mercredi 6 avril 2011 - par Damien Perrotin

Question de langue

Le 19 mars dernier a eu lieu, devant la fontaine Molière à Paris et à l'appel de quatre associations, le Courriel, la DLF (Défense de la langue française), l'AFRAV (Francophonie avenir), l'Aselaf (Association pour la sauvegarde et l’expansion de la langue française) et le CLEC (Cercle littéraire des écrivains cheminots), une manifestation pour "défendre la langue française".

Le moins que l'on puisse dire c'est qu'elle n'a pas eu un grand succès. Une petite centaine de personnes à peine se sont rassemblé à deux pas du restaurant Hand (Have A Nice Day) pour crier leur refus du "tout anglais". Quant aux passants, leur réaction oscillait entre indifférence et franche hostilité.

Les défenseurs du breton font en général beaucoup mieux, avec une base démographique beaucoup plus restreinte. Il est d'ailleurs plus que symbolique que l'un des maîtres de cérémonie de cette petite messe, Georges Castaud, soit aussi un des dirigeants du très stalinien PRCF – les arrières-gardes se rejoignent.

Bien sûr, l'influence des associations francophonistes sur les forces qui, partout, poussent au recul du français, est à peu prés nulle. La domination de l'anglais, comme celle du français autrefois, est le reflet d'un rapport des forces économiques, démographiques, politiques et culturelles. Nous ne sommes pas plus en mesure de le renverser que les Américains ne sont en mesure de stopper l'ascension chinoise... qui conduira sans doute un jour nos francophonistes à lutter contre le tout mandarin.

Toute économie-monde, pour parler comme Braudel, a besoin d'une langue véhiculaire ; Il se trouve que pour des raisons parfaitement contingentes c'est aujourd'hui l'anglais qui joue ce rôle. On peut le regretter, on ne peut l'ignorer. Cela équivaudrait à dresser autour de nous une véritable muraille de Chine linguistique qui nous couperait de l'essentiel de la production littéraire, intellectuelle et scientifique mondiale.

Que cet appel à l'ignorance et à la fermeture soit populaire au PRCF, cela se comprend. Les staliniens ont toujours eu une affinité particulière avec les murs. On me permettra de ne pas la partager.

Si les francophonistes ne faisaient que promouvoir l'auto-enfermement, nous pourrions largement les ignorer. Chacun est, après tout, libre de s'emmurer dans une secte, une langue ou une croyance... tant qu'il n'impose rien à son voisin.

Le problème c'est que les francophonistes entendent bien imposer. Dans un tract paru en 2010, ils réclament l'instauration de "quotas par langue étrangère". Concrètement, cela signifie qu'on décidera à la place des parents quelles langues doivent étudier leurs enfants... au prix de la réussite future des dits enfants, car la réalité linguistique mondiale ne se change pas, elle, par décret.

Encore n'est-ce là que la surface des choses. Si l'on creuse plus avant, on s'aperçoit que ce que réclame les francophonistes ce n'est pas la liberté de parler français entre eux et avec l'administration – elle n'est guère menacée – mais le droit de partager les privilèges des anglophones.

Ils dénoncent les avantages économiques et financiers que la suprématie de l'anglais donne aux pays anglo-saxons et vitupèrent contre la "colonisation mentale" qui empêcherait les francophones de vivre pleinement dans leur langue et les soumettrait à la vision du monde anglo-saxonne.

Ils ont raison et tout ce qu'on peut leur répondre, en paraphrasant Kaj Munk, c'est "Ils ont conquis le monde, dites que c'est un crime, mais ils ont prouvé qu'ils savent le gouverner"... un argument un peu faible, je l'admets, même s'il pose au vociférateur une question à laquelle il doit répondre s'il veut être crédible : "et vous, sauriez-vous le faire ? Que proposez-vous, au delà de la pétition de principe ?".

Dès que l'on passe dans le concret, dans le positif, les francophonistes nous expliquent que l'expansion du français nous permettra de gagner des parts de marché et d'influencer les autres cultures – Quid pugnas ? mutato nomine, de te fabula narratur.

