Une réforme absurde, disent-ils…
La réforme en question, c’est la réforme territoriale, et « ils », ce sont les élus, les seuls qui s’expriment sur le sujet et souvent de façon biaisée.
Seraient-ils les seuls à détenir la vérité ? Toujours est-il que les médias leur déroulent le tapis rouge et accueillent leurs articles, le plus souvent sans apporter la moindre objection ou contradiction. Les élus ont parlé et ils sont légitimes, semble-t-on considérer, ce qui est vrai la plupart du temps, mais sur le thème de la réforme territoriale, les choses sont biaisées puisque les élus eux-mêmes sont concernés par la refonte des Régions et des intercommunalités et la disparition des Conseils Généraux. Nous ne sommes pas loin du conflit d’intérêts.
Que nous disent-ils pour dénigrer cette réforme ?
« Il n’y aurait pas surabondance de niveaux administratifs en France… «
…si nous nous comparons à nos voisins. Ce n’est peut-être pas faux, mais la question n’est pas là : elle réside dans les compétences octroyées aux différents niveaux de collectivités françaises, leurs zones d’exercice et les financements dont elles disposent.
On sait désormais que la répartition des compétences entre Régions et Départements correspond principalement à un saupoudrage destiné à contenter les barons locaux, sans recherche de cohérence et que la clause générale de compétences (qui permet à toutes les collectivités territoriales d’intervenir dans tous les domaines) génère un gâchis financier.
Les frontières départementales sont aujourd’hui obsolètes et l’intercommunalité est aujourd’hui capable de fonctionner entre deux ou trois départements pour couvrir des bassins de vie. L’intercommunalité est parfois insignifiante et constituée sur des attendus plus politiques que d’efficacité et survit artificiellement grâce aux subventions des conseils généraux. Quant au Régions tout a été dit sur le découpage de 1964 destiné à contenter les barons locaux.
Enfin, les budgets des collectivités locales sont fortement contraints par l’Etat qui détient les cordons de la bourse et par l’endettement.
Il faut rajouter à ce tableau la nébuleuse des syndicats intercommunaux (eau, ordures ménagères, électrification,…) qui font les beaux jours des concessionnaires de réseaux et dans lesquels les élus occupent les postes honorifique avec les indemnités qui vont avec et organisent ainsi une forme de cumul de mandats méconnue des citoyens
« Cette réforme est téléguidée par Bruxelles »
La théorie du complot n’est pas loin. Bruxelles voudrait imposer cette réforme à la France pour imposer le fédéralisme : exit l’Etat Nation selon les opposants à la réforme. Aux armes, citoyens ! La France est en danger ! On agite le chiffon rouge en s’alliant objectivement avec les souverainistes de tous poils et on s’interdit par conséquent de réformer nos structures territoriales obsolètes. Les tenants du statu quo nous rappellent que le Département est l’héritage de la révolution et qu’y toucher, c’est saper un des fondements de la République, en oubliant de dire que le Département, circonscription administrative de l’Etat n’est pas concerné par la réforme mais que c’est le Conseil Général qui est appelé à disparaître. A croire que tout le monde est content de payer des impôts pour un système qui ne fonctionne plus et qui a été perverti par la classe politique qui a fait du mandat électif un métier, piétinant les fondements de la démocratie.
« La réforme projetée sera inutile et coûteuse »
Même l’agence de notation Moody’s ne croit pas à des économies. C’est dire qu’ils connaissent bien les élus, chez Moody’s car s’il y a bien un domaine où les élus sont en dessous de tout, c’est bien le management. Il n’est pour s’en convaincre, que l’intercommunalité, qui a récupéré des compétences communales n’a pas bénéficié des transferts de personnels communaux correspondants. Résultats : 200 000 emplois supplémentaires.
Ainsi donc, les transferts de compétences prévus se traduiraient par la création d’emplois supplémentaires là où il n’en est nul besoin et tout cela coûtera plus cher ! Où va-t-on ? Il faut absolument que la réforme soit assortie d’un plan d’économies sous le contrôle des Chambre Régionales des Comptes, que les postes devenus inutiles et les postes en doublon soient réellement supprimés en les gageant sur les départs en retraite. Il ne faut pas que les élus managent cet aspect de la réforme en direct et que les élus devant disparaître (les conseillers généraux et leurs conseillers politiques de cabinet) ne soient pas recyclés dans d’autres assemblées.
Cela n’en prend pas le chemin puisque la loi sur les régions votée en juillet qui prévoyait le plafonnement du nombre d’élus à 150 dans les nouvelles régions a été modifiée par les élus eux-mêmes. On fusionnera non seulement des Régions mais également les assemblées qui deviendront pléthoriques et les cabinets fusionneront également : on organise déjà les surcoûts pour les Régions : ça promet pour le reste !
Pour un vrai débat
Les élus et les partis politiques opposés à la réforme des collectivités territoriales nous servent leur argumentaire indigeste en espérant une large adhésion de la population à leurs thèses. Pour l’instant, les médias ne se sont pas encore donné la peine de décrypter la manœuvre pas plus que le texte qui sera soumis prochainement au Parlement. Espérons que ce travail sera fait et que nous aurons un débat, un vrai débat qui concerne avant tout les citoyens-contribuables et non exclusivement une caste d’élus professionnels qui s’accrochent bec et ongles à leurs mandats.