Clearstream : décalage entre couverture médiatique et intérêt des Français
Cette force d’influence n’est-elle pas
abusive ou abusée, lorsque sont traités, dans de telles proportions, des faits
d’actualité comme celui de Clearstream ?
Depuis maintenant un mois, plus un jour ne passe sans que
Clearstream ne fasse la une des quotidiens et journaux nationaux. Cette
surmédiatisation semble pourtant davantage être une occasion de vendre qu’une
occasion d’informer.
Lorsque l’affaire est pour la première fois dévoilée au grand
jour, rien ne laisse présager qu’elle conduira à faire couler tant d’encre.
Rien ne choque, si ce n’est une énième histoire de corruption ou de comptes
cachés, impliquant des hommes politiques déjà bien mal vus ces temps-ci.
Pourtant, l’information enfle de jour en jour, mais cela sans que le lecteur ou
le téléspectateur ne comprenne vraiment l’état de la situation. C’est ainsi qu’à
cette date, une grande majorité de Français ont entendu parler de l’affaire,
mais sans en saisir assez d’éléments pour se faire une réelle opinion. En effet
les médias, dans leur course au scoop et à l’audience, en ont omis d’expliquer
clairement le problème au fondement de ce débat polémique, et politique.
L’affaire n’est pourtant pas aussi compliquée qu’on tenterait de
nous le faire croire. Pour la résumer, les mots "transferts illicites" et "comptes
cachés" suffisent, il ne reste plus qu’à mentionner les noms de Sarkozy et de de
Villepin pour ajouter le piment gouvernemental dont le public raffole
actuellement. Du moins, c’est ce que les médias semblent s’imaginer. Puisque
pour contredire ouvertement cette tendance qui paraît, il est vrai, au goût du
jour, il ne faut pas chercher plus loin que les sondages mêmes qui la créent.
On sait désormais grâce à l’IFOP, IPSOS et autres CSA, que le Français est loin du mouton suiveur de la moindre polémique alléchante. Il est
ainsi écrit que la majorité des citoyens considèrent le mystère Clearstream comme
peu important. De plus, en majorité toujours, les Français considèrent
que cette affaire n’a pas changé leurs opinions et qu’elle n’a pas changé leurs
projets de vote présidentiel. Peut-on alors dire, comme le titrait aujourd’hui
Le Monde, que Clearstream est une "affaire d’Etat" ?
La France est aujourd’hui engouffrée dans une gigantesque crise
de confiance politique, et les médias en jouent pour vendre de l’info, ou,
pourrait-on dire, du ragot. C’est de cette manière que l’ensemble de la
population se croit elle-même intéressée par des sujets qui, en réalité, ne font
que l’empêtrer dans une morosité dont elle ne veut pas. Ainsi, un sondage du 28
mai dévoilait que 35% des Français en avaient assez d’une crise politique
actuelle qui tourne presque désormais au harcèlement médiatique.
La question n’est pas de remettre en cause l’importance immuable
de l’information au sein de notre société, mais de remettre sur la voie de
l’utilité des médias qui négligent justement trop souvent leur rôle public et
désintéressé : servir justement l’actualité.