Quant à la colonisation mentale, écoutons ce que dit le beninois Guy Ossito Midiohouan :

il suffit, pour être considéré comme “francophone”, que vous soyez d’un pays “où l’on parle le français”, même si, personnellement, vous ne pratiquez pas cette langue. Votre pays est “francophone”, même si 90% de sa population ignore le français. Vous avez beau dénoncer l’idéologie francophone, vous êtes un chantre de la francophonie dès l’instant où vous vous exprimez à peu près correctement en français. On entre en francophonie comme dans un parti unique. Nul n’a besoin de votre avis, c’est comme ça ! […] Nous voilà à jamais enfermés dans l’enclos du français. Plus aucune possibilité de nous définir par rapport à nous-mêmes. Pour aller vers les autres, comme pour venir à nous, la francophonie est un passage obligé. Elle est notre présent et notre avenir.

Ou le camerounais Mongo Beti :

Qu’est-ce que c’est que cet acte d’allégeance ou d’amour à la langue française qu’on attend de nous ? Pourquoi faudrait-il que je fasse fête au français ? Parce que j’écris en français ? Habitant la banlieue, je prends ma voiture chaque matin pour aller travailler au centre de la ville. Qui oserait me demander de faire une déclaration d’amour à ma voiture ?

Dans combien de peuples divers, à travers le monde, les écrivains utilisent la langue anglaise ! Irlandais, Canadiens, Britanniques, Américains... Rien qu’en Amérique, il y a les Noirs, les Hispaniques, les Chinois, les Juifs, les Scandinaves, les Germaniques, les Anglo-saxons, sans compter tous les autres. Dans chacun de ces peuples, il y a des écrivains de langue anglaise. Feraient-ils fête à l’anglais ? Aiment-ils l’anglais ? Ils n’en savent sans doute rien. La question ne leur a même jamais été posée, elle serait incongrue. Ils vivent l’anglais comme le poisson l’océan, innocemment ; à peine sauraient-ils dire que cette langue s’appelle bien ainsi, à quel moment leur peuple y est entré, et à la suite de quels événements. Ils ont avec l’anglais une relation de confiance naturelle, la seule vraiment souhaitable, au lieu du concubinage tourmenté. [...]

Je sens bien qu’un de ces jours je me ferai anglophone, sans retour ni regret.

La langue anglaise est aujourd’hui, mieux que la langue française, loin devant la langue française, la langue de la liberté, autant dire de la créativité.

Ce n’est certainement pas un hasard si le premier Prix Nobel Africain de littérature est anglophone. L’anglais est la langue où se débattent librement aujourd’hui tous les grands problèmes du monde, au contraire du français, première victime du délire de censure qui asphyxie la francophonie, et pas seulement dans l’Afrique des dictatures.

A cela, bien sûr, les francophonistes répondent avec Claude Hagège, qu'on a connu mieux inspiré "Loin de supplanter les autres langues du monde, (le français) leur donne l'occasion d'être plus aimées encore de ceux qui s'en servent." Pour eux, le français est le garant de la diversité culturelle dans un monde menacé d'uniformisation par l'anglo-américain, un " espace culturel où sont assumées les différences."

C'est là qu'il est utile de prendre le point de vue de Quimper. On y parle, encore, une autre langue que le français. Cette langue a une littérature, qui n'est certes pas pléthorique mais à le mérite d'exister, quelques journaux et une grande importance symbolique. Elle est menacée étouffement, mais pas, on s'en doute, par l'anglais. S'ils étaient sincères, les francophonistes devraient se précipiter au secours des associations qui luttent pour sa survie.

Ce n'est pas vraiment le cas. Certes le Manifeste progressiste pour la défense de la langue française précise que les langues régionales "peuvent jouer un rôle, à côté du français, pour résister à l’uniformisation culturelle", mais c'est pour préciser "Le français est menacé par des mouvements séparatistes qui prennent prétexte de la défense des langues régionales"

On retrouve la même antienne dans tous les textes francophonistes, souvent mêlée de théories du complot délirantes autour de la FUEV – un groupuscule allemand sans intérêt ni influence – qui se trouve soudain transformé en version moderne des Illuminati de Bavière.

Quand leur discours s'extirpe hors du monde nébuleux des complots anglo-saxono-germaniques c'est en général pour combiner une ignorance crasse du sujet avec une intolérance toute aussi crasse. La récente affaire de Villeneuve-lès-Maguelones – une ville de la banlieue de Montpellier dont le maire avait fait installer des panneaux bilingues à l'entrée de l'agglomération – est à ce sujet exemplaire, justement parce qu'elle est clochermerlesque. Le contraste entre l'insignifiance de la mesure – sans aucun effet linguistique, est-il besoin de le préciser – et la violence de la réaction de l'AFRAV, par exemple, est saisissant. On trouvent des réactions du même ordre sur la mention (de l'ordre du pur symbole) des langues régionales dans la constitution ou la création d'une école occitane à Montpellier.

