Suppression du droit de véto dans l’Union européenne
Suppression du droit de véto dans l’Union européenne
Dans la perspective du débat sur la nouvelle stratégie de l'UE pour les années 2024-2029, dans le cadre duquel la question de l'unanimité en matière de politique étrangère devrait être posée, l'Allemagne a une nouvelle fois soulevé la question de l'abolition du droit de veto dont disposent tous les États membres de l'UE.
Il s’agit d’une question qui comporte des risques pour les petits États, et qui relance les débats sur le fonctionnement de l’Union et la légitimité démocratique de ses institutions, tout en soulevant de vieilles inquiétudes sur l’éternelle « question allemande », à savoir la tentative de ce pays de contrôler politiquement l’Europe, de manière pacifique cette fois. Légende urbaine ou réalité, cette question est profondément ancrée dans l’inconscient européen.
Cette question a connu un développement important : l'approbation, avec une légère majorité de voix, par la session plénière du Parlement européen des propositions visant à modifier les traités de l'UE, dont la proposition d'abandonner le principe de l'unanimité en matière de politique étrangère. Cette résolution, qui fait suite à la Conférence sur l'avenir de l'Europe - dans le cadre de laquelle avait été soulevée la question de la modification des textes fondamentaux de l'UE - révèle l'intention des puissants États de l'UE d'intensifier la pression sur les petits États, afin que ces derniers acceptent l’abandon de l'unanimité. Il convient toutefois de souligner que l'abolition de l'unanimité est un processus difficile et long, qui nécessite le consentement de tous les États membres, ce qui est loin d’être acquis actuellement.
Qu'en est-il aujourd'hui ? Quelles sont les questions qui sont actuellement votées à la majorité simple, à la majorité qualifiée et quelles questions nécessitent l'unanimité au sein du Conseil de l'UE ?
A) Le Conseil de l'UE décide à la majorité simple, lorsque le vote positif de 14 États membres est nécessaire, sur les questions de procédure, telles que l'adoption de son règlement intérieur, l'organisation du Secrétariat général, etc.
B) Lorsque le Conseil vote sur une proposition émanant de la Commission ou du Haut Représentant de l'Union pour les questions de politique étrangère et de sécurité, la proposition est approuvée selon la « règle de la double majorité ».
En d’autres termes, il faut une majorité qualifiée, dans laquelle deux conditions doivent être remplies en même temps :
⦁ La proposition doit être votée favorablement par 55 % des États membres – en pratique, cela signifie 15 des 27 États membres.
⦁ La proposition doit être soutenue par les États membres représentant au moins 65 % de la population totale de l'UE.
C) Le Conseil décide à l'unanimité sur un certain nombre de questions considérées comme sensibles par les États membres, telles que :
⦁ La politique étrangère et de sécurité commune (sauf certains cas clairement définis où une majorité qualifiée est requise, par exemple la nomination d'un représentant spécial).
⦁ Les questions de citoyenneté (l'octroi de nouveaux droits aux citoyens de l'UE).
⦁ La qualité de membre de l'UE.
⦁ L’harmonisation des législations nationales en matière de fiscalité indirecte.
⦁ Les finances de l'UE (ressources propres, cadre financier pluriannuel).
⦁ Certaines dispositions dans le domaine de la Justice et des Affaires intérieures (Parquet européen, droit de la famille, coopération policière opérationnelle, etc.).
⦁ Harmonisation des législations nationales dans le domaine de la sécurité sociale et de la protection sociale.
Les arguments des puissants
L'Allemagne fait pression depuis des années pour l’abolition du veto, le nouveau débat étant cette fois lancé par la ministre des Affaires étrangères du pays, Annalena Baerbock, qui a affirmé que cela faciliterait les décisions et rendrait ainsi l'UE plus forte et capable d'agir.
Les implications pour les petits pays
Les petits pays européens craignent d’être à la merci des grands pays européens et qu’ils n’auront pas leur mot à dire dans des domaines vitaux tels que la politique économique, la politique migratoire, l’élargissement de l’Union et la politique extérieure…