien à la volonté populaire telle qu’elle s’est exprimée durant la campagne électorale et le jour du vote, a déclaré Mme Hanoune, qui animait une conférence de presse.
      Les résultats du scrutin ont été “modifiés” au profit du Front de libération nationale (FLN) qui a remporté 220 sièges, a-t-elle dit, estimant que ce score est irréel, tout comme le sont les 20 sièges dont a été crédité le PT. Les résultats officiels ne correspondent pas aux résultats établis par les PV des bureaux de vote et aux résultats annoncés par le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, a soutenu Mme Hanoune. “À Alger, par exemple, le PT a obtenu, selon les résultats du dépouillement, 11 sièges. Le lendemain, 4 de ces sièges sont détournés”, a-t-elle affirmé, soulignant que l’administration n’avait pas été neutre, qu’elle avait violé la loi électorale et que le dispositif de surveillance et de supervision des élections avait été balayé à tous les niveaux. “Qui peut croire que le PT, seul parti à compter des victoires et des réalisations, a régressé  ?” s’est-elle interrogée, rappelant “le succès de la campagne électorale” de sa formation politique. À une question sur les mesures que prendra le PT à ce sujet, Mme Hanoune a précisé qu’elle comptait soumettre des recours et qu’elle s’adresserait avec d’autres partis au président de la République pour l’informer du non-respect des garanties avancées pour assurer la transparence de ces élections. La première responsable du PT a également appelé les citoyens à constituer “des comités populaires” pour débattre de leurs revendications et pour discuter de la nature du régime à mettre en place dans la prochaine Constitution, le régime capable d’opérer la rupture avec le système du parti unique et les politiques non conformes aux intérêts de la nation. Dans ce cadre, Mme Hanoune a souligné que la révision de la Constitution “se fera à travers l’implication du peuple dans les comités populaires qui soumettront leurs propositions à l’Assemblée populaire nationale (APN)”, écartant l’idée de “confier la mission de la révision de la Constitution à une commission d’experts”. Mme Hanoune, qui a annoncé la tenue prochaine d’une réunion du PT pour évaluer la situation actuelle, n’a pas écarté l’éventualité de la formation d’alliances parlementaires regroupant le FLN et de nouveaux partis qui ont remporté des sièges pour obtenir la majorité parlementaire.


  • RBEYEUR RBEYEUR 14 mai 2012 14:19

    Que dire des presque 58% d’abstentionnistes ?


  • Hamid PASSYVITE 14 mai 2012 17:27

    Bonjour Mr GHEDIA Aziz
    Je confirme l’analyse de Al west, c’était plutôt la météo entre Hollande-Sarkozy, pour ce qui est du débat en Algerie comment voulez vous debattre avec plus de 50 partis ? de plus débattre de quoi ? puisque tous les partis ont leur accrediatation en fevrier pour voter en mai. et enfin ce qui m’inquiète c’est que les verts ont eu quand même 45 sièges et se trouvent en troisième place.


    • GHEDIA Aziz GHEDIA Aziz 14 mai 2012 17:43

      Il est vrai qu’avec une cinquantaine de partis politiques, il est difficile d’engager un débat sur quoi que ce soit. ça devient une cacophonie et personne ne pourra écouter l’autre. Mais, toute démocratie commence ainsi. Avec le temps, les choses vont s’améliorer, certains partis vont disparaître d’eux-mêmes. Une chose est sûre, c’est que malgré tout ce qu’on pourra gloser sur ces élections algériennes, ça s’est passé dans le calme et la sérinité, il n’y a pas eu d’incidents majeurs que tout le monde redoutait. ça, c’est déjà un point positif. 


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