C'est d'autant plus révélateur que le statut des langues locales au Royaume-Uni, et d'une manière générale dans le monde anglo-saxon, est assez protecteur.

A croire que, comme le disait Mongo Beti, c'est aujourd'hui l'anglais la langue de la liberté. D'ailleurs, est-ce bien un hasard si parmi ce concert de voix haineuses se fait entendre celle de Christine Tasin, égérie des apéritifs saucisson – pinard et des Assises de l'Islamisation ?

En fait, la diversité culturelle des francophonistes est un pur artifice rhétorique, qu'ils n'entendent nullement s'appliquer à eux-même. Quant à leur anti-impérialisme, c'est surtout un retentissant "touche pas à mon empire !"

J'avoue, pour ma part, ne pas être très attiré par les thèses de ces croisés de la fermeture et de l'intolérance. Ma bibliothèque est pour partie anglophone, partie francophone, partie britophone, partie... plein d'autre choses. Je ne m'en porte que mieux et la France ferait bien de m'imiter sur ce point.

 

http://vudebretagne.blog.lemonde.fr/2011/04/05/question-de-langue/



27 réactions


  • Asp Explorer Asp Explorer 6 avril 2011 12:02

    Je ne suis pas loin de partager votre point de vue sur la question, et suis moi-même d’avis qu’une langue progresse non par la loi, l’interdit ou la volonté politique, mais par le fait qu’elle est « défendue et illustrée » par des gens de bien. Ce fut le cas jadis, plus maintenant. Tant que BHL écrira en français et Chomsky en anglais, notre vieille langue ne suscitera que l’intérêt poli des polyglottes, et l’indifférence des autres.

    InB4 krokodilo


  • Krokodilo Krokodilo 6 avril 2011 12:19

    Déjà, que Asp, cet archétype troll, soit du même avis que vous devrait vous inquiéter !
    Votre article est très ambigü, un peu comme si vous aviez une dent contre le français, et un très fort tropisme pour l’anglais...
    (Remarque hors-sujet : il est d’ailleurs rare d’obtenir des choses claires de la part des promoteurs des langues régionales sur la question des langues, de leur organisation à l’école - jusqu’à quel niveau créer des filières régionales, démultiplier tout l’enseignement jusqu’à l’université ? Multiplier par x le nombre de profs ?)
    « . Dans un tract paru en 2010, ils réclament l’instauration de « quotas par langue étrangère ». Concrètement, cela signifie qu’on décidera à la place des parents quelles langues doivent étudier leurs enfants...« 
    Mais c’est le cas de l’anglais ! qui est imposé à l’école primaire, et souvent au secondaire, faute d’un choix. Et la récente lettre de mission du ministre au Comité stratégique pour le s langues indique clairement qu’il s’agit d’IMPOSER l’anglais dès la maternelle, comme la première dictature venue, ou la planification à la soviétique.
     » promouvoir l’auto-enfermement, »
    Défendre sa langue n’est pas de l’enfermement, mais de l’autodéfense. Défendre ses intérêts au sein de l’UE n’est pas de l’enfermement mais du bon sens et un instinct naturel. L’UE a tout fait pour imposer l’anglais au monde et dans l’UE, et l’OIF a fermé sa gueule, les laissant faire jusqu’au point de non-retour.
    Les choses ne se font pas naturellement, mais par une lutte politique et économique permanente : les USA viennent d’investir un million de dollars dans une réalité virtuelle anglophone (dans une école de langues) afin de promouvoir leur langue - et de maintenir cet avantage économique.
    Enfin, les grands débats du jour ne se font pas en anglais, car on pense dans sa propre langue, ils se font - au mieux - par la réflexion dans sa propre langue puis par la traduction.
    Et apparemment, vous ignorez l’existence de l’espéranto, langue internationale construite, langue équitable - méconnue parce que chaque « grande langue » se bat pour faire avancer la sienne, et à ce jour, le français est KO debout et l’anglais victorieux, c’est le seul point où je suis d’accord avec vous.

    ">

    • Asp Explorer Asp Explorer 6 avril 2011 13:16

      Complots anglo-saxono-germanistes, écrit à juste titre l’auteur...


    • Krokodilo Krokodilo 6 avril 2011 13:23

      Non, les complots sont secrets. il ne s’agit donc pas de complots car ils soutiennent leur langue à visage découvert, de façon très pragmatique et sans fausse honte, ce que la francophonie ne fait pas pour des raisons qui m’échappent. De même que l’anglicisation forcenée de l’UE était visible et prévisible depuis longtemps. Seuls l’aveuglement, l’indifférence ou la complicité de nos « élites » et de nos médias a fait que cette évolution ait pu avoir lieu sans débat parlementaire ou médiatique, et quasiment en silence. Curieusement, c’est l’Italie, qui a imposé l’anglais au primaire il y a longtemps, qui est en pointe de la lutte contre le brevet européen en anglais.


  • Rough 6 avril 2011 13:23

    Encore un article à la gloire du microscopique groupuscule UDB qui théorise une identité bretonne !

    J’aime bien l’expression « les croisés de la fermeture et de l’intolérance.. » c’est génial !

    Si voulez que vos gniards apprennent le breton ou l’occitan, libre à vous mais ne demandez pas à l’école ni à la société de financer vos lubies...Prenez exemple sur les population immigrées...l’on apprend le bambara, le dioula ou le kabyle à la maison pas à l’école....l’école c’est pour apprendre d’abord et avant tout le français....

     


  • Damien Perrotin Damien Perrotin 6 avril 2011 14:35

    Krokodilo, la promotion de l’anglais n’interesse pas grand monde aux USA ou en Grande-Bretagne, du moins à l’extérieur. Il ne faut pas confondre les discours pro domo de quelques lobbies et la réalité du débat local. Les anglophones vivent la domination de l’anglais comme je la vis : c’est un fait qui apporte plus d’avantages que d’inconvénients.

    L’OIF (enfin la France mais c’est ce qui compte) reconnaît la réalité, mais ne peut pas l’admettre officiellement d’où une politique de posture associée à une saine adaptation aux réalités. Les parents suivent, car ils ont compris que la maîtrise de l’anglais était aussi indispendable à toute carrière un tant soit peu poussée que la maîtrise de l’écriture.

    Ce que proposent les francophonistes équivaudrait à obliger une partie des enfants à apprendre le français en cyrillique ou en devanagari... étant bien entendu que le reste de la société continuerait à fonctionner avec l’alphabet latin. Je doute que ce soit trés populaire.

    Quand j’écris en anglais - ce qui m’arrive fréquement - je ne traduis naturellement pas, comme le font tous ceux un tant soit peu ouverts sur la culture mondiale. Par ailleurs, Asp a raison sur un point : la culture et le débat intellectuel français sont à la fois insulaires et de médiocre qualité. Entre BHL et Rawls ou Lasch, il n’y a pas de comparaison possible.

    J’ai beaucoup de sympathie pour l’idée espérantiste, un peu moins pour sa mise en oeuvre (une langue latine eurocentrée avec une phonologie slave - dans le monde des conlangs on appelle ça un euroclone), mais on doit reconnaître que l’espéranto n’est plus dans la course depuis longtemps. Il est la base d’une culture vivante, ce qui est déjà pas mal, mais c’est tout ce qu’il peut espérer.

    Enfin, pour moi le français est un outil, rien de plus, et dans le domaine scientifique ou intellectuel il ouvre moins de portes que l’anglais.

    Rough, merci de me démontrer que la diversité culturelle à la française n’est qu’une posture et qu’il n’y a donc pas de raison particulière de la défendre.


  • Krokodilo Krokodilo 6 avril 2011 15:13

    Je ne parlais pas des gens - encore qu’ils semblent tous avoir intégré qu’ils sont chacun des missionnaires de leur langue - mais des lobbys et des politiciens, de ceux qui prennent des décisions et peuvent investir dans les British Council et autres subventions, influer sur les décisions européennes comme la langue des brevets, la langue de telle ou telle organisation.
    Vous n’avez pas l’air de percevoir que la guerre des langues est permanente, une lutte d’influence quotidienne.
    Comme dans toute guerre, il n’y que peu d’attitudes possibles : gagner (anglais) , se déclarer vaincu et abandonner (UE, gouvernement français), ou résister pour garder quelques positions – comme le font quelques associations dont l’AFRAV, l’Observatoire du plurilinguisme, DLF, etc., les syndicats qui ont lutté pour le droit de travailler en français en France – car curieusement, il faut maintenant lutter pour ça !
    L’espéranto serait une troisième voie, celle de la raison, promouvoir une langue équitable pour laquelle chacun aurait un effort similaire à faire, une langue largement plus simple donc accessible à tous et non aux seules élites (niveau actuel des Chinois médiocre, malgré des investissement énormes durant des décennies : l’anglais langue mondiale est un échec, sauf pour les élites)
    Par ailleurs, l’espéranto n’est pas une langue latine – environ deux-tiers des racines sont latin-grec, un tiers germaniques et divers ; la grammaire est internationale car basée sur les structures essentielles communes, elle est à la fois agglutinante et fusionnelle et ne peut être classée facilement
    De plus, elle n’est pas phonétiquement slave : le son ĥ est le même que le khi russe mais aussi la jota espagnole et le kha arabe.
    C’est en fait la plus internationale des langues actuelles, construites ou naturelles, ce qui en fait le meilleur candidat dans ce rôle – ce qui est logique si on considère qu’elle a été conçue spécifiquement pour cela, être simple et la plus internationale possible.


    • Damien Perrotin Damien Perrotin 6 avril 2011 16:05

      Les politiciens sont en général impuissants dans ce domaines et peuvent accompagner le mouvement ou pondre des mesures symboliques sans effets sur le raport des forces. La seule exception c’est pour des langues minoritaires ou locales qu’un effort durable de la puissance publique avec une solide étude linguistique peut propulser.

      Maintenant comme pour la francophonie les arbitres de la lutte ce sont les non-francophones, qui n’ont aucune raison de la soutenir... quant à l’argument de la diversité culturelle... il suffit de lire les diatribes de l’AFRAV pour comprendre que ce n’est qu’une réthorique creuse. Je ne vois pas pourquoi les partisans de la vraie diversité culturelle devraient s’engager dans ce combat.

      L’esperanto est une langue latine avec des racines germaniques (comme le français) et ses phonemes sont celles que le polonais oriental note orthographiquement (donc pas les consonnes palatales), avec le goût typiquement slave pour les fricatives et un grand nombre de phonèmes et d’oppositions typiquement européens... sans parler des accumulations de consonnes. Il est trivial de trouver une langue plus facile à prononcer pour tout le monde (l’indonésien, par exemple).

      La grammaire est typiquement européenne au point que c’en est ennuyeux. Elle est aussi inutilement compliquée (le chinois est beaucoup plus simple, de même que l’anglais)


    • Krokodilo Krokodilo 6 avril 2011 16:54

      Ah, on dirait les arguments de l’ido : vous voulez que l’espéranto ressemble au français ? Ben non, c’est quand même une langue étrangère, un compromis reprenant des sons fréquents dans diverses langues, et un compromis entre des grammaires différentes (à noter que le « r » français pointu est une rareté, donc non retenue). 16 règles de grammaire au total, c’est trop ? Quand à la grammaire simple de l’anglais (300 pages), je passe, c’est de la propagande. L’espéranto ne prétend pas à la perfection, mais c’est la langue la plus simple et la plus internationale à l’heure actuelle.


    • Krokodilo Krokodilo 6 avril 2011 17:01

      Vous vous trompez : les polticiens ont fait beaucoup pour éviter le déclin de l’anglais dans un monde multipolaire où les instituts Confucius poussent comme des champignons : en n’utilisant QUE l’anglais dans ses relations internationales, l’UE a clamé depuis des décennies au monde entier que l’Europe parlait anglais (ce qui est devenu vrai). Le programme Erasmus mundus (différent d’Erasmus) a outrageusement privilégié les programmes de cours en anglais - autant d’étudiants qui jadis seraient venus étudier en français pendant des années et maintenant iront faire leur post-doc aux States qui profiteront de leurs années les plus créatives ! le protocole de Londres sur les brevets, ce sont aussi des décisions poltiiques.
      On aurait très bien pu faire une autre Europe linguistique, où les organisations n’utiliseraient pas toutes la même langue : pourquoi pas l’allemand pour les manoeuvres portuaires, l’anglais en sciences, le français en diplomatie, etc. ?


  • PASDUPE 6 avril 2011 15:46

    Je me demande pourquoi cette charge contre des gens qui ont la volonté
    de défendre et promouvoir l’usage du français en France ? Parce qu’il
    s’agit bien de cela. Qui peut s’élever contre ? Vous, Perrotin !
    Défendre notre langue contre l’invasion croissante du globish semble à
    vos yeux un combat d’arrière-garde. Que dire du membre de l’UDB que
    vous êtes, parti bretonnant, qui souhaiterait voir la Bretagne entière
    reparler breton, langue dont l’usage est mort. Ce ne serait pas vous
    qui êtes en retard d’une guerre ?

    Autres choses : Le français ne se porte pas si mal à l’étranger, merci.
    Par exemple, dans les pays francophones africains - que vous semblez
    traîter d’arriérés à vouloir eux aussi défendre et promouvoir l’usage
    de leur langue, parce que le français est bien vécu par une majorité de
    gens comme étant aujoud’hui une langue africaine au même titre que le
    swahili et toutes autres langues africaines à « stature » internationale
    (eh oui ! en usage dans plusieurs pays), et bien la langue française
    est en nette progression.

    Je pense que régionaliste comme vous êtes, vous devez être un
    Européiste convaincu ? Parce qu’alors tout se tiendrait à merveille.
    Je m’explique.
    L’UE c’est quoi à terme ? : la disparition des Nations en leur retirant
    leurs souverainetés (ça c’est déjà fait) et leurs identités. Et
    qu’est-ce qui synthétise le mieux une identité : la langue. Donc les
    gangrener toutes par un apport massif d’anglais, langue de l’empire
    mondialisant dont l’UE est le relais et promouvoir d’une façon acharnée
    et constante l’apprentissage et l’utilisation de la seule langue
    unificatrice digne de ce nom : l’obligatoire globish.
    Et alors, le régionaliste que vous êtes à de nouveau espoir de revoir
    sa langue régionale reprendre du poil de la bête, grâce à ce que l’on
    appelle l’Europe des régions qui n’est jamais que le démantèlement des
    Nations. D’un côté, langue ultra minoritaire que vous voulez voir
    renaître de ses cendres (un patois très local en définitive) et de
    l’autre, langue de la conquête anglo-américaine qui vous aura
    débarrassé de ce maudit français qui couplé à un pouvoir centralisateur
    qu’était la nation, avait signé sa disparition. La langue anglaise est
    alors pour vous la langue de la libération de la Bretagne par le biais
    de l’UE. Enfin dans votre fantasme ça doit être un peu près ça.

    Je ne dis évidemment rien sur votre soumission à l’ordre nouveau parce
    que ça serait partir sur des considérations qui m’enmeneraient trop
    loin.


  • Damien Perrotin Damien Perrotin 6 avril 2011 17:01

    Pasdupe, merci de confirmer ce que je disais, à savoir que pour les francophonistes la diversité culturelle n’est que le cache-sexe d’une défense tribale de leur pré carré...

    Franchement, leur échec programmé ne me dérange pas.

    Pour le reste, qu’est-ce que je disais déjà à propos du complot anglo-saxono-germanique... ?


    • Krokodilo Krokodilo 6 avril 2011 17:10

      Germanique, non : les Allemands ont totalement abandonné la défense de leur langue au sein de l’UE... Les pays nordiques, par contre, de langues germaniques, sont inversement totalement étonnés qu’on puisse remettre en question l’Europe anglophone, eux qui ont abandonné leur propre langue à l’université dans de nombreuses branches... le destin du français ?


    • Damien Perrotin Damien Perrotin 6 avril 2011 17:45

      Vous savez, krokodilo, je n’ai jamais dit que le complot anglo-saxono-germanique était une réalité... c’est la variante souverainiste / francophoniste du complot judéo-maçonnique. Lisez Yvonne Bollmann, par exemple, ou Pierre Hillard


    • Krokodilo Krokodilo 6 avril 2011 18:06

      Rien compris. Vous comptez les points Godwin en moins de deux lignes ?


  • Damien Perrotin Damien Perrotin 6 avril 2011 17:41

    Krokodilo, la liste des phonèmes est exactement la même que celle distinguée par l’orthographe du polonais. La prononciation du r que vous décrivez est celle des langues slaves, ce qui d’ailleurs ne pose pas problème vu qu’il n’y a qu’un seul phonème rhotique. Par contre le v est une specificité européenne, quasiment inconnue ailleurs. Et quand on sait qu’une bonne partie des langues de cette planète détestent les accumulations de consonnes on imagine le caractère international de « majstrskribisto » par exemple.

    Par ailleurs les 16 règles ne sont 16 que parce qu’elles assument une structure européenne typique. Il n’y a rien la dedans qui m’empêche de dire « blankajn la vi hierau tri frapis shafojn », ce qui est pourtant correct en latin, ou « vi blanktrishaffrapis hierau, (là c’est plutôt l’inuit) ou »kiun mi estas post vidi viro la" (gallois pour le verbe, indonésien pour l’ordre des propositions).

    Rien n’est dit de la syntaxe, de l’ordre des mots de base, de la phonosyntactique, de l’alignement morphosyntactique etc... En gros, ces règles ne sont utilisables que si on parle une langue européenne et qu’on fait du copier-coller.

    Donnez-les à un inuit, sans rien d’autre, et le résultat sera... disons créatif


    • Krokodilo Krokodilo 6 avril 2011 18:35

      Réflexion faite, pour traduire maître-écrivain, on dira plutôt fama verkisto (comme famous !), l’espéranto, fidèle à ses principes de base, privilégiant la fluidité et la simplicité autant que possible.


  • eugène wermelinger eugène wermelinger 6 avril 2011 18:10

    Bonjour, Guata Tag, Guten Tag, bonan tagon, .....

    Natif alsacien, je m’exprime dans ces divers idiomes. Pour la communication internationale, allez voir ici, mon blog :
    et vous verrez que l’espéranto est pour bien du monde un formidable outil de rencontre.
    Ĝis revido !

  • Krokodilo Krokodilo 6 avril 2011 18:25

    Il n’y a pas d’accumulation de consonnes. Dans votre exemple tarabiscoté et faux je crois (il signifierait écrivain de maître et non maître-écrivain, quoiqu’on dise plutôt verkisto) , il faudrait ajouter une finale « o » et un tiret de préférence - encore faut-il préciser que le « j » est une « semi-voyelle », à la prononciation identique à notre « y » (de yaourt). Ce qui au final, ne donne rien de choquant. 5 voyelles et deux « semi-voyelles » pour 21 consonnes, et une régularité totale un son = une lettre, chaque lettre se prononce.
    L’ordre des mots n’est pas fixe, ce qui permet à chacun de s’adapter selon sa propre langue, d’ailleurs votre exemple resterait compréhensible, quoique tarabiscoté à cause de la séparation du nom et de l’adjectif, de préférence en ôtant l’article : blankajn vi hieraŭ frapis ŝafojn.
     Je lis des messages d’espérantophones de diverses nationalités et de divers continents, y compris asiatiques. Vous cherchez des problèmes artificiels qui ne se présentent pas en pratique, on peut compter sur les termes de la linguistique pour tout compliquer !
    Par ailleurs, la dérivation logique des pronoms possessifs est régulière comme celle du chinois. Et le « r » mou est largement majoritaire dans le monde.
    Encore une fois, l’espéranto ne prétend pas à la perfection, mais au meilleur compromis international actuel, alliant simplicité et internationalité relative - en outre des milliers de mots d’origine européenne ont essaimé dans le monde entier du fait de l’histoire, c’est comme ça.


    • Hermes Hermes 7 avril 2011 17:01

      Kroko selon quelles règles on applique en esperanto, on peut tout aussi bien faire comprendre ecrivain de maitre ou maitre écrivain. 


      Sinon à l’auteur, très bons exemples que vous avez pris sur l’esperanto. Rares sont ceux qui ont cette capacité d’analyse de la langue eo, certains linguistes ont un niveau bien plus bas.



  • skirlet 6 avril 2011 19:45

    Daniel Perrotin : vous vous gargarisez de ces termes savants, mais que se cache-t-il derrière - le vide ou le désir de mentir ?..

    la liste des phonèmes est exactement la même que celle distinguée par l’orthographe du polonais

    Faux. L’espéranto ne contient pas toutes les phonèmes du polonais, et contient des sons absents dans le polonais (comme le h sans « chapeau »).

    La prononciation du r que vous décrivez est celle des langues slaves

    Meuh bien sûr, les Espagnols et les Italiens, pour ne nommer qu’eux, sont vachement dépaysés face au « r » espéranto smiley

    le v est une specificité européenne, quasiment inconnue ailleurs

    Il est bien connu que le vietnamien, le ourdou ou le hindi (pour ne nommer qu’eux) sont des langues européennes smiley

    D’où vous sortez ce « majstrskribisto » ?.. Sûr que la souplesse de l’espéranto permet beaucoup de choses, mais de telles constructions... Jamais vu. Même le sens n’est pas clair. C’est quoi, écrivain public maître de son métier ?
    D’ailleurs, le rapport consonnes-voyelles en espéranto se rapproche plutôt de l’italien et de l’espagnol - il est même meilleurs qu’en anglais qui présente une part plus importante de consonnes.

    Par ailleurs les 16 règles ne sont 16 que parce qu’elles assument une structure européenne typique.

    Et les manuels de grammaire anglaise à destination des anglophones qui contiennent plusieurs centaines de pages, c’est plus simple ? D’ailleurs, les Chinois (pour ne nommer qu’eux) ne cherchent pas midi à quatorze heures, pour eux c’est 16 règles.

    « blankajn la vi hierau tri frapis shafojn »

    Vous battez les moutons ? Quelle cruauté smiley

    ce qui est pourtant correct en latin

    Quel latin ? Si vous parlez du latin classique, il ne possédait pas d’article défini. Et les démonstratifs ille ou ipse ont leurs propres équivalents en espéranto.

    Donnez-les à un inuit, sans rien d’autre, et le résultat sera... disons créatif

    Donner quoi ? Les Inuits ne sont pas idiots et peuvent, comme n’importe qui, apprendre une langue étrangère. Car, malgré vos... imprécisions, l’espéranto est une langue étrangère aussi bien pour un Inuit que pour un Polonais.

    Eh oui, l’espéranto n’est pas parfait. Mais il est déjà plus facile et surtout équitable que n’importe quelle langue nationale utilisée comme internationale. Si on inventait un remède pour guérir la calvitie rapidement et facilement, mais qui présenterait quelques minimes effets secondaires - qui aurait refusé son utilisation sous prétexte que le remède n’est pas parfait ? Mais dans le jeu géopolitique, auquel les langues sont intimement liées, il ne s’agit pas de qualités linguistiques. Là, il y a un plus fort, d’autres qui s’écrasent devant lui et d’autres encore qui veulent devenir calife à la place du calife.


  • Asp Explorer Asp Explorer 6 avril 2011 21:34

    Moralité : il est difficile d’écrire un article intelligent sur Agoravox sans s’attirer les lazzis d’une nuée de crétins avec qui il est bien vain de vouloir discuter. C’est desespéranto.


    • Damien Perrotin Damien Perrotin 7 avril 2011 09:32

      Je me souviens qu’à une certaine époque les amateurs de langues artificielles (genre elfique ou klingon - créées pour le fun) ont exclus manu militari les espérantistes et assimilés de leur liste de diffusion parce que leur prosélytisme et leur pinaillerie devenaient une nuisance.


    • skirlet 8 avril 2011 17:50

      Réponse hors sujet : pris en flagrant délit de mensonges, vous déviez la conversation.


  • Τυφῶν בעל Perkele Τυφῶν 6 avril 2011 22:18


    Au fait, ce n’est pas grâce au mouvement breton qu’on a aujourd’hui à Rennes des panneaux bilingues français / breton, alors que jamais personne n’a parlé breton dans cette zone (du moins avant le vingtième siècle), tout ça au détriment du gallo ?

    C’est toujours pareil : quand on s’imagine régler les problèmes en empêchant A d’opprimer B, on se rend compte en général que B opprime lui-même C, et ainsi de suite. (pour paraphraser Orwell)

    Sinon, ce n’est pas la peine de discuter ni avec Kroko ni avec Skirlet, même les plus basses des insultes volent trop haut pour eux.

    Typhon


    • Damien Perrotin Damien Perrotin 7 avril 2011 09:34

      Mais tout le monde est d’accord pour promouvoir le gallo... sauf que la population ne s’y intéresse pas et que la promotion en question ne rencontre aucun écho.


    • Τυφῶν בעל Perkele Τυφῶν 10 avril 2011 13:32

      Probablement, c’est une langue trop proche du français. J’ai comme l’impression que plus une langue est différente de ses voisines, et moins elle risque de se faire assimiler.

      Typhon